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des choses veut tout à la fois savant, moral et religieux, une haute magistrature, fortement organisée pour agir dans l'intérêt de l'état qui l'a créée et qui la soutient, impuissante et vaine pour agir dans un sens contraire.

Nous croyons qu'on ne lira pas sans un vif intérêt ce que Napoléon disait à ce sujet dans les premières instructions qu'il avait données à l'illustre grand-maître auquel il venait de confier les destinées naissantes de l'Université.

«S. M. a organisé l'Université en un corps, parce qu'un corps ne meurt jamais, et parce qu'il y a transmission d'organisation et d'esprit. »>

« Des directeurs, des professeurs de lycées sont des magistrats importans; ils marchent le front levé avec les parens dont ils sont les égaux. Ils n'ont point devant eux une contenance de salariés; ils n'assujettissent point leurs principes aux caprices et à la mode; ils ne sont poiut obligés à de puériles et fâcheuses condescendances; ils peuvent faire tout le bien qu'ils sont appelés à produire. »>

«S. M. a voulu réaliser, dans un état de quarante millions d'individus, ce qu'avaient fait Sparte et Athènes, ce que les ordres religieux avaient tenté de nos jours et n'avaient fait qu'imparfaitement, parce qu'ils n'étaient pas un. »

« S. M. veut un corps dont la doctrine soit à l'abri des petites fièvres de la mode; qui marche toujours quand le gouvernement sommeille; dont l'administration et les statuts deviennent tellement nationaux, qu'on ne puisse jamais se déterminer légèrement à y porter la main. »

<< Si ses espérances se réalisent, S. M. veut trouver dans ce corps même une garantie contre les théories pernicieuses et subversives de l'ordre social, dans un sens ou dans un autre. »

« Il y a toujours eu dans les états bien organisés

un corps destiné à régler les principes de la morale et de la politique. Telles furent l'Université de Paris et la Sorbonne; les Universités de Pavie, de Pise et de Padoue; en Allemagne, celles de Goettingue et de Iéna; en Espagne, celle de Salamanque; en Angleterre, celle d'Oxford; chez les Turcs, les corps des Ulemas. Ces corps étant les premiers défenseurs de la morale et des principes de l'Etat, donneront les premiers l'éveil, et seront toujours prêts à résister aux théories dangereuses des esprits qui cherchent à se singulariser, et qui, de période en période, renouvellent ces vaines discussions qui, chez tous les peuples, ont si fréquemment tourmenté l'opinion publique. >>

Nous n'ajouterons rien à de telles paroles descendues de si haut.

Que l'Université de France poursuive avec courage et persévérance sa noble tâche, qu'elle la remplisse tout entière par le double bien fait de ses doctrines et de ses exemples, elle aura fait assez pour sa gloire et pour le bonheur du pays.

Puisse l'ouvrage, que nous publions en ce moment, n'être pas tout-à-fait inutile à l'accomplissement de ce vœu universitaire et français !

Nous aurons du moins contribué à faire mieux connaître une des plus grandes créations des temps modernes ; et mieux connue, sans doute, elle sera mieux jugée, mieux appréciée, cette Université, dont nous n'avons pas craint de dire, il y a seize ans, au milieu des plus violentes contradictions, que, toujours attaquée, elle irait s'affermissant toujours.

Nous en avons donné les raisons; il nous semble que le temps les a singulièrement fortifiées.

Le Code universitaire se divise naturellement en deux parties principales:

L'une qui contient les lois, décrets et ordonnances; en un mot, les actes directs de la puissance publique.

L'autre qui renferme les statuts émanés du conseil même de l'Université.

La première partie a paru seule au commencement de 1828; nous l'avons revue et complétée.

La secoude partie paraît pour la première fois.

Conçue sur le même plan que la première, cette seconde partie est beaucoup plus étendue, et cela devait être. Le législateur pose les principes, ils doivent être précis et peu nombreux. Le pouvoir qui administre déduit les conséquences, les développe et les modifie, comme le demande l'infinie variété des faits et des incidens dont se composent les affaires hu

maines.

Dans l'une et dans l'autre section, nous nous sommes surtout proposé de montrer l'état présent de la législation qui régit le corps enseignant; mais nous avous aussi envisagé l'avenir; et pour mieux le préparer, nous avons quelquefois rappelé le passé, dans lequel se retrouvent de sages leçons et d'utiles exemples.

Une même série de numéros et une table commune des matières par ordre alphabétique faciliteront la recherche des différentes dispositions relatives, soit à T'organisation générale, soit à chaque genre d'écoles.

Toute cette organisation devant bientôt subir l'épreuve d'une discussion solennelle dans le sein des deux chambres, il nous a paru qu'il convenait d'autant mieux de rassembler avec quelque méthode ces divers élémens, qu'on aurait été peu disposé peut-être à les aller chercher dans les onze ou douze volumes où ils ont été successivement déposés depuis un quart de siècle, sans autre ordre que celui de leur date. On ne saurait trop éclairer toutes les parties de cette grande question sociale de l'instruction et de l'éducation publique.

