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stance. Le Code pénal nous présente un exemple de cette hypothèse dans son art. 200, ainsi conçu : « En cas de nouvelles contraventions, le ministre du culte qui les aura commises, sera puni, savoir pour la première récidive, d'un emprisonnement de 2 à 5 ans, et pour la seconde de la détention. » Il est facile d'apercevoir que cet article déroge formellement aux règles générales sur la récidive. Nous remarquerons, en passant, qu'il offre un exemple, rare dans notre législation, d'une aggravation progressive à raison du nombre des récidives. Le Code pénal de la Louisiane est le seul qui ait prévu, par une disposition générale les deuxièmes récidives; cette gradation était une règle de l'ancien droit : « Gravius multo puniendus est qui ter deliquit quàm qui bis.»

Enfin une troisième exception existe, dans certains cas, à l'égard des délits purement spéciaux. Le dernier § de l'article 56 consacre formellement cette exception à l'égard des délits exclusivement militaires. Nous allons en suivre tout à l'heure l'application en ce qui concerne les délits de la presse. Arrêtons-nous, d'abord, au système pénal de l'art. 58.

La récidive prévue par cet article n'entraîne point une peine d'un autre ordre que celle que le second délit eût encourue sans cette circonstance: l'aggravation consiste uniquement dans la prolongation de sa durée. L'art. 58, identique sur ce point avec l'art. 57, porte: « Les coupables seront condamnés au maximum de la peine portée par la loi, et cette peine pourra être élevée jusqu'au double. » Cette dernière disposition pourrait paraître bien rigoureuse si le bénéfice des circonstances atténuantes ne venait en tempérer la sévérité.

L'application de l'art. 463, aux cas de récidive, avait fait naître des doutes sous le Code de 1810. La Cour de cassation avait jugé, d'abord, que cette application ne pouvait avoir lieu [1]; mais depuis elle avait répudié cette jurisprudence en s'appuyant sur la généralité de la disposition de l'art. 463 [2]. La loi du 28 avril 1832 a dissipé toutes les incertitudes en

[1] Arr. cass., p. 93. [2] Arr. cass., 22 sept. 1820. (Bourguignon, tome III. pag. 48), 2 fév. 1827. Sirey, 1828, 1, 73; Dalloz, t. 22, p. 217.-La cour de Bruxelles, par arrêt du 1er déc. 1832, a également consacré cette interprétation; J. de Belg. 1833, p. 17.

consacrant cette interprétation [3]. Les peines aggravantes des art. 57 et 58 ne sont donc plus que facultatives : les juges peuvent les réduire jusqu'au taux des peines de simple police et même substituer l'amende à l'emprisonnement, pourvu que le jugement constate l'existence des circonstances atténuantes qui motivent cette réduction. Cette déclaratiou est la condition essentielle de l'atténuation de la peine.

Ce n'est donc que dans le cas où les juges ne reconnaissent pas de circonstances atténuantes, que ces deux articles deviennent rigoureusement applicables. Il faut alors rechercher le sens de la disposition qui exige la condamnation au maximum de la peine portée par la loi. Plusieurs hypothèses peuvent se pré

senter.

Si la loi pénale ne porte qu'une seule peine, aucune difficulté ne peut exister. Mais il peut arriver qu'elle porte à la fois une peine principale et d'autres peines facultatives; qu'elle prononce ensemble plusieurs peines principales; enfin qu'elle offre à la volonté des juges deux peines alternatives. Dans ces trois espèces, l'élévation de la peine au maximum peut donner lieu à quelques difficultés.

