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Des auteurs nouveaux

Qu'on juge au parterre.
Là, sans affecter

Les dédains critiques,
Je laisse avorter

Les brigues publiques.
Du beau seul épris,
Envie ou mépris

Jamais ne m'enflamme:

Seulement dans l'âme
J'approuve ou je blâme,
Je bâille ou je ris.
Dans nos folles veilles,
Je vais de mes airs
Frapper tes oreilles.
Après nos concerts,
L'ivresse en délire
Pourra succéder.

Sous un double empire,
Je fais accorder

Le thyrse et la lyre :
J'y crois voir Thémire,
Le verre à la main,
Chanter son refrain,
Folâtrer et rire.

Quel sort plus heureux!
Buveur, amoureux,
Sans soin, sans attente,

Je n'ai qu'à saisir

Un riant loisir;

Pour l'heure présente,

Toujours un plaisir,
Pour l'heure suivante,
Toujours un désir.

Coulez, mes journées,
Par un noeud si beau
Toujours enchaînées,
Toujours couronnées
D'un plaisir nouveau.
Qu'à son gré la Parque
Hâte mes instans,
Les compte et les marque
Aux fastes du Temps:
Je l'attends sans crainte ;
Par sa rude atteinte
Je serai vaincu :

Mais j'aurai vécu.

Sans date ni titre,
Dormant à demi,
Ici ton ami

Finit son épître.
En rimant pour toi
Le dernier chapitre,
La table où je boi
Me sert de pupître.
De tes vins divers

Je serai l'arbitre :

Sois-le de mes vers,
Je te les adresse.

S'ils sont sans justesse,

Sans délicatesse,

Sans ordre et sans choix,

En de folles rimes

On lit quelquefois
De sages maximes.

FRAGMENS

DU

POEME DES MOIS;

PAR ROUCHER.

CE Poëme, tour-à-tour loué avec outrance, et critiqué amèrement, offrait, plus que tout autre, les moyens d'être donné par fragmens à nos lecteurs.

Roucher, né à Montpellier le 22 février 1745, mourut à Paris sur l'échafaud révolutionnaire en juillet 1794.

Sans nous occuper des motifs qui le conduisirent à la mort, nous n'avons dû voir en lui qu'un poëte, et ne point faire rejaillir sur son ouvrage ses erreurs politiques, comme semble l'avoir fait un des aristarques du dernier siècle, autrefois son ami.

Reconnaissant, au surplus, trop d'exagération dans la louange, et trop de sévérité dans la critique, nous n'avons pris du poëme des Mois, que les passages avoués par le goût, et cités avantageusement par les littérateurs impartiaux.

L'auteur a quelquefois étendu ses descriptions jusques au-delà des mers, et quelquefois même jusques aux quatre parties du monde. Dans les fragmens que nous avons pris, nous nous sommes renfermés en Europe, et plus particulièrement en France.

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