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grande sainteté. Flavien, son père, chevalier romain, et Dafrose, sa mère, étaient des chrétiens fort zélés. Flavien fut arrêté et dépouillé d'un emploi considérable qu'il avait dans la ville. On lui brûla le visage avec un fer rouge, et on le bannit à Aqua-Pendente, qu'on appelait alors Aquæ Taurinæ. Il y mourut peu de jours après des suites de ses tourmens. Dafrose fut renfermée quelque temps dans sa propre maison. Enfin on l'en tira par l'ordre d'Apronien, et on la conduisit hors de la ville pour lui couper la tête.

Bibiane et Démétrie sa sœur, ayant perdu ceux dont elles avaient reçu le jour, le jour, se virent privées de tout ce qu'elles possédaient dans le monde. Elles éprouvèrent pendant cinq mois toutes les rigueurs de la pauvreté : mais elles firent un saint usage de cette épreuve. Apronien s'était flatté de vaincre leur constance par la misère : il se trompa; il les fit donc comparaître devant lui. Dieu permit que Démétrie, après avoir généreusement confessé sa foi, tombât morte aux pieds du juge. Apronien fit remettre Bibiane entre les mains d'une méchante femme, nommée Rufine. Celle-ci, voyant l'inutilité des artifices qu'elle avait employés pour séduire la Sainte, eut recours aux plus indignes traitemens. Ils n'eurent pas plus de succès que les caresses. Apronien, confus et furieux d'être vaincu par une jeune vierge, la condamna à mort. La sentence portait que Bibiane serait attachée à un pilier, et battue avec des fouets garnis de plomb, jusqu'à ce qu'elle expirât. Elle souffrit ce supplice avec joie, et mourut sous les coups des bourreaux. On laissa son corps exposé, pour que les bêtes la dévorassent. Mais un saint prêtre, nommé Jean, l'enleva secrètement au bout de deux jours, et l'enterra pendant la nuit près du palais de Licinius. Les chrétiens érigèrent une chapelle sur son tombeau, lorsqu'ils eurent la liberté de professer leur religion. En 465, le Pape Simplice y fit construire une belle église, laquelle fut appelée Olympina, du nom

d'une dame pieuse qui avait payé les frais de la construction. Honorius III la fit depuis réparer. Comme elle tombait en ruines, dans la suite des temps, on l'unit à SainteMarie-Majeure. Urbain VIII la fit rebâtir en 1628, et il y plaça les reliques des saintes Bibiane, Démétrie et Dafrose. Elles avaient été découvertes dans le lieu qu'on a quelquefois appelé cimetière de Sainte-Bibiane.

La seule affaire qu'ait un chrétien dans le monde, et qui puisse le rendre parfaitement heureux, c'est de chercher Dieu, de soupirer après la possession de sa grâce et de son amour, et de se soumettre en tout à sa sainte volonté. Avec cette disposition, le chrétien s'élève au-dessus de toutes les choses créées, et s'unit à l'objet éternel et immuable de sa félicité. Il reçoit avec reconnaissance les biens de ce monde, et il les quitte sans regret, lorsque Dieu en exige le sacrifice. La crainte même de les perdre le touche moins que la crainte d'y attacher son cœur. Pour se préserver de cette attache qui n'accompagne que trop souvent l'abondance, il se fait une pieuse habitude de prier, de méditer la loi du Seigneur, et de pratiquer les autres bonnes œuvres que prescrit l'Evangile. Mais le détachement du monde, quelque sincère qu'il soit, ne peut se conserver sans les plus grandes précautions; il faut l'entretenir et le perfectionner par la disposition actuelle de sacrifier tout ce que nous possédons, dans le cas où Dieu le demanderait; et cette disposition doit être accompagnée de vifs sentimens de foi et de charité. Elle sera récompensée dans cette vie de consolations et de grâces abondan

et d'un poids immense de gloire dans le siècle à venir.

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S. EUSÈBE, PRÊTRE; S. MARCEL, diacre;

S. HYPPOLYTE, ET LEURS COMPAGNONS, MARTYRS, A ROME.

L'AN 256.

HIPPOLYTE était un chrétien de Rome, qui vivait retiré dans une grotte auprès de cette ville. Ses lumières l'avaient rendu célèbre. Ses instructions engageaient plusieurs païens à embrasser la foi. Il les présentait ensuite au Pape saint Etienne, qui les baptisait. L'Empereur Valérien en fut instruit. Saint Etienne l'ayant appris d'Hyppolyte lui-même, vit bien qu'il fallait se préparer à la persécution, et que le prince n'était plus aussi favorablement disposé pour le christianisme, qu'il l'avait été au commencement de son règne. Il exhorta les fidèles à s'armer de courage, pour soutenir les épreuves auxquelles ils seraient bientôt exposées; à s'occuper de la conversion de leurs parens et de leurs amis qui étaient encore idolâtres, et à les lui amener pour recevoir le baptême.

