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vel établissement, et prit l'abbaye sous sa pro

tection.

L'abbaye d'Aindre devint bientôt célèbre par la multitude et par la vertu de ceux qui l'habitoient; on en tira diverses colonies pour peupler les maisons que la piété des fidèles bâtissoit de toutes parts. Le Saint suffisoit par sa vigilance au grand nombre de ses occupations. Il quittoit tous les ans son monastère, pour aller passer le carême dans l'île d'Aindrinette, qui en étoit à quelque distance. It en agissoit ainsi pour se mieux disposer à célébrer la fête de Pâques. La vieillesse ne lui fit rien de ses austérités. Tout ce qu'il accorda à ses infirmités, fut de se décharger des soins du gouvernement. Il ordonna donc à ses religieux de procéder à l'élection d'un abbé. Malheureusement le choix tomba sur Adalfroi, qui n'avoit aucune des qualités requises pour cette place. La mort l'ayant enlevé quelque temps après, le Saint établit abbé un de ses disciples nommé Donat, ét l'instruisit auparavant de tous les devoirs d'un bon supérieur. Pour lui, il passa le reste de sa vie dans l'état de simple religieux, et mourut vers l'an 710 ou 715. Il fut enterré dans l'église de Saint-Paul. Quinze où seize ans après, on transporta son corps dans l'église de Saint-Pierre. Il est nommé en ce jour dans le martyrologe romain; mais en Bretagne, on l'honore le 25 Novembre, qui est peut-être le jour de la translation de ses reliques.

Voyez les Bollandistes, sous ce jour; Mabillon, Act. SS. Ben. sect. 3, t. I, p. 385, et Bulteau, l. 4, c. 37, p. 183.

S. LUDGER,

ÉviQue De MuNSTER, APôTRE DE LA SAXE..

Tiré des différentes vies du Saint. La première est d'Altfrid', un de ses successeurs; la seconde, qui a moins d'autorité, est d'un moine de Werden, qui écrivoit environ soixante ans après la mort de saint Ludger. Mabillon les a publiées l'une et l'autre, "Act. Ben. t. IV, p. 289. Surius et Bollandus ont donné une troisième vie de saint Ludger, écrite par les moines de Werden. Il est assez probable qu'elle fut postérieure d'environ vingt ans à la seconde de 'celles dont nous venons de parler. Voyez l'Hist, litter, de la Fr. t. V, p. 660.

L'AN 809.

Saint Ludger, d'une des premières maisons de Frise, naquit vers l'an 743. Son père, pour se conformer à ses désirs, le mit sous la conduite de saint Grégoire, disciple et successeur de saint Boniface dans le gouvernement de l'église d'Utrecht. Saint Grégoire l'ayant reçu dans son monastere, prit un soin particulier de son éducation. Charmé des progrès qu'il faisoit dans les sciences et la vertu, il lui donna la tonsure cléricale. Ludger, qui vouloit se perfectionner dans les cónnoissances propres a former l'esprit et le coeur, passa en Angleterre, avec la permission de saint Grégoire. Il y suivit quatre ans et demi le célèbre Alcuin, qui étoit à la tête de l'école d'Yorck. Avare de son temps, il n'en perdoit pas la plus petite partie; il en partageoit tous les momens entre les exercices de la religion, et l'étude de l'écriture et des Pères. Il retourna dans sa patrie en 773.

Saint Grégoire étant mort en 776, Albéric son successeur éleva Ludger a la dignité, du sacerdoce, et l'employa plusieurs années à prêcher l'évangile dans la Frise. Le Saint s'acquitta de son ministère

avec un grand succès; il convertit une multitude innombrable d'infidèles et de mauvais chrétiens, fonda plusieurs monastères, et bâtit des églises de toutes parts. Le ravage de la Frise par les Saxons l'obligea malheureusement d'interrompre ses travaux apostoliques; il fut même forcé de quitter le pays. Se voyant libre, il fit un voyage à Rome, afin de consulter le pape Adrien II sur le parti qu'il avoit à prendre pour exécuter la volonté de Dieu; il se retira ensuite au Mont-Cassin, où il resta trois ans et demi. Il pratiqua toutes les austérités de cette maison, dont il portoit l'habit, sans y avoir fait toutefois des vœux monastiques.

Cependant Charlemagne vainquit les Saxons, et fit, en 787, la conquête de la Frise. Ludger retourna dans le pays qu'il avoit été forcé d'abandonner, pour y continuer ses missions. Il annonça l'évangile aux Saxons, et en convertit un grand nombre. Il porta aussi la lumière de la foi dans la province de Sudergou, aujourd'hui la Westphalie; il fonda ensuite le monastère de Werden, dans le comté de la Mark (a). L'empereur Charlemagne l'estimoit beaucoup. Il avoit été instruit de son mérite par Alcuin, qui étoit passé d'Angleterre en France.

