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que nous analysons, ses études sur le développement du droit public de la Hollande, dans ses rapports avec les matières économiques. C'est un travail historique intéressant, où nous avons trouvé de nouveaux et puissants arguments en faveur de la proposition que voici la liberté est la fille de l'individualisme. En d'autres termes, la liberté est le résultat de la lutte des intérêts individuels; les intérêts collectifs ne produisent que l'égalité entre les associés, mais n'empêchent pas ceux-ci d'exercer l'oppression sur ceux qui sont en dehors de ces intérêts.

M. J.-G. Kohl étudie l'Influence des croisades sur la civilisation européenne. L'auteur fait, dans cette étude sur une matière fouillée en tous sens, une assez large place aux intérêts économiques. Il trouve que la découverte de l'Amérique est l'une des conséquences du mouvement né des croisades. Ce rapprochement est très-plausible, et s'il était fondé, les croisades auraient eu un effet permanent, quoique assez imprévu.

Le professeur libre (docent) d'économie politique de l'Université de Prague, M. Fréd. Kleinwachter, offre une « Étude sur les banques d'émission et de dépôt. » L'auteur, abondant dans le sens des ennemis du billet à vue et au porteur, veut que les banques fassent à peu près comme le crédit foncier, et qu'elles prennent, au lieu d'un gage immobilier, la lettre de change de l'emprunteur, et lui donnent en échange des billets à elle, payables à terme, en ayant soin que ce terme n'échoie pas en deçà de celui de l'obligation de l'emprunteur. La banque ne ferait donc strictement que mettre son crédit à la place de celui de l'emprunteur; elle donnerait simplement une garantie, sans s'exposer au danger de ne pas pouvoir rembourser ses billets. L'emprunteur négocierait les effets de la Banque comme il négocie les obligations du crédit foncier. Les dépôts aussi ne seraient acceptés qu'à terme.

Il nous semble que la plupart des personnes qui traitent la question des banques ferment les yeux à cette vérité banale que plus un instrument est puissant, plus il fera de bien... et de mal; il s'agit de savoir s'il est plus avantageux pour la société de jouir du grand bien, en prenant par-dessus le marché le grand mal, ou s'il vaut mieux réduire le bien, afin que le mal aussi soit réduit.

M. Otto Michaëlis, l'éminent économiste, député de Berlin, examine quels peuvent être les résultats permanents de la conjoncture, » c'està-dire de la crise cotonnière. L'auteur croit que les pays conquis nouvellement à la culture de ce textile sont entrés dans un mouvement de progrès qui continuera son action lorsque la cause première aura été oubliée. Nous regrettons que les raisonnements de M. Michaëlis et les faits qu'il cite à l'appui ne soient pas susceptibles d'être résumés en quelques lignes.

Signalons encore le travail sur le dénombrement de la population de Berlin, par M. le Dr Neumann.

3e SÉRIE. T. V. — 15 janvier 1867.

8

Une publication mensuelle nouvellement fondée à Vienne sous le titre de Internationale Revue (éditeur Arnold Hilberg), et dont le 5* numéro vient de paraître, accorde un certain espace à l'économie politique. Nous lui consacrerons à l'avenir une attention soutenue, parce qu'elle paraît devoir se ranger parmi les meilleures publications de l'Allemagne. Aujourd'hui, nous nous bornerons à signaler un seul, mais intéressant article, inséré au numéro 4, et intitulé : l'Economie politique dans le nouveau et dans l'ancien monde. C'est un parallèle entre MM. Carey et Macleod, avec quelques observations en passant sur MM. J.-St. Mill, List, Bastiat, et M. Roscher. L'auteur de cet article est M. Dühring, - dont nous ne connaissons les livres que par des citations, mais qui, d'après son article, paraît être un élève de l'illustre économiste américain que nous venons de nommer.

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Il est inutile de dire que M. Dühring met M. Carey au-dessus de tous les économistes présents, passés et futurs; puis vient, selon lui, M. Macleod, ensuite M. J.-St. Mill. Nous n'aimons pas les classifications de cette nature, car il est difficile de trouver un criterium certain. M. Dühring croit l'avoir trouvé dans le nombre des propositions nouvelles dont un auteur enrichit la science. Soit. Mais il y a proposition et

proposition.

