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Peine des galeres,

De la con

biens.

23. On ne fait pas bien l'origine de la punition aux galeres, foit en France, foit dans les autres royaumes; mais ce qu'il y a de certain, c'est que cette peine n'étoit point ufitée chez les Romains; il n'y en a pas moindre veftige ni la moindre mention dans tout le droit civil.

le

II y a une déclaration du Roi du 4 feptembre 1677, par laquelle il y a peine de mort contre ceux qui étant condamnés aux galeres, mutilent leurs membres afin de n'être plus en état de fervir fur les galeres.

C'eft un crime capital, & dont les coupables méritent le dernier fupplice, de forcer la chaîne des galeres, & fecourir les galériens attachés à la chaîne. Il y a un arrêt du parlement en la chambre de la tournelle, du 3 juin 1681, qui a condamné à la roue trois particuliers accufés & con

vaincus de ce fait.

Les capitaines de galeres ne peuvent retenir un galérien plus de tems qu'il n'est porté par fon jugement de condamnation, à peine de privation de leur état; parce que ce feroit contrevenir aux ordres de la justice & du Roi,

24. La confifcation de biens dans les coutumes qui portent que qui fifcation de confifque le corps, confifque le bien, eft une fuite néceffaire de la confifcation de corps : cette confifcation de biens appartient au Roi ou au feigneur haut-jufticier du lieu où les biens font fitués; c'est un droit de juftice, & non pas féodal, debetur ratione jurifdictionis, & non ratione feudi. Par arrêt du parlement de Paris du premier feptembre 1704, en la grand'chambre, fur les conclufions de M. Joly de Fleury, avocat général, M. le premier président de Harlay prononçant, il a été jugé qu'un feigneus haut-jufticier, confifcataire des biens d'un condamné à une peine emportant confifcation de biens, n'étoit point recevable à interjetter appel de la fentence de condamnation, en ce qu'elle avoit adjugé 2000 liv. de dommages & intérêts à la partie civile; parce que le feigneur confif. cataire doit prendre les biens en l'état qu'ils fe trouvent lors du jugement du procès, c'est à dire, avec les charges pécuniaires de la condamnation. Journal des audiences.

Mort civile, ce que c'eft, & quand eft

encourue.

Peine de

La mort civile & la mort naturelle emportent la confifcation de biens. La mort civile eft celle par laquelle on perd la capacité de tefter, de fuccéder, d'intenter des actions en juftice; elle eft encourue par la condamnation aux galeres à perpétuité, & par le banniffement perpétuel hors le royaume. Et fuivant la derniere jurifprudeuce du droit romain, introduite par l'Empereur Juftinien, la confifcation de biens a lieu pour le crime de leze-Majefté divine ou humaine, ce qui fe pratique encore dans les provinces qui fe régiffent par le droit écrit.

1

Dans le pays coutumier, la confifcation des biens a prefque lieu dans toutes les coutumes du royaume, à la réserve de quelques-unes, entr'autres, Boulonnois, Berry, Maine, Poitou, Bretagne, Saint-Sever & Calais. Voyez mon recueil de jurifprudence civile, verbo confifcation.

25. Par arrêt du parlement de Paris en la grand'chambre, fur les conceuxquirefu clufions de M. Bignon, avocat général, du 27 Mai 1732, un criminel fent de faire condamné à neuf ans de galeres; & à faire amende honorable, n'ayant amende ho- point voulu proférer les paroles, fa' peine fut augmentée fur le champ

norable.

des

1

des galeres à perpétuité. C'est Bardet qui rapporte cet arrêt, tom. 2, liv.
તે
i, chap. 28. Aujourd'hui it femble qu'on a plus de tolerance.

26. Le fupplice de la roue eft fort aucien; il en eft fait mention dans faint Jérôme. Il eft rapporté qu'Apollinaris, Sénateur de Rome, ayant été accufé d'être chrétien du tems de l'Empereur Commode, fon accufateur qui étoit fon efclave fut condamné par le jugement de Perennis Préfet du Prétoire, à avoir les os brifés. L'Empereur Commode vivoit l'an 181. Il y a donc prefque feize cens ans qu'on punit les coupables du fupplice de la roue. Quelques-uns prétendent que cette peine n'a com.. mencé en France que fous le regne de François I. Elle étoit long-tems auparavant en ufage en Allemagne.

