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jeune homme, jeune personne, insensés qui courez après la vanité, dévorés de désirs qui ne seront jamais satisfaits, et bercés par des espérances qui seront toujours déçues? Où es-tu, vieillard malheureux qui portes sur ta tête blanchie la trace de tant d'années passées au sein des misères dont souvent tu as gémi, sans avoir encore appris la vraie sagesse? Vous tous qui m'écoutez, nous tous qui sommes ici devant Dieu, répondons; bannissons les illusions: où sommes-nous ? Où sommesnous quant à Dieu, quant à notre âme, quant au ciel, quant à l'Éternité?

Oh! puissions-nous entendre cette voix, tandis que Dieu nous l'adresse dans sa bonté! Puissionsnous, comme Adam, ouvrir les yeux sur notre véritable état! Oui, dussions-nous éprouver la même honte et la même terreur; dût la rougeur monter sur notre front humilié et nous accuser aux yeux de tout l'univers; dût la voix de l'Éternel porter le tremblement jusqu'au fond de notre âme, Dieu veuille que nous nous voyions tels que nous sommes! J'aimerais mieux mille fois vous voir rougir de honte ou trembler de terreur, que de vous voir dans cette coupable et lâche indifférence, ou dans une vague profession d'un Christianisme sans vie et sans puissance. Mon Dieu! je te le demande; s'il le faut, que la rougeur de la honte et le treinblement de la terreur soient les témoins de notre humiliation et de notre repentance!

Mes frères, si Dieu exauce cette prière, si vous apprenez à vous connaître vous-mêmes devant lui, si vos yeux sont ouverts, ah! n'ayez pas recours, pour couvrir votre honte, aux misérables expédiens que nous avons signalés, et, après avoir vu toute votre nudité devant Dieu, puissiez-vous entonner avec un prophète ce chant de rédemption : « Je me réjouirai en l'Éternel et mon âme s'égaiera en mon Dieu; car il m'a revêtu des vêtemens du salut et il m'a couvert du manteau de la justice, comme un époux qui se pare de magnificence et comme une épouse qui s'orne de ses joyaux ! »

MÉDITATION V.

L'INTERROGATOIRE. LES EXCUSES.

«

Et Dieu dit: Qui t'a montré que tu étais nu? N'as-tu pas mangé du fruit de l'arbre dont je t'avais défendu de manger? Et Adam répondit: La femme que tu m'as donnée pour être avec moi m'a donné du fruit de l'arbre, et j'en ai mangé. Et l'Éternel Dieu dit à la femme: Pourquoi as-tu fait cela? Et la femme répondit : Le serpent m'a séduite, et j'en ai mangé. » GENÈSE III, 11-13.

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A peine le péché est-il entré en Éden, et la voix de l'Éternel s'est fait entendre contre cette violation de l'ordre établi dans le monde moral. L'homme coupable a fui tremblant. Fuir devant Dieu! En vain Adam pense-t-il cacher son crime et sa honte en prétextant sa nudité. Il faut comparaître devant Celui qui sonde les cœurs; il faut rendre compte de cette honte même; il faut se placer en présence de la loi violée. Un tribunal solennel s'élève; le juste Juge interroge sa créature sur l'usage qu'elle a fait de sa liberté, de son inno

cence, de sa responsabilité. — Il faut répondre ; il faut que ce qui est caché vienne à la lumière.

Ecoutons, mes frères, en nous plaçant nousmêmes en la présence de Dieu, écoutons cet interrogatoire. Il nous a été conservé pour notre instruction; il nous concerne tous, car il renferme la base du jugement auquel nous allons tous être soumis, et les chefs d'accusation qui seront bientôt produits contre chacun de nous.

Les questions du juge suprême, les réponses des accusés vont successivement occuper notre attention.

J'ai entendu ta voix et j'ai craint parce que j'éta's nu, et je me suis caché. Telle avait été la parole d'Adam troublé dans sa conscience à l'approche de son Dieu, parole qui trahissait à la fois son crime et sa confusion. Déjà il sent la misère du péché, déjà il tremble malheureux à la voix du Dieu dont naguère la communion faisait son bonheur. Il a la conscience du péché qu'il a commis; il en souffre déjà les premières conséquences; mais il ne s'avoue pas encore la portée morale de son action; il ne s'avoue pas coupable; il ne parle que de sa crainte, de sa nudité. Détournant les yeux de son propre cœur, il cherche follement au dehors les raisons de son état présent. Il faut donc le traduire au tribunal de sa propre conscience; lui rappeler sa

responsabilité, l'ordre divin violé, la sainteté de la loi qu'il a foulée aux pieds, le mal moral qui vient de souiller son cœur, en un mot la véritable cause de ce qu'il éprouve en la présence de son Dieu.→→→ Tel est en effet le but des deux questions que lui adresse son Juge: Qui t'a montre que tu étais nu ?

ou comment cette nudité est-elle maintenant devenue pour toi un sujet de honte 1? N'étais-tu pas revêtu d'innocence, de lumière et de gloire ? Ne portais-tu pas l'image de Dieu, dont tu te glorifiais? Ne jouissais-tu pas avec bonheur de toutes les facultés qu'il t'avait conférées? - Pourquoi donc es-tu dépouillé, honteux, misérable? N'as-tu pas souillé ce vêtement de pureté et d'innocence que je t'avais donné? N'as-tu pas perdu cette couronne de gloire et d'immortalité qui ornait ton front? Qui donc t'a réduit à cet état? Qui t'a montré que tu étais nu?

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-

Adam confus se tait devant son juge. Il faut donc enfoncer plus avant le trait qu'il porte en sa conscience troublée. Il faut lui montrer le mal de plus près, par une question plus précise encore. Il faut mettre devant ses yeux le miroir lumineux de la loi divine : N'as-tu pas mangé du fruit de l'arbre dont je t'avais défendu de manger?—ou, comme il y a dans l'hébreu: dont je t'avais donné l'ordre de ne pas manger? Que de leçons, mes frères, dans celte

(1) Voir chap. II, v. 25.

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