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Je la vis maffacrer par la main forcenée,
Par la main des brigands à qui tu t'es données
Tes freres, ces Martyrs égorgés à mes yeux,-
T'ouvrent leurs bras fanglans.tendus du haut dës
Cieux :

Ton Dieu que tu trahis, ton Dieu que tu blafphe

mes,

Pour toi, pour tesspéchés eft mort en ces lieux: mêmes,.

En ces lieux od mon bras le fervit tant de fois、,
En ces lieux ou fon fang te parle par ma voixs
Voi ces murs, voice Temple envahi par tes Maitres.
Tout annonce le Dieu qu'ont vengétes ancêtres e
Tourne les yeux, sa tombe est près de ce Palais !!
C'est ici la montagne, où lavant nos forfaits,
Il voulut expirer fous les coups de l'impie ;-
C'est là que de fa combe il rappella fa vie ::
Tu ne faurois marcher dans cet augufte lieu;.
Tu n'y peux faire un pas fans y trouver ton Dieu f
Et tu n'y peux refter fans renier ton pere,.
Ton honneur quite parle, & ton Dieu qui t'éclairee,
Je te vois dans mes bras & pleurer & frémirs=
Sur ton front pâliffant Dieu met lé repentir..
Je vois la Vérité dans ton cœur defcendue::
Je retrouve ma fille après l'avoir perdues.
Et je repreas ma gloire & ma félicité,.
En dérobant mon sang à l'infidélité. .

C'eff auffi par l'image fanglante del

mort d'Agamennon, que Palaméde arme Electre, & fur-tout Orefte, contre le meurtrier de ce Héros..

Je vous raffemble enfin, famille införtunée, A des malheurs fi grands trop long-tems condam née !!

Qu'il n'eft dour de vous voir ou régnoit autres foiss

Ce Père vertueux, ce chef de tant de Rois;
Que fit périr le fort trop jaloux de fa gloiret:
O jour! que tout ici rappellè à ma mémoire,.
Jour cruel qu'ont fuivi tant de joues malheureux1!
Lieux terriblés, témoins d'un particide affreux !!
Retracez-nous fans ceffe un fpectacle fi trifte!:
Otefte: c'est ici que le barbare Egyfthe;
Ge monftre dérefté, fouillé de tant d'horreurs,
Immola votre pere à fès noires fureurs : =
Là, plùs cruelle encor, pleine des Euménider,,
Son Epouse fur lui porta les mains perfides;
C'èft ici que fans force & baigné dans fön lang3 ›
Il fut long-tems traîné le coûteau dans le flancs
Mais c'eft-là que du fórt laffânt lá barbarić,
Il finit dans mes bras fes malheurs & fa vies:
C'est-là que je reçus; impitoyables Dieux !!
Et fes derniers foupirs, & fes derniers adieux-
Amon trifte deftin paifqu'il faut que je cede,,
Adieas-Fuis; me die il fuis, mon-cher Palamedel
Gefle de mimmolèr d'ódieux ennèmis';~

Je suis affez vengé fi tu fauves mon fils:
Va, de ces inhumains fauve nion cher Orefte;
C'eft à lui de venger une mort fi funeste.

Vos amis font tout prêts; il ne tient plus qu'à vous-
Une-indigne terreur ne fufpend plus leurs coups;
Chacun, à votre nom, & s'excite, & s'anime;
On n'attend, pour frapper, que vous & la victime.
Voici un autre exemple où il entre
moins de paffion & plus de raifonne-
ment que dans ceux-ci.

Dans la Tragédie de Bérénice', Paulin, confident fincere de Titus, veut détourner fon Maître du dessein d'époufer cette Reine.

N'en doutez point, Seigneur. Soit raifon ou caprice,
Rome ne l'attend point pour fon Impératrice.
On fait qu'elle eft charmante. Et de fi belles mains
Semblent vous demander l'Empire des humains. *
Elle a même, dit-on, le cœur d'une Romaine;
Elle a mille vertus: maís, Seigneur, elle est Reine.
Rome, par une loi qui ne peut fe changer,
N'admet avec fon fang aucun fang étranger,

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Et ne reconnoît point les fruits illégitimes,
Qui naiffent d'un himen contraire à fes maximes:
D'ailleurs, vous le favez, en banniffant fes Rois,
Rome à ce nom & noble & fi faint autrefois
Attacha pour jamais une haine puiffante;
Et quoiqu'à fes Céfars fidelle, obéiffante,

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Cette haine, Seigneur, refte de fa fierté,
Survit dans tous les cœurs après la liberté.
Jules, qui le premier la foumit à fes armes,
Qui fit-taire les loix dans le bruit des alarmes,
Brûla pour Cléopâtre, & fans fe déclarer,
Seule dans l'Orient la laiffa foupirer.
Antoine qui l'aima jufqu'à l'idolâtrie;
Oublia dans fon fein fa gloire & fa Patrie;
Sans ofer cependant fe nommer fon époux..
Rome l'alla chercher jufques à fes genoux,
Et ne défarma point fa fureur vengereffe,
Qu'elle n'eût accablé l'Amant & la Maîtreffe.
Depuis ce temps, Seigneur, Caligula, Neron,
Monftres dont à regret je cite ici le

nom

Et qui ne confervant que la figure d'homme, Foulerent à leurs pieds toutes les Loix de Rome Ont craint cette loi feule, & n'ont point à nos yeux Allumé le flambeau d'un hymen odieux. Vous m'avez commandé fur-tout d'être fincere a De l'affranchi Pallas nous avons vu le frere, Des fers de Claudius Felix encore ftétri, De deux Reines, Seigneur, devenir le mari; Et s'il faut jufqu'au bout que je vous obéisse, Ces deux Reines étoient du fang de Bérénice. Et vous pourriez, Seigneur, fans bleffer nos regards Faire entrer une Reine au lit de nos Céfars, *Tandis que l'Orient dans le lit de fes Reines Voit paffer un Efclave au fortir de nos chaînes

C'est ce que les Romains pensent de votre amour ; ;
Et je ne réponds pas, avant la fin du jour:
Que le Sénat chargé des vœux de tout l'Empire,.
Ne vous redise ici ce que je viens de dire::
que
Rome avec lui tombant à vos genoux,
Ne vous demande un choix digne d'elle & de vous.

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Admirons l'artqui regne dans cette ex cellente fcene. Paulin y joue le plus beau perfonnage du monde; c'eft un confident également difcret & fincere; c'est uncourtisan honnête & habile; il ne dit pré cifément que ce qu'il faut, & quand il le faut; il fait, en foutenant les intérêts du: Peuple Romain,ménager adroitement la délicateffe de fon Maître ; il ne va point étourdiment dire une vérité dure, lorfqu'on ne la lui demande point; mais il ne la diffimule pas auffi lorfqu'il fe voit forcé de parler. Titus lui demande d'abord ce que penfe le Peuple.

De la Reine & dé moi que dit la voix publique e Parlez, Qu'entendez-vous ? ›

Paulin répond avec une difcrétion & une retenue. infinie ::

l'entends de tous côïtés

Pablier yos vertus; Seigneur, & les beautéss

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