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cés à temps, de la détention, de la réclusion et du bannissement, c'est-à-dire qu'elle doit être appliquée lors même que l'arrêt de condamnation ne l'a pas prononcée. D'après l'article 50, au contraire, elle ne peut être attachée aux peines correctionnelles qu'en vertu, non seulement d'un texte positif de la loi, mais encore d'une dispo sition formelle du jugement. Or, entre ces deux articles si différens, se trouve l'article 49 qui dispose simplement que « les condamnés pour crimes ou délits qui intéressent la sûreté intérieure ou extérieure de l'État [1], devront être renvoyés sous la même surveillance. » Dans ce dernier cas, la surveillance est-elle de plein droit ? Est-il nécessaire qu'elle soit formulée dans l'arrêt? Cette omission en entraînerait-elle l'annulation?

Il est inutile de faire observer que la sur veillance est de plein droit, toutes les fois que l'attentat politique est puni de l'une des peines afflictives auxquelles elle est nécessairement attachée. Mais dans les autres cas, il est indispensable qu'elle soit prononcée, car les peines de droit ne peuvent être étendues audelà des termes précis de la loi pénale. Les cours d'assises doivent donc l'exprimer lorsque le crime ou le délit rentre dans la disposition de l'article 49; l'omission de cette disposition dans l'arrêt constituerait même un droit acquis au condamné, si cet arrêt n'était pas attaqué en temps utile; car un pourvoi fondé sur cette omission le ferait nécessairement annuler sur ce chef. Ainsi, on peut remarquer cette différence entre la surveillance de droit et celle que prescrit l'article 49; que, dans le premier cas, elle existe indépendamment de la condamnation, et que, dans le dernier, les juges sont tenus de la prononcer; mais que s'ils l'omettent, et que cette omis sion soit couverte par la chose jugée, elle profité au condamné. La même solution s'appliquerait à tous les cas où la loi a rendu la surveillance, l'accessoire obligé de certains délits. M. Carnot pense que cette mesure, dans le cas de l'article 49, ne doit avoir d'autre durée que celle de la peine principale [2]. Il fonde cette opinion sur ces termes, sous la même surveillance, qui semblent assimiler cette peine à celle de l'article 48, qui pré

cède immédiatement, et qui limite, en effet, la durée de la surveillance à la durée du bannissement sous la même surveillance. Il faut donc remonter à l'article 47, qui prononce la surveillance de la haute police à vie. A la vérité, l'article intermédiaire 48 formule une exception, une limite; mais dès qu'elle n'est pas répétée dans celui qui le suit, on ne peut l'y suppléer [3].

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Enfin, la mise en surveillance échappe à la prescription. En effet, qu'elle soit temporaire, son exécution est indépendante des mesures facultatives attribuées par la loi à l'autorité administrative la suspension de ces mesures ne peut donc constituer un droit en faveur du condamné la peine est continue, et par conséquent imprescriptible. Elle n'a d'autre terme que celui marqué par le jugement ou par la loi [4].

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Il est impossible de passer sous silence plusieurs questions transitoires, mais d'un intérêt actuel, que les variations de la législation ont soulevées. La première est relative aux condamnés aux fers qui, antérieurement au Code pénal, ont été soumis à une surveillance locale, en vertu des décrets du 9 ventôse an 13 et 17 juillet 1806. Ils ont pu, sous le régime de l'ancien art. 44 du Code pénal, réclamer le bénéfice du cautionnement, d'après ce principe consacré par l'art. 6 du décret du 23 juillet 1810, que ceux qui sont atteints par la loi antérieure doivent jouir du bénéfice de la loi postérieure qui modifie et adoucit la première. D'après la même règle, ils doivent encore, s'ils n'ont pas fourni ce cautionnement, recevoir l'application de la nouvelle loi. Les précautions formulées par cette loi suffisent à la protection de l'ordre social: il serait donc trop rigoureux de se servir à l'égard de quelques condamnés, d'anciennes armes que le législateur lui-même a jugées inutiles.

Une difficulté plus grave se présente à l'égard des individus condamnés sous le Code pénal de 1810, soit qu'ils aient déjà subi leurpeine, soit qu'ils l'exécutent encore. Quels doivent être leurs droits, leur position légale, leurs obligations? Ces condamnés peuvent être partagés en deux classes: ceux qui ont fourni un cautionnement, et ceux qui ne présentent

[1] Ces crimes et délits font la matière du ch. I, prévus par la foi du 24 mai 1834, laquelle rend la tit. I, du liv. III du Code pénal.

