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niait à son tour le recès royal, qui renvoyait la diète provinciale aux résolutions de la diète germanique du 20 septembre 1819 et du 16 août 1824, ainsi qu'à l'édit du 18 octobre 1819 et à l'ordre du cabinet du 28 septembre 1824.

Le recès rejetait la demande de la diète relative à la publicité des délibérations, ainsi que celle d'un changement dans le mode d'élection. Un autre vœu relatif à l'extension du droit de pétition ne fut pas mieux accueilli.

Ces résistances royales contre ce que Sa Majesté regardait comme des empiétements sur son pouvoir ne devaient pas, au reste, faire craindre qu'elle s'arrêtât dans cette voie de concessions prudentes, mais libérales, dans laquelle elle est entrée depuis longtemps, et la promesse d'une constitution si ardemment désirée par la Prusse fut renouvelée de manière à faire penser que le jour n'était pas loin où le pays puiserait une force et une vie nouvelles dans l'exercice des libertés constitutionnelles.

La Prusse préludait aux réformes politiques par des réformes administratives et financières.

Ainsi, un ordre royal créait une nouvelle banque à Berlin; fondée avec un capital de 10 millions et sur des bases qui assuraient aux particuliers toutes les garanties nécessaires, cette institution était appelée à consolider le crédit prussien, à étendre les relations financières, industrielles et commerciales du pays, et à augmenter la circulation de la richesse nationale, en même temps que le bien-être de toutes les classes.

Une autre mesure dont le gouvernement s'occupait, c'était l'organisation de la presse gouvernementale. Par là, on opposerait à la presse libérale un autre critérium que celui de la censure, et l'opinion publique pourrait trouver dans cet instrument nouveau un guide sûr, en même temps que le gouvernement y trouverait un appui solide.

Au mois de juillet, fut publiée une nouvelle loi relative au mode de procédure à la cour de justice et au tribunal criminel de Berlin. C'était là le commencement d'une réforme générale ju

diciaire pour toute la monarchie prussienne. Cette loi portait création de procureurs généraux nommés par le roi sur la présentation du ministre de la justice. La procédure serait orale et publique, à moins que l'accusé et la cour n'exigeassent, dans l'intérêt de la morale, l'éloignement de l'assistance. Aucune enquête ne pourrait être commencée qu'à la demande des procureurs généraux. Tout accusé aurait le droit de se choisir un défenseur. Dans les accusations contre fonctionnaires, personne n'aurait le droit d'intervenir que sur la demande de l'autorité dont dépendrait ce fonctionnaire.

Des modifications importantes furent arrêtées pour le tarif du zollverein dans une conférence générale des délégués de l'union douanière. Ces modifications sortiraient leur effet au 1" janvier 1847. Voici en quoi elles consistaient :

Le droit de sortie sur le coton brut était réduit de 15 silbergr. à 10 silbergr. par centner; cette réduction était modifiée par cette considération que le droit de sortie sur le coton en laine ne peut être qu'un droit de transit et ne saurait, par conséquent, être plus élevé que celui-ci. Le droit d'entrée sur le fil de coton pur ou mélangé de laine ou de lin, non blanchi, à un ou deux brins, et sur les ouates, était porté de 2 th. à 3 th.

Le droit d'entrée sur les bois de teinture en blocs était aboli et remplacé par un droit de 10 silbergr. Cette mesure fut adoptée dans l'intérêt des manufactures de coton qui souffriraient de l'aggravation du droit sur les fils étrangers.

Les mesures suivantes furent prises en ce qui concernait les fils et toiles de lin:

Les fils de lin à la mécanique payeraient 2 th.; les fils à la main, 5 gros; les fils blanchis, teints, etc., 3 th.; les fils tors, 4 th.; les toiles grises d'emballage et les toiles à voiles, 20 gros; les toiles brutes sans apprêt, 4 th.; les toiles blanches, teintes, imprimées ou autrement apprêtées, et celles faites de fil blanchi, linge de table, de lit et essuie-mains bruts ou blanchis ou mis en œuvre, sarreaux de toile, linge de corps neuf, 20 th.; rubans, batiste, galons, franges, gaze, dentelles tissées, cordons, bonneterie,

tissus de fils métalliques et de lin, 30 th.; dentelles de fils, 60 th. Sur la ligne frontière d'Oberwiesenthal, en Saxe, jusqu'à Schusterinsel, dans le grand-duché de Bade, les bœufs maigres payeraient à l'entrée 1 3/4 th.; les bestiaux pour l'élève et les vaches, 1 th.; les bestiaux de labour, 2 th.

L'aggravation des droits sur les fils de laine et de laine et coton ne fut pas admise.

La disposition la plus grave sur laquelle les délégués tombérent d'accord était celle qui concernait l'augmentation des droits sur les fils de lin et de coton et sur les tissus de lin. La majorité des membres de la conférence se refusa à entrer dans la voie du drawback, des primes d'exportation sur la filature, etc. Du moment où ce système, dont l'introduction était réclamée par quelques gouvernements, se trouvait écarté, l'aggravation des droits d'entrée ne pouvait être considérable. S'il en eût été autrement, l'industrie du tissage n'eût pu se maintenir sans faveur spéciale.

Un autre fait important, c'est que la surtaxe n'atteignait que les fils à la mécanique, tandis que les droits sur les fils à la main restaient fixés, comme précédemment, à 5 silberg. Il n'y avait pas lieu d'augmenter les droits sur cette dernière espèce de fils, par le motif que ni le filage à la main ni le filage à la mécanique indigènes n'auraient à souffrir de l'introduction des fils à la main étrangers, et que les plaintes qui s'étaient fait entendre s'adressaient uniquement à la concur rence des fils étrangers à la mécanique.

