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seul sur la scène, le vieux Romain sent naître en lui certain désir, et forme le projet de se faire conduire chez la belle, à la faveur de la nuit. La vieille vient, reconnaît son maître à l'aide d'une lanterne sourde; et, sans se déconcerter le travestit des habits de femme qu'elle apportait pour Lindor. Jacqueline conduit son maître, les yeux bandés, dans şon école de droit; il est berné par ses écoliers, moqué par sa maîtresse, et Lindor lui enlève sa prétendue: les écoliers fuient dès qu'ils reconnaissent le docteur. Celui-ci, furieux, voit bien qu'il est pris pour dupe, et apprend que sa pupille et Lindor sont unis en vertu de la loi.

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MAJOR PALMER (le), opéra en trois actes, par M. Pigault-Lebrun, musique de Bruni, à Feydeau, 1797. Palmer, major dans le régiment de Brown, est logé en Franconie, chez madame de Blumensthal, dont il séduit la fille. Amalie a un frère jeune et ardent, qui la surprend avec le major, et se bat avec lui; plus expérimenté et plus calme, Palmer tue son adversaire, et se voit obligé de fuir Peu de jours après cet événement, l'ennemi paraît, mais il ne tarde pas à être repoussé par le régiment de Brown; enfin, Palmer est condamné à mort comme déserteur.

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Par une suite d'événemens qu'il est inutile d'expliquer, madame de Blumensthal s'est retirée avec sa fille, devenue mère en Silésie, où elle a fait l'acquisition d'un château ; le propriétaire de ce château était l'ami de Palmer. Ce dernier arrive en Silésie pour lui demander un asyle, et, pendant la nuit, pénètre dans le parc; il y'est reconnu, et, par sa seule présence, jette le trouble dans cette malheureuse famille. Déchiré de remords, méconnu par Amalie, qui a perdu la raison, repoussé par la mère, qui a conservé la sienne, il est en proie au plus violent désespoir. Cependant l'ennemi passe

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l'Oder, et approche du château de madame de Blumensthal, où le général est logé. Ce dernier rassemble ses troupes, arme les habitans, et propose à Palmer de saisir cette occasion de réparer ses torts. Palmer accepte, se met dans les rangs, marche à l'ennemi, le combat et le repousse, après avoir sauvé la vie au général de retour au château, on lit le signalement de Palmer, et l'ordre de l'arrêter pour lui faire subir son jugement; mais au moment où lui-même, veut qu'on le conduise à la mort, le général reçoit une lettre du grand Frédéric, dans laquelle ce monarque lui dit, que la nécessité de maintenir la discipline ne lui permet pas de révoquer le jugement contre Palmer, mais qu'ayant appris qu'un inconnu s'est distingué dans le dernier combat, et a contribué à la victoire, il lui donne un régiment sous le titre du baron de Holtz, et défend de faire aucune recherche ulterieure sur la retraite de Palmer. Rentré en grâce et toujours amoureux, Palmer regagne les faveurs de madame de Blumensthal, d'Amalie, sa fille, qui a recouvré la raison, et la pièce se termine par leur union.

Cet opéra, malgré ses invraisemblances et ses irrégularités, a obtenu beaucoup de succès.

MALADE IMAGINAIRE (le), comédie en trois actes, en prose, par Molière, aux Français, 1673.

Cette pièce est si connue, qu'il serait superflu d'en donner l'analyse l'amour inquiet de la vie, les soins trop multipliés pour se la conserver, sont les faiblesses les plus ordinaires à l'homme, et celles que l'auteur joue dans le Malade Imaginaire. Il joue aussi l'art des médecins et la faculté en corps, dans le troisième intermède de cette comédie-ballet. Les caractères en sont variés et soutenus; enfin, c'est une des bonnes. productions de Molière, et sa dernière. Malheureusement

elle lui coûta la vie. Le jour qu'il devait représenter le Maladė Imaginaire pour la troisième fois, le 17 février 1673, se sentant plus incommodé qu'à l'ordinaire du mal de poitrine, auquel il était sujet, il exigea de ses camarades qu'on commençât la représentation à quatre heures précises. Sa femme et Baron le pressèrent de prendre du repos et de ne pas jouer.