[2]. Comment. sur l'art. 49 du Code pénal. [3] Cette solution rencontre toutefois une exception à l'égard des délits contre la sûreté de l'Etat

surveillance facultative et limitée. Voyez Journ. du droit crim., 1834. pag. 179.

[4] V. Arr. cass., 31 janv. 1834; Journ du droit crimin., p. 156.

pas cette garantie. Les premiers doivent rester dans la position qu'ils ont acquise; la loi nouvelle pour eux n'introduit aucun bénéfice, elle aggraverait au contraire leur position, puisque par l'effet du cautionnement ils sont libres de toute entrave; il y aurait alors effet rétroactif. Il en est de même pour tous ceux qui n'ont pas encore achevé de subir leurs peines, et dont le jugement a fixé le montant du cautionnement; enfin pour tous les condamnés actuellement libérés qui demanderaient à jouir de cette faculté du cautionnement; car à l'égard de tous, c'est un droit acquis, et la loi postérieure étant dans ce cas plus rigoureuse, on ne pourrait leur en faire l'application.

Mais quant aux condamnés qui n'ont pu fournir caution et qui ont maintenant une résidence obligée, quant à ceux qui, au fur et à mesure qu'ils achèveront de subir des condamnations aujourd'hui prononcées,ne réclameront pas cette faculté, il est évidentque les dispositions de la loi nouvelle les atteignent et les soumettent à leur empire, d'après le principe d'humanité et de raison que nous avons rappelé. Telles sont, au surplus, les règles que les comités de législation et de justice administrative du conseil d'État ont consacrées dans un avis du 7 novembre 1832, portant: « Qu'il est convenable que le gouvernement, usant de la faculté que lui confère l'art. 44, et dirigé par les motifs qui l'ont porté à provoquer les modifications qu'a reçues cet article, par la loi du 28 avril 1832, substitue lui-même le simple éloignement de certains lieux, à la résidence obligée dans un lieu déterminé, pour les individus déjà condamnés... que les condamnés qui avaient déjà fourni caution, conservent le bénéfice qui leur était acquis par cet article, et ne puissent être soumis aux nouvelles mesures prescrites par cette loi; enfin que la faculté de fournir caution reste acquise à tous ceux qui avaient été condamnés par arrêts ou jugemens, ayant acquis l'autorité de la chose jugée, antérieurement à la loi du 28 avril 1832, soit que la mise en surveillance n'ait pas encorc commencé pour eux, soit qu'ils se trouvent déjà placés en surveillance, faute d'avoir usé de cette faculté. »

Il reste à parler de la sanction pénale que la loi a donnée à ces diverses mesures. L'ancien art. 45 du Code pénal portait qu'en cas de désobéissance, le gouvernement aurait le droit de faire arrêter et détenir le condamné, durant un intervalle de temps qui

pouvait s'étendre jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la surveillance. Ce droit de détention administrative était l'une des dispo-sitions les plus odieuses du- Code; c'était une peine souvent très grave, quelquefois perpétuelle, prononcée sans jugement, sans que le prévenu pût se défendre, sans aucune garantie quelconque. Les principes ont été rétablis par la loi du 28 avril 1832; à l'arbitraire a été substitué le droit commun: la peine de la désobéissance ne peut plus, aux termes du nouvel art. 45 du Code pénal, être prononcée que par les tribunaux correctionnels, et cette peine est limitée à cinq ans.

On doit rechercher quel est le caractère de cette désobéissance, si elle constitue un délit ou bien une simple contravention matérielle. Il est évident que la rupture du ban n'est point un délit moral, qu'elle ne revèle point dans le délinquant une perversité plus grande, un agent plus dangereux. Elle existe, indépendamment de toute intention criminelle, par le seul fait de l'infraction aux règles prescrites par l'art. 44. La désobéissance à la loi morale constitue seule le délit; la déobéissance aux formalités imposées par les lois de police ne constitue qu'une contravention.