CODE

UNIVERSITAIRE.

PREMIÈRE PARTIE.

LOIS, DÉCRETS ET ORDONNANCES

CONCERNANT L'UNIVERSITÉ.

TITRE PREMIER.

ORGANISATION GÉNÉRALE.

Idée première de l'Université.

1. Il sera créé et organisé une instruction publique, commune à tous les citoyens, gratuite (1) à l'égard des parties d'enseignemens indispensables pour tous les hommes, et dont les établis semens seront distribués graduellement dans un rapport combiné avec la division du royaume.

(Loi des 13 et 14 septembre 1791.) 2. Indépendamment des écoles primaires, il sera établi dans le royaume trois degrés progressifs d'instruction :

Le premier pour les connaissances indispensables aux artistes et ouvriers de tous les genres (2).

Le second pour les connaissances ultérieures nécessaires à ceux qui se destinent aux autres professions de la société (3).

(1) Il est bien reconnu aujourd'hui que l'entière et absolue gratuité de l'enseignement serait une fausse mesure, même pour l'instruction primaire. Il est bon et juste que, à l'égard des enfans pauvres, la commune, le département et l'état se chargent des frais de la première instruction; mais il convient sous tous les rapports que tous ceux qui peuvent payer ces frais, les supportent, jusqu'à concurrence de leurs besoins et de

leurs ressources.

(2) Ainsi avait été posé, il y a plus de 40 ans, un principe d'une grande fécondité, qui se développe plus que jamais dans toute l'étendue de la France. L'Université s'est efforcée depuis long-temps d'encourager et de multiplier ces écoles industrielles qui doivent influer puissamment sur la prospérité du pays. La loi du 28 juin 1833 favorisera beaucoup les établissemens de ce genre, par la propagation des connaissances générales que répandront les écoles primaires, et surtout les écoles primaires supérieures. (3) Les colléges royaux, les colléges communaux, les institutions et les pensions.

Le troisième pour les objets d'instruction dont l'étude difficile n'est pas à la portée de tous les hommes (1).

3. L'instruction sera donnée,

(Décret du 15 septembre 1793.)

1o. Dans des écoles primaires établies par les communes (2). 2o. Dans des écoles secondaires établies par les communes, ou tenues par des maîtres particuliers.

3o. Dans des lycées et des écoles spéciales entretenus aux frais du trésor public.

(Loi du 11 floréal en X, 1er. mai 1802, art. 1er.)

Création de l'Université.

4. Il sera formé sous le nom d'Université royale (3) un corps chargé exclusivement de l'enseignement et de l'éducation publique dans tout le royaume. Les membres du corps enseignant contracteront des obligations civiles, spéciales et temporaires. (Loi du 10 mai 1806, art. 1 et 2.)

5. L'enseignement public dans tout le royaume est confié exclusivement à l'Université.

Aucune école, aucun établissement quelconque d'instruction ne peut être formé hors de l'Université royale, et sans l'autorisation de son chef (4).

Nul ne peut ouvrir d'école, ni enseigner publiquement, sans être membre de l'Université royale et gradué par l'une de ses facultés. Néanmoins, l'instruction dans les séminaires dépend des archevêques et évêques, chacun dans son diocèse; ils en nomment et révoquent les directeurs et professeurs; ils sont seulement tenus de se conformer aux règlemens sur les séminaires par nous approuvés (5).

(Décret du 17 mars 1808, art. 1, 2 et 3.)

(1) Les facultés, et notamment celles de théologie, de droit et de médecine, (2) Ou tenues par des instituteurs privés (loi du 28 juin 1833).

(3) Dans le code universitaire, comme dans les autres codes, on a dû substituer les mots, roi, royaume et royale, aux mots empereur, empire et impériale.

(4) Une loi spéciale vient de fonder parmi nous l'instruction primaire sur des bases larges et solides. Elle a su concilier deux choses qui avaient long-temps paru incompatibles, le droit de la puissance publique et la liberté de l'enseignement. Le premier de ces principes a créé les écoles primaires communales, le second protége les écoles primaires privées. Suivant toute apparence, ces deux principes, qui ont inspiré la loi du 28 juin 1833, présideront aussi à l'organisation générale de l'instruction publique; et, malgré les nouvelles et sérieuses difficultés qui s'y rencontreront, ils fonderont de même l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur d'une manière digne de la France et du 19. siècle.

(5) Une autre exception, en ce qui concerne la nécessité d'un grade, a été consacrée par la loi du 28 juin 1833. Le droit de tenir école et d'enseigner publiquement comme instituteur primaire n'exige point de grade, mais un brevet de capacité. D'un autre côté, le brevet de capacité n'est point suppléé par les grades académiques.

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