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d'autre fondement que la méchanceté de Perfée, foutenue de quelques apparences équivoques & abfolument fauffes. Démé trius eft arrêté; on le traîne devant le Roi; il eft obligé de fe juftifier; il le fait du mieux que fon trouble peut le lui permettre; il finit par dire tout ce qu'il juge de plus propre à exciter la compaffion de fon pere; il lui représente qu'il n'efpere qu'en fa bonté; que s'il en eft abandonné, il fe trouve expofé fans fecours, fans défense, à la fureur d'un frere violent & jaloux, dont il ne manquera pas d'être l'innocente victime.

Quelle feroit mon efpérance, fi je n'avois mon pere pour Juge? Hélas! je » ne demande point qu'il partage égale>ment fa tendreffe entre mon frere & » moi, mais du moins mon malheur me

donne des droits fur fa pitié; je ne lui » demande que de me conferver pour lui autant que pour moi. Mon frere a la barbarie de vouloir qu'on m'immole à » fà sûreté; mais à quel excès ne fe portera-t-il donc point, lorfqu'il fera un » jour monté für le trône, fi dès-à-pré» fent il rouvé ma mort fi légitime pour » calmer les vains foupçons qu'il ofe concevoir injuftement contre moi

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Dans l'Oraifon funebre de M. de Montaufier, par M. Fléchier.

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<< Que vous dirai-je, Meffieurs, dans » une cérémonie auffi lugubre & auffi » édifiante que celle-ci! Je vous avertirai » que le monde eft une figure trompeule » qui paffe, & que vos richeffes, vos plai » firs, vos honneurs paffent avec lui. Si » la réputation & la vertu pouvoient dif» penfer d'une loi commune, l'illuftre & » vertueufe Julie vivroit encore avec »fon époux : ce peu de terre que nous

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voyons dans cette Chapelle couvre ces » grands noms & ces grands mérites. » Quel tombeau renferma jamais de fi précieufes dépouilles? La mort a re»joint ce qu'elle avoit féparé. L'époux » & l'épouse ne font plus qu'une même » cendre; & tandis que leurs ames teintes » du fang de Jéfus-Chrift repofent dans » le fein de la paix, j'ofe le préfumer » ainfi de la miféricorde infinie, leurs » offemens humiliés dans la pouffiere du » fépulchre, felon le langage de l'Ecri»ture, fe réjouiffent dans l'efpérance de > leur entiere réunion & de leur réfurrection glorieuse ».

M. Boffuet termine l'Oraifon funebre

de la Reine d'Angleterre, par cette confolante Péroraifon.

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» Elle est morte, cette grande Reine, " & par fa mort elle a laissé un regret » éternel, non-feulement à Monfieur & » à Madame, qui, fideles à tous leurs » devoirs, ont eu pour elle des respects » fi foumis, fi finceres, fi perfévérans, mais encore à tous ceux qui ont eu l'honneur de la fervir ou de la connoître. Ne plaignons plus fes difgraces, qui font maintenant sa félicité: fi elle avoit été plus fortunée, son histoire » feroit plus pompeufe, mais fes œuvres feroient moins pleines ; & avec des titres fuperbes, elle auroit peut-être paru vuide devant Dieu. Maintenant qu'elle a préféré la Croix au Trône, & qu'elle a mis fes malheurs au nombre » des plus grandes graces, elle recevra » les confolations qui font promises à » ceux qui pleurent. Puiffe donc, ce Dieu » de miféricorde, accepter ses afflictions » en facrifice agréable! puisse-t-il la pla>>> cer au fein d'Abraham, &, content de » fes maux, épargner déformais à fa fa» mille & au monde de fi terribles le» çons » !

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Antoine, pour perfuader aux Romains

de venger la mort de Céfar, fait apporter, à leurs yeux le corps fanglant de ce Héros. qui vient d'être immolé à l'Idole de la Liberté. Les Romains éperdus frémiffent à ce spectacle; un d'entr'eux, faifi d'horreur & de compaffion, s'écrie:

Dieux! Son fang coule encor!

Antoine fuit cette idée, & acheve de leur mettre les armes à la main par cette pathétique conclufion

:

Il demande vengeance,

Il l'attend de vos foins & de votre vaillance;
Entendez-vous la voix Réveillez-vous, Romains;
Marchez; fuivez-moi tous contre fes affaffins:
Ce font-là les honneurs qu'à Céfar on doit rendre.
Des brandons du bucher qui va le mettre en cendre,
Embrâfons les Palais de ces fiers Conjurés;
Enfonçons dans leur fein nos bras défefpérés.
Venez, dignes amis; venez, vengeurs des crimes,
Au Dieu de la Patrie immoler ces victimes!

Il paroît que les anciens Orateurs étoient affez dans l'ufage de présenter aux yeux de leurs Juges, à la fin de leurs difcours, quelque objet frappant, capa

ble de les intéreffer en leur faveur.

Ulyfle, dans fa Péroraifon, préfente aux Princes Grecs le facré Palladium

(c'étoit une image de Minerve, à laquelle étoit attaché le fort de Troye, & qu'Ulyffe avoit eu l'adreffe d'enlever aux Troyens), en même-temps il leur dit : non, illuftres Grecs, que ce ne foit point à moi que vous accordiez les armes d'Achille; accordez-les à ce témoignage authentique de ma valeur, à ce gage affuré de la deftruction prochaine de Troye.

Il femble que M. Racine, dans fa Comédie des Plaideurs, ait voulu repandre du ridicule fur cet ufage, dont on abusoit par-tout, & dans la Chaire, & au Barreau. L'Intimé qui plaide pour un chien nommé Citron, accufé d'avoir enlevé un chapon dans une cuifine, & de l'avoir mangé en tout ou en partie, présente à Perrin Dandin, fon Juge, de petits chiens éplorés qui viennent lui demander la grace de leur pere.

Venez, famille défolée,

Venez, petits enfans qu'on veut faire orphelins; Venez. faire parler vos foupirs enfantins.

Oui, Monfieur, vous voyez ici notre mifere;

Nous fommes Orphelins, rendez-nous notre Pere, Notre Pere par qui nous fûmes engendrés,

Notre Pere qui nous

DANDIN

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