A la vérité, l'art. 45 a fixé les limites du maximum de la peine à cinq ans d'emprisonnement, et n'a point déterminé de minimum. Mais cette latitude a été motivée sur ce que les infractions auxquelles la surveillance peut donner lieu sont extrêmement diverses par leur importance et par leur danger. C'est au juge seul qu'il peut appartenir d'en apprécier la valeur et de les réprimer, par l'application soit d'une peine correctionnelle, soit d'une peine de simple police. L'infraction la plus grave que le condamné puisse commettre, est de se présenter dans les lieux qui lui sont interdits; les autres, consistant dans des formalités négligées, peuvent sans trop d'inconvéniens, n'entraîner que des peines légères.

Du principe qui vient d'être posé, il résulte que l'infraction du ban commise par un condamné ne peut donner lieu à l'application des peines aggravantes de la récidive. En effet, cette aggravation a sa base dans la présomption de l'immoralité plus grave de l'agent: elle elle ne peut donc s'appliquer qu'à un fait moral, à un deuxième délit. Cette opinion a été consacrée par un arrêt de la cour royale de Grenoble du 11 décembre 1833 [1].

[1] Journ. du droit crim., 1834, pag. 91.

Au reste, l'infraction du ban ne peut être panie qu'autant qu'elle a été constatée par un acte précis. Ainsi, il ne suffit pas qu'il soit allégué que le prévenu ne pouvait paraître dans les lieux où il a été saisi; il faut que l'interdiction dont il était atteint résulte d'un acte formel, ainsi que la déclaration de résidence qu'il avait faite.

En effet, cette interdiction, cette déclaration de résidence, sont les élémens de l'infraction, et il serait insolite de condamner un individu pour contravention à un ordre ou à un commandement, sans lui représenter l'ordre enfreint, sans lui prouver qu'il en a eu connaissance. Ces règles de droit commun ont déjà reçu la sanction d'un arrêt de la cour royale de Colmar, du 3 juillet 1833 [1]; et c'est, dès lors, un devoir pour les magistrats du ministère public, lorsqu'ils ont à poursuivre des infractions de cette nature, de réclamer des autorités administratives sous la surveillance desquelles les prévenus se trouvaient placés, toutes les informations propres à éclairer la justice.

Une dernière question s'est élevée sur l'effet rétroactif de l'art. 45: les tribunaux correctionnels sont-ils compétens pour connaitre des infractions dont les individus condamnés et soumis à la surveillance avant sa promulgation, se rendraient coupables? Les cours royales de Paris et de Grenoble, par deux arrêts des 30 octobre 1832 et 11 décembre 1833 [2], ont adopté une solution affirmative; et l'avis du conseil d'État, que nous avons déjà cité, décide également : « que les individus déjà condamnés, lorsque mis en surveillance avant la loi du 28 avril 1832, ils n'auraient violé

[1] Journ. du droit crim., 1832, pag. 292 et 1833, pag. 91.

leur ban que postérieurement à la publication de cette loi, doivent, conformément au nouvel art. 45 du Code pénal, être renvoyés pardevant les tribunaux correctionels pour y être condamnés à la peine indiquée dans cet article.

Nous partageons complètement cette opinion. L'état de surveillance est une conséquence d'une condamnation antérieure; mais la désobéissance aux règles qui établissent cet état est un fait étranger à la condamnation, et qui n'en dérive nullement c'est un délit nouveau qui, conformément au principe général, ne peut être atteint que par les lois en vigueur, au moment où il est commis. L'article abrogé a donc cessé d'être applicable même aux condamnés dont la surveillance est antérieure à l'abrogation.

Nous terminerons ce chapitre par une observation qui s'applique à toutes les interdictions de droits qui s'y trouvent traitées : c'est que ces incapacités, quelles qu'elles soient, cessent à la fois à la réhabilitation du condamné. « La réhabilitation, porte l'art. 633 du Code d'instruction criminelle, fait cesser pour l'avenir, dans la personne du condamné, toutes les incapacités qui résultaient de la condamnation. » Ainsi, cette heureuse institution laisse entrevoir aux yeux du condamné un terme à la perpétuité de ces privations souvent si pénibles.

Il est à regretter peut-être que cette faculté de la réhabilitation, à laquelle notre dernière loi pénale a apporté de notables améliorations, et qui pouvait exercer une si forte influence sur l'amendement moral des condamnés, soit encore entravée par trop de formes et de solennités.

[2] Journ, du droit eriminel, 1832, pag. 292, et 1833, pag. 91.

