Or c'était un cochet dont notre souriceau Comme d'un animal venu de l'Amérique. Que moi, qui, grâce aux dieux, de courage me pique, Le maudissant de très bon cœur. Marqueté, longue queue, une humble contenance, Avec messieurs les rats; car il a des oreilles Je l'allais aborder, quand, d'un son plein d'éclat Mon fils, dit la souris, ce doucet est un chat, Contre toute ta parenté D'un malin vouloir est porté. L'autre animal, tout au contraire, Bien éloigné de nous mal faire, Servira quelque jour peut-être à nos repas. Quant au chat, c'est sur nous qu'il fonde sa cuisine. Garde-toi, tant que tu vivras, De juger des gens sur la mine. LA FONTAINE. LE PETIT POISSON ET LE PÊCHEUR. PETIT poisson deviendra grand, Je tiens pour moi que c'est folie : Car de le rattraper il n'est pas trop certain. Un carpeau, qui n'était encore que fretin, Fut pris par un pêcheur au bord d'une rivière. Tout fait nombre, dit l'homme, en voyant son butin, Voilà commencement de chère et de festin : Mettons-le en notre gibecière. Le pauvre carpillon lui dit en sa manière : Que ferez-vous de moi? Je ne saurais fournir Pour faire un plat : quel plat? croyez-moi, rien qui vaille. Un tiens vaut, ce dit-on, mieux que deux tu l'auras. LE MÊME. LE LABOUREUR ET SES ENFANTS. TRAVAILLEZ, prenez de la peine : Un riche laboureur, sentant sa mort prochaine, Un trésor est caché dedans. Je ne sais pas l'endroit; mais un peu de courage Le père mort, les fils vous retournent le champ D'argent, point de caché. Mais le père fut sage Que le travail est un trésor. LE MÊME. * La moisson, qui se fait au mois d'août (oût.) LE LÉOPARD ET L'ÉCUREUIL. UN écureuil sautant, gambadant sur un chêne, Qui faisait sa méridienne. Vous jugez s'il eut peur! En sursaut s'éveillant, Et l'écureuil, s'agenouillant, Tremble et se fait petit aux pieds de son altesse. Le léopard lui dit: Je te donne la vie, Je suis si triste et je m'ennuie. Je dois à votre bon accueil Sur cet arbre un peu haut je voudrais être assis De dormir sans remords; vous mangez les chev.cuils, Mes feuilles et mes fruits; vous haïssez, et j'aime : Lorsque notre bonheur nous vient de la vertu, FLORIAN. LE HIBOU, LE CHAT, L'OISON, ET LE RAT De jeunes écoliers avaient pris dans un trou Un hibou, Et l'avaient élevé dans la cour du collége. Un vieux chat, un jeune oison, Ils avaient orné leur esprit, Savaient par cœur Denys d'Halicarnasse Répondit le hibou: que d'esprit ! que de grâce' Parbleu, dit l'oison en colère, Plus de grandeur, de gloire et de faits éclatants! Pour moi, ce sont mes favoris: Tout doit céder le pas aux vainqueurs de la terre. Athènes les hiboux, et Rome, au Capitole, LE MÊME. LES JOUETS DES ENFANTS. LES jouets sont les premiers goûts de l'enfance. Que d'habitudes fâcheuses peuvent être puisées au milieu de polichinelles, de chevaux de carton et de poupées! Multiplier à l'infini les joujoux, comme on a la faiblesse de le faire pour les enfants des riches, c'est préparer en eux la prodigalité, l'inconalance, le dégoût ou l'avarice. L'enfant, attaché au même chariot qu'il a traîné toute une saison dans le jardin de sa mère, est aussi heureux que celui qui a des armoires remplies de joujoux: le soin qu'on lui fait prendre de remiser son petit chariot ui fait contracter l'habitude de l'ordre; et la petite fille qui, dans quelque rang qu'elle se trouve placée, doit être formée au goût de l'arrangement, reçoit déjà une petite leçon quand on exige d'elle de réunir dans sa boîte toutes les pièces du ménage de sa poupée. Pour la multiplicité des joujoux, j'ai vu de jeunes princes déjà victimes de la triste satiété ; j'ai vu leurs mères les promener au milieu de mécaniques ingénieuses dont la vue charmait jusqu'aux gens faits, s'efforcer en vain d'exciter leurs désirs; déjà ils avaient eu et brisé plusieurs fois des jouets semblables. Il est cependant juste de dire que tous les jouets qui se meuvent par des ressorts cachés n'inspirent aux enfants qu'un étonnement passager; qu'ils ne font point cas d'une action qu'ils n'ont pas dirigée, et n'éprouvent que le désir de briser ces jouets pour s'instruire du moyen qui les fait agir. Tout ce qui se traîne, chevaux, charrettes, sont les jouets qui plaisent le plus aux enfants, et surtout aux garçons, parce qu'ils se prêtent au besoin d'action qui ne les quitte jamais. On remarque dans les jeux des enfants leurs constantes dispositions à imiter tout ce qu'ils voient faire aux gens formés; ils aiment les petits ménages dont toutes les pièces leur retracent celui de leurs parents; un bâton transformé en cheval représente celui de leurs parents; ils sont ravis de faire claquer un fouet comme les postillons, et d'arroser comme le jardinier. La plus petite fille s'empare des poupées, et par l'effet d'un instinct admirable, véritable bienfait de la Providence, vous la verrez Rêver le nom de mère en berçant sa poupće. Que l'oreille d'une mère soit bien attentive aux discours adressés à la poupée : ce qui lui a fait le plus d'impression, |