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nent de voter à l'unanimité des deux chambres va donner, il faut l'espérer, une favorable impulsion.

La loi de 1850 se bornait à donner aux communes la faculté de créer des écoles de filles, mais sans leur indiquer les ressources nécessaires, et en se bornant, en cas d'insuffisance, à soumettre la question à la décision du conseil départemental. Dans cette situation, les écoles de filles ne s'établissaient pas. La nouvelle loi améliore le traitement des institutrices; elle diminue le nombre des écoles mixtes, organise le service des maîtres et maîtresses adjoints, et crée des moyens d'enseignement pour les hameaux éloignés du centre de la commune; enfin elle provoque la gratuité en autorisant les communes à voter des subventions pour que rien ne s'oppose à l'instruction des filles pauvres.

- Un autre fait qui prouve que l'enseignement public est en désaccord avec les besoins publics, c'est la multiplicité des coalitions et des grèves.

Voici maintenant en scène les tailleurs qui, depuis 1830, font souvent parler d'eux, et qui devaient être en 1848, sous l'impulsion de M. Louis Blanc, les moniteurs de « l'organisation du travail », par une association générale de la corporation, à laquelle fut donnée à cet effet la commande de la confection des capotes de la garde mobile dans le local de la prison pour dettes de Clichy. Après les tailleurs viendront les cordonniers, etc.

Mais nous ne nous arrêterons pas ici sur ce sujet. Nos lecteurs trouveront dans ce numéro une discussion de la Société d'économie politique pendant laquelle divers membres ont produit d'intéressants détails sur les grèves actuelles.

-M. Albert Tachard a signalé dans le journal le Temps (1) les allures politico-démocratico-socialistes d'une société fondée sous le nom de Société nationale pour l'extinction du pauperisme, dont M. Hugelman est le secrétaire général, à l'occasion d'une séance tenue à Mulhouse dans le but de fonder un comité central pour le Haut-Rhin. Cette société a imprimé dans ses statuts et autres publications qu'elle est constituée sous la protection de l'empereur Napoléon III; qu'elle a pour intermédiaire de ce protectorat, le duc de Persigny; qu'elle se donne la triple mission de se préoccuper de l'éducation de l'enfance, de l'organisation du travail et de la création des invalides civils; » que la Société-mère a plus de 40,000 affiliés; qu'entre les « travailleurs » de Paris et l'Empereur il y a des « égoïsmes parasites, etc. Dans une réponse de M. Hugelman, qui apprend que la Société fonctionne à Paris depuis trois ans, il

(1) Temps des 1, 8 et 10 avril, et Statuts de la Société, rue Laffitte, 27.

est dit des choses comme celles-ci : « que le parlementarisme dressait pour les hommes affamés l'échafaud de Buzançais; » que «la dynastie n'a de raison d'être qu'à la condition de s'appuyer sur une démocratie sociale, » etc. C'est le langage et le ton des plus mauvais esprits et des plus mauvais jours.

L'opinion s'était émue de l'apparition de cet étendard politico socialiste; mais le Moniteur est venu démentir le prétendu protectorat sous. lequel s'abritait la Société pour l'extinction du paupérisme. On lit dans le numéro du 10 avril :

« Quelques journaux de Paris et des départements ont reproduit, en l'accompagnant de réflexions diverses, le compte rendu d'une réunion tenue le 17 mars à Mulhouse, sous la présidence de deux délégués d'une association qui a pris le titre de Société nationale pour l'extinction du paupérisme.

« Le Gouvernement accorde toujours ses sympathies aux efforts qui s'inspirent du désir sincère d'améliorer le sort de la classe ouvrière, mais il ne saurait lui convenir de partager certaines doctrines: entre lui et les hommes qui les professent, aucune solidarité n'existe, et il n'admet pas que, sous prétexte de poursuivre un but philanthropique, on se présente au public comme une sorte d'organe officiel honoré du protectorat personnel de l'Empereur.

