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mant qu'il dépendait de l'Union de remporter encore cette victoire. M. Mac-Cullough a d'abord annoncé qu'il y avait eu, dans l'année précédente, des erreurs de prévision. Mais pourquoi nos ministres n'en font-ils pas de sembables! Au lieu de se solder par un déficit de 112 millions, l'exercice offrira un excédant de recettes de 132. Cela vient de ce que les recettes ont procuré 90 millions de ressources imprévues et de ce que les dépenses votées ont pu être diminuées de 200 millions.

En définitive, l'exercice courant, celui qui sera clos le 30 juin 1867, devra aboutir à un excédant de recettes d'environ 80 millions de dollars. La dette, le 31 octobre 1866, ne s'élevait plus qu'à 2 milliards 551 millions 424,121 dollars. Elle avait en un an diminué de 206,379,565 dollars, chiffre exact.

Néanmoins, tant que la circulation du papier-monnaie n'aura pas été réduite, le ministre reconnaît qu'il n'y a pas à entonner des chants de triomphe.

Les lois de la finance et celles du commerce surtout ne retrouveront leur équilibre troublé que lorsqu'il n'y aura plus dans le pays cette quantité de monnaie fictive qui élève le prix de la main-d'œuvre, renchérit tous les objets de nécessité, gêne le commerce avec l'étranger et, sans qu'on s'en rende compte, porte l'État comme les particuliers à dépenser plus encore qu'ils ne peuvent. Les moyens que M. Mac-Cullough indique pour tirer les finances américaines de leurs derniers embarras sont au nombre de cinq, le dernier tout politique, mais d'une politique qui ne semble pas près d'être acceptée par le pouvoir législatif. Ce sont : 10 L'obligation imposée aux banques dites nationales de racheter leurs billets en circulation, dans les grands centres commerciaux du pays, ou dans un seul, New-York, par exemple. Cette mesure aurait pour résultat d'asseoir un agent de circulation très-répandu sur des bases solides et de diminuer le chiffre de la circulation inconvertible;

2o La réduction de la circulation des green-backs au chiffre strictement nécessaire pour les besoins du commerce;

3o La révision du tarif et la réduction des droits de douane sur certains produits bruts employés dans l'industrie américaine; la suppression des impôts sur les matières brutes. Ces mesures auraient pour résultat de donner un nouvel essor à l'industrie et de favoriser l'exportation;

4° L'émission de bons remboursables dans vingt ans, portant un intérêt annuel de 5 0/0 en or, payables en Angleterre et en Allemagne, et destinés à remplacer les bons 6 0/0 qui ont aujourd'hui cours en France; 5 La réhabilitation des États du Sud.

Nous ne savons quel système les États-Unis adopteront pour s'affranchir des gênes de la circulation de leur papier, qui en effet sont trèsnuisibles à la reprise des affaires commerciales, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du pays; mais on peut tenir pour assuré que, dans ce pays de liberté où toutes les expériences peuvent réussir, la victoire définitive du crédit public et du crédit des particuliers ne se fera pas attendre. Le plus difficile est fait.

P. B.

SOCIÉTÉ D'ÉCONOMIE POLITIQUE

Réunion du 5 mars 1867.

OUVRAGES PRÉSENTÉS. Discours sur les finances italiennes, par M. Scialoja. Étude sur la crise d'Espagne, par M. L.-M. Pastor. - Exposé d'un système de crédit agricole, par M. Granié. — Impôt sur les actes, par M. Besobrasof. — Bankfreiheit, traduction allemande de la Liberté des banques, par M. Horn. - Première: notions d'économie politique, sociale ou industrielle, par M. Joseph Garnier (troisième édition).

nale.

COMMUNICATIONS.- Mission économique de M. Édouard Sève dans l'Amérique septentrio-
L'anniversaire de la naissance de J.-B. Say, célébré par la Société d'économie
politique de Lyon. - Mort de M. Skarbek, économiste polonais.
DISCUSSION. Prolétariat. Salariat. Association.

M. H. Passy, membre de l'Institut, a présidé cette réunion à laquelle avaient été invités : M. de Beraza, directeur de la Gaceta economista, organe de la Société d'économie politique de Madrid, et M. Szymanowski Michal, économiste polonais.

M. le secrétaire perpétuel a présenté les ouvrages suivants :

Discours sur les finances italiennes (1), prononcé à la Chambre des députés de Florence, les 16 et 17 janvier 1867, par M. A. Scicloja, ministre des finances dans le dernier ministère. Parlement et ministère ont depuis cessé d'être; mais cet intéressnt exposé reste comme point de départ des discussions ultérieures sur la grande affaire des biens dits ecclésiastiques.