Le premier cas est celui où la loi prononce à la fois une peine principale et des peines ac cessoires facultatives. L'art. 401 du Code offre un exemple de ce concours de pénalités : comme peine principale, il inflige au prévenu de vol simple, l'emprisonnement, et il laisse au juge la faculté d'y ajouter l'amende, l'interdiction des droits civils et la surveillance. Plusieurs tribunaux avaient pensé que le maximum de ces diverses peines devait concurremment être prononcé au cas de récidive : « attendu que le mot peine dont se sert l'art. 58 est complexe dans sa signification, et comprend à la fois toutes les dispositions répressives qui doivent être appliquées à l'individu reconnu coupable; que la peine portée en l'art. 401 se compose de quatre dispositions différentes; que le législateur, en prononçant contre le coupable en état de récidive le maximum de la peine portée par la

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3 févr. 1814. Merlin, Rép., t. 23, par le Code pénal, si les circonstances paraissent atténuantes, les tribunaux correctionnels sont autorisés, même en cas de récidive, à réduire l'emprisonnement même au dessous de 16 fr.; ils pourront ausssi prononcer séparément l'une ou l'autre de ces peines, et même substituer l'amende à l'emprisonnement, sans qu'en aucun cas, elle puisse être au-dessous des peines de simple police.

[3] « Dans tous les cas où la peine de l'emprisonnement et celle de l'amende sont prononcées

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loi a nécessairement entendu que les tribunaux seraient tenus de prononcer le maximum des quatre élémens de répression mentionnés en l'art. 401 [1]. »

Cette doctrine n'est point justifiée par le texte de la loi. L'art. 58 ne prononce que le maximum de la peine portée par la loi et non de toutes les peines que la loi a pu mettre à la disposition du juge; et cet article entend si peu cumuler nécessairement ces peines, qu'il ajoute: « Ils (les condamnés) seront DE PLUS mis sous la surveillance. » D'un autre côté l'art. 401 renferme deux ordres de peines, les unes principales que le juge est obligé de prononcer, c'est l'emprisonnement et en certains cas l'amende, et les peines accessoires qu'il a la faculté d'appliquer ou de ne pas appliquer telles sont la surveillance et l'interdiction des droits civiques. Or, cette distinction importante a-t-elle été effacée par l'art. 58? ces dernières peines cessent-elles d'être facultatives parce que le prévenu est en état de récidive? Il faudrait une disposition formelle pour dépouiller les tribunaux d'une latitude pour l'application de ces peines accessoires, et cette disposition n'existe pas; cette latitude, qui tend d'ailleurs à alléger le sort des condamnés, doit donc être conservée. Telle est, au surplus, la jurisprudence invariable de la Cour de cassation, fondée sur les termes précis de l'art. 58 [2] On peut donc considérer comme une règle constante que lorsque la loi prononce à la fois une peine principale et des peines accessoires facultatives, les juges ne sont tenus d'appliquer le maximum que de la peine principale.

Le deuxième cas est celui où la loi a prononcé cumulativement plusieurs peines; nous citerons pour exemples les art. 410 et 411 du Code. Dans l'espèce de ces articles, l'amende et l'emprisonnement sont des peines également principales; la récidive les élève donc à la fois au maximum.

La troisième hypothèse, enfin, est celle où la loi prononce deux peines, mais en laissant aux tribunaux la faculté de n'en appliquer qu'une seule. Telle est la disposition de l'art. 311 qui porte que les blessures ou les coups seront punis d'un emprisonnement et d'une amende, ou de l'une de ces deux peines seulement.

[1] Arr., Paris, 23 sept. 1830. Douai, 24 fév. 1832. Sirey, 1830, 2, 377. - Voy. aussi Merlin, vo Récidive, no 12.

[2] Arrêt de cassation, 10 septembre 1813;

Les tribunaux conservent au cas de récidive la faculté de n'appliquer qu'une peine, pourvu qu'ils l'élèvent au maximum; s'ils les appliquent à la fois, ils ne sont tenus d'élevér au maximum que l'une d'elles.