Il y a des endroits, comme en Allemagne, où l'on roue avec la roue: cela fe pratiquoit autrefois en France; mais, comme difent nos auteurs, ce fupplice erat barbarum. Dès le regne d'Henri IV, on changea ce fupplice; on rompt le coupable fur une croix de faint André, avec une barre de fer, après quoi on le met fur une roue encore vif ou mort. Si l'on en croit une certaine tradition du parlement de Paris, anciennement le coupable n'expiroit point fur la roue, on l'étrangloit s'il n'expiroit point fous coups; & on dit que le contraire n'a commencé que fous un préfident de Melme, qui par l'arrêt ordonna qu'un enfant qui avoit tué fon pere, feroit roué vif, & expireroit fur la roue ; ce qui fut exécuté.

les

Autrefois on avoit coutume de laiffer expirer fur la roue ceux qui y étoient condamnés; mais les Cours fe font beaucoup relâchées de cette rigueur, foit par humanité, ou de crainte qu'un fupplicié dans un pareil état ne fe porte au défefpoir par l'excès des douleurs, & à des imprécations qui pourroient faire douter de fon falut. Ainfi il arrive très fouvent que par un retentum on arrête que le coupable fera fecretement étranglé, fans même fentir de coups vifs, ou après en avoir fenti un, ou quelquefois tous, fuivant l'atrocité de l'action. Et quoiqu'il n'y ait pas de pareille retentum, quand un fupplicié refte un tems confidérable vif fuc la roue, la Cour ordonne qu'il fera étranglé : cela eft arrivé en l'année 1743, à l'égard d'un de ces affommeurs à coups de bâtons dans les rues de Paris. Ce fut un fimple ordre de la chambre; il n'y eur à ce fujet aucun arrêt, ni arrêté particulier.

Supplice de la roue,

ne condamn point aux ga

27. Dans l'ordre judiciaire, les filles & femmes peuvent être condamQuelles nées à toutes fortes de peines, à la réserve des galeres & de la roue; il perfonnes on n'y a que les hommes qui puiffent être condamnés à ces deux dernieres peines, de quelque état, qualité & condition qu'ils foient, les gentilshommes comme les roturiers, même les prêtres & autres ecclefiaitiques. Les filles & femmes ne font pas non plus condamnées au banniffement hors du royaume, à caufe de la décence dûe au fexe. Voyez ci-après, ch. 2, fect. 1, dift. 2, n. 3, l'arrêt du 11 mars 1730.

2.8. L'ufage du parlement de Paris en la chambre de la Tournelle, eft de ne point prononcer de condamnation d'amende contre un condamné aux galeres, parce qu'un tel condamné en payant la peine de fon corps pour fon crime, & en fervant le Roi fur fes galeres, fes biens ne doivent point en fouffrir; ce qui s'entend quand il eft condamné aux galeres à tems, 1. Partie.

B

roue.

nonce point contre les condamnés aux galeres.

d'amende

Si les Juges de feigneurs peuvent condamner aux galeres.

Il n'eft point

d'ufage en France de condamner à une prifon perpétuelle.

ou quand étant condamné aux galeres à perpétuité, fes biens font fitues' en pays où confifcation a lien.

Cependant il faut remarquer que quand le procès eft fait par les Juges, d'un fiége royal dont le domaine eft engagé, ou par un Juge de feigneur, en condamnant aux galeres, quoiqu'à tems feulement, on condamne toujours l'accufé en une amende, pour indemnifer le feigneur engagifte ou le feigneur haut-jufticier où le procès a été fair.

A l'égard de toutes les autres condamnations à peines afflictives, corporelles ou infamantes, il s'adjuge toujours des amendes au Roi, aux engagiftes & aux feigneurs; lefquelles font un peu plus fortes pour les engagiftes & les feigneurs, à l'effet de les indemnifer des frais qu'il convient faire pour l'inftruction des procès & tranflation des accufés; d'autant qu'on ne peut condamner les accufés aux dépens, lorfqu'il n'y a que les procureurs du Roi & les procureurs fifcaux de parties. Et comme il arrive fouvent que les premiers Jages tombent dans cette erreur, quand le cas y échet, la Cour ne manque pas de leur faire défenses de les y plus condamner, ni de fe taxer aucunes épices; elle les condamne même à rendre celles qu'ils ont reçues, dans le cas même où ils ordonnent la confifcation de biens, & qu'ils difent que fur iceux feront pris les frais de juftice, ou bien fans confifcation, que fur les amendes qu'ils adjugent ils feront pareillement pris ; parce que ces prononciations équipollent à une condamnation de dépens, au lieu qu'ils fe doivent renfermer uniquement en des condamnations d'amende.

