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prefque tout fon Diocèfe des impiétés de l'héréfie AVRIL 12. & des fuperftitions du Paganisme. Son troupeau étant confidérablement augmenté, il entreprit de bâtir une grande Eglife. Il fut aidé dans cette bonne œuvre par des perfonnes riches de Vérone qui fans avoir été follicitées, lui fournirent des fonds abondants (2). On éleva une Croix dans cette Eglife, afin qu'elle en fut comme le rem part (3).

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Parmi les vertus que le faint Pasteur inspiroit à fon peuple, par fes exemples plus encore que par fes difcours, il n'y en avoit point qu'il re commandât plus fortement que la charité envers les pauvres. Auffi l'on vit fes Diocésains porter cette vertu fi loin, que leurs maifons étoient toujours ouvertes aux étrangers. Ils prévenoient les malheureux, & leur épargnoient jufqu'à la honte de demander (4). Le Saint crut devoir les féliciter de leurs libéralités. « En donnant votre ar»gent aux pauvres, leur difoit-il, vous amasseż » de gros intérêts dans le ciel. Vous tirez un »profit très- confidérable de vos tréfors, fans

exciter l'envie. Quoi de plus riche qu'un homme > dont Dieu lui-même veut bien être le débiteur>>> Les Goths ayant battu les Romains à Andrinople en 378, firent un très-grand nombre de prifonniers dans la Thrace & l'Illyrie (d). Les habi tants de Vérone donnerent en cette occafion de nouvelles preuves de leur charité; leurs aumônes procurerent la liberté à plufieurs captifs. Ils en

(2) Saint Zenon, l. 1. Tr. | mains n'avoient jamais été fi mal14. p. 103.

(3) Ibid. p. 106.

(4) L. 1. Tr. 10. p. 83.

(d) La bataille d'Andrinople fut très-fanglante, & les Ro

traités depuis la journée de Cannes. Voyez Ammien - Mar cellin, Zozime, l. 4. t. 31. & faint Ambroife, de Offic. 1. 2. c. 15. & 28.

délivrerent d'autres, par le même moyen, des travaux pénibles auxquels ils avoient été condam- AVRIL 12. nés, & de la mort cruelle qui les menaçoit.

Autant faint Zénon étoit charitable pour les pauvres, autant il étoit dur à lui-même. Il fe refufoit tout ce qui n'étoit point indifpenfablement néceffaire aux befoins de la nature. Il s'appliquoit à former des Clercs pour le fervice des Autels; il s'affocioit auffi des Prêtres, auxquels on donnoit à Pâque une rétribution proportionnée à leurs befoins, & aux fonctions qu'ils exerçoient (5) C'étoit auffi à Pâque qu'il faifoit les Ordinations & qu'il réconcilioit folemnellement les Pénitents. Nous apprenons de faint Ambroife (6.) qu'il y avoit à Vérone des Vierges qui portoient le voile, & qui s'étoient confacrées à Dieu par le miniftere de faint Zénon. Les unes vivoient dans leurs maisons, & les autres dans un Monaftere dont le Saint avoit la direction. Il paroît que ce

apaq fontinas qules Oxirations (8).

(5) Saint Zénon, 1. 2. Tr. so. | au moins certain par le témoi❤ de Pafcha 6. p. 261.

à

(e) Voyez faint Zénon, loco fap. cit. Pâque ne fe trouve point dans l'énumération, des temps marqués pour conférer les Ordres Sacrés, laquelle a été faite par le Pape Gélafe, Ep. 9. ad Epifc. per Bruttios & Lucaniam, c. 1. par le Pape Zacharie dans le Concile tenu Rome en 743, c. 2. &c. Quelques Auteurs ont conclu delà avec le P. Quefnel, in Op. S. Leon. Diff. 3. n. 5. & not. in Ep. 11. & avec le P. Mabillon, Muf. Ital. T. 2. p. 104. qu'anciennement Pâque n'étoit point un des temps marqués pour la Collation des SS. Ordres. Il eft

gnage de S. Zénon, l. 2. Tr. 49.
de Paschâ 5. p. 261. qu'on ordon-
noit à Paque à Vérone, & felon
toutes les apparences, dans plu
fieurs autres Eglifes. Quant à la
réconciliation des Pénitents, elle
fe faifoit le Jeudi Saint, fuivant
les Sacramentaires de Gélafe
&c. Elle ne fe faifoit pourtant
que le Vendredi Saint à Milan,
comme on le voit par une lettre
de faint Ambroife, Ep. 20. ad
Marcellin. n. 26. Cette coutume
pafla depuis en Espagne, ainfi
que dans quelques Eglifes de
France. Voyez le P. Martene
T. 2. de Antiq. Ecclef. Rit. I. 1.
c. 6. a. 5.

(6) Ep. 5. ad Syagr
C c ii)

Monaftere exiftoit avant que faint Ambroise en AVRIL 12, eût fondé aucun à Milan.

On abufoit depuis long-temps des Agapes ou repas de charité qui fe faifoient aux Fêtes des Martyrs. Ils n'étoient plus pour un grand nombre de Chrétiens, qu'une occafion de vanité & d'intempérance. Saint Zénon combattit ce défordre avec fon zele & fon éloquence ordinaires (7); & l'on ne peut douter qu'il ne foit un des Evêques d'Italie, loués par faint Auguftin (8), pour avoir banni de leurs Diocèfes la fource de tant d'abus. Il corrigea avec le même fuccès ceux qui par leurs cris & par leurs larmes, troubloient les Prieres & les Sacrifices que les Prêtres offroient à Dieu pour les morts (ƒ). Enfin, après avoir conduit fon Diocèfe avec autant de vigueur que de prudence, Zénon alla recevoir dans le ciel la récompenfe de, fes travaux. La patience, l'humilité & une follicitude vraiment paftorale furent les vertus qui brillerent le plus dans fa perfonne, Il falloit qu'il les poffédât dans un degré bien éminent, pour en parler avec autant de feu & d'énergie, qu'il l'a fait dans fes discours.

Voici comment il termine fon Sermon fur la patience. «O patience, ô Reine de toutes chofes, que je voudrois bien être en état de vous » célébrer, mais plus par ma conduite que par » mes paroles !..... Vous êtes l