-

Malgré cette critique, que nous abrégeons, l'article de M. Dühring est très-intéressant, mais il n'est guère flatteur pour les économistes français, et encore moins pour les Allemands, à l'exception de Frédéric List, dont il adopte les vues sur les économies nationales, vues communes, d'ailleurs, à tous les protectionnistes.

Le Statistik Tidskrift (Journal de statistique), publié par le bureau central de statistique de Suède, continue de fournir d'excellents travaux. Nous avons sous les yeux les livraisons 11 à 15: l'une d'elles (15°), donne une statistique de Stockholm; une autre (11 et 12 en une), renferme divers travaux sur la population, une monographie statistique relative à l'île de Saint-Barthélemy (colonie suédoise des Antilles) et quelques autres. La double livraison 13-14 est consacrée aux caisses d'épargne. C'est un document complet, qui nous apprend, entre autres choses, que la première caisse d'épargne suédoise date de 1813 (peutêtre de 1805), qu'il y en avait 25 en 1830, 60 en 1840, 86 en 1850. 151 en 1860 et 175 en 1863. A cette époque existaient 218,335 livrets, et le montant des dépôts était de 32,494,403 riksdalers (1 fr. 42). La fortune propre, etc., des caisses était en outre de 2,807,222 riksdalers.

La Gaceta economista donne un excellent article sur la « crise économique, » dù à M. Luis-Maria Pastor. Dans cet article, cet économiste distingué cite encore l'échelle des prix du blé selon les variations de la récolte, échelle imaginée il y a près de deux siècles par Gregory King et citée par Porter, et d'après ce dernier, par tant d'autres, même par deux de

nos plus célèbres économistes français, dans des livres imprimés en 1865 et 1866. Or, d'une part, M. G. King n'avait aucune statistique authentique, et de l'autre, eût-il possédé d'excellentes données, qu'elles n'auraient plus aucune valeur à l'époque où la vapeur a changé tant de choses, où des pays, inconnus alors, exercent une grande influence sur le marché, où l'Angleterre, d'exportatrice de céréales, est devenue importatrice, où les barrières intérieures ont été brisées en France, en Allemagne, en Italie, en Autriche, où... la liste est loin d'être épuisée. Eh bien, le Journal des économistes a publié une nouvelle échelle des prix, calculée sur des données toutes modernes, et cette échelle est passée inaperçue, parce qu'elle s'appuyait sur trop de chiffres ! L'argument est historique.

Quelques mots encore sur le Finanze, de Florence. L'espace nous manque aujourd'hui pour en faire des extraits; nous nous bornons à relever le fait que cette feuille, publiée par le ministère des finances d'Italie, a reproduit un charmant conte siamois inséré il y a quelques mois dans la Revue Moderne, et tendant à prouver d'une manière énergique que l'impôt dessèche l'arbre sur pied. N'est-ce pas d'une rare vertu pour un ministère de finances que d'abonder dans le sens du contribuable ? MAURICE BLOCK.

REVUE FINANCIÈRE

LA BOURSE DE PARIS DURANT LE SECOND SEMESTRE
DE L'ANNÉE 1866 (1)

Le second semestre de 1866 n'a été, à vrai dire, que le développement des conséquences normales et naturelles des faits arrivés durant le premier; il a continué les mêmes tendances, sans apporter de nouveaux éléments; aussi l'histoire en est-elle moins dramatique que celle que nous avons eu à faire du premier semestre, il y a juste six mois.

Il y a un point d'arrêt dans le mal, même quelques tentatives de réhabilitation sur certaines valeurs; d'ailleurs hésitation provenant d'une défiance, trop souvent justifiée au reste.

De ces généralités passons aux détails.