Hyppolyte avait une sœur nommée Pauline. Elle avait épousé Adrias, dont elle avait eu un garçon et une fille, Néon et Marie. Quoiqu'Hyppolyte eût élevé et instruit son neveu et sa nièce, ils n'étaient point encore baptisés. Il les retint auprès de lui, afin de faire venir le père et la mère. Ils y vinrent en effet mais la crainte les empêcha de se faire chrétiens. Le prêtre Eusèbe et le diacre Marcel leur parlèrent avec beaucoup de force, sans pouvoir dissiper leurs préjugés. La nuit suivante, Eusèbe baptisa un enfant paralytique, qui fut guéri en recevant le baptême. Ce miracle convertit Adrias et Pauline. Saint Etienne, après s'être assuré de la sincérité de leur conversion, les baptisa avec leurs enfans au nom de la Trinité, et leur administra les sacremens de la Confirmation et de l'Eucharistie. Ils se retirèrent

ensuite dans la solitude de saint Hyppolyte, qui était une sablonnière voisine de Rome. Eusèbe et Marcel s'y tinrent cachés avec eux. Adrias ne sortait que pour aller distribuer son bien aux pauvres.

L'Empereur ayant ordonné d'arrêter tous ces chrétiens, le greffier Maxime se chargea de la commission. Mais il en fut sévèrement puni par la possession du démon. Il eut recours à ceux qu'il avait voulu livrer aux persécuteurs. Les Saints se mirent en prières, et il fut guéri. Il demanda le baptême par reconnaissance, et on le conduisit à saint Etienne, qui l'instruisit et le baptisa. Il resta encore quelques jours auprès du saint Pape.

Valérien apprit de Maxime même sa conversion, et la liberté avec laquelle il l'entendit parler contre les idoles, le transporta de colère. Il le fit jeter du haut du pont dans le Tibre. Eusèbe trouva le corps du martyr, et l'enterra le 20 Janvier dans le cimetière de Caliste. Son tombeau se voyait encore dans les Catacombes du temps de Baronius; mais son corps n'y était plus. On l'honore le 2 Décembre avec les autres saints martyrs dont nous parlons ici.

Adrias, Pauline et leurs enfans furent arrêtés avec Eusebe, Hyppolyte et Marcel. On les renferma tous dans la prison de Mamertin. On les en tira trois jours après pour les effrayer par la vue des tourmens. Ils les méprisèrent et restèrent inébranlables. Pauline expira entre les mains des bourreaux, Eusèbe et Marcel furent décapités le 20 Octobre. Hyppolyte, diacre de l'Église romaine, et différent de notre Saint, enleva leurs corps, ainsi que celui de sainte Pauline, et les enterra dans le lieu qui leur avait servi de retraite à un mille de Rome, sur la voie Appienne.

Adrias et ses enfans furent appliqués à la question avec Hyppolyte. Pendant qu'on tourmentait Néon et Marie, leur père les encourageait à souffrir. On ne les entendait pro

noncer que ces paroles: Jésus-Christ, assistez-nous. Adrias et Hippolyte subirent entre autres supplices, celui des torches ardentes. Néon et Marie furent décapités en présence de leur père. On les enterra le 27 Octobre, auprès de saint Eusèbe et de saint Marcel. Adrias et Hippolyte furent battus avec des fouets garnis de plomb jusqu'à ce qu'ils expirassent. Le diacre Hippolyte les enleva la nuit, et les enterra auprès des autres, le 9 Décembre. On assure que les corps de saint Hippolyte, de saintAdrias, de sa femme et de ses enfans sont présentement à Rome, dans l'église de Sainte-Agathe.

Sainte Martane ou Marthe, et sainte Aurélie, sa fille, que le martyrologe romain joint à nos saints martyrs, étaient parentes de saint Adrias. Elles vinrent de Grèce à Rome, neuf mois après, et apprirent avec joie qu'il avait donné sa vie pour la foi. Elles veillèrent et prièrent nuit et jour à son tombeau pendant treize ans, et y furent enterrées le 10 Décembre.

Voyez Tillemont, qui a donné l'extrait des actes des saints martyrs, IV, p. 29 et suiv. Quoiqu'il ne les juge pas entièrement authentiques, il les croit cependant anciens et estimables à bien des égards.

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JEAN DE RUYSBROECK, ainsi nommé parce qu'il était de Ruysbroeck (1), naquit l'an 1294. Etant, dès son

en

(1) Ce village qu'on appelait anciennement Ruschebroeck et Ruselbroeck, est situé sur la Senne entre Halle et Bruxelles, à une lieue et demie de cette dernière ville. C'était une seigneurie qui appartenait au

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