29. Henris, tom. 1, liv. 2, queft. 31, rapporte un arrêt rendu en forme de réglement pour le bailliage de Forez, qui fait défense aux Juges feigneuriaux de condamner aux galeres. Mais Bretonnier obferve judicieufement ibidem, que l'ordonnance de 1670, intervenue depuis cet arrêt ne fait point de différence entre les Juges de feigneurs & les Juges royaux, & permet à tous également de prononcer la peine des galeres. I eft vrai que de la maniere dont Bretonnier parle, il paroît douter fi les Juges des feigneurs peuvent condamner aux galeres perpétuelles; mais il n'y a nul doute qu'ils ne le puiffent: car, comme dit cet auteur luimême, qui peut le plus, peut le moins; ainfi pouvant condamner à la ils peuvent à plus forte raifon condamner aux galeres perpétuelles. Ainfi jugé par arrêt rendu en la Tournelle le 27 Octobre 1734, confirmatif d'une fentence rendue par le Bailli du Fort-aux-Dames, transféré à Montmartre, par laquelle Jean Mulard le jeune, cabaretier, avoit été condamné aux galeres perpétuelles.

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30. L'on a déja observé qu'il n'est point d'ufage en France de condam ner un coupable à une prifon perpétuelle, parce que la prifon n'eft pas une peine, mais un lieu deftiné ad cuftodiam reorum pendant l'inftruction de leurs procès, & d'autres emprifonnés pour caufe civile. Cependant on condamne fouvent des hommes & des femmes à être renfermés pour toujours & pendant leur vie à l'hôpital, pour caufe de débauche, folie, ou autre caufe qui ne peut donner leu qu'à cette punition.

A l'égard du dérangement d'efprit, il eft important d'observer qu'il arrive fouvent qu'un accufé étant prévenu de crime de quelque nature qu'il

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foit, on reconnoît en lui quelque marque de foibleffe d'efprit alors, quoique les premiers Juges reconnoiffent ce dérangement d'efprit, ils ne peuvent point en informer; ils doivent faire l'inftruction & juger à la rigueur. Ainfi jugé par arrêts de la Tournelle criminelle des 11 février 1732, 12 feptembre 1733, & 8 juillet 1738. Mais en ce cas la Cour avant faire droit fur l'appel, ordonne qu'il fera informé des vie & mœurs & comportement de l'accufé. Si cette information conftare le dérangement d'efprit, on ordonne que l'accufé fera renfermé à l'hôpital général, pour y être traité comme les autres infenfés. Quand les premiers Juges jugent préfidialement ou prévôtalement, il n'y a pas de doute pour lors qu'ils ne puiffent ordonner l'information de vie & mœurs à l'effet de favoir fi l'accufé eft fou.

3. Par arrêt du parlement de Paris du 25 juin 1619, rendu en la grand'chambre, fur les conclufions de M. le Bret, avocat général, il a éré jugé que dans les crimes atroces, le coupable perd la difpofition de fes biens du jour du crime commis : le crime étoit un parricide. Cet arrêt eft rapporté par Bardet, dans fon recueil d'arrêts, tom. 1, liv. 1, ch. 6.3. Il est auffi rapporté par le Bret, liv. 6, décif. 4.

Par arrêt du parlement de Paris du 16 juillet 1676, rendu contre la dame de Brainvilliers, elle a été déclarée indigne des fucceffions de fes pere, freres & fœurs, à caufe des crimes d'empoifonnement par elle

commis.

Mais la regle eft que, pendente accufatione, l'accufé n'eft point interdit de l'administration de fon bien, & peut recevoir ce qui lui eft dû, excepté en crime de leze-majefté, ou quand il eft en fuite, & que fes biens font annotés, comme l'enfeigne le Prêtre, centurie 1, chap. 84.

A l'égard des donations, étant faites après le crime capital commis, elles font nulles, fi la condamnation a fuivi, fuivant la loi 15. ff. de do nationibus. La loi 28, ff. de pænis, explique ce qui eft crime capital fuivant le droit; mais parmi nous, c'est tout crime qui emporte mort civile ou naturelle.

Les donations à caufe de mort, de même que les teftamens, font auffi nuls, même quoiqu'elles foient faites avant le crime commis, leg. 7.ff. de mort. cauf. donationib. ce qui ne s'entend pas des donations entre mari & femme faites entre-vifs en pays de droit écrit avant le crime commis lefquelles fuivant le droit font confirmées par mort, leg. 24, cod. de donat. int. vir. & uxor, ni des donations faites par le pere au fils, qui font auffi confirmées par mort, leg. 25, cod.