Mais dans ces divers cas, la peine de la surveillance doit nécessairement accompagner les peines principales. Le 3o § de l'art. 58 porte en effet que les condamnés seront de plus mis sous la surveillance pendant au moins cinq années, et dix ans au plus; ainsi cette peine est nécessaire, et les tribunaux ne peuvent en dispenser les coupables. Toutefois si le jugement avait omis de la prononcer, elle ne pourrait être suppléée, car les articles 47 et 48 du Code ont déterminé d'une manière limitative les peines qui emportent la surveillance de plein droit. Le jugement pourrait seulement être déféré à la Cour de cassation à raison de cette omission.

Nous avons précédemment examiné [3] la question de savoir si le prévenu en récidive peut être dispensé de la surveillance; dans le cas où des circonstances atténuantes sont déclarées. Il nous a paru que cette peine accessoire devait suivre le sort de la peine principale, et que la faculté d'atténuer ou de faire disparaître celleci suppose le pouvoir de dispenser de la première. Cette opinion vient d'être consacrée, depuis l'impression des premières feuilles de ce volume, par un arrêt de la Cour de Colmar qui déclare « que la mise en surveillance n'étant que l'accessoire des peines d'amende et d'emprisonnement, les tribunaux sont à plus forte raison dans le cas de l'écarter d'après les circonstances atténuantes de l'affaire [4] » Cet arrêt-mérite d'autant plus d'être remarqué qu'il déroge à la jurisprudence précédente de la même Cour [5].

Les règles que nous venons de parcourir ne s'appliquent pas sans quelques restrictions aux délits de la presse: la loi spéciale a dérogé à cet égard à la loi commune; il faut mesurer l'étendue et les limites de cette dérogation.

Elle est toute entière dans l'art. 25 de laĵloi du 17 mai 1819, ainsi conçu : « En cas, de récidive des crimes et délits prévus par la présente loi, il pourra y avoir lieu à l'aggravation de peines prononcées par le chap. IV, liv. I du Code pénal. >>

10 février 1827; 15 février 1829; 19 avril 1832. [3] Voy. Supra pag. 68.

[4] Arr. cass., 22 janv. 1835.
[5] Arr., Colmar, 8 sept. 1833.

On lit dans les discussions législatives qui préparent cette foi, que le projet portait : Il y aura lieu à l'aggravation. Quelques députés ayanl réclamé contre cette pénalité aggravante appliquée à des délits aussi légers que le sont ordinairement les délits de la presse, il fut repondu qu'il n'y avait récidive légale, aux termes de l'art. 58 du Code pénal, qu'autant que la première condamnation excédait une année d'emprisonnement; et M. de Serre, prévoyant le cas où le second délit serait faible comparativement au premier, proposa de rendre l'aggravation facultative. Ces mots il y aura lieu, furent remplacés en conséquence par ceux-ci : il pourra y avoir lieu [1].

Ainsi, la Cour d'assises dispose, en matière de presse, des pénalités de la récidive, mais elle n'est pas tenue de les appliquer. Cette disposition facultative, innovation à l'époque de la promulgation de cette loi, n'est plus aujourd'hui que le droit commun lui-même, depuis l'extension au cas de récidive du bénéfice des circonstances atténuantes. Elle remplace, à l'égard des délits de la presse, l'atténuation autorisée par l'art. 463, et que la jurisprudence a écartée de ces délits [*].

Mais la Cour de cassation a pensé que cette faculté n'existait que lorsque les délits successivement commis sont l'un et l'autre réprimés par les lois spéciales et qu'il y a obligation d'appeler l'art. 58 du Code pénal, lorsque la première condamnation a été prononcée en vertu d'une disposition de ce Code [2]. Cette interprétation, que nous avous mûrement pesée, n'a point entraîné notre conviction; nous devons compte des motifs de nos doutes.