CHAPITRE VII.

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DES CONDAMNATIONS PÉCUNIAIRES.-DE L'AMENDE. SYSTÈME DU CODE ET RAPPROCHEMENS DES LÉGISLATIONS ÉTRANGÈRes. CARACTÈRE PÉNAL DE L'AMENDE. -LOIS SPÉCIALES. QUESTIONS DIVERSES.-DES RESTITUTIONS CIVILES ET DES DOMMAGES-INTÉRÊTS.—PRINCIPES ET APPLICATION. —DES FRAIS EN MATIÈRE CRIMINELLE, Correctionnelle et de police.— RÉGLES GÉNÉRALES.-EXAMEN DE LA LÉGISLATION, DE LA JURISPRUDENCE et de la doctrine. – ART. 9, 10, 11, 51 ET 52 DU CODE PÉNAL.

Les condamnations pécuniaires comprennent l'amende, les restitutions civiles et les frais. Nous allons successivement parcourir les règles différentes qui s'appliquent à chacune de ces matières.

§ I. De l'Amende.

tion, a des effets utiles, et convient parfaitement à une certaine classe de délits. Elle est divisible presque à l'infini: elle descend jusqu'aux degrés les plus infimes de l'échelle pénale, et peut se trouver en rapport avec les plus légers. Elle est réparable: Il ne s'agit que d'en effectuer le remboursement. Enfin, « il n'est point de peine, dit Bentham, qu'on puisse asseoir avec plus d'égalité, ni mieux proportionner à la fortune des délinquans [4]. » En effet, tout le mal produit par cette peine se réduit à une simple privation, à la perte de telle somme. Or, privez deux délinquans du dixième, du vingtième de leur fortune respective; que l'amende consiste, non dans la même somme nominale, mais dans une somme également proportionnelle à leur capital, la privation sera la même, l'égalité de la peine serà complète.

En France, cette peine paraît avoir pris son origine, moins dans les lois romaines que dans les anciennes compositions des Francs et des Germains. Ces compositions, communes aux peuples barbares, et qu'on retrouve avec étonnement de notre temps dans les lois d'une nation civilisée, celles de la Chine [1], rachetaient à prix d'argent les crimes les plus graves, qui étaient ainsi amendables à volonté; mais cet argent n'était pas entièrement pour l'offensé une partie appartenait au roi ou au leude sur les terres duquel se rendait la justice [2]. Or, quand les compositions furent abolies [3], cette portion, à la quelle le nom d'amende resta, fut maintenue « principalement, dit Muyart de Vouglans, pour indemniser le roi et les seigneurs des frais qu'ils sont obligés de faire pour la poursuite des criminels [4] >> L'amende, graduée dans une juste propor- laissent trop de part à l'arbitraire.

[1] Ta-tsing-leu-lée, ou Code pénal de la Chine, traduit du chinois par Staunton, 1812, t. Jer, pag. 11.

[2] Voyez Loiseau, Traité des offices, 1. I, chapitre XIV, no 86 et suiv. - Pastoret, Lois pénales, 2o part. ch. VIII.

Mais, dans cette matière surtout, il y a loin de la théorie à l'application: cette égalité relative des amendes est l'un des problèmes les plus difficiles de la législation pénale. Tous les Codes ont eu pour but de la résoudre; mais leurs dispositions sont insuffisantes, soit parce qu'elles sont trop vagues, soit parce qu'elles

[3] On en voit encore des vestiges au xvie siècle. Voyez Ord. 3 mars 1356. Decrusy et Isambert, t. IV, p. 821.

[4] Lois crim., p. 84.

[5] Théorie des peines, pag. 340.

Le droit romain posait des règles pleines d'humanité : les amendes excessives étaient nulles de plein droit mulcta immoderata et excessiva, ipso jure nulla est [1]. Le juge pouvait en diminuer le taux et même en faire la remise: judex mulctam vel minuere, vel etiam remittere valet [2]. Les pauvres en étaient exempts: potest remitti ex causâ paupertatis [3]. Et dans ce dernier cas, la peine pécuniaire ne pouvait être convertie en peine corporelle [4]. Enfin cette peine n'emportait jamais d'infamie par elle-même [5].