- Il a été formé une commission chargée d'examiner diverses questions relatives aux monnaies, composée de MM. Gouin et Louvet, représentant le Corps législatif; M. Dutilleul, directeur du mouvement des fonds, représentant le ministre des finances; M. Andouillé, représentant la Banque de France; MM. de Parieu et de Lavenay, représentant le Conseil d'État; M. Michel Chevalier, représentant le Sénat; M. Wołowski, représentant le crédit foncier, et M. Pelouze, représentant la commission des monnaies. Cette commission s'est réunie le 10 avril, sous la présidence de M. de Parieu, et son premier vote a été de se prononcer pour le double étalon.

Cette décision a été prise à la majorité de 5 (MM. Gouin, Louvet, Andouillé, Dutilleul, Wolowski), contre 3 (MM. de Parieu, de Lavenay, Michel Chevalier).

Nous ignorons le sens du vote dans l'esprit de la majorité de la commission; il n'est pas possible de penser qu'elle entende par là qu'il peut y avoir simultanément deux mesures absolument et relativement invariables de la valeur, l'une en or et l'autre en argent.

Toujours est-il que M. Michel Chevalier a cru devoir envoyer sa démission à M. le ministre des finances.

La commission d'il y a dix ans, et qui n'était pas composée de même, avait voté à 10 contre 2 (MM. de Parieu et Michel Chevalier) pour un droit d'importation sur l'argent !

-

Voici ce que deviennent quelques-unes de ces entreprises de crédit baptisées de grands noms et annoncées avec audace. Nous lisons dans un journal quotidien :

Un prêtre, l'abbé Clergeau, ancien curé d'une paroisse de Bourgogne, ancien vicaire du chapitre de Sens, venu à Paris, il y a plus de vingt ans, pour exploiter un procédé dont il se disait l'inventeur, un nouveau système de transposition pour le clavier des orgues, n'a pas tardé à y occuper une position industrielle considérable.

S'adressant plus particulièrement à ses anciens collègues, aux curés et desservants de campagne, par des lettres, par des prospectus, par des circulaires, il leur demandait le dépôt de leurs fonds ou de titres représentant des valeurs cotées à la Bourse, en leur promettant de leur servir un intérêt de 8 0/0.

Séduits par l'appât de ce bénéfice un peu usuraire, bon nombre d'ecclésiastiques ont confié leurs fonds ou leurs valeurs à l'abbé Clergeau, qui, toujours proclamant le succès de ses entreprises et promettant de plus grands avantages, a fondé successivement six établissements sous les noms de la caisse des Bonnes œuvres, le Crédit des pa

la banque des Dépôts,

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roisses, les Eaux de Calais, la Société des institutions de Boulogne et de Saint-Mandé.

Le résultat de toutes ces entreprises a été une faillite présentant un passif de plus de 4 millions en face d'un actif de 60,000 fr., ensuite de laquelle s'est dressée contre l'abbé Clergeau et deux de ses associés, les sieurs Faure (dit de Monginot) et Margaine, une triple prévention de banqueroute simple, d'escroquerie et d'abus de confiance.

Bon nombre de témoins ont été entendus, presque tous des ecclésiastiques, curés et desservants de divers départements. Tous ont déclaré qu'ils ont été trompés par l'abbé Clergeau, auquel, avec la plus grande confiance, ils ont envoyé leurs fonds ou des valeurs pour en faire un emploi déterminé; le résultat a été pour eux un désastre complet; quelques-uns ont été désintéressés, non par l'abbé Clergeau, mais par ses associés.

Le syndic de la faillite a déclaré que l'abbé Clergeau percevait pour son traitement particulier une somme de 25,000 fr., menait un grand train et avait une maison de campagne à Enghien.

L'abbé Clergeau, qui depuis longtemps est en fuite, ne s'est pas présenté à l'audience.

Le tribunal correctionnel, 6 chambre, présidé par M. Delesvaux, a donné défaut contre lui, et l'a condamné sur tous les chefs de la prévention en cinq ans de prison et 50 fr. d'amende. Le sieur Margaine, pour complicité de banqueroute simple et d'abus de confiance, a été condamné à trois mois de prison et 50 fr. d'amende. (Siècle.)

