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applaudissements et par les cris de: Vive la république ! En présence des événements qui menaçaient les droits les plus inviolables et l'œuvre des siècles basée sur la foi des peuples et des rois, les puissances de l'Europe catholique ne restaient point inactives. La première entre toutes, la noble et religieuse Espagne, prenant l'initiative, donnait suite à une note adressée au nom de l'Autriche par le prince de Schwartzenberg (1) et manifestait aux gouvernements catholiques son intention formelle de rétablir l'autorité temporelle du Saint Père. Voici la circulaire qu'elle adressa à ce sujet aux cabinets dont elle sollicitait le concours et la coopération :

« Le gouvernement de Sa Majesté est décidé à faire pour le pape tout ce qui sera nécessaire pour remettre le Saint Père dans un état d'indépendance et de dignité qui lui permette de remplir ses fonctions sacrées. Dans ce but, après avoir appris la fuite du pape, le gouvernement espagnol s'est adressé au gouvernement français, qui s'est déclaré prêt à soutenir la liberté du Saint Père.

» Ces négociations toutefois peuvent être regardées comme insuffisantes quand on jette un coup d'œil sur la tournure qu'ont prise les affaires de Rome. Il ne s'agit plus de protéger la liberté du pape, mais de rétablir son autorité d'une manière stable et ferme et de l'assurer contre toute violence. Vous savez que les puissances catholiques ont toujours eu à cœur de garantir la souveraineté du pape et lui assurer une position indépendante.

(1) N° 8 Voyez les documents historiques.

>> Cette position est d'une telle importance pour les États chrétiens, qu'elle ne peut, en aucune manière, être exposée à l'arbitre d'une si petite partie du monde catholique, telle que les États romains.

» L'Espagne croit que les puissances catholiques ne sauraient abandonner la liberté du pape au bon plaisir de la ville de Rome, et permettre qu'en même temps que toutes les nations catholiques s'empressent de donner au pape des preuves de leur profond respect, une seule ville d'Italie ose outrager sa dignité et mettre le pape dans un état de dépendance dont elle pourrait un jour abuser comme pouvoir religieux.

>> Ces considérations engagent le gouvernement de Sa Majesté à inviter les autres puissances catholiques à s'entendre sur les moyens à prendre pour éviter des maux qui surviendraient si les choses devaient rester dans l'état actuel. Dans ce but, Sa Majesté a ordonné à son gouvernement de s'adresser aux gouvernements de France, d'Autriche, de Bavière, de Sardaigne, de Toscane et de Naples, afin de les inviter à nommer des plénipotentiaires, et à désigner le lieu où ils doivent se réunir.

» Pour éviter des retards, Sa Majesté à désigné Madrid, ou toute autre ville espagnole située sur les bords de la Méditerranée, tant à cause du calme dont jouit la presqu'ile, que par la situation d'une ville maritime. Comme il ne s'agit que d'une question catholique, l'Espagne peut être désignée comme très-propre pour ces négociations.

» Signé : PEDRO de Pidal. »

Toutes les puissances catholiques accueillirent avec

empressement cette note qui répondait à leur pensée propre. Les cabinets de Turin et de Florence seuls soulevèrent quelques difficultés. Le premier, engagé plus avant dans la voie révolutionnaire, basa ses répu gnances à faire partie des conférences, sur ce que l'Italie ne consentirait jamais à traiter avec l'Autriche une question qui, selon lui, devait être considérée au point de vue politique aussi bien qu'au point de vue religieux: L'abbé Gioberti, qui présidait alors le conseil des ministres, répondit par la note suivante à celle de l'Espagne :

>> J'ai lu avec attention les dépêches très-importantes, en date du 24 décembre dernier, que le cabinet de Madrid vous avait chargé de communiquer au gouvernement de Sardaigne, pour lui proposer un moyen de faire cesser la situation déplorable où se trouve le souverain Pontife.