Rappelons, d'abord, que le projet de la loi du 17 mai 1819 portait il y aura lieu, à la place de il pourra y avoir lieu. Cependant, cette dernière expression fonde tout le système de la Cour de cassation. Cet article, à ses yeux, n'a eu qu'un seul but: c'est de substituer la faculté à la nécessité d'appliquer les peines de la récidive dans le seul cas où les deux délits sont également prévus par cette loi. Mais, n'est-ce pas placer la disposition entière dans une seule de ses parties? Quel but avait cet art. 25 dans le projet de loi? n'avait-il donc aucun sens? était-ce une disposition inutile et

[1] Séance du 21 avr. 1819. (Monit. du 22 ) [*] L'art. 15 du décret du 20 juillet 1831, maintenu depuis et qui régit en Belgique cette matière, porte que l'art. 463 du Code pénal est applicable aux dispositions de cette loi; il ajoute qu'il sera

parasite? car l'amendement n'en a changé ni le sens ni la portée; il n'a fait qu'en rendre l'application facultative.

C'est qu'une pensée plus large se manifestait dans cet article; avant de songer à rendre les peines de la récidive facultative, le législateur avait voulu limiter ces peines aux seuls cas d'une récidive formée par les délits de la presse euxmêmes. Il séparait ces délits des délits communs; c'était l'application de ce principe que nous avons rappelé en commençant ce chapitre, et qui veut que les délits qui concourent à l'aggravation de la peine soient d'une nature identique. De là les termes limitatifs de la loi; elle ne prévoit qu'un seul cas de récidive, celle des crimes et délits qu'elle punit, et si elle renvoie aux règles générales du Code, c'est pour les appliquer à la mesure des peines dans ce eas unique.

Et comment confondre, en effet, les délits de la presse, délits essentiellement politiques, avec les délits communs, pour faire des uns et des autres la base d'une même peine, pour en tirer la présomption d'une immoralité commune? Les délits de la presse ont une criminalité qui leur est propre ; elle devient plus intense quand le prévenu est en récidive, parce que cette récidive révèle un agent plus dangereux dans l'ordre politique. Mais elle n'acquiert aucune gravité d'une infraction commise dans un autre ordre de délits, parce que dans ce cas, ces deux délits n'ont ni le même but, ni le même péril, parce qu'ils ne supposent ni le même degré, ni la même nature de perversité.

Aussi la confusion de ces délits produit des résultats étranges: si le délit commun est commis en dernier lieu, la peine peut être atténuée jusqu'aux extrémités de l'échelle pénale, en vertu de l'art. 463; tandis que dans l'ordre contraire, si le délit de la presse est postérieur au délit commun, la peine demeure inflexible, fixée au maximum de la loi. Étrange système qui punit les mêmes faits de peines différentes suivant l'ordre de leur date. Ainsi les mêmes délits sont réputés des délits communs lorsqu'ils doivent supporter l'aggravation de la récidive, et pour les faire concourir avec un autre délit et des délits spéciaux, pour les écarter de l'application générale de l'art. 463.

facultatif aux tribunaux de ne pas prononcer l'interdiction des droits civiques que prononce l'arti cle 374 du Code pénal, contre le calomniateur.

[2] Arr. cass., 12 sept. 1829; 13 sept. 1832; Sirey, 1830, 1, 308; 1833, 1, 191.

Nous sommes loin de penser, toutefois, que les lois de la presse doivent être considérées comme un corps spécial de lois qui seraient soustraites à l'empire des règles communes. « Les délits de la presse ne sont autres que les délits prévus et définis par les lois pénales ordinaires et que la presse a servi à commettre : la loi de la presse ne fait que recueillir dans ces lois les actes déjà incriminés auxquels l'imprimerie peut servir d'instrument [1]. » Cette législation doit donc être regardée comme un complément et une partie du droit commun; elle doit en refléter les principes.

Mais il s'agit ici, non de fonder une théorie, mais de restituer à un texte précis son sens naturel. En général, toutes les fois qu'une loi particulière renferme une règle, il faut s'y arrêter; car cette règle est la pensée de cette loi, et l'on s'en écarte dès qu'on tente de la ployer sous l'empire des règles communes. L'art. 25 a évidemment, et nous l'avons prouvé, un sens, un but quelconque, indépendamment de la faculté qu'il laisse aux juges dans l'application des peines aggravantes; or, quel est ce but? ce ne peut être que de limiter la portée des art. 56, 57 et 58 du Code pénal, au cas seul où les deux délits appartiennent aux lois de la presse.