Cette dernière règle n'était point suivie dans notre ancienne législation: les amendes étaient infamantes toutes les fois qu'elles étaient prononcées sur une procédure extraordinaire [6]. Du reste, presque toujours accessoires à d'autres peines, les amendes étaient en général ou fixes ou arbitraires dans ce dernier cas, le juge pouvait en mesurer la quotité suivant les circonstances, la nature du crime, et, comme l'ajoute Jousse [7], suivant la qualité de l'accusé.

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Cet abandon des amendes à l'arbitraire du juge se retrouve dans plusieurs législations modernes. Le Code pénal d'Autriche reproduit souvent cette simple formule: Amende proportionnée aux moyens du coupable. La grande Charte d'Angleterre (art. 25, 26, 27 et 28) proclame « que la peine pécuniaire doit être proportionnée aux facultés et à la situation du coupable, qu'elle ne doit jamais être assez forte pour obliger un fermier d'abandonner son champ, un marchand de cesser son trafic, et un laboureur de vendre ses instrumens de culture. » Ce principe est le seul qui régisse les amendes dans la législation anglaise elle s'est abstenue d'en déterminer le taux. Le Code prussien exempte tout-à-fait des amendes les classes les plus pauvres de la société (art. 85), il les convertit en travaux correctionnels ou en détention; la détention est calculée à raison de huit jours par cinq écus d'amende (art. 88).

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Le législateur du Brésil a adopté un autre système; l'art. 55 de son Code pose un principe général ainsi conçu : « La peine de l'amende

obligera les coupables au paiement d'une somme pécuniaire qui sera toujours réglée selon ce que les condamnés peuvent retirer chaque jour du revenu de leurs biens, emplois ou industrie. >> Si ce principe peut se traduire dans une application fidèle, la question de la mesure des amendes peut être considérée comme résolue; car, avec une telle règle, l'amende cesserait d'être illusoire pour le riche et accablante pour le pauvre : elle pèserait du même poids sur toutes les classes de la société.

Mais le juge aura-t-il les moyens de calculer avec justesse les revenus de chaque délinquant? Comment réunira-t-il les élémens de ce calcul, lorsque ceux-ci seront intéressés à les lui céler? S'il tombe dans quelque erreur, si son calcul est inexact, l'inégalité de la peine ne devientelle pas aussitôt manifeste? La base est juste, mais ne suffit pas; il aurait fallu y joindre les moyens d'en faire une exacte application. Arrivons à notre législation.

Le code rural du 28 septembre 1791 et le code des délits et des peines du 3 brumaire an 4, avaient pris pour base de l'amende la valeur de la journée de travail. Cette disposition aurait eu quelque analogie avec le code du Brésil, si le taux de l'amende y avait été calculé sur le prix de la journée de chaque délinquant. Mais la loi n'avait pas été jusque-là; elle s'était bornée à évaluer le taux de la journée de travail dans chaque localité, et ce taux moyen était ensuite doublé, quadruplé, suivant le caractère du délit, et abstraction faite de la fortune du délinquant.

Le Code pénal a changé cette sorte d'unité, base des amendes, sans changer le système de leur pondération. Sa théorie, simple et claire, a été d'établir des amendes uniformes à l'égard de tous les prévenus, et dont le taux fût en proportion avec la gravité des délits. « Le projet, disait l'exposé des motifs du Code, laisse au juge une certaine latitude pour fixer la quotité de l'amende correctionnelle : les circonstances qui atténuent ou qui augmentent un délit ne peuvent être toutes prévues par la loi; il faut donc accorder au juge le moyen de proportionner

[1] Farinacius, de delictis et pœnis, quæst. question et la résout négativement. Tiraquean XVIII, no 29.

[2] Ibid., no 55.

[3] Farinacius, de delictis et pœnis, quæst. XVIII. Tiraqueau dit également : « Mitius est agendum cum pauperibus quàm cum divitibus, cum agitur de pœnâ pecuniaria. » (De Pœnis temp., 137).

[4] Farinacius, loc. cit., no 57, discute cette

adopte cette solution : Propter inopiam solvendi mulctam non fit mutatio ipsius mulctæ in corpus.>> (Loc. suprà cit.)

[5] Non muleta, sed causa, infamiam irrogat. L. 4, § 4, ff. de his qui not. inf.

[6] Ord. de 1870, tit. 25.
[7] Just. crim., t. I, pag. 63.

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