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O toi si long-temps redoutée,

Déesse paisible des airs,
O lune, embellis l'univers,
Et de ta lumière argentée
Blanchis la surface des mers;
L'Amour implore ta puissance.
Triste victime de l'absence,
Léandre, aimé sans être heureux,
Frémit de la barrière immense
Que Neptune oppose à ses vœux,
Mais que la fortune trahisse
L'indigne amant qui réfléchit;
Sans connaître le précipice
Léandre y vole et le franchit.
En vain sur les plaines humides
Il touche, en étendant les bras,
Le sein des jeunes néréides,
Et s'égare sur leurs appas:
En vain cent beautés ingénues
S'élèvent au milieu des flots;
Toujours moins homme que héros,
Il fuit les belles éperdues

Qui

, par leur mollesse étendues,
Chantent les hymnes de Paphos.
La jeune Doris, plus pressante
Et plus sensible à ses refus,
Lui tend, d'une main caressante,
Un piége inventé par Vénus.

Poëmes descr.

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Cent fois la naïade échappée

S'attache à son sein embrasé:
S'il plonge, il baise une napée ;
S'il se renverse il est baisé.
Efforts dangereux d'une belle,
L'Amour peut vous rendre impuissans ;
Et le cœur d'un amant fidèle
Echappe au prestige des sens.
Léandre a vaincu la nature:
Un dieu l'éclaire et le conduit
Aux portes d'une tour obscure,
Où la Volupté l'introduit.
Héro sur un tapis sommeille,
Un Songe assis sur ses genoux;
L'instinct de l'Amour la réveille :

O mon cher Léandre! est-ce vous?
Quoi! tant d'écueils... Sa voix expire,
Et le silence le plus doux

Donne le signal du délire.
Ce dieu lève un voile jaloux,
Et de la pudeur qui soupire
Excite et calme le courroux.
Héro du vainqueur qui la presse
Irrite les tendres efforts;

En résistant à son ivresse

Elle en augmente les transports.
Sévère, et même un peu farouche
Quand elle refuse un baiser,

Son âme vole sur sa bouche,
Honteuse de le refuser.

Léandre brûle, Héro désire;

La volupté qui les inspire

Brille tour à tour dans leurs yeux :
Mais quel bonheur et quel martyre,
Et quel tourment délicieux !
Tourment envié par les dieux.
Héro l'éprouve, Héro pâmée
Lève au ciel des yeux languissans:
Un cri de sa bouche enflammée
Prouve qu'à peine elle a quinze ans.
A ce cri les Amours répondent;
La lune jalouse pâlit;

Le jour renaît, l'air s'embellit,
Et tous les plaisirs se confondent.
Qu'ainsi puisse couler toujours
L'été rapide de nos jours!
Rions des préceptes sauvages,
Et de nos censeurs rigoureux;
Nous serons toujours assez sages
Si nous sommes souvent heureux.

Voyez au Vol. des Mélanges (T. XVIII), les quatre Parties du Jour; par Pezai.

La Description poétique du Matin; par Bernis.

Le Soir et le Matin; par Saint-Lambert.

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