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faible. Comment, après cela, nous livrer à l'orgueil, et empêcher l'effet des vues des miséricordes que Dieu avait à notre égard? Notre cœur ne peut recevoir l'effusion de la grâce, tant que le poison de l'amour-propre en remplit la capacité. Le prophète demanda des vaisseaux vides, pour les remplir de l'huile miraculeuse; de même nous devons offrir à Dieu des cœurs entièrement vides, lorsque nous le prions de les remplir de sa grâce. La pratique de l'humilité, de la pénitence et des autres vertus, commence l'ouvrage; mais la prière et l'amour perfectionnent le principe qui produit ces vertus. Par là nous arriverons à cette pureté de cœur qui nous donnera du moins quelque ressemblance avec la Sainte-Vierge. Demandons cette grâce par son intercession; demandons en particulier celle de conserver la vertu de pureté. Le pieux Jean d'Avila assure qu'il a vu plusieurs personnes qui ont été délivrées des tentations de la chair, en récitant quelques prières en l'honneur de l'immaculée Conception et de la pureté virginale dans laquelle Marie avait conçu le Fils de Dieu.

L'immaculée Conception de Marie est non-seulement en elle-même un mystère glorieux; c'est encore un mystère qui doit exciter dans le monde une joie universelle. La rédemption du genre humain avait été annoncée dès la chute d'Adam, par des révélations, des types, des figures. Les patriarches et les Saints de l'ancienne loi avaient tressailli de joie, en considérant dans le lointain ce bienfait de la miséricorde divine; mais la Conception de Marie fut, comme nous l'avons déjà observé, l'aurore de ce beau jour (11).

(11) Saint Bernard, dans sa lettre aux chanoines de Lyon, ep. 174, ne les blâma point de leur dévotion à l'immaculée Conception, mais de ce qu'ils en célébraient la fête, de leur autorité privée, et sans avoir consulté le Saint-Siége. On la célébrait en Orient long-temps auparavant

Sa pureté la fit paraître parmi les filles d'Adam comme un

et elle y était fête d'obligation avant la loi que l'Empereur Emmanuël Commène donna à ce sujet, vers l'an 1150, ap. Balsam. in Nomocan. Photii. George, évêque de Nicomédie, sous le règne d'Héraclius, l'appelle une fête d'ancienne date.

Baronius, Benoit XIV, etc. supposent que pour l'Occident, elle fut d'abord instituée en Angleterre par saint Anselme, vers l'an 1150. Mais il ne parait pas que la lettre de saint Anselme; sur laquelle est fondée cette opinion, soit authentique. (Lupus, ad Conc. Mogunt. sub Leone IX, t. III, p. 497.) M. Jos. Assémani prouve, d'après le calendrier gravé à Naples sur le marbre dans le neuvième siècle, qu'on célébrait alors dans cette ville la fête de la Conception, et que l'église de Naples fut la première de l'Occident qui l'adopta, à l'exemple des Orientaux. En 1483, le Pape Sixte IV ordonna qu'elle serait chômée. Voyez Benoît XIV, de Festis B. Mariæ V., c. 15, p. 348. M. Jos. Assémani, in Cal. univ. t. V, à pag. 433 ad pag. 462, et Mazocchius, in vet. marm. Neap. Calendarium.

La fête de la Conception a été appelée la fête aux Normands, parce qu'ils ont été très-zélés à la célébrer. Cette dévotion dut chez eux son origine, à la persuasion où ils étaient qu'elle avait opéré plusieurs miracles. Ils lui attribuaient la délivrance d'un ambassadeur de Guillaume le Conquérant, qui, en revenant du Nord, échappa à un naufrage. En 1070, on ne se contenta pas en Normandie de célébrer la fête dont il s'agit, il s'y établit encore plusieurs associations particulières en l'honneur de la Conception. La plus connue, comme la plus célèbre, fut érigée dans la paroisse de Saint-Jean, à Rouen. Jean de Bayeux, archevêque de cette ville, la confirma. En 1486, il se forma dans la même église une nouvelle société qui s'incorpora à la première. Les confrères concurent le projet d'une espèce d'académie où l'on couronnerait les poètes qui auraient composé les meilleures pièces sur Marie conçue sans péché. Alors plusieurs gens de lettres entrèrent dans la compagnie pour l'aider de leurs lumières, et juger les poésies qui lui seraient présentées. Les assemblées où se faisait le couronnement, se tinrent près de trente ans dans l'église de Saint-Jean; mais elle se trouva trop petite pour contenir tous ceux qui s'y rendaient ce jour-là. On chercha, en 1515, un emplacement plus vaste et plus commode. On choisit le cloître des Carmes, que l'on agrandit pour cet effet. Le nouveau bâtiment prit le nom de Palinod, qu'il porte encore aujourd'hui. Palinod ou chant réitéré, vient du refrain qu'on employait dans les chants royaux et dans les ballades. C'était aussi une des dénominations de la société littéraire qui ve

lis au milieu des épines (12). Dieu lui dit dès le moment de sa conception (13)! Vous êtes toute belle, ma bienaimée, et il n'y a point de tache en vous. Elle est ce jardin fermé, où le serpent n'entra point; cette fontaine scellée, qui n'a jamais été souillée (14). Elle fut le trône et le tabernacle du vrai Salomon, et l'arche du Testament destinée à renfermer, non une manne corruptible, mais l'au