En 802, Hildebaud, archevêque de Cologne, sacra Ludger, évêque de Mimigardefort, malgré la résistance de ce dernier. La ville de Mimigardefort prit ensuite le nom de Munster, du monastère que le Saint y bâtit pour les chanoines réguliers, destinés à faire l'office divin dans la cathédrale. Le nouvel évêque joignit à son diocèse cinq cantons de Frise, qu'il avoit gagnés à Jésus-Christ. Il fonda

(a) Quelques auteurs ont confondu mal à propos Werden, dont il est ici question, avec Ferden ou Werden, situé au-delà du Weser.

encore dans le duché de Brunswick le monastère de Helmstad, qui fut appelé ensuite LudgerClooster, c'est à-dire, monastère de Ludger.

Le saint évêque, qui, comme nous l'avons observé, étoit fort habile dans la connoissance de l'écriture, ne passoit aucun jour sans en expliquer quelque chose à ses disciples. Il mortifioit son corps par des jeûnes rigoureux et par de longues veilles; il portoit aussi le cilice, mais secrètement, et on ne s'en aperçut que fort peu de temps avant sa mort. S'il lui arrivoit quelquefois de manger de la viande, par condescendance pour le prochain, il se renfermoit dans les bornes de la tempérance la plus exacte. Lorsqu'il étoit obligé de se trouver dans quelque assemblée, il faisoit tomber adroitement la conversation sur des matières spirituelles, et se retiroit le plutôt qu'il lui étoit possible. Il étoit doux et affable envers les pauvres, mais plein de fermeté et de résolution à l'égard des riches enflés de leurs trésors. Les pécheurs impénitens le trouvoient armé d'une rigueur inflexible. Une dame de qualité, coupable d'inceste, en fit l'expérience. En vain elle mit tout en œuvre pour gagner le saint évêque: il ne voulut rien entendre; et comme la coupable ne se corrigeoit. point, illa retrancha de la communion des fidèles. Il ne prenoit sur son patrimoine et sur les revenus de son évêché, que ce qui lui étoit absolument nécessaire pour subsister; le reste étoit employé à faire des aumônes.

La conduite du Saint, toute irréprochable qu'elle étoit, trouva des censeurs. On le décria même auprès de Charlemagne; on le lui représenta comme un homme qui ruinoit son évêché, et qui négligeoit l'embellissement des églises de sa juridiction. Le prince, qui aimoit à voir des églises

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magnifiques, prêta l'oreille aux accusateurs de Ludger, et lui ordonna de se rendre à la cour, Le Saint obéit. Le lendemain de son arrivée, un officier le vint avertir que l'empereur l'attendoit. Ludger, qui disoit son office, répondit qu'il iroit trouver le prince aussitôt qu'il auroit fini. On le vint chercher trois fois de suite, tant on s'ennuyoit de son délai. Ses ennemis ne manquèrent pas de lui en faire un nouveau crime. Lorsqu'il fut arrivé, l'empereur lui demanda avec un peu d'émotion, pourquoi il le faisoit attendre si longtemps. « Je sais tout ce que je dois à votre ma» jesté, répondit Ludger; mais j'ai cru que vous » ne trouveriez pas mauvais que Dieu eût la pré» férence. Quand on est avec lui, il faut oublier » toutes les autres choses. D'ailleurs, en agissant » de la sorte, je me suis conformé aux intentions » de votre majesté, puisqu'après m'avoir choisi » pour évêque, elle m'a commandé de préférer le » service de Dieu à celui des hommes. » Cette réponse fit une telle impression sur l'empereur, qu'il tint Ludger pour justifié des accusations formées contre lui. Il le traita avec distinction, et disgracia tous ceux qui avoient voulu le perdre.

L'amour que saint Ludger avoit pour la prière, la lui faisoit recommander fortement aux autres. Un jour qu'il vaquoit à ce saint exercice avec ses clercs, il reprit sévèrement l'un d'entre eux qui avoit paru seulement à l'extérieur occupé d'autre chose que de Dieu; il lui imposa même une pénitence de quelques jours. Outre le don des miracles, il avoit aussi celui de prophétie. Il prédit les ravages que les Normands devoient faire dans l'empire français, et cela dans un temps où il ne paroissoit pas qu'on eût rien à craindre de ces peuples. Il voulut aller travailler à leur conversion;

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