Ensuite, ce ne serait point imprimer à ces délits un caractère spécial que de les séparer, en ce qui concerne l'aggravation de la récidive, des autres infractions. Les délits communs diffèrent entre eux soit par leur cause impulsive, soit par leur but, soit par la nature de leur immoralité; et peut-être une loi pénale rationnelle ne devrait-elle faire concourir à l'aggravation de la peine que les délits de la même nature: telle est l'opinion que nous avons nous-même exprimée. Or, si les délits commis par la voie de la presse ne different pas des délits communs, quant à leur criminalité intrinsèque, ils en diffè rent parce qu'ils sont généralement empreints d'un caractère politique, et que dès lors leur moralité varie et se modifie suivant les circonstances politiques, l'opinion et les lumières des jurés. Leur alliance avec un délit ordinaire ne peut donc produire la même présomption de perversité que l'aggrégation de deux délits com

muns.

Si nous avons insisté sur cette question, c'est que la jurisprudence paraît s'être fixée dans un sens contraire; c'est qu'elle domine, non seulement la loi du 17 mai 1819, mais toute la lé

[1] Du jury appliqué aux délits de la presse, p.

7 et 8.

gislation de la presse. La Cour de cassation a reconnu en effet, et nous sommes parfaitement de cet avis, que « la loi du 25 mars 1822 n'est qu'une suite, une extension de la loi du 17 mai 1819 [2].» La même règle doit donc s'étendre à ses dispositions. Elle doit régir également l'art. 10 de la loi du 9 juin 1819 portant: « Les amendes pourront être élevées au double, et, en cas de récidive, portées au quadruple, sans préjudice des peines de la récidive portées par le Code pénal. » Cette disposition, à la vérité, est impérative; mais aucun texte, aucune discussion législative ne révèle l'intention de déroger à la loi du 17 mai 1819. La loi du 9 juin n'avait qu'un but: c'était de déployer une sévérité plus grande à l'égard des délits commis par la voie des journaux; mais cette intention s'accomplissait par l'élévation des peines. Telle est aussi l'opinion de l'auteur des lois de la presse: « Dans le doute, dit ce magistrat, je me garderai bien de conclure de ce qu'on a voulu plus de sévérité, qu'il faut aller jusqu'à rendre obligatoires toutes les peines de la récidive. C'est assez que les magistrats puissent donner le maximum de la peine corporelle, et même la doubler; qu'ils puissent en outre doubler et quadrupler l'amende. Je ne sépare pas le présent art. 10 de la disposition de la loi du 17 mai 1819, relative à la récidive, et je maintiens que cet article est purement facultatif [3], »

Enfin, la même règle se reproduit encore dans l'art. 15 de la loi du 18 juillet 1828, ainsi conçu : « En cas de récidive par le même gérant, et dans les cas prévus par l'art. 58 du Code pénal, indépendamment de l'art. 10 de la loi du 9 juin 1819, les tribunaux pourront, suivant la gravité du délit, prononcer la suspension du journal. » Ainsi, cette peine accessoire est, de même que les peines principales aggravantes, purement facultative.

Mais il faut remarquer que, dans cette dernière loi, la spécialité des deux délits est visiblement exigée comme une condition de la récidive: il faut que le deuxième délit ait été commis par le même gérant. L'aggravation n'est donc applicable qu'à deux délits commis par la voie du même journal.

La loi ajoute encore : « Dans le cas prévus par l'art. 58 du Code pénal, » ce qui indique qu'il est nécessaire que la première condamnation ait excédé une année d'emprisonnement. C'est là l'une de ces règles générales auxquelles

[2] Arr. cass., 22 janv. 1834.