,

Quant à l'aliénation par vente faite par l'accufé après le crime commis rien n'eft plus controverfé que cette question. Ricard, traité des donations, partie 1, nomb. 24, ufe d'un tempérament qui paroît fort équitable; il dit que l'acquéreur doit du moins recouvrer les deniers qu'il a débourfés, à moins qu'il n'ait été d'intelligence avec le vendeur, & qu'il n'ait eu part à fa mauvaise foi, qui fe préfume particulierement lorfque le crime a été connu à l'acquéreur, & que l'aliénation a été faite fans néceflité & fans emploi du prix. A quoi il faut ajouter que l'aliénation eft cenfée frauduleufe, lorfque la vente eit générale, leg. 17, §. 1, ff. que in

Si un accufé

peut difpofer de fes biens.

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fraud, creditor. ou fi l'accufe eft résté en poffeffion des biens par lui ven dus, & en a perçu les fruits, leg. 8. ff. quib. mod. pig. vel hypoth. folvit. ou s'il a vendu clandeftinement & à fort vil prix, leg. ult. de ritu nuptiarum in fin. leg. 54. ff. de adminiftrat. & peric, tutor. leg. 1. §. 16. ff. fi quid in fraudem patroni.

¶ Par arrêt du 11 feptembre 1708, au rapport de M. de Dreux, il a été jugé qu'un ceffionnaire d'une fomme de 6600 liv. tranfportée par acte paffé devant Notaires, pour intérêts civils adjugés à une mere contre Î'affaffin de fon fils, avoit hypothéque du jour du décret de prife-de corps prononcé contre le meurtrier, qui poftérieurement à ce décret, & avant le jugement définitif, avoit vendu partie de fes biens, & contracté frauduleufement plufieurs dettes hypothécaires.

32. Sur la question de favoir fi le crime du titulaire d'un bénéfice, le fait vaquer de plein droit, il faut d'abord obferver que, fuivant la Clementine premiere, de fent. & re judicatâ, ce n'eft qu'après trois fentences que l'on peut impétrer le bénéfice vacant par l'irrégularité du titulaire. Mais Tournet, lettre V, chap. 2, dit que le bénéfice vacant par irrégularité fe peut impétrer de plein vol, fans attendre aucune déclaration ni fentence, & que l'impétrant peut montrer du vice & obtenir maintenue. Il rapporte un arrêt de l'an 1543, qui l'a ainfi jugé dans le cas d'un pourvu par réfignation fimoniaque. C'eft aufli ce qui a été jugé par arrêt de l'an 1531, rapporté par Louet, lettre B, fom. 1, dans le cas de l'irrégularité encourue par un bénéficier pour avoir affifté à un jugement de mort.

Cependant Tournet loc. cit. remarque qu'un titulaire de bénéfice, quoiqu'irrégulier, même à caufe d'un crime capital, peut réfigner fon bénéfice purement & fimplement après le crime par lui commis, avant la condamnation, & même pendant l'appel. C'eft auffi ce qu'enfeignent Guimier fur la Pragmatique-Sanction, S. item infuper, verbo, difponere ; Coras en fɔn traité des bénéfices, partie 3, chap. 6; & Louet fur la regle de infirm. refignantib. fur du Moulin, num. 366 & 367, & fur la regle de publicandis, num. 98. Mais Tournet met cette reftriction: finon que le crime fût fi grand & abominable qu'il fit vaquer le bénéfice jure & facto; auquel cas, felon cet auteur, la réfignation ne feroit pas valable après le crime commis: en quoi il a fuivi le fentiment de du Moulin, qui en ce cas admet la démiffion entre les mains de l'Ordinaire après le crime commis, mais non pas la réfignation in favorem.

Il faut convenir que cette reftriction de Tourner eft réguliere & conforme à la jurifprudence, quand le bénéficier coupable d'un crime atroce qui a fait vaquer fon bénéfice de plein droit, a été prévenu par la collation de l'Ordinaire ou du Pape, par dévolut ou autrement. C'eft le véritable point de décifion des arrêts des 21 mai 1620 & 21 juillet 1626, rapportés au Journal des Audiences, tom. I, liv. 2, chap. 125, qui ont confirmé, l'un la collation faite par l'Ordinaire, l'autre les provifions par dévolut, fans s'arrêter aux réfignations faites par les bénéficiers qui avoient été prévenus, P'un par l'Ordinaire, l'autre par dévolut.

Mais au contraire quand le bénéficier, quoique coupable de crime atroce qui a rendu fon bénéfice vacant & impétrable de plein droit, a prévenu

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