nait de se fixer en ce lieu. Elle prenait encore le titre de Puy, à cause de la tribune où se lisaient les pièces couronnées, et celles qui avaient approché du prix. Cet exemple fut suivi par l'université de Caen, qui eut aussi un Puy des Palinods, formé en tout sur le modèle de celui de Rouen. Ces deux académies furent long-temps les seules qu'il y eut en Normandie, et même dans le royaume, si l'on en excepte celle des Jeux Floraux à Toulouse. Ces deux établissemens ont toujours continué depuis leurs exercices, sous la protection des personnes les plus qualifiées; et c'est en concourant pour les prix qu'ils distribuent, que plusieurs de nos meilleurs écrivains ont commencé à développer leurs talens pour la poésie. Le Puy de Caen a suivi assez constamment ses anciens usages; mais celui de Rouen a cru devoir se prêter aux circonstances et aux révolutions arrivées dans la république des lettres. Il a supprimé les genres surannés, comme les rondeaux, les sonnets, etc., et y a substitué les odes, les poèmes héroïques, etc. Ce changement, adopté en partie par le Palinod de Caen, a ranimé les talens ; et les recueils de ces deux académies offrent des morceaux plus piquans et moins monotones, tant pour la forme que pour le fond. L'une et l'autre cependant n'ont point encore d'histoire particulière; elles se sont contentées de mettre à la tête de chaque recueil une préface historique sur leur fondation et leurs progrès. On a commencé celle du Puy à Rouen, et ce travail a été confié à un de ses derniers secrétaires, M. Guyot, chanoine régulier de Saint-Victor à Paris. Quant aux recueils, ils s'imprimaient autrefois tous les ans : ils renferment aujourd'hui plusieurs années. Le dernier et le plus considérable du Palinod de Rouen, a été imprimé à Paris, chez Berton, 1776, in-8°. Nous devons les détails contenus dans cette note à M. Guyot, dont nous avons parlé ci-dessus.

(12) Cant. II, 2.

(13) Cant. IV, 7.

(14) Cant. IV, 12.

T. XVIII.

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teur de la vie incorruptible de nos âmes. Faisons donc éclater notre joie en chantant avec l'Eglise : « C'est la Conception de la glorieuse Vierge Marie, issue du sang d'Abraham, de la tribu de Juda, de l'illustre maison » de David, dont la vie, par son éclat, illustre toutes les

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S. ROMARIC, ABBÉ DE REMIREMONT.

L'AN 653.

S. ROMARIC, appelé encore Remiré et Rombert, était un prince du sang royal. Il fut élevé à la cour, et y parvint aux premières places; mais il sut pratiquer les vertus chrétiennes au sein des grandeurs. Il se lia d'une étroite amitié avec saint Arnould, qui fut depuis évêque de Metz. Son attachement à Théodebert, son souverain, lui suscita des persécutions et le fit exiler. On le rappela depuis, et on lui rendit ses biens dont on l'avait dépouillé. Il quitta la cour sous Clotaire II, et résolut de n'avoir plus de commerce avec le monde. Il vendit ses biens et en donna une partie aux pauvres; le reste fut employé à fonder un monastère double pour des hommes et pour des filles. Romaric choisit pour emplacement son château d'Abend, situé sur le mont des Vosges, en Lorraine, au diocèse de Toul, aujourd'hui de Saint-Diez. Ce monastère, connu sous le nom de Remiremont (1), se soumit à la règle de saint

(1) Ce monastère fut bâti sur une montagne qui a été appelée du nom du Saint, Romarieberg et Remiremont. On l'appelle aussi Rumelsberg, Romberg ou Saint-Mont. La règle de saint Colomban s'y observa longtemps avec ferveur. L'abbaye fut détruite dans le dixième siècle par les

Colomban, et eut pour premier abbé saint Amat, ou Amet, moine de Luxeul. Le saint fondateur voulut y vivre en simple religieux. Mais la mort ayant enlevé saint Amat, on l'obligea d'en prendre le gouvernement, vers l'an 627. Il fut abbé près de vingt-six ans, et se rendit recommandable par son humilité, sa douceur et sa charité. Son zèle pour les austérités de la pénitence animait tous ses religieux à pratiquer avec ferveur les observances prescrites par la règle. On met sa bienheureuse mort en 653. Il est nommé dans le martyrologe gallican et dans le romain.

Voyez sa vie, écrite par un de ses disciples; Bulteau, Histoire de l'ordre de saint Benoît; Pinius, un des continuateurs de Bollandus, in vitá S. Amati, t. IV, Sept. p. 95, et Mabillon, sec. 2, Ben.

Hongrois ou nouveaux Huns. Elle fut rebâtie peu de temps après, non à la même place, mais au bas de la montagne, dans une plaine au-delà de la Moselle. Nous lisons dans les écrivains de l'ordre de saint Benoît, que leur règle fut établie à Remiremont sous le règne de Louis-le-Débonnaire; mais les religieuses du monastère ont toujours prétendu qué la règle et la manière de vivre qu'elles suivaient, avaient pour auteur le concile tenu à Aix-la-Chapelle en 816. On a substitué aux religieuses un chapitre noble de chanoinesses, qui recevaient une rétribution au chœur comme des chanoines. Elles faisaient des vœux simples pour le temps qu'elles restaient à Remiremont; mais elles pouvaient changer d'état et même se marier. Il n'y a que l'abbesse qui faisait les vœux solennels de religion. Elle jouissait d'un revenu assez considérable.

Sur le Saint-Mont était un prieuré bâti à l'endroit où furent enterrés saint Romaric et saint Amat. Les chanoines réguliers de saint Augustin le cédèrent à la congrégation de Saint-Vanne en 1623. (Voyez D. Beaunier, p. 1054, et le Gallia Christ. pour le diocèse de Toul. )

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