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D'autres voulaient le faire porter à Paris; mais le peuple de Noyon ne permit point qu'on lui'enlevât la dépouille mortelle de son pasteur; en sorte que cette ville possède encore aujourd'hui la plus grande partie des reliques du saint évêque. Sa mort fut suivie de plusieurs miracles que saint Ouen rapporte. On lit dans le même auteur, que saint Eloi, dans une vision, avertit de sa dernière hcure l'abbesse sainte Aure, que la peste emporta avec cent soixante de ses religieuses, en 666.

La Reine Bathilde ayant, peu de temps après, vendu tous ses ornemens pour les donner aux pauvres, en excepta ses bracelets d'or dont elle fit faire une croix qui fut mise à la tête du tombeau de saint Eloi. Elle fit faire aussi, pour couvrir le même tombeau, un dais d'or et d'argent qu'on nommait repa. Les grands, à son exemple, y offrirent une grande quantité d'or et de pierreries. Comme ces ornemens avaient beaucoup d'éclat, on les couvrait en carême d'un linge brodé de soie. On s'apercut qu'il degouttait de ce linge une certaine liqueur; on le pressa dans un vase, et cette liqueur servit à guérir plusieurs maladies (16). On voit ici la coutume de couvrir pendant les jours de pénitence, ce qu'il y avait de plus brillant dans l'église (17).

Saint Eloi devint un Saint, en vivant au milieu du monde et à la cour. C'est qu'il ne fut point du monde, et qu'il se préserva de ses piéges par une fidélité constante aux exercices de la religion. Il faisait quelquefois attendre le prince pour achever ses exercices, et il n'aurait pas voulu lui être attaché à d'autres conditions. Quand on est dans le monde, il faut converser avec les hommes; c'est un devoir que prescrivent l'honnêteté, l'amitié, la charité. Mais comment rendre la conversation chrétienne? Premièrement, elle doit

(16) S. Audoen. Vit. S. Elig. c. 40; du Cange, in Glossar. V. Repa. (17) Voyez Fleury, 1. 39, n. 26.

porter l'empreinte de la sincérité, et ne pas consister en de pures formules. Les hommes pleins de l'amour d'euxmêmes ne connaissent pas la vraie charité; cette vertu n'est point faite pour des cœurs que les passions tyrannisent. Aussi leurs protestations d'amitié ne sont-elles souvent qu'hypocrisie, qu'un manége opposé à la simplicité évangélique. Secondement, on ne doit pas donner un temps trop considérable à la conversation; on doit également craindre qu'elle ne soit une source d'amusemens vains et frivoles. S'il est nécessaire de recevoir des visites inutiles, on doit chercher du moins à les abréger, pour éviter la perte du temps. Les discours des gens du monde ne tendent pour l'ordinaire qu'à entretenir les passions, et l'on peut dire des hommes en général, que le langage de la vérité ne leur est guères connu. Ayons donc soin de nous entretenir avec nous-mêmes par la lecture et la méditation de la loi du Seigneur. Plus nous sommes exposés à entendre le langage perfide du monde, plus nous devons nous rendre attentifs à la voix de la vérité. Il n'y a que l'orgueil et la vanité du monde qui l'empêchent de se faire entendre, et qui ont établi un langage qui n'est pas le sien. Pensons enfin que saint Eloi et plusieurs autres Saints ont trouvé le moyen, même à la cour, de converser avec le ciel et avec eux-mêmes. Aurions-nous encore quelque excuse à alléguer ?

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S. LÉONCE, ÉVÊQUE DE FRÉJUS, EN PROVENCE.

Vers l'an 432.

Saint Léonce, né à Nisme en Languedoc, était frère de saint Castor, évêque d'Apt, que l'Église honore le 21 Septembre. Ayant été élevé sur le siége de Fréjus, il édi

fia par le spectacle des plus éminentes vertus. Il engagea saint Honorat, son ami, qui voulait mener la vie solitaire, à se fixer dans son diocèse, et il lui désigna l'île de Lérins. Honorat y bâtit un monastère qui devint depuis trèscélèbre, et qu'il gouverna jusqu'au temps où il fut élu archevêque d'Arles.

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Cassien, fondateur de l'abbaye de Saint-Victor de Marseille, dédia ses dix premières conférences à Léonce de Fréjus vers l'an 423. Quelques auteurs ont cru que les conférences de Cassien furent dédiées à un autre évêque, nommé aussi Léonce, mais différent de notre Saint. Ce sentiment ne paraît point appuyé sur des preuves solides (1).