Estudios sobre la crisis economica (2). Étude nourrie de faits et de justes aperçus de la crise économique qui, en sus de la crise politique, sévit en Espagne depuis trois ans, par un des hommes les plus compétens de ce pays, M. Luis-Maria Pastor, ancien ministre des finances, sénateur du royaume, sous la présidence duquel se sont groupés les économistes espagnols.

Exposé d'un système de crédit foncier rural et de crédit agricole (3), par M. F. Granié. Cet écrit en résume un autre du même auteur, dont le titre promet la Gratuité du crédit foncier.

(1) Florence, typographie de l'Italie. In-8 de 80 p.

(2) Madrid, imprimerie de la Gaceta economista. 1866. In-8 de 65 p. (3) Février 1867. Guillaumin et C. In-8 de 46 p.

Impôt sur les actes (1), première partie d'un important mémoire lu à l'Académie de Saint-Pétersbourg, dans lequel l'auteur, M. W. Besobrasof, membre de cette Académie, fait preuve du double mérite, encore assez rare, de financier et d'économiste. Ce travail se rattache à un ensemble d'études sur les revenus publics.

Bankfreiheit (2), traduction en allemand de la Liberté des Banques (3), récemment publiée par M. Horn, et dont les éditeurs ont pensé avec raison que la question ne tarderait pas à intéresser l'Allemagne, marchant dans la voie de l'unification politique qui pourrait bien la mener à la centralisation du crédit.

La 3 édition des Premières notions d'économie politique, sociale ou industrielle (4), par M. Joseph Garnier, suivies de la Science du bonhomme Richard, de Benjamin Franklin; de l'Econonomie politique en une leçon, de Frédéric Bastiat, et d'un Vocabulaire de la langue économique.-Petit volume dans lequel l'auteur s'est donné pour mission d'exposer les premières notions le plus brièvement, le plus clairement possible, pour les personnes qui n'ont que très-peu de temps à donner à cette étude ou qui veulent être préparées par une première lecture à une étude plus approfondie.

Après ces présentations, M. le secrétaire perpétuel donne lecture d'une lettre adressée par M. Edouard Sève, un des plus fervents libreéchangistes de la Belgique, annonçant son prochain départ pour aller remplir aux États-Unis et au Canada une mission d'exploration économique et commerciale. Tous les amis de la science accompagneront l'économiste belge de leurs vœux.

M. le secrétaire perpétuel entretient ensuite la Réunion de l'hommage récemment rendu à la mémoire de J.-B. Say par la Société d'économie politique de Lyon, qui s'est réunie dans un banquet, dans le double but de célébrer l'anniversaire séculaire de la naissance de l'illustre économiste (le 5 janvier 1767, à Lyon), et de donner un témoignage de gratitude à M. Dameth, dont les leçons d'économie politique, instituées par la chambre de commerce, il y a deux ans, vont bientôt finir, et qui a eu le talent de faire goûter les vérités un peu sévères de la science, à la fois par les ouvriers qui en ont compris le vrai libéralisme, et par les chefs d'industrie qui ont pu apprécier combien un pareil enseignement est propre à amener la concorde et la paix entre

(1) Saint-Pétersbourg, Eggers, Schmitzdorff. 1866. In-4 de 52 p. (2) Stuttgart et Leipzig, Verlag von Kroner. 1867. In-8.

(3) Guillaumin et Ce. 1867. In-8.

(4) Guillaumin, Garnier frères. 1867. In-18 de 288 p.

les deux camps. Dans cette réunion, présidée par M. Flottard, viceprésident de la Société, M. Alph. Courtois a vivement intéressé ses confrères par une notice sur J.-B. Say, aussi bien pensée que bien écrite. La Réunion entend cette communication avec une vive satisfaction.

Nous devons, dit M. Wolowski, nous associer au témoignage de respect et de reconnaissance si bien formulé par notre collègue, M. Courtois, aujourd'hui secrétaire de la Société d'économie politique de Lyon, envers un homme qui a rendu de si grands services à son pays et à l'humanité tout entière. Les travaux de J.-B. Say ont grandement contribué à faire comprendre les bienfaits de la liberté du travail et de la liberté des échanges. Esprit ferme et lucide, cœur droit et dévoué, âme forte, pénétrée du sentiment de l'énergie individuelle, tout se réu nissait pour faire de Jean-Baptiste Say un bon citoyen, en même temps qu'un penseur éminent ses enseignements portent de plus en plus leur fruit, et sa mémoire continuera toujours d'inspirer une estime égale à l'admiration que méritent les travaux d'un des fondateurs de la science à la propagation de laquelle nous consacrons nos efforts. (Marques unanimes d'adhésion.)