[3] Lois de la presse, par M. Parant, pag. 124.

la législation de la presse n'a point dérogé, et le mot récidive la loi n'a voulu parler ici que qu'il était superflu de rappeler.

Cette législation renferme encore une disposition relative à un cas particulier de récidive. L'art. 7 de la loi du 25 mars 1822 punit l'infidélité et la mauvaise foi dans le compte que rendent les journaux des séances des chambres et des audiences des cours et tribunaux, et le deuxième paragraphe ajoute: « En cas de récidive, les éditeurs du journal seront, en outre, condamnés à un emprisonnement d'un mois à trois ans ; dans les mêmes cas, il pourra être interdit, pour un temps limité ou pour toujours, aux propriétaires et éditeurs du journal condamné, de rendre compte des débats législatifs ou judiciaires. >> Cette disposition soulève plusieurs questions. D'abord, y a-t-il récidive lorsque le journal, condamné pour un compte rendu infidèle d'un débat législatif, tombe dans le même délit en rapportant un débat judiciaire? Nous ne faisons aucun doute qu'il y ait lieu, dans ce cas, à l'application de la peine de la récidive, parce que le délit est de la même nature dans les deux hypothèses, et qu'il consiste, dans l'un et l'autre cas, dans l'infidélité et la mauvaise foi d'un compte rendu. C'est cette mauvaise foi, manifestée par deux actes successifs, que la loi a voulu frapper d'une peine plus sévère. Peu importe que l'une des condamnations émane d'un corps politique : la loi a momentanément investi ce corps du pouvoir judiciaire; ses jugemens, rendus dans le cercle de sa compétence, ont toute la force des jugemens émanés des tribunaux ordinaires [1].

Mais, est-il nécessaire que la première condamnation excède un an d'emprisonnement? Evidemment non, et sous ce rapport, l'art. 7 de la loi du 25 mars 1822 fait une exception formelle à l'article 25 de la loi du 17 mai 1819. Par

[1] Voy. suprà. pag. 133.

d'une seconde infraction de la même nature, et non d'une récidive légale. Une seconde exception est que l'aggravation consiste dans le même cas, non dans le maximum de la peine de l'amende, la seule qui soit infligée à la première infraction, mais dans deux peines nouvelles, celles de l'emprisonnement et de l'interdiction. Ainsi, les juges conservent, même au cas de récidive, la faculté de graduer l'amende depuis le minimum jusqu'au maximum.

Enfin, la peine de l'emprisonnement est-elle obligatoire? Ce qui pourrait le faire croire, c'est que le troisième paragraphe de l'art. 7 rend purement facultative la mesure de l'interdiction, tandis que le deuxième paragraphe semble imposer le devoir de prononcer l'emprisonnement. Mais les mêmes motifs que nous avons exposés à l'égard de la loi du 9 juin 1819 militent ici. La faculté d'appliquer les peines aggravantes, admise par la loi du 17 mai 1819, embrasse toutes les lois subséquentes, et il faut se rappeler que l'art. 463 du Code pénal est inapplicable à l'hypothèse qui nous occupe, et que cette hypothèse peut toutefois renfermer des motifs d'atténuation; on ne doit donc pas priver les juges d'un pouvoir qu'ils tiennent d'une disposition générale, et que l'art. 7 de la loi du 25 mars 1822 ne leur refuse d'ailleurs nullement d'une manière positive.

Nous terminerons ici nos observations sur la récidive. Nous avons successivement exposé les règles générales de cette matière, et les exceptions que la loi a posées quelquefois à ces règles. Nous avons parcouru le vaste champ des questions qu'elle a fait naître, en rattachant chaque solution à l'une de ces règles. Quelques difficultés relatives à la même matière se présenteront encore dans le cours de notre ouvrage ; mais elles avaient trait plus particulièrement à d'autres chapitres, et nous avons cru devoir les y renvoyer.

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FIN DU TOME PREMIER, ÉDIT. DE FRANCE.

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