On compte saint Léonce de Fréjus parmi les evêques des Gaules, auxquels les Papes Boniface et Célestin I écrivirent pour des affaires importantes. La lettre du premier concernait les mesures à prendre dans la cause de Maxime de Valence, contre lequel on avait porté des plaintes graves au Saint-Siége. Il s'agissait dans celle de Célestin d'imposer silence aux semi-pélagiens, qui attaquaient la doctrine de saint Augustin sur la grâce,

Léonce mourut vers l'an 432; ainsi le Pape saint Léon ne peut avoir eu dessein de lui conférer la primatie dont il voulait dépouiller Hilaire d'Arles. La lettre d'ailleurs qu'il écrivit à ce sujet aux évêques de la province de Vienne, est de l'an 445 (2). Notre Saint est honoré en ce jour dans les diocèses de Fréjus et d'Apt. On lui a donné quelquefois le titre de martyr, mais sans aucun fondement (3). On

(1) Voyez M. Girardin, Hist. de la ville et de l'église de Fréjus, t. II, p. 63.

(2) Voyez Antelmi, de initiis ecclesiæ Forojuliensis. Il paraît prouver solidement que saint Léonce de Fréjus mourut vers l'an 432 ou 433. (3) Le P. Louis Dufoer, Jésuite, a donné un livre intitulé : S. Leontius, episcopus et martyr, suis Forojuliensibus restitutus, lequel fut imprimé T. XVIII.

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l'a aussi confondu avec Léonce d'Arles, et avec d'autres évêques du même nom.

Voyez Tillemont, t. XII, p. 468; Baillet, sous le 1 Décembre; le Gallia. Christ. nova, t. I, p. 420; M. Girardin, Hist. de la ville et de l'église de Fréjus, t. II, p. 40 et suiv.

S. CONSTANTIEN, SOLITAIRE DANS LE MAINE.

Vers l'an 562.

SAINT CONSTANTIEN, né en Auvergne, vécut dans une grande ferveur dès sa jeunesse. Ayant quitté son pays, il se retira dans le monastère de Micy, près d'Orléans. Il y trouva saint Frambourg, son compatriote, qui avait passé quelque temps dans la solitude d'Ivry, près de Paris (1). Le désir d'une plus grande perfection leur inspira depuis à l'un et à l'autre la résolution de chercher quelque désert écarté, où ils fussent inconnus au monde. Ils s'arrêtèrent dans la forêt de Javron, au pays du Maine. Saint Innocent, évêque du Mans, obligea depuis Constantien à recevoir les saints ordres, afin qu'il pût être utile aux habitans des villages voisins. Son zèle, sa douceur, ses exemples et ses prières opérèrent un grand nombre de conversions. Il continua ses missions sous saint Domnole, successeur de saint Innocent.

La réputation de sainteté dont il jouissait le fit connaître par toute la France. Clotaire I alla le visiter, et se re

à Avignon en 1636. Le titre seul annonce quel est le sentiment de l'auteur; il est cependant porté à croire qu'il y a eu deux évêques de Fréjus du nom de Léonce; d'autres savans ont pensé de même. Voyez M. Girardin, loc. cit. p. 45.

(1) Voyez sa vie sous le 15 Août.

commanda à ses prières, lorsqu'il passa par le Maine, en 560. Ce prince portait la guerre en Bretagne, où l'on appuyait la révolte de Chramme, son fils. Le saint lui prédit qu'il remporterait la victoire. Il employa les présens que lui fit le Roi, à fonder un monastère qui a subsisté long-temps, et qui est aujourd'hui un prieuré simple, dépendant de l'abbaye de Saint-Julien de Tours.

Il ne paraît pas que saint Constantien ait survécu longtemps à Clotaire, qui mourut en 562. On l'enterra dans l'église de Javron, et son corps y resta jusqu'aux incursions des Normands. On garde une partie de ses reliques dans l'abbaye de Breteuil, au diocèse de Beauvais. On l'honore dans le Maine le premier Décembre, qu'on croit être le jour de sa mort; mais sa fête ne se célèbre que le 2 du même mois dans le diocèse de Beauvais.

Voyez sa vie par un auteur presque contemporain, et écrite d'après la relation des disciples du Saint. Le père Le Cointe a publié cette pièce dans ses Annales. Voyez aussi Baillet, etc.

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DOMNOLE (1), dont on ignore la patrie, était frère de saint Audouin, qui fut évêque d'Angers avant saint Lézin. On dit qu'il fut abbé de Saint-Laurent près de Paris (2). On lui a reproché de s'être attaché à Clotaire Roi de Soissons, du vivant même de Childebert, Roi de Paris et de Neustrie. Clotaire, pour le récompenser des services qu'il

(1) On ne sait pourquoi le vulgaire l'appelle saint Tannoley et saint Ariolet.

(2) C'est aujourd'hui une des plus considérables paroisses de cette ville.

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