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qui s'écrioit devant Dieu en efprit d'humilité: O Seigneur, que je vous connoisse, & que je me connoiffe; Et faint Francois qui interrogeoit Dieu, difant: Qui étes-vous ? &que fuis-je ? Proteftez de ne vouloir point, remarquer votre avancement pour vous rejouir en vous-mêmes, mais pour vous rejouir en Dieu ni pour vous en glorifier: mais pour glorifier Dieu, & l'en remercier. Proteftez que fi, comme vous pensez, vous decouvrez d'avoir peu profité, ou bien d'avoir reculé, vous ne voulez point pour cela vous abbattre ni vous refroidir par aucune forte de découragement ou relâchement de cœur; mais qu'au contraire, vous voulez vous encourager & animer d'avantage vous humilier & remedier aux défauts, moiennant la grace de Dieu.

Cela fait, confiderez doucement & tranquillement comme jufques à l'heure prefente vous vous étes comportée envers Dieu, envers le prochain, & à l'endroit de vousmême.

CHAPITRE. IV.

Examen de l'état de notre ame envers Dien.

Q

Uel eft votre cœur contre le peché mortel: avez vous une refolution forte de ne jamais commettre pour quelque chofe qui puiffe arriver? & cette refolution a-t-elle duré dès votre proteftation

jufques à prefent? Le fondement de la vie fpirituelle confifte dans cette refolution.

2. Quel est votre cœur à l'endroit des Commandemens de Dieu! les trouvez-vous bons, doux & agréables? Ha! ma fille, celui qui a le goût bon, & l'eftomach fain, aime les bonnes viandes, & rejette les mauvaises.

5. Quel eft votre cœur à l'égard des pechez veniels? On ne fçauroit éviter d'en faire quelqu'un par-ci par-là: mais n'y en a-t-il point auquel vous aiez une inclination particuliere; & ce qui feroit pis, n'y en a-t-il point auquel vous aiez quelque affection & de l'amour?

4. Quel eft votre cœur à l'égard des exercices fpirituels? Les aimez vous, les eftimez-vous, ne vous chagrinent-ils point, n'en étes vous point degoûtée, auquel vous fentez-vous plus ou moins portée ? Entendre la parole de Dieu, la lite, s'en entretenir, mediter, afpirer vers Dieu, fe confeffer, prendre les avis fpirituels, fe preparer à la communion, fe communier, mortifier les affections, qu'y a-t-il en cela qui repugne à votre cœur? Et fi vous trouvez quelque chofe à quoi ce coeur ait moins d'inclination, examinez d'où vient ce dé goût, qu'eft-ce qui en eft la caufe?

5. Quel est votre coeur à l'égard de Dieu même votre cœur fe plaît-il à fe reffou venir de Dieu? n'en reffent-il point de dou

ceur agreable? Ha! dit David, Je me fuis reffouvenu de Dieu, & j'y ai pris plaifir. Sentez-vous en votre cœur une certaine facilité à l'aimer, & un goût particulier à cet amour? Votre cœur ne fe plaît-il point à penser à l'immenfité de Dieu, à sa bonté, à fa fuavité ? Si le fouvenir de Dieu vous arrive parmi les occupations du monde, & les vanitez, ne fe fait-il point faire place ne faifit-il point votre cœur ne vous femble-t-il point que votre cœur fe tourne de fon côté, & qu'en quelque maniere il lui aille au devant? Il y a des ames comme cela.

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6. Si le mari d'une femme revient de loin, auffi-tôt que cette femme s'apperçoit de fon retour, & qu'elle entend fa voix, quoiqu'elle foit embaraffée d'affaires & retenue par quelque violente confideration parmi la preffe, fon coeur néanmoins n'est pas retenu; mais abandonne les autres penfées, pour penfer à ce mari qui eft revenu. Il en eft de même à l'égard des ames qui aiment bien Dieu : Quoiqu'elles foient empreffées quand le fouvenir de Dieu revient en elles, elles negligent prefque tout le refte, pour leplaifir qu'elles ont de voir ce cher fouvenir revenu, & c'eft un bon figne.

7. Quel est votre cœur à l'endroit de Je fus-Chrift, Dieu & homme ? Vous plaifez-vous autour de lui? les mouches à miel fe plaifent autour de leur miel, & les gucf

pes autour des puanteurs : ainfi les bonnes ames prennent leur contentement auprès de Jefus-Chrift, & ont une extrême. tendreffe d'amour en fon endroit : mais les méchans fe plaifent autour des vanitez.

8. Quel eft votre cœur à l'endroit de Notre-Dame, des Saints, & de votre bon Ange? les aimez-vous fort? avez-vous une fpeciale confiance en leur bienveillance ? leurs images, leurs vies, leurs louanges vous plaifent-elles ?

9. Quant à votre langue, comment parlez vous de Dieu, vous plaifez-vous d'en dire du bien felon votre condition & fuffifance; aimez-vous à chanter fes Cantiques?

10. Quant aux œuvres, penfez fi vous avez à cœur la gloire exterieure de Dieu, & de faire quelque chofe à fon honneur: car ceux qui aiment Dieu aiment avec Dieu l'ornement de fa maifon.

11. Avez-vous quitté quelque affection, & renoncé à quelque chofe pour Dieu; car c'eft un bon figne d'amour, de fe priver de quelque chofe en faveur de celui qu'on aime. Qu'avez-vous donc ci-devant quitté pour l'amour de Dieu?

CHAPITRE V.

Examen de votre état envers vous-même.

Omment vous aimez-vous vous-même?

'Co Cue nous aimez-vous point trop pour

ce monde? Si cela eft, vous defirerez de demeurer toûjours ici, & vous aurez un extrême foin de vous établir en cette terre; mais fi vous vous aimez pour le Ciel, vous defirerez, au moins vous aquiefcerez aisement de fortir d'ici bas à l'heure qu'il plai ra à Notre-Seigneur.

2. Tenez-vous un bon ordre dans l'amour de vous-même ? car il n'y a que l'amour defordonné de nous-mêmes qui nous ruine. Or l'amour ordonné veut que nous aimions plus l'ame que le corps: que nous ayons plus de foin d'aquerir les vertus que toute autre chofe : que nous tenions plus de compte de l'honneur celefte que l'honneur d'ici bas & periffable. Le cœur bien ordonné dit plus fouvent en foi-même : que diront les Anges, fi je pense à telle chose? que non pas: que diront les hommes ?

3. Quel amour avez-vous pour votre cœur ? Ne vous fachez-vous point de le fervir dans fes maladies? helas! vous lui devez ce foin, de le fecourir & de le faire fecourir quand fes paffions le tourmentent, & de laiffer toutes chofes pour cela.

4. Que vous estimez-vous devant Dieu ? rien fans doute: Or il n'y a pas une grande humilité dans une mouche, de ne s'eftimer rien au prix d'une montagne, ni dans une goutte d'eau de fe tenir pour rien en comparaifon de la mer, ni à une bluette ou étincelle de feu, de fe tenir pour rien

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