Hél que feraient, répondit-il, tant de pauvres ouvriers? je >> me reprocherais d'avoir négligé un seul jour de leur donner » du pain. » Les efforts qu'il fit pour achever son rôle, augmentèrent son mal; et l'on s'aperçut qu'en prononçant le mot juro, dans le divertissement du troisième acte, il lui prit une convulsion. On le porta chez lui, dans sa maison, rue de Richelieu, où il fut suffoqué par un vomissement de sang. Après sa mort, les comédiens se disposèrent à lui faire un convoi magnifique; mais M. de Harlai, archevêque de Paris, ne voulut pas permettre qu'on l'inhumât en terre sainte. Sa femme alla sur-le-champ à Versailles, se jeter aux pieds de Louis XIV, pour se plaindre de l'injure que l'on faisait à la mémoire de son mari, en lui refusant la sépulture. Le roi la renvoya, en lui disant que cette affaire dépendait du ministère de M. l'archevêque, et que c'était à lui qu'il fallait s'adresser. Cependant, sa majesté fit dire à ce prélat qu'il fit en sorte d'éviter l'éclat et le scandale. L'archevêque révoqua donc sa défense, à cordition que l'enterrement serait fait sans pompe et sans bruit. Il se fit, en effet, par deux prêtres, qui accompagnèrent le corps sans chanter, et Molière fut enterré dans un cimetière qui était derrière la chapelle de Saint-Joseph, dans la rue Montmartre. Tous ses amis y assistèrent, ayant chacun.un flambeau à la main, et l'épouse du défunt s'écriait partout: « Quoi! l'on

refuse la sépulture à uu homme qui mérite des autels! »" Deux mois avant ce malheureux événement, Despréaux vint voir Molière; il le trouva fort incommodé de sa toux, et fai

sant des efforts de poitrine qui semblaient le menacer d'une fin prochaine. Molière, naturellement froid, fit plus d'amitié que jamais à Despréaux, ce qui engagea ce dernier à lui dire : << Mon pauvre monsieur Molière, vous voilà dans un pitoya»ble état; la contention continuelle de votre esprit, l'agita»tion de vos poumons, sur votre théâtre, tout devrait vous » déterminer à renoncer à la représentation. N'y a-t-il que >> vous dans la troupe, qui puissiez exécuter les premiers » rôles? Contentez-vous de composer, et laissez l'action » théâtrale à quelqu'un de vos camarades: cela vous fera plus d'honneur dans le public, qui regardera vos acteurs » comme vos gagistes ; et vos acteurs, d'ailleurs, qui ne sont >> pas plus souples avec vous, sentiront mieux votre » supériorité.» « Ah! monsieur, répondit Molière, que me » dites-vous-là? il y va de mon honneur de ne les point quitter. »« Plaisant honneur, disait en soi-même le satyrique, que celui qui consiste à se noircir tous les jours le visage, pour se faire une moustache de Sganarelle, et à » dévouer son dos à toutes les bastonades de la comédie ! » On raconte, au sujet du Malade Imaginaire, l'anecdote

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suivante :

Dans le tems que Molière composait cette pièce, il cherchait un nom pour un lévrier de la faculté, qu'il voulait mettre en scène : le hasard lui fit rencontrer un garçon apothicaire, armé d'une seringue, à qui il demanda quel but il voulait coucher en joue : celui-ci lui apprit qu'il allait seringuer de la beauté à une comédienne : « Comment vous » nommez-vous, reprit Molière?» Le serviteur d'Hypocrate lui répondit qu'il s'appelait Fleurant. Molière l'embrassa, en lui disant: « Je cherchais un nom pour un personnage tel que » vous. Que vous me soulagez, en m'apprenant le vôtre ! » En effet, le clistériseur qu'il a mis sur le théâtre, dans le

Malade Imaginaire, s'appelle Fleurant. Comme on sut l'histoire, tous les petits-maîtres, à l'envi, allèrent voir l'original du Fleurant de la comédie. La célébrité que Molière lui donna, et la science qu'il possédait, lui firent faire une fortune rapide, dès qu'il devint maître apothicaire. Ainsi, en le ridiculisant, Molière lui ouvrit la voie des richesses.

Dans cette même pièce, l'apothicaire Fleurant, brusque jusqu'à l'insolence, vient, une seringue à la main, pour donner un lavement au malade. Un honnête homme, frère de ce prétendu malade, qui se trouve là dans ce moment, le détourne de le prendre. L'apothicaire s'irrite, et lui dit toutes les impertinences que l'on prête à tous les gens de son espèce. A la première représentation, l'honnête homme répondait à l'apothicaire : « Allez, monsieur, on voit bien que vous n'a» vez coutume de parler qu'à des culs,» Tous les auditeurs qui étaient à cette représentation s'en indignèrent; mais on fut enchanté, à la seconde, d'entendre dire : « Allez, monsieur, » on voit bien que vous n'avez pas coutume de parler à » des visages. »

Le mari de mademoiselle Beauval était un faible acteur. Molière étudia son peu de talent, et lui donna des rôles qui le firent supporter du public. Celui qui lui fit le plus de réputation alors, fut le rôle de Thomas Diafoirus, dans le Malade Imaginaire, qu'il jouait supérieurement. On dit que Molière, en faisant répéter cette pièce, parut mécontent des acteurs qui y jouaient, et principalement de mademoiselle Beauval, qui représentait le personnage de Toinette. Cette actrice, peu endurante, après lui avoir répondu assez brusquement, ajouta « Vous nous tourmentez tous, et vous ne dites mot » à mon mari?» « J'en serais bien fâché, reprit Molière; je » gâterais son jeu : la nature lui a donné de meilleures le

çons que les miennes, pour ce rôle. » On assure que le latin

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