>> J'ai remarqué qu'une semblable dépêche a été également adressée aux cabinets de France, d'Autriche, de Portugal, de Bavière, de Toscane et de Naples. Le gouvernement espagnol, par l'effet des sentiments religieux qui l'animent vis-à-vis du chef de la chrétienté, sentiments dignes d'une nation éminemment catholique, aurait le projet d'ouvrir entre les représentants des puissances catholiques sus-énoncées, un congrès, en Espagne ou ailleurs, pour traiter des moyens de nature à produire, dans le plus bref délai possible, une réconciliation entre le pape et ses sujets, afin que le Saint Père puisse rentrer dans le libre exercice de tous ses droits spirituels et jouir de l'indépendance qui lui est nécessaire pour le gouvernement de l'Église.

» Je me suis fait un devoir de soumettre cet important document au roi, mon auguste souverain, et de le porter ensuite à la connaissance du ministère. Sa Majesté avait à peine appris la nouvelle des malheureux évènements de Rome, qu'elle s'est empressée d'exprimer au pape toute la part qu'elle prenait à cette grande affliction. Le roi n'a pas cessé, par tous les moyens, de lui témoigner son plus vif intérêt pour atteindre précisément le but que le gouvernement de Madrid s'est proposé. Le roi et son gouvernement, animés pour Sa Sainteté du même esprit de vénération profonde qui guide le cabinet de Madrid, s'estimeraient, en conséquence, infiniment heureux de pourvoir s'associer aux conférences proposées par l'Espagne, et de se voir en mesure ainsi de coopérer, par tous les moyens à leur disposition, au grand résultat que le roi en attend, non moins ardemment que tout autre prince ou gouvernement catholique. Le cabinet espagnol assure que dans ce congrès on aurait à s'occuper uniquement de la question religieuse, en faisant abstraction de la politique intérieure des États pontificaux.

» Mais le ministère de Sardaigne, appréciant la pensée vraiment religieuse du cabinet de Madrid, doit néanmoins faire observer qu'il ne lui paraît pas probable que dans une réunion des plénipotentiaires de toutes les puissances énoncées, il puisse être établi une juste séparation entre les affaires religieuses et les affaires politiques, si l'on considère que c'est pour des causes politiques que le pape a abandonné Rome, et qu'en conséquence, sa rentrée parmi ses sujets se trouve entravée par des difficultés civiles qu'il faudra

nécessairement avant tout aplanir. La question temporelle se trouve étroitement liée à la question spirituelle, et l'une est mêlée à l'autre de telle sorte que dans la discussion on ne pourraient pas discuter les droits spirituels sans toucher aux droits temporels du pape. En conséquence, il У aurait nécessité de traiter à la fois les deux questions dans le même congrès, ce qui serait en opposition directe avec les vues des puissances italiennes.

» De plus, entre les gouvernements appelés à envoyer des plénipotentiaires aux conférences, on voit le gouvernement autrichien. Il n'est pas douteux que, dans ce moment, les États de la Péninsule italienne n'admettraient pas l'intervention de l'Autriche dans une semblable union, même alors que les négociations pourraient être restreintes à la partie spirituelle, complétement isolée de la partie temporelle. Il faut ajouter à ces considérations que dans la situation générale des esprits en Italie et au sein des États pontificaux, l'intervention des puissances étrangères sus-énoncées indisposerait à l'excès les sujets du pape et les aliénerait de telle sorte, qu'en supposant même la réconciliation obtenue entre eux par ce moyen, cette réconciliation aurait le caractère de la violence étrangère; elle ne manquerait pas alors d'être peu stable et de courte durée ; elle manquerait son but et elle tournerait au préjudice de la religion. Le gouvernement du roi, appréciant néanmoins les idées qui ont conseillé à la haute piété de Sa Majesté la reine d'Espagne et à son digne gouvernement le projet à lui communiqué, serait d'avis de faire de bon aecord tous ses efforts pour atteindre, d'une autre ma

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