Cette aggravation de tarifs votée par le zollverein était surtout dirigée contre l'Angleterre. Il devenait évident que le traité de commerce conclu en 1841 entre le cabinet de Londres et celui de Berlin ne serait pas renouvelé. La Bavière, Bade, le Wurtemberg, étaient disposés à suivre la Prusse dans cette voie d'exclusion des marchandises anglaises. Il y avait dans ces tentatives hardies toute une émancipation de l'industrie allemande, et peut-être, dans un avenir peu éloigné, cette politique intelligente ouvrirait-elle de nouveaux débouchés à l'u

nion douanière, en forçant l'accession des villes hanséatiques. Le grand-duché de Posen, Posnanie, qui, sous la domination bienveillante des rois de Prusse, avait pu conserver et entretenir l'ancien esprit de la Pologne, fut, le 14 février, le théâtre d'une conspiration qui éclata à Posen. Ce mouvement, comprimé à sa naissance, se rattachait à une tentative générale d'insurrection qui, partie de l'étranger, devait soulever toutes les populations d'origine polonaise réparties dans le royaume prussien et dans les empires d'Autriche et de Russie. Cracovie, foyer et tombeau tout à la fois de cette révolte avortée, fut, on le verra plus loin, incorporée à l'Autriche. La part que prit la Russie à ce grand événement qui devait ébranler un instant l'Europe sera expliquée ailleurs (voyez Pologne, Cracovie), et les incidents particuliers au grand-duché de Posen, se reliant nécessairement à l'ensemble de l'affaire de Cracovie, trouveront plus loin leur place.

Comment se faisait-il que, dans la Prusse, l'insurrection polonaise n'eût pas eu sur l'esprit des masses la même influence que dans l'Autriche? Pourquoi les massacres de la Gallicie n'avaient-ils pas eu leur pendant dans le grand-duché de Posen? C'est qu'en Prusse l'émancipation des classes inférieures a fait depuis vingt ans des progrès incontestables, progrès de moralité et d'intelligence, progrès de richesse et de liberté. Attachés au sol par la propriété (1), délivrés des corvées qui excitaient

(1) Les chiffres suivants prouvent combien, en Prusse, la constitution féodale de la propriété s'est transformée depuis vingt ans. Nous les extrayons d'une lettre de Berlin publiée par le Portefeuille, revue diplomatique, fondée en 1846 et rédigée dans un esprit politique des plus sages, avec une conscience et une érudition tout à fait remarquables. Nous sommes et serons encore redevable à cette publication distinguée de plus d'un emprunt de ce genre.

C'est à peine s'il y a vingt majorats dans tout le royaume, et encore ils existent plutôt comme un souvenir qui doit lier le passé à l'avenir, que comme un droit. Le principe de la divisibilité du sol n'est pourtant pas arrivé encore, en Prusse, jusqu'au morcellement le nombre des propriétés, tout en augmentant, n'a pas dépassé le progrès de la population et par conséquent n'a pas produit de prolétariat. Combiné avec la trans

contre leurs maîtres la haine des serfs autrichiens, les paysans prussiens étaient devenus possesseurs de la terre, et travailleurs indépendants.

Il y avait dans ce contraste entre les deux pays un hommage éclatant rendu aux principes de sage liberté que la monarchie prussieune représente en Allemagne.

BAVIÈRE.

La Bavière continue à garder, dans la question des tarifs, une attitude hostile au zollverein. Pays agricole, elle ne s'intéresse qu'à l'industrie linière, pour laquelle elle réclame les bienfaits du système protecteur, tandis que les États du Nord, et à leur tête la Prusse, veulent mettre à l'abri de la concurrence étrangère les fils, les machines, les draps et autres produits manufacturés. Lorsqu'en 1844 la Prusse insista sur l'augmentation des droits établis sur les fers, la Bavière protesta énergiquement et renvoya son vote à deux ans. Le 1er janvier 1846, elle différa son vote d'une année encore. Les chambres, réunies à Munich, se prononcèrent hautement, à cette occasion, contre le cabinet de Berlin. Le rapport fait sur cette question par une commission de la seconde chambre accusa la Prusse de se laisser

formation du sol, l'affranchissement des paysans dans les provinces où le servage existait a produit d'excellents résultats économiques sans troubler en aucune façon l'ordre politique et social; c'est ainsi que, depuis 1825 jusqu'en 1845, il s'est créé dans le grand-duché de Posen 1733 propriétés de paysans, 34 fermes seigneuriales et 5,643 habitations des manœuvres salariés. Dans le même espace de temps, le nombre de petites propriétés en Silésie s'est accru de 4,435 et de 95 fermes. Dans les districts de Stettin et de Costin, on a vu, jusqu'en 1833, plus de 1,105,000 arpents adjugés en toute propriété à 9,748 familles de paysans. En un mot, les comptes jusqu'à l'année 1831, les derniers qui ont été faits, ont prouvé qu'il y avait jusqu'à cette époque, dans tout le royaume, 46,694 propriétés nouvelles, représentant 3,738,681 arpents, et en outre 412 fermes, 17,925 habitations de manœuvres, c'est-àdire 19,526,657 arpents de terres libérés de toute charge, et appartenant en toute propriété à leurs possesseurs nouveaux, pour la plupart paysans et anciens serfs.

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