Images de page
PDF
ePub

2,000 prisonniers, furent le résultat de ces différentes affaires, qui furent assez meurtrières pour les Français. Le général de brigade Bruslé et l'adjudant général Langlois furent tués, le premier en chargeant à la tête de sa brigade, et Langlois en sautant le premier dans une redoute. La Convention, sur le rapport de ses commissaires à l'armée d'Italie, honora la mémoire de ces deux braves officiers.

Combat de la Briga.- L'armée d'Italie continuait avec succès son mouvement offensif. Après la prise de Saorgio, les Piémontais s'étaient retranchés sur les hauteurs qui dominent l'embranchement des chemins du col de Tende. Cette position pouvait empêcher la communication du centre et de la droite des Français entre eux. Les généraux Masséna et Macquart, qui commandaient ces deux divisions, reçurent l'ordre d'attaquer les Piémontais. Le premier attaqua les retranchements qui défendaient la Briga sur la route principale du col de Tende. Le défaut d'artillerie, dans la colonne française, rendit ces efforts inutiles. Le général Masséna, formant un détachement de grenadiers et chasseurs, essaya de les renouveler; mais, convaincu bientôt de l'inutilité de cette attaque de front, il fait tourner la redoute, par les montagnes, à l'entrée de la nuit. Sa manœuvre, aperçue des Piémontais, les détermina à la retraite.

Pendant ce temps, le général Macquart attaquait les hauteurs en avant du village de Tende, et parvenait à s'en emparer. Les Piémontais, au nombre de plus de 8,000 combattants, furent ainsi obligés de se retirer jusqu'au col de Tende, et s'y fortifièrent pour couvrir cette entrée du Piémont.

[ocr errors]

Après

Combats dans les Alpes, et prise du mont Cénis. la prise du mont Valaisan et du petit Saint-Bernard, il restait encore à l'armée des Alpes à s'emparer du mont Cénis, pour compléter la libre et entière occupation de la Savoie, en enlevant aux Piémontais tous les moyens de déboucher dans ce duché à leur volonté, et en les forçant à cantonner dans les plaines du Piémont. Le poste important de la Tuile, au-dessus du mont Valaisan, fut attaqué le 27 avril, et pris sans beaucoup de résistance. Les troupes qui le défendaient se retirèrent dans la ville d'Aoste, sur la Dora-Baltea en Piémont.

L'intention du Comité de salut public avait été que le gé

néral Alexandre Dumas, commandant l'armée des Alpes, fit l'ouverture de la campagne par l'attaque du mont Cénis, le passage le plus fréquenté pour se rendre de France en Italie. Jusqu'alors la saison n'avait pas permis de commencer cette opération avec succès. Plusieurs tentatives trop précipitées avaient échoué, et le général Sarret avait perdu la vie dans une première entreprise pendant le mois de février; son corps s'était perdu dans les neiges. Le retour du printemps permit au général Dumas d'essayer cette expédition, que la fonte d'une grande partie des neiges rendait plus facile. Il fit attaquer et replier tous les postes occupés par les Piémontais pour défendre l'approche du mont Cénis. Les retranchements élevés sur divers points de cette montagne furent assaillis et emportés avec la plus grande impétuosité. Pour faciliter cette expédition, le général Dumas fit réunir à Briançon un corps de 3,000 hommes, qui, après s'être emparé de Pras, du fort Mirabouc, se porta dans les vallées de Bardonèche et de Césane, prit Oulx, occupa Fenestrelle, et s'avança presque sous le canon d'Exiles.

Tandis que le mont Cénis était enlevé au centre, une autre colonne de l'armée des Alpes, passant par le col d'Argentière, en avant de Barcelonnette, s'emparait du poste des Barricades, envahissait la vallée de la Stura, et mettait presque ainsi l'armée des Alpes en communication avec l'armée d'Italie, dont l'extrême gauche était au-dessus du petit village d'Isola, vers Saint-Dalmatio-Salvatico.

[ocr errors]

Combat de Cairo. La faiblesse du nombre des troupes qui composaient les deux armées des Alpes et d'Italie empêchait les généraux qui les commandaient en chef de former de grandes entreprises, et de poursuivre de ce côté la guerre avec cette activité qu'on remarquait en Espagne et sur les frontières du nord de la France. Depuis le combat du 8 mai, qui avait mis les Français en possession du col de Tende, ils n'avaient guère fait que des marches et des manœuvres. Nous allons succinctement donner la suite des opérations depuis le combat de Briga jusqu'à celui de Cairo, livré entre les Français et les Autrichiens.

Le 11 juin, l'adjudant général Almeyras battit 1,500 Piémontais dans la vallée d'Aoste. Le 17, le général Basdelanne

les repoussa en avant du petit Saint-Bernard. Du côté de la Méditerranée, la garnison de Loano, après avoir mis en fuite 4,000 Piémontais, les chassa de la Piétra, au-dessus de Loano, le 3 juillet. Le général Lebrun s'empara, le 14, du village de Vernente, dans le comté de Tende, au-dessous de Saint-Dalmazzo, sur le seul chemin qui conduise de Tende à Coni, et prit, le lendemain, de vive force, le village de Roccavione, sur la rive gauche du Gesso, aussi sur le chemin de Tende à Coni, mais beaucoup plus près de cette dernière ville.

A cette époque, le corps auxiliaire autrichien du général Wallis occupait une position entre Final et Acqui. Vers le 12 septembre, une partie de ses troupes s'avança sur le territoire de Gênes, et menaça de s'emparer de Savone. Les Français avaient donné, au mois d'avril de cette même année, l'exemple de la violation du territoire des états génois, et les Autrichiens avaient le même intérêt que leurs ennemis à ne pas respecter la neutralité de cette république.

