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ral. Il faut ajouter que depuis ce renvoi, il n'y a eu aucune sentence de correction contre cet ecclésiastique.

Madame l'abbesse de Jouarre a remarqué dans sa réplique qu'elle avoit plusieurs arrêts du conseil et du grand conseil, qui la maintenoient en diverses prérogatives appartenant à sa dignité d'abbesse. M. l'évêque de Meaux représente de son côté, que ces arrêts ordonnent seulement que les comptes de la maladrerie de Jouarre seront rendus à l'abbesse; que l'abbesse pourra faire célébrer les messes conventuelles et offices par d'autres prêtres que par les chanoines de Jouarre il ne s'agit point de juridiction, et ainsi ce sont pièces inutiles pour la cause.

:

Reste à observer que la transaction rapportée, à l'insu de M. l'évêque de Meaux, par madame l'abbesse de Jouarre, et passée le 21 février 1682, avec madame l'abbesse de Faremontier, ne peut pas être déclarée commune avec madame l'abbesse de Jouarre, parce que la condition du monastère de Faremontier et de celui de Jouarre est différente; celui-là étoit agrégé par lettres-patentes registrées au grand conseil, à l'ordre de Cluny; celui-ci n'est uni à aucune congrégation, ni en état de s'y unir : celui-là n'avoit pas besoin de réforme; on convient que celui-ci en a grand besoin, et pour y procéder, il est nécessaire que l'autorité de l'évêque ne soit pas restreinte par des priviléges, qu'il ait la liberté de choisir des personnes capables d'y travailler sous lui, et ne soit pas réduit à se servir de ceux qui lui seroient présentés.

M. NOUET le jeune, avocat,

SOMMAIRE DE LA CAUSE.

PROCÉDURE.

Ce qui a donné lieu à la contestation, est une information de l'official de Meaux à la requête du promoteur, contre madame l'abbesse de Jouarre, pour raison de ses fréquentes sorties sans permission; suivie d'un décret pour être ouïe, qui a été converti en ajournement personnel sur le refus de subir l'interrogatoire, avec défenses de sortir sans permission sous les peines de droit.

Pour éluder cette procédure, madame l'abbesse de Jouarre a formé sa demande en complainte contre les officiers de l'officialité, qu'elle a portée aux requêtes du palais en vertu de son committimus, et y a obtenu sentence du 2 juillet, qui casse le décret de l'official ou vice-gérent,, avec défenses de passer outre, et permet d'emprisonner en cas de contravention.

M. l'évêque de Meaux a pris le fait et cause pour ses officiers, et obtenu arrêt qui le reçoit appelant ; fait défense d'exécuter la sentence, et ordonne que la procédure commencée à l'officialité sera continuée.

Il a ensuite donné requête à fin d'évocation du principal, qui est la demande en complainte de

madame l'abbesse de Jouarre; et après y avoir fourni des défenses, la cause a été mise au rôle.

Depuis, M. l'évêque de Meaux en plaidant a appelé comme d'abus d'une sentence du cardinal Romain, en ce qu'elle déclare le monastère, le clergé et le peuple de Jouarre, exempts de sa juridiction: et il y a eu arrêt à l'audience qu'on plaideroit sur le tout.

Question unique à juger, si en infirmant la sentence des requêtes du palais, M. l'évêque de Meaux sera maintenu en toute juridiction sur lesdits monastère, clergé et peuple.

Quant à la sentence des requêtes du palais, on voit bien qu'elle est insoutenable en la forme, messieurs des requêtes ne sont point juges compétens des sentences émanées des officialités; au fond, s'agissant de discipline, ils n'auroient pu surseoir l'exécution de la procédure. Il en faut donc venir au fond.

DEUX MOYENS DU FOND.

1.0 Que le monastère de Jouarre n'a aucun titre ni privilége; 2.o que quand il en auroit eu, ils sont révoqués.

On ne prétend pas déduire ces moyens tout au long; on l'a fait dans les mémoires précédens; mais seulement les remettre devant les yeux de messieurs, et faire voir qu'on peut tout trancher par un

arrêt.

PREMIER MOYEN.

Que le monastère de Jouarre n'a aucun privilége.

LA maxime est constante, que toute exemption doit avoir le concours des deux puissances; il y faut donc également un privilége et des lettrespatentes et dans le fait, il est constant que le monastère de Jouarre ne produit ni l'un ni l'autre.

Déjà pour lettres-patentes, ni on n'en produit, ni on ne produit aucune pièce où elles soient énoncées. L'arrêt de 1631 parle des lettres-patentes; mais la partie adverse est demeurée d'accord en plaidant, que ce n'étoit pas des lettres - patentes pour confirmer le privilége; et en effet on les représenteroit encore si elles avoient été alors.

Il n'est point question de présumer ce qui n'est ni produit ni énoncé nulle part, surtout dans une matière de droit étroit, et encore d'un droit odieux, où il faut des preuves constantes, et non pas des présomptions.

Voilà donc déjà la question jugée par le seul défaut de lettres-patentes.

Mais il n'y a non plus de privilége : le chapitre, Ex parte, n'est pas un privilége, il ne contient qu'une simple énonciation d'un privilége; mais en confusion, sans même en dire la date, ni de quel pape il est, sans légitime contradicteur : Quia tandem nullus apparuit idoneus responsalis, qui partem defensaret adversam; et avec expresse déclaration du pape, qu'il laissoit les parties au même état où elles étoient avant l'énonciation et le renouvel

lement

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lement de ce privilége: Ita ut non plus juris accres

cat.

La sentence du cardinal Romain n'est pas un privilége, ni n'équipolle à un privilége. Ce cardinal n'avoit pas le pouvoir d'affranchir un monastère ni de valider un privilége qu'Innocent III avoit laissé indécis; il ne l'énonce qu'en termes généraux, inspectis privilegiis : ainsi on ne sait encore ce que c'est. La sentence ne lui donne point d'autorité, 1.o parce qu'elle est abusive; 2.0 ce n'est qu'un acte particulier dans une affaire de droit public; 3.o elle est demeurée sans exécution.

Abusive, 1.0 en ce que ce cardinal a autorisé un privilége sans lettres-patentes; 2.o on a vu les priviléges des religieuses, inspectis privilegiis; on n'énonce nulles pièces de la part de l'évêque, il y en avoit cependant qu'on a imprimées; ainsi l'évêque a été mal défendu. 3.0 Toutes les parties n'ont pas été appelées, et on n'y fait nulle mention du métropolitain ni du primat, qui avoient pareil intérêt que l'évêque à la juridiction dont on exempte le

monastère.

Cette sentence est un acte purement particulier. Ce cardinal n'avoit point de pouvoir du pape pour cela; il n'agit pas comme légat, mais en vertu du pouvoir donné par les parties: pouvoir insuffisant en matière de droit public, dont les parties ne pouvoient disposer.

Il ne sert de rien que le cardinal ait prononcé du consentement des parties; car au contraire c'est ce qui fait voir que la sentence n'a force que de transaction entre particuliers. On ne pouvoit remédier BOSSUET. VII.

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