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que Dieu eft le Dieu de verité. Si vous en dites par mefgarde, & vous pouuez le corriger fur le champ, par quelque explication ou reparation, corrigez-la; vne excufe veritable a bien plus de grace & de force pour excufer, que le menfonge.

Bien que quelquesfois on puiffe difcretement & prudemment desguiser & couurir la verité par quelque artifice de parole; fi ne faut-il pas prattiquer cela, finon en chofe d'importance, quand la gloire & feruice de Dieu le requierent manifeftement hors de là, les artifices font dangereux; car comme dit la facree parole, le Sainct Efprit n'habite pas en vn efprit feint & double. Il n'y a nulle fi bonne & defirable fineffe que la fimplicité. Les prudences mondaines & artifices charnels appartiennent aux enfans de ce fiecle: mais les enfans de Dieu cheminent fans deftour, & ont le cœur fans replis! qui cheminēt fimplement, dit le Sage, il chemine confidemment; le mefonge, la duplicité, la

fimulation tefmoignent toufiours vn efprit foible & vil.

Sainct Augustin auoit dict au quatriesme liure de fes confeffions, que fon ame & celle de so amy n'eftoyent qu'vne feule ame, & que cefte vie lui eftoit en horreur apres le trefpas de fon amy parce qu'il ne vouloit pas viure à moitié ; & que auffi pour cela mesme, il craignoit à l'aduenture de mourir, afin que fon amy ne mourust du tout. Ces parolles luy femblerent par apres trop artificieuses & affectees, fi que il les reuoque au liure de fes retractations, & les appelle vne ineptie. Voyez vous chere Philothee combie cefte faincte belle ame eft douillette au fentiment de l'affeterie des paroles. Certes c'eft vn grand ornement de la vie Chreftienne que la fidelité, rondeur & fincerité du langage. I'ay dit, ie prendray garde à mes voyes pour ne point pecher en ma langue. Hé Seigneur mettez des gardes à ma bouche, & vne porte qui ferme mes leures, difoit Dauid.

C'eft vn advis du Roy S. Loys, de ne point defdire perfonne, finon qu'il y eust peché, ou grand dommage à confentir : c'eft à fin d'euiter toutes conteftes & difputes. Or quand il importe de contredire à quelqu'vn, & d'opposer fon opinion à celle d'vn autre, il faut vier de grande douceur & dexterité, fans vouloir violenter l'efprit d'autruy car auffi bien ne gaigne-on rie prenant les chofes afprement.

Le parler peu, tant recommandé par les anciens fages ne s'ented pas qu'il faille dire peu de paroles; mais de n'e dire pas beaucoup d'inutiles: car en matiere de parler, on ne regarde pas à la quantité, mais à la qualité ; & me femble qu'il faut fuïr les deux extremitez. Car de faire trop l'entendu & le feuere, refufant de contribuer aux deuis familiers qui fe font és conuerfations, il femble qu'il y ait ou manquement de confiance, ou quelque forte de defdain: de babiller auffi & cajoller toufiours, fans donner ny loitir,

ny commodité aux autres de parler à fouhait, cela tient de l'efuété & du leger.

Saint Louys ne treuuoit pas bon qu'efstant en compagnie l'on parlaft en fecret & en confeil, & particulierement à table, à fin que l'on ne donnaft foupçon que l'on parlaft des autres en mal: Celuy, difoit-il, qui eft à table en bonne compagnie, qui a a dire quelque chofe ioyeufe & plaifante, la doit dire que tout le monde l'entende: fi c'eft chofe d'importance, on la doit taire, fans en parler.

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