M. Wolowski ajoute quelques mots pour annoncer à la Société la perte que l'étude de l'économie politique a faite dans la personne du comte Frédéric Skarbek qui, sans s'être posé au premier rang, a occupé une place honorable parmi les professeurs et les écrivains voués à cet ordre de travaux. La Théorie des richesses sociales de M. Skarbek a été d'abord publiée en français, car l'auteur maniait cette langue avec autant de facilité que le polonais, sa langue natale. Cet ouvrage, 'constamment amélioré par lui, et dont le titre se trouvait modifié à mesure que les études qu'il embrassa prenaient plus d'ampleur, a eu plusieurs éditions la plus récente ne date que de quelques années. Elle fournit la preuve du zèle persévérant de M. Skarbek, qui, dans un âge avancé, n'a jamais cessé de s'occuper activement de la science qu'il enseignait depuis près d'un demi-siècle à l'Université de Varsovie, et qu'il faisait aimer à ses élèves. C'est sous la direction de M. Skarbek que M. Wolowski a commencé l'étude de l'économie politique.

M. le comte Skarbek était aussi un littérateur distingué, aucun genre ne lui est demeuré étranger: poëte, historien, romancier, auteur dramatique en même temps qu'économiste, il a développé partout un talent ingénieux, et, ce qui ne gâte jamais rien, beaucoup d'esprit. Appelé à occuper les postes les plus élevés de l'administration, il s'est constamment distingué par une affabilité de manières et un tact délicat qui lui donnaient une légitime influence sur la jeunesse. Son enseignement et ses nombreux écrits ont contribué à répandre en Pologne la con

naissance et le goût des principes qu'il avait puisés aux meilleures sources, car il professait les doctrines d'Adam Smith et de Jean-Baptiste Say.

Après ces communications, la réunion choisit pour sujet d'entretien trois propositions formulées au programme par MM. J. Duval, Joseph Garnier et Clamageran.

PROLETARIAT. SALARIAT. ASSOCIATION.

Trois questions étaient formulées au programme comme suit: Une première, par M. Jules Duval, en ces termes : « Le prolétariat est-il un état social et nécessaire des sociétés humaines? >>

Une deuxième, provoquée par la première et formulée en ces termes par M. Joseph Garnier: «Le salariat est-il un état normal des sociétés humaines ? »

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• Enfin une troisième, corollaire des deux précédentes et formulée en ces termes par MM. Clamageran et Joseph Garnier: « Les principes du gouvernement représentatif peuvent-ils se généraliser dans l'industrie » ; -c'est-à-dire le salariat peut-il faire place entièrement à l'association. La discussion s'engage d'abord sur la première question.

M. Jules DUVAL, directeur de l'Économiste français, auteur de la question relative au prolétariat, recherche d'abord le sens de ce mot. Dans le langage moderne, comme à peu près dans la langue de Rome, le prolétariat est l'état des individus qui, ne possédant ni rente, ni instruments de travail, ni une profession largement lucrative, vivent au jour le jour des salaires que leur payent les patrons et n'ont guère que leur famille pour toute richesse (1). Le prolétariat n'est pas de son essence la misère, car il se peut que des salaires quotidiens suffisent à pourvoir convenablement aux besoins de la famille ouvrière; mais il est le pourvoyeur de la misère, par les risques graves et nombreux qui l'entourent. Le salaire du prolétaire, égal tout au plus à ses besoins les plus stricts dans les conditions habituelles, est sujet à vingt causes d'instabilité : la maladie, les infirmités, la vieillesse, les chomages intermittents du métier, la concurrence des ouvriers, celle des machines, les exigences plus ou moins justes du patron, les crises financières, industrielles, commerciales, les révolutions, etc.... Sous le coup de tous ces risques, il faut au prolétaire un bonheur extrême pour ne pas tomber un jour ou l'autre à la charge de l'assistance publique ou de la charité privée, et un bon

(1) Lẹ Dictionnaire de l'Académie définit les prolétaires « ceux qui n'ont ni fortune ni profession suffisamment lucrative. Le Dictionnaire de l'économie politique a omis ce mot.

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