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verfation, dans les ouvrages legers, ce font des fleurs qui réveillent l'attention, qui foutiennent le plaifir.

Les figures confiftent ou dans les penfées ou dans les paroles: ce n'eft pas qu'il puiffe y avoir des figures entées fur un frivole affemblage de mots fans penTées, ou de pensées fans mots; mais il y a des figures qui confiftent tellement dans les mots, que les moindres changemens, la plus légere omiffion ou tranfpofition renverse & détruit toute la figure. En voici des exemples,

Rompez, rompez tout pacte avec l'impiété.
Jehu, le fier Jehu tremble dans Samarie.

où il eft clair que toute la figure confifte dans la répétition du mot, Rompez d'une part, & du mot Jéhu de l'autre. Retranchez la répétition: il n'y aura plus de figure.

Il n'en eft pas de même des figures de penfées où l'on peut faire mille changemens dans le choix & l'arrangement des paroles,fans anéantir la figure.Par exemple, dans ces paroles de M. Boffuet :

» Glaive du Seigneur, quel coup vous » venez de frapper! toute la terre en eft 22 étonnée.

Voilà une apoftrophe parfaite. Changez tous les termes, retranchez, ajoutez, ôtez une partie, fubftituez-en une autre, la figure fubfiftera toujours.

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SECTION

PREMIERE.

Des Figures de Penfées. COMME il eft naturel de penser avant que de parler (bien des gens font cependant le contraire), nous commencerons par les figures de penfées dans lefquelles nous n'observerons point d'autre ordre que l'ordre alphabétique. Nous ne remarquerons que les principales. Le moyen de les détailler toutes !

De l'Antithefe.

L'ANTITHESE eft une des plus agréables figures. Elle confifte dans un combat de penfées & de paroles oppofées les unes aux autres, qui forme un effet frappant.

Saint Cyprien emploie fort noblement cette figure dans fon fermon fur l'Aumône.

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» Le Fils de Dieu s'eft fait Fils de

l'Homme, afin de nous faire enfans de

» Dieu ; il a été bleffé pour guérir nos plaies, il s'eft fait efclave pour nous » rendre libres; il eft mort enfin >> nous faire vivre.

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M. Fléchier, dans l'Oraison funebre de Madame la Ducheffe d'Aiguillon, dit: » On la vit fouffrir, mais on ne l'entendit pas fe plaindre : elle fit des vœux » pour fon falut, & n'en fit pas pour fa fanté. Prête à vivre pour achever fa » pénitence, prête à mourir pour confom. mer fon facrifice; foupirant après le » repos de la Patrie, fupportant patiem»ment les peines de fon exil; entre la » douleur & la joie, entre la poffeffion & »'efpérance; fe réfervant toute entiere » à fon Créateur, elle attendit tout ce qui pouvoit arriver, & ne fouhaita que ce » que Dieu voudroit faire d'elle.

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M. Mafcaron, Oraifon funebre du Vicomte de Turenne.

> M. de Turenne, vainqueur des enne>> mis de l'Etat, ne caufa jamais à la Fran>>ce une joie fi univerfelle & fi fenfible » que M. de Turenne vaincu par la vé» rité & foumis au joug de la foi,

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Rome profane lui eût dreffé des Sta»tues fous l'Empire des Céfars, & Rome » fainte trouve de quoi l'admirer fous

»les Pontifes de la Religion de Jefus » Christ.

Saint Paul, 1.Epître aux Cor. chap. 4:

» On nous maudit, & nous béniffons; » on nous perfécute, & nous fouffrons; >> on nous dit des injures, & nous répon > dons par nos prieres.

ZAIRE à Nerftan.

Seigneur, nous nous craignons, nous rougiffons tous deux,

Je fouhaite & je crains de rencontrer vos yeux,

ALZIRE à Zamore.

O jour! ô doux momers d'horreur empoisonnés
Cher & fatal objet de deu'eur & de joie,
Ah! Zamore; en quel tems faut-il que je te voiet
XIPHARES Monime.

Quelle marque, grands Dieux ! d'an amour déj plorable!

Combien en un moment heureux & miférable!
De quel comble de gloire & de félicités,
Dans quel abime affreux vous me précipitez

Dans le Poëme de la Religion.

Ver impur de la Terre & Roi de l'Univers, Riche & vuide de biens, libre & chargé de fers; Je ne fuis que menfonge, erreur, incertitude,

Et de la vérité je fais ma feule étude :

Tantôt le Monde entier m'annonce à haute voix Le Maître que je cherche, & déja je le vois. Tantôt le monde entier dans un profond filence; A mes regards errans n'eft plus qu'un vuide im menfe.

Que d'orgueil ! C'est ainsi qu'à moi-même contraire

Monftre de vanité, prodige de mifère,

Je ne fuis à la fois que néant & grandeur.

Dans le Poëme de la Henriade, les fentimens oppofés qui agitent le Roi, au moment fatal où il s'éloigne de Gabrielle d'Eftrées, font fort bien exprimés par cette Antithèse.

Plein de l'aimable objet qu'il fuit & qu'il adore,
En condamnant fes pleurs il en versoit encore;
Entraîné par Mornai, par l'amour attiré,
Il s'éloigne, il revient ; il part défefpéré.

Voici une Antithèse bien foutenue dans le caractere d'un homme bifarre & capricieux.

Il veut, il ne veut pas ; il accorde, il refuse;
Il écoute la haine, il confulte l'amour;

Il promet, il rétracte; il condamne, il excufe;
Le même objet lui plaît & déplaît tour-à-tour.

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