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renouvellé, à fon Principe & Sauveur, au très-faint Sacrement de l'Euchariftie.

CHAPITRE XV I.

Des reffentimens qu'il faut conferver après

cet exercice.

E jour que vous aurez fait ce renou

devez fouvent redire de cœur & de bouche ces ardentes paroles de S. Paul, de S. Auguftin, de fainte Catherine de Genes, & autres: non, je ne fuis plus à moi, ou que je vive, ou que je meure, je suis à mon Sauveur: je n'ai plus de moi, ni de mien mon moi, c'eft Jefus : mon mien c'eft d'être fienne: ô monde! vous étes toûjours vous-même, & moi j'ai toûjours été moi-même mais d'orefnavant je ne ferai plus moi-même. Non, nous ne ferons plus nous-mêmes, car nous aurons le coeur changé; & le monde qui nous a fi fouvent trompés, fera trompé en nous : car ne s'appercevant de notre changement que petit à petit, il penfera que nous fommes toûjours des Efaii, & nous nous trouverons des Jacob.

Il faut que tous ces exercices reposent dans le cœur, & que paffant de la confideration & méditation nous allions tout doucement entre les affaires & les con. verfations, de peur que la liqueur de nos

refolutions ne s'épanche d'abord car il faut qu'elle détrempe & penetre bien par toutes les parties de l'ame, le tout nean. moins fans efforts, ni d'efprit, ni de corps.

CHAPITRE XVII.

Réponses à deux objections qui peuvent être faites fur cette Introduction.

E monde vous dira, ma Philothée, que

Lees exercices & ces avis font en fi grand

nombre, que qui voudra les obferver, il ne faudra pas qu'il vacque à autre chose. Helas! chere Philothée, quand nous ne ferions autre chofe, nous ferions bien affez, puifque nous ferions ce que nous devrions faire en ce monde : mais ne voyez-vous pas la rufe? S'il falloit faire tous ces exercices tous les jours, à la verité ils nous occu peroient entierement: mais il n'eft pas neceffaire de les faire; qu'en tems & lieu, chacun felon l'occafion. Combien y a-t-il de Loix civiles aux Digettes & au Code, qui doivent être obfervées : mais cela s'entend felon les rencontres, & non pas qu'il les faille toutes pratiquer tous les jours. Au refte David, ce Roi plein d'affaires très-difficiles, pratiquoit bien plus d'exer cices que je ne vous ai pas marqués. Saint Louis, Roi admirable & pour la guerre & pour la paix, & qui avec un foin nonpareil adminiftroit la juftice, manioit les

affaires, entendoit tous les jours deux Mef fes, difoit Vêpres & complies avec fon Chapelain, faifoit fa méditation, visitoit les Hôpitaux tous les Vendredis, fe confeffoit, prenoit la difcipline, entendoit très-fouvent des Predications, faifoit fort fouvent des conferences fpirituelles, & avec tout cela il ne perdoit pas une feule occafion du bien public exterieure, qu'il ne fît & n'executât diligemment; & fa Cour étoit plus belle & plus fleuriffante qu'elle n'avoit jamais été du tems de fes predeceffeurs.

Faites donc hardiment ces exercices felon que je vous les ai marquez, & Dieu vous donnera affez de loifir & de force pour faire tout le refte de vos affaires : oui, quand il devroit arrêter le Soleil, comme il fit du tems de Jofué. Nous faifons toûjours affez quand Dieu travaille

avec nous.

Le monde dira que je fuppofe prefque par tout que ma Philothée ait le don de I'Oraifon mentale, & que neanmoins cha cun ne l'a pas de forte que cette Introduction ne fervira pas pour tous. Il est vrai, fans doute j'ai préfuppofé cela, & il eft vrai encore que chacun n'a pas le don de l'Oraifon mentale : mais il eft vrai auffi que prefque chacun le peut avoir, même les plus groffiers; pourvû qu'ils ayent de bons Conducteurs, & qu'ils veuil

lent

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lent travailler pour l'acquerir, autant que la chofe le merite. Et s'il s'en trouve qui n'ayent pas ce don en aucun degré (ce que je ne crois pas pouvoir arriver que fort rarement) le fage Pere fpirituel leur fera aifement fuppléer ce défaut par l'attention qu'il leur enfeignera d'avoir, ou à lire, ou à entendre lire les mêmes confiderations qui font mifes dans les medi

tations.

CHAPITRE XVIII.

Trois principaux & derniers avis pour cetis

Introduction.

Efaites tous les premiers jours du mois la proteftation qui eft dans la premiere partie, après la meditation, & à tous momens proteftez de la vouloir obferver, difant avec David : Non jamais je n'on blierai vos juftifications, ô mon Dieu; car vous m'avez vivifiée en elles. Et quand vous fentirez quelque dérangement dans votre ame, prenez votre proteftation en main, & profternée en efprit d'humilité, proferez-la de tout votre cœur, & vous trouverez un grand foulagement.

Faites profeflion ouverte de vouloir être devote je ne dis pas d'être devote, mais je dis de le vouloir être ; & n'ayez point de honte des actions communes & neceffaires qui nous conduisent à l'amour de E

Dieu : avouez hardiment que vous essayez de mediter; que vous aimeriez mieux mourir que de pecher mortellement : que vous voulez frequenter les Sacremens & fuivre les confeils de votre Directeur (quoique fouvent il ne foit pas neceffaire de le nommer pour plufieurs railons) car cette franchise de confeffer, qu'on veut fervir Dieu, & qu'on eft confacré à fon amour d'une affection particuliere, eft fort agreable à fa divine Majefté, qui ne veut point que l'on ait honte de lui, ni de fa Croix. Et puis elle coupe chemin à beaucoup de choles contraires que le monde voudroit nous infpirer, & nous oblige de reputation à la pourfuite. Les Philofophes fe publioient pour Philofophes, afin qu'on les laiffât vivre philofophiquement : & nous devons nous faire connoître pour de. fireux de la devotion, afin qu'on nous laiffe vivre devotement. Que fi quelqu'un vous dit que l'on peut vivre devotement fans la pratique de ces avis & de ces exercices, ne le niez pas mais répondez doucement que votre infirmité eft fi grande, qu'elle demande plus d'aide & de fecours qu'il n'en faut pas pour les autres.

Enfin, très-chere Philothée, je vous conjure par tout ce qui eft de facré au Ciel, & en la Terre, par le Baptême que vous avez reçû, par les mamelles que Je fus Chrift fucça, par le cœur charitable

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