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Ma triste voix s'exhale en regrets inutiles.

Où sont-ils ces coteaux que j'ai vus si fertiles?
Où sont-ils ces vallons si rians à mes yeux?

Printemps, quand viendras-tu rasséréner les cieux?
Je l'attendrai long-temps... L'Hiver règne ; et la neige,
Suspendue en rochers dans les airs qu'elle assiége,
Oppose aux feux du jour sa grisâtre épaisseur :
De sa chute prochaine un calme précurseur
S'est emparé des airs; ils dorment en silence.
La nuit vient: l'Aquilon d'un vol bruyant s'élance,
Et déchirant la nue où pesait enfermé

Cet océan nouveau goutte à goutte formé ;

La neige, au gré des vents, comme une épaisse laine, Voltige à gros flocons, tombe, couvre la plaine, Déguise la hauteur des chênes, des ormeaux,

Et confond les vallons, les chemins, les hameaux : Les monts ont disparu: leur vaste amphithéâtre S'abaisse; tout a pris un vêtement d'albâtre......

LES

QUATRE PARTIES

DU JOUR;

PAR BERNIS.

Nota. Ce poëme fut adressé à Eléonore Guichard, connue par quelques poésies, et que le Cardinal avait déjà chantée dans sa jolie chanson :

Le connais-tu, ma chère Élénore? etc.

LES QUATRE PARTIES DU JOUR.

JE chante le palais des Heures,

Où trente portes de vermeil

Conduisent aux douze demeures

Qu'éclaire le char du Soleil.

Toujours nouveau, toujours semblable,
Mobile, incertain et constant,

Le Temps, d'une aile infatigable,
Parcourt ce palais éclatant.

Arrête, vieillard indocile;

L'Amour en faveur des amans

Annonce un jour pur et tranquille,
Dont il veut remplir les momens.
Pour embellir cette journée
Les Saisons offrent leurs couleurs;
Flore, de jasmin couronnée,
Prépare une moisson de fleurs.
Beaux jours, naissez; et vous, Délie,

Digne élève d'Anacréon,

Lisez ces vers, que la Folie

Fit pour amuser la Raison.

LE MATIN.

ARIANE ET BACCHUS.

Des nuits l'inégale courrière

ES

S'éloigne et pâlit à nos yeux;

Chaque astre, au bout de sa carrière,
Semble se perdre dans les cieux.
Des bords habités par le Maure
Déjà les Heures de retour
Ouvrent lentement à l'Aurore
Les portes du palais du Jour.
Quelle fraîcheur ! l'air qu'on respire
Est le souffle délicieux

De la Volupté, qui soupire

Au sein du plus jeune des dieux.
Déjà la colombe amoureuse

Vole du chêne sur l'ormeau ;

L'Amour cent fois la rend heureuse

Sans quitter le même rameau.

Triton sur la mer aplanie

Promène sa conque d'azur;
Et la nature rajeunie

Exhale l'ambre le plus pur.

Poëmes descr.

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Au bruit des faunes qui se jouent
Sur le bord tranquille des eaux,
Les chastes naïades dénouent
Leurs cheveux tressés de roseaux.
Dieux! qu'une pudeur ingénue
Donne de lustre à la beauté!
L'embarras de paraître nue
Fait l'attrait de la nudité.
Le flambeau du jour se rallume,
Le bruit renaît dans les hameaux,
Et l'on entend gémir l'enclume
Sous les coups fréquens des marteaux.
Le règne du travail commence :
Monté sur le trône des airs,
Eclaire ton empire immense,
Soleil, annonce l'abondance
Et les plaisirs à l'univers.
Vengeur d'Ariane éplorée,
Vainqueur de l'Inde et des Titans,
De sa douleur immodérée
Calme les transports éclatans;
Qu'elle abandonne le rivage
Où tout lui retrace l'image
D'un amant qu'elle appelle en vain.
Plaisirs cachés sous cet ombrage,
Aimables enfans du Matin,

Ris, Enjoûmens, Jeux, Badinages,
Annoncez votre souverain !

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