JOSEPH GARnier.

Le Gérant, PAUL BRISSOT-THIVARS.

Paris. Imprimerie A. PARENT, rue Monsieur-le-Prince, 31.

DES

ÉCONOMISTES

DE

L'ASSOCIATION

DANS LA SPHÈRE DE L'ÉCONOMIE POLITIQUE (4)

IV

ANALYSE ÉCONOMIQUE DE L'ASSOCIATION.

Quelle est la portée de la réforme de l'ancien régime des associations? Quel avenir est réservé à la société à responsabilité limitée, désormais affranchie de l'entrave de l'autorisation préalable? Cette forme de l'association est-elle destinée seulement à s'appliquer aux entreprises excédant les forces d'un seul capitaliste, comme le prétendait M. Palmer dans l'enquête de 1838, ou bien est-elle destinée à empiéter sur le domaine des entreprises individuelles, des sociétés en nom collectif et des sociétés en commandite qui se trouvaient protégées contre sa concurrence par la douane quasi-prohibitive de l'autorisation préalable? Quelle influence la suppression de cette espèce de douane exercera-t-elle sur la forme générale des entreprises ? Les entreprises individuelles continueront-elles à prédominer, ou bien est-il vrai, comme le

(1) Voy. dans le numéro de janvier 1867, t..V, p. 2, la première partie de ce travail: I. Causes du développement de l'Association à l'époque actuelle. II. De l'Association sous l'ancien régime. - III. Réforme de l'ancien régime.

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pensait Coquelin, que l'avenir appartienne à la société à responsabilité limitée? Cette question, dont l'importance n'échappera à personne, l'expérience a commencé à la résoudre dans le sens prévu par Coquelin. En Angleterre, notamment, la société à responsabilité limitée est devenue et tend à devenir de plus en plus la forme préférée des entreprises. Elle y est appliquée, non plus seulement aux entreprises de chemins de fer et de bateaux à vapeur, aux exploitations minérales, aux assurances, c'est-à-dire à ce que l'on croyait être autrefois son domaine naturel, mais encore aux manufactures, au commerce, au crédit : chaque jour on voit, surtout dans la banque, d'anciennes et respectables firmes se transformer en sociétés à responsabilité limitée. Cet empiétement de l'association sur le domaine naguère réservé de l'individualisme est-il un fait normal destiné à se développer encore, à se généraliser peut-être, ou n'est-ce qu'un accident produit par un engouement passager pour une forme d'entreprises récemment émancipée ? Si nous voulons être éclairés sur ce point, qu'avons-nous à faire? Nous avons à soumettre la société à responsabilité limitée à l'épreuve de l'analyse; nous avons à la comparer aux autres formes des entreprises, en recherchant si elle est plus ou moins économique que ces formes concurrentes, et, en particulier, que l'entreprise individuelle, demeurée jusqu'à présent prédominante dans le domaine de la production.

Le plus ou moins de perfection d'un type économique aussi bien que d'un type animal se reconnaît au degré de division du travail. fonctionnel (1). Dans les entreprises individuelles, les diverses opé

(1) Écoutons à ce sujet un savant naturaliste, M. de Quatrefages : << Tant que l'industrie humaine, dit-il, est à l'état de première enfance, le même homme cultive son champ avec la bêche qu'il s'est forgée ; il récolte et fait rouir le chanvre, le teille et le file. Puis il construit un métier informe, se fabrique une navette grossière et tisse tant bien que mal la toile qui devra le vêtir. Plus tard, il trouve à se pourvoir d'instruments plus parfaits chez un voisin qui passe sa vie à ne faire que des instruments aratoires ou des navettes. Plus tard encore, il vend son fil au tisserand, qui n'a jamais manié ni le marteau du forgeron, ni la pioche du cultivateur, ni la scie du menuisier. A mesure que chaque phase du travail est confiée à des mains uniquement consacrées à elle seule, à mesure que le travail se divise, le produit final devient de plus en plus parfait. Eh bien ! il en est de même chez les animaux : pour assurer la nutrition et la reproduction, c'est-à-dire la conservation de l'individu

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