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pour l'empêcher de parvenir à la connaissance des troupes.

Le gouvernement révolutionnaire, ressentant la portée du coup terrible dont l'avait frappé le dernier acte du souverain Pontife, essaya d'en atténuer l'effet immédiat en décrétant une mesure qui rappelle les plus mauvais jours de la Révolution française. En effet, les ministres, après avoir ordonné l'organisation d'un bataillon universitaire pour s'en faire une garde prétorienne, institua une commission de salut public.

En même temps, un décret de la commission gouvernementale, assignant le palais Madama au comité de salut public pour le siége de ses opérations, adjoignait au préfet de police MM. Maggiore, Mattia, Montecchi et Cartani.

Ainsi, deux mois ne s'étaient pas encore écoulés depuis le départ du souverain Pontife, que le peuple romain, passant par le crible révolutionnaire, était arrivé au joug de la plus abjecte tyrannie. Malheureux peuple! il était destiné à descendre rapidement, sans transition, tous les degrés de la servitude et de la terreur! Le jour où la révolte armée avait remplacé Pie IX au Quirinal, le despotisme avait pris la place de la liberté.

CHAPITRE XV.

Nomination d'un général de la garde civiuqe. Système d'intimidation. Manoeuvres révolutionnaires pour les élections de l'assemblée constituante. Réunion préparatoire. Adresse de la commission gouvernementale. - Faits divers. - Instructions électorales. - Ouverture des bureaux. Succès négatif. - Notes étranges. douze constituants romains. - Ordonnances et décrets. démagogique. Noble attitude des puissances catholiques. Note du gouvernement Espagnol. Refus de concours de la part du Piémont. Affaires de Toscane.

-

Les

Réunion

Deux jours après la formation d'un comité de salut public, les gardes civiques appelés à nommer un général en chef, élurent à une très-grande majorité, malgré l'opposition des ultra-révolutionnaires, le duc Cesarini. Dans l'état réactif où se trouvaient les choses, ce choix significatif déplut aux clubs, qui s'empressèrent de le combattre, donnant ainsi une nouvelle preuve du respect qu'ils accordaient aux délibérations et aux décisions prétendues libres de la majorité honnête. Plusieurs députations, revêtant le masque d'un intérêt hypocrite, se rendirent chez le général et l'adjurèrent, au nom de sa propre sécurité, de donner volontairement sa démission. Un instant le duc hésita, mais l'argumentation du poi

gnard qui avait brisé la résistance du ministre Rossi, triomphant de la sienne, il accéda aux désirs des clubistes en se démettant, sous le coup de la peur, d'une dignité que la majorité de la garde civique lui avait conférée.

Comme on le voit, les révolutionnaires ne reculaient devant aucun moyen d'oppression. Après les mises hors la loi et la formation d'un comité de salut public, ils songeaient à faire de l'intimidation en détail et de la terreur en grand. Dans le but de contre-balancer l'effet produit au sein des masses par la menace d'excommunication lancée de Gaëte le premier jour de l'année, la commission du gouvernement adressa à tous les employés une circulaire par laquelle ses membres invitaient instamment les hommes qui vivaient de leurs charges à donner en se rendant au scrutin, un exemple de vertu et d'intelligence patriotique. D'un autre côté, le ministre de l'intérieur, qui connaissait le côté faible de la multitude, cherchait à captiver ses votes en organisant la joie publique pour le jour des élections. A cet effet, il ordonnait par une circulaire habile, à toutes les musiques du district, de se rendre au chef-lieu électoral pour harmonier, s'il était possible, la cacophonie des opinions. En même temps il enjoignait aux autorités locales de préparer les démonstrations de joie par tous les moyens qui seraient en leur pouvoir afin de fêter dignement l'acte solennel de l'élection des membres appelés à faire partie de la constituante. Par une circulaire, il ordonnait la convocation de toutes les gardes civiques en armes pour protéger et influencer pacifiquement les votes révolutionnaires. Dans la crainte que les gardes nationales ne se rendissent

à cette invitation, il décidait qu'elles seraient considérées en état de mobilisation et recevraient, en conséquence, une rétribution imposée à leurs communes respectives.

Cependant ces mesures ne leur paraissant pas encore suffisantes, les proconsuls de Rome demandèrent à l'arbitraire des moyens plus sûrs et plus expéditifs. Ils créèrent une commission militaire, pour juger rapidement, tout complot même non consommé, qui aurait pour but de renverser l'ordre établi. Les sentences devaient être sans appel, et exécutées dans les vingt-quatre heures.

Le jour des élections était proche, les meneurs organisèrent une réunion préparatoire au Théâtre d'Apollon; on devait y discuter les noms des postulants à la candidature. Au lieu de donner à cette cérémonie un caractère solennel, ils la rendirent ridicule en faisant participer aux épreuves interrogatoires, la curiosité des dames romaines. Rien de plus curieux que la contexture du petit billet par lequel les commissaires, invitant ces dames, leur envoyaient gratis, la clé des loges qui leur étaient destinées.

Celui que nous avons sous les yeux est ainsi concu : << Madame,

» Le comité électoral, nommé par le peuple, l'ayant convoqué au Théâtre d'Apollon, et lui présentant, ce soir, à six heures et demie précises, le nom des candidats pour l'assemblée générale de l'État, se fait un plaisir de vous envoyer la clef d'une loge au deuxième rang, afin que, s'il vous est agréable d'assister, avec votre respectable famille, à une assemblée politique aussi grave, vous puissiez y arriver librement et sans obstacles. S'il

ne vous plaisait point d'y venir, ayez la bonté de faire remettre la clef de la loge, au palais Boromée, à la salle du comité, ajourd'hui même, avant cinq heures et demie.

» Le comité espère que vous accueillerez avec plaisir la pensée qui a dicté cette lettre et l'acte qui vous défère cette distinction particulière.

>> Palais Boromée, le 15 de.

4849. »

C'est ainsi que ces hommes, jouant avec le sort de leur malheureuse patrie, associaient le plaisir aux préoccupations les plus graves et faisaient, d'une question immense, une soirée de fête! Peu de femmes se rendirent à l'invitation du comité électoral:

De son côté le parti du droit et de l'ordre ne restait pas inactif; la commission gouvernementale nommée par le Saint Père, dans les premiers jours de son arrivée à Gaëte, ne pouvant fonctionner librement à Rome, s'était retirée momentanément au palais pontifical de Castel Gandolfe et protestait, de cette retraite, contre les nouveaux actes du gouvernement usurpateur.

Les triumvirs ne reculant devant aucun moyen pour assurer le succès des prochaines élections, trouvèrent dans les prisons des auxiliaires dignes d'eux ; ils décrétèrent qu'une remise de deux années sur leurs peines serait accordée à tous les détenus qui n'auraient pas été condamnés pour assassinats, faux ou vols à main armée. Alors l'avocat Gabussi, président du comité électoral, assisté des secrétaires, publia une première instruction pour les opérations électorales. Les électeurs furent divisés en six sections, suivant les quartiers qu'ils habitaient; mais dans chaque section les présidents, secré

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