Le semestre débute par un de ces coups de théâtre qui, à la Bourse, dans le monde spéculateur, engendrent des fortunes et occasionnent des

(1) Voir le Journal des Economistes, juillet 1866, p. 107.

ruines, ne laissant en tout cas que des pertes pour les intermédiaires, en raison des risques énormes qui leur incombent. La liquidation de juin venait de se terminer dans les appréhensions d'une guerre continentale; les situations avaient été établies et prévues, pour ainsi dire, en conséquence, c'est-à-dire que les agents et courtiers s'étaient beaucoup plus défendus de la baisse que de la hausse. Tout à coup l'Autriche, vaincue par la Prusse à Sadowa, cède la Vénétie à l'empereur Napoléon, sous condition d'une médiation de la part de ce dernier; les esprits saisissent de suite l'importance de ce fait en faveur de la conclusion prochaine de la paix et escomptent instantanément la hausse avec une facilité qui a peu de précédents. Le 3 0/0 français faisait 64,40 le 4 juillet; il atteint 70 fr. le 5; le Mobilier de 485, cours du 4, vient à 720, cours du 5; le 5 0/0 italien, coté le 4 à 42,60, se fait le lendemain à 59 fr., et ainsi, plus ou moins, des autres valeurs. On comprend quel effet une pareille hausse dut produire sur les positions de certains spéculateurs. Ce fut un vrai coup de foudre pour les malheureux intermédiaires; le Tartare apportant la fausse nouvelle de la prise de Sébastopol et plus tard la mort de Nicolas, n'ont pas fait, il y a douze ans, une impression plus forte, ni surtout aussi désastreuse que, cette fois, le revirement violent dont nous parlons; à Paris, à Marseille, à Lyon, des agents de change disparaissaient, ne pouvant plus continuer, en raison des pertes écrasantes que leur faisaient subir leurs clients imprudemment engagés à la baisse.

On revient toutefois de cette première impulsion et, la liquidation générale opérée, les cours sont moins tendus; la réaction naturelle qui suit tout mouvement trop rapide se produit sur les prix. Et puis la paix, ce n'est pas tout; il faut payer les frais de la guerre; il faut supprimer dans les supputations de la richesse publique les capitaux détruits par ce fait brutal et le crédit contracté par les incertitudes de l'avenir. Tout cela ne peut se réparer qu'avec le temps et en attendant la torpeur règne sur les marchés financiers.

L'attention publique est néanmoins distraite de cette perspective par des préoccupations d'une autre nature, ou relatives à d'autres causes: l'Empire du Mexique est en question, l'état de santé de Napoléon III inquiète les esprits, et la convention relative à l'évacuation de Rome va, recevant son exécution, laisser le Souverain Pontife sans appui contre ses fidèles sujets.

Ces objets ne détournent qu'imparfaitement les esprits du motif principal de la stagnation: les inquiétudes nées de la situation actuelle. Ainsi, malgré les pertes subies directement ou indirectement, à cause de la guerre, par les diverses nations de l'Europe, les capitaux sont encore abondants, non en raison de l'accumulation des épargnes, mais par suite de la répugnance que l'on éprouve à s'engager autrement qu'à court terme.

Cependant les ministres des finances de deux grands Empires, différemment gouvernés il est vrai, font à qui de droit leur exposé financier: M. Fould vante la sagesse du gouvernement impérial, tout en constatant presque à chaque ligne les pertes subies par la France dans les événements du Mexique et reconnaissant que le passé a déjoué ses prévisions par la conversion d'excédants en déficits, ce qui ne l'empêche pas de conclure encore, pour l'avenir, en faveur d'excédants, sans s'expliquer sur l'influence financière du nouveau système militaire aboutissant à l'armement de 1,200,000 hommes. M. Mac Cullough, moins enthousiaste des fautes de l'Amérique du Nord, prévoyait un déficit là où il réalise un excédant et attend patiemment l'avenir, sans le préjuger avec optimisme. Il est vrai qu'il amortit la dette sur le pied d'un milliard et plus par an et que l'armée est entièrement licenciée à 100,000 hommes près. Mais ne sait-on pas que ce qui est vérité par delà l'Océan est erreur chez nous, et réciproquement?

Somme toute, l'année 1866 comptera parmi les années désastreuses du xix siècle. Si encore les populations en faisaient leur profit pour former leur expérience, la leçon ne serait certainement pas trop chère; mais, hélas! à en juger par l'appui que trouvent, dans l'opinion publique, les hérésies morales et politiques, on est en droit d'en douter.

Voici, pour les principales valeurs cotées à la Bourse de Paris, les oscillations mensuelles du second semestre de 1866 :

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