Le général Dumerbion, calculant toutes les suites de cette invasion, ne voulut point donner aux alliés des Piémontais le temps de s'étendre davantage, et surtout de s'emparer de la place de Savone. Il réunit en conséquence toutes les troupes de la droite de l'armée d'Italie, et marcha pour attaquer les Autrichiens. Le général Colloredo occupait Carcare et une partie de la vallée de la Bormida; le général Mercy-Argenteau était à Mondovi; une troisième division, placée en réserve vers Dego, devait appuyer les deux premières. L'armée française attaqua, le 19 septembre, tout le front des Autrichiens, en se bornant néanmoins à inquiéter la division Argenteau, pour agir plus fortement sur celle de Colloredo.

La position de San-Giacomo, qui sépare la vallée de la Bormida du littoral de Finale et Savone, fut d'abord emportée, et bientôt après les Autrichiens évacuèrent les villages de Bormida, Malère, Pallère, Altare et le plateau de Carcare, pour se retirer vers le château de Cossaria, au-dessus de Millesimo. Poursuivis avec chaleur, les Autrichiens marchèrent, dans la nuit du 20 au 21, sur Dego, pour se réunir à la réserve, que commandait personnellement le général Wallis.

Le général Dumerbion atteignit l'ennemi à Cairo, au moment où celui-ci se préparait à continuer sa retraite : il était deux heures de l'après-midi, et, malgré la fatigue de ses troupes, le général français ne balança point à attaquer les Autrichiens dans la position qu'ils avaient prise pour couvrir leur retraite. En moins d'une heure et demie, ces derniers furent culbutés sur tous les points, et forcés de se retirer en désordre, avec une perte de plus de 1,000 hommes en tués, blessés ou prisonniers. L'armée trouva dans Cairo des magasins de vivres et de fourrages. Le général Dumerbion, dans le rapport qu'il fit de cette affaire au Comité de salut public, se loua beaucoup des talents et de la belle conduite du général de division Masséna, et des généraux de brigade Laharpe et Cervoni. Un soldat, nommé Brimont, quoique blessé de deux coups de feu à la cuisse et de deux coups de baïonnette, tua de sa main quatre Autrichiens qui cherchaient à le faire prisonnier. Ce brave fut nommé officier sur le champ de bataille, par les commissaires conventionnels Salicetti et Albitte, présents à cette affaire.

Le général Wallis prit position à Acqui, où les Français ne jugerent pas à propos de le suivre. Il est à présumer que la faiblesse de l'armée française ne permit pas à son général de tirer tout le parti possible de l'avantage qu'il venait de remporter.

Le combat de Cairo fut la dernière des opérations de l'armée d'Italie dans cette campagne. Il ne se passa plus rien, jusqu'à l'année suivante, qui mérite d'être rapporté.

ANNÉE 1795. AN III.

Ouverture de la campagne aux armées des Alpes et d'Italie, combat du col de Monte. Nos lecteurs ont déjà pu remarquer que le gouvernement conventionnel, par suite des troubles civils survenus dans l'Est et le Midi de la France, n'attachait qu'une importance secondaire aux progrès des armées françaises vers ces parties de la frontière de la république, et se bornait à maintenir ses armées sur le territoire que le premier élan des troupes et la propagation des principes révolutionnaires avaient conquis. Si de plus grands efforts avaient été dirigés aux Pyré–

nées, il faut les attribuer à la crainte qu'avaient inspirée les succès momentanés des Espagnols, et à la nécessité de garantir le sol français d'une invasion d'autant plus dangereuse, qu'elle pouvait réveiller l'énergie des partisans de la royauté dans des provinces où ces derniers étaient nombreux, et n'attendaient peut-être qu'une occasion favorable pour se montrer et donner la main aux émigrés qui servaient dans les armées d'Espagne.

Toutefois, ainsi qu'on a pu le voir dans le précédent paragraphe, les mesures prises par le gouvernement français ne furent pas en proportion avec l'activité que mettait le gouvernement espagnol à recruter ses armées et réparer leurs revers. Sans le zèle infatigable des généraux, et sans l'intrépidité des soldats, qui souvent suppléa à leur petit nombre,-il eût été bien difficile au Comité de salut public d'amener le roi d'Espagne à entrer en négociation avec la république, et de conclure avec ce monarque une paix aussi honorable qu'avantageuse.

Dans les Alpes, les opérations de la dernière campagne avaient été bornées, depuis les frontières de la Savoie jusqu'à la rivière de Gênes, à garder ou à enlever des gorges et des postes ce genre de guerre, qui forme de bons soldats, n'exige pas l'emploi de forces considérables; aussi le gouvernement conventionnel se contentait-il d'entretenir ses armées des Alpes et d'Italie dans l'état strictement nécessaire pour garantir ce côté des frontières de l'irruption des troupes austro-sardes. Ce système défensif fut encore adopté pour la campagne de 1795. Mais si les armées des Alpes et d'Italie, réunies alors sous le commandement d'un seul général en chef, n'inspirent point encore cet étonnement dont on est saisi en lisant les exploits des armées qui combattaient au Nord avec tant de bonheur et de gloire, on ne pourra leur refuser les justes éloges auxquels elles ont droit, pour leur patience admirable, leur valeur froide qui se maintint sans l'enthousiasme des brillants succès, au milieu des privations de tout genre, et dans l'abandon, pour ainsi dire, où on les laissait. Elles seront une école austère où continueront de se former, presque en silence, ces généraux que nous verrons briller plus tard avec tout l'éclat d'un météore inattendu; et ces soldats qui franchiront bientôt, les Alpes avec

« PrécédentContinuer »