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Le faint Evêque, dont les aumônes étoient trèsAVRIL 1. abondantes, réfolut un jour de vendre fes chevaux, afin de procurer plus de fecours aux pauvres.

!

Il fe croyoit d'ailleurs en état de faire à pied la vifite de fon Diocèfe. Saint Bruno le détourna de l'exécution d'un tel deffein, en lui repréfentant qu'il comptoit trop fur fes forces, & qu'il devoit ménager fa fanté, dont le dépériffement étoit fenfible. Il fut en effet fort infirme durant les quarante dernieres années de fa vie. Des maux de tête & d'eftomac prefque continuels lui caufoient de vives douleurs, & l'auroient fouvent empêché, s'il eût eu moins de zele, d'exercer les fonctions épifcopales. Dieu permit encore qu'il fût rudement éprouvé par des tentations intérieu res; mais il fut lui-même fon confolateur, & le combla de ces graces qui font tirer avantage des affauts du tentateur.

Hugues ne pouvoit s'empêcher de pleurer toutes les fois qu'il penfoit aux miferes de l'homme, & à cet amour infini dont Dieu nous a donné tant de marques. Il lui arrivoit fouvent de ne pouvoir retenir fes larmes en public, fur-tout lorsqu'il entendoit lire l'Ecriture Sainte. Comme un autre Ambroife, il pleuroit dans le Confeffionnal avec fes pénitents, & par-là les faifoit entrer dans les fentiments de la plus vive componction. Il prêchoit avec une onction qui attendriffoit les ames les plus infenfibles; & il n'étoit pas plutôt defcendu de chaire, qu'il fe livroit à l'adminiftration du Sacrement de pénitence. Il fe jettoit quelquefois aux pieds de ceux qui avoient des inimitiés, afin de les engager à oublier les injures reçues, & à faire au prochain les fatisfactions convenables. Il étoit extrêmement circonfpect dans la direction des femmes. Mort au monde & à tous

fes

fes biens, il n'avoit que du dégoût pour les affaires temporelles. Il n'aimoit ni à entendre, ni à AVRIL 1 raconter les nouvelles publiques, tant il craignoit de bleffer la charité par la médifance, & même de fe diffiper. Son amour pour les pauvres, dont nous avons déja parlé, éclata fur-tout dans un temps de famine. Il vendit pour les affifter, un calice d'or & une partie de fes ornements épifcopaux. Son exemple ouvrit la bourfe des perfonnes riches; & les malheureux de fon Diocèfe ne manquerent point de fecours.

Il ne défiroit rien tant que d'aller mourir dans la folitude. Il pria le Pape Innocent II de lui donner un fucceffeur, & il employa, pour l'y déterminer, les raifons les plus preffantes. Mais le fouverain Pontife n'eut aucun égard à fes prieres; & il fut obligé de se réfoudre à mourir Evêque. Dieu, avant de l'appeller à lui, acheva de le purifier par les douleurs d'une longue maladie, qui lui fournit l'occafion de pratiquer les plus héroïques vertus. Quelque temps avant fa mort, il perdit la mémoire; il oublia tout, excepté fes prieres, qu'il récitoit prefque continuellement. On eut beau lui repréfenter que la continuité avec laquelle il prioit, augmenteroit de beaucoup fon mal, on ne put le taire changer de conduite. Il difoit même à ce fujet, que la priere, loin de le fatiguer, lui donnoit au contraire de nouvelles forces. Jamais on ne lui entendit prononcer une feule parole qui marquât la moindre impatience. Il s'obfervoit jufqu'à ne point parler de fes maux. Il remercioit avec humilité ceux qui lui rendoient quelque fervice; & s'il lui arrivoit de caufer la moindre peine à quelqu'un, il s'en accufoit comme d'une faute, & prioit Dieu avec larmes de le lui pardonner. Un de ceux qui le vifitoient ordinai

Tome 111.

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rement lui ayant dit qu'il ne devoit pas pleurer AVRIL 1. fi amérement, parce qu'il n'avoit jamais péché volontairement en matiere grave, il répondit : «La vanité & les affections défordonnées fuffi

» fent pour damner une ame. Ce n'eft que par la » miféricorde de Dieu que nous pouvons espérer » d'être fauvés; nous ne devons donc jamais ceffer » de l'implorer. La vie, disoit-il à ceux qui parloient » de nouvelles en fa préfence, ne nous a pas été » donnée pour tenir des difcours inutiles, mais pour pleurer nos péchés & pour en faire pé

>>> nitence ».

La bienheureufe mort de faint Hugues arrival le premier Avril 1132. Il étoit âgé de près de quatre-vingts ans, & en avoit paffé cinquante-deux dans l'Epifcopat. Il fut canonifé par Innocent II, en 1134. Son nom fe trouve en ce jour dans le Martyrologe Romain (a).

L'amour extraordinaire qu'avoit faint Hugues pour la retraite, n'a rien qui doive nous furprendre. C'eft en effet dans la folitude qu'on apprend à con noître Dieu & à fe connoître foi-même; qu'on détache fon cœur de toute affection défordonnée, & qu'on lui inspire du goût pour les biens éternels; qu'on foumet entiérement la chair à l'efprit; qu'on purifie fon ame de toutes les fouillures inféparables de la fragilité humaine; qu'on fe revêt enfin de Jefus-Chrift pour devenir une créature nouvelle. Les occupations des Solitaires les rendent en quelque forte femblables aux Anges,

(a) Saint Hugues eft compté | hiftoriques fort curieuses, le, parmi les Écrivains Eccléfiaf- quel fe garde Mf. à Grenoble, tiques, principalement à caufe Cet Ouvrage a été utile au derde fon Cartularium ou recueil nier éditeur du Gloffaire de de Chartes, avec des remarques du Cange.

puifque, comme eux, ils paient continuellement à Dieu un tribut de louanges, d'adoration, d'a- AVRIL 1. mour, d'actions de graces. Mais il faut, s'ils veulent plaire à Dieu, & jouir des avantages attachés à leur état, qu'ils fe faffent une violence continuelle, qu'ils veillent perpétuellement fur leurs fens, qu'ils aient fans ceffe la mort devant les yeux, & qu'ils ne négligent aucun des exercices propres à les entretenir dans l'efprit de componction & de pénitence. Tous les hommes ne font pas fans doute appellés à une entiere féparation du monde. Mais tous font appellés à fe dérober de temps en temps au tumulte des affaires pour rentrer en eux-mêmes, & pour fe faire une folitude au fond de leur cœur. Voilà le feul moyen qu'ils aient d'empêcher les dépériffements infenfibles qu'éprouve la piété au milieu du commerce du monde. Sans cette précaution, ils ne tarderont point à fe relâcher; & bientôt ils perdront cette vie de la foi qui eft l'unique principe de toutes les actions chrétiennes.

LE MÊME JOU R. SAINT MÉLITON, ÉVÊQUE DE SARDES EN LYDIE.

CE Saint fut élevé à l'Épifcopat sous le regne de l'Empereur Marc-Aurele. Il adreffa à ce Prince en 175 une Apologie très-folide de la Religion Chrétienne. Nous n'avons aucuns détails fur les autres actions de fa vie. Nous favons feulement que l'efprit de prophétie, dont il étoit doué dans un degré éminent, lui fit donner le furnom de Prophete. Il compofa plufieurs Ouvrages qui font

fouvent cités par les anciens. Dans un de ces AVRIL 1. Ouvrages, il donna un catalogue des Livres de l'Ancien Teftament que l'Eglife univerfelle reconnoît pour canoniques (a). Il enfeigne de la maniere la plus claire, que Jefus-Christ étoit véritablement Dieu avant tous les fiecles, & véritablement homme, depuis fa naiffance de la Sainte Vierge. Ces paroles ont fervi merveilleufement à confondre les Ariens & les Eutychiens (b). Voyez Eufebe, Hift. l. 4. c. 26. l. 5. c. 24. & faint Jérôme, Catal. c. 24.

SAINT GILBERT, ÉVÊQUE DE CATHNESS EN ÉCOSSE. +1240 CES E Saint entra dans l'Ordre des ChanoinesRéguliers, que l'efprit de priere, de mortification & de pénitence avoit rendu très-célebre. Son mérite & fes vertus le firent élire Archidiacre de Murray, puis Evêque de Cathneff. Il gouverna fon Diocèfe avec beaucoup d'édification durant l'espace de vingt ans. Sa fainteté, qui le rendoit comparable aux Pasteurs des premiers fiecles, fut récompenfée par le don des miracles. Il mourut l'an 1240. On trouve un Office en fon honneur dans le Bréviaire d'Aberdeen, fous le premier d'Avril.

Voyez le Bréviaire d'Aberdeen, & Keith, in Catal. Epifcop. Scot.

(4) Ce catalogue nous a été | c. 13. les autres par Eusebe, confervé par Eusebe. Hift. l. 5. c. 28. & par la Chro(b) Les unes font citées par nique pafchale fous l'OlymAnaftafe le Sinaïte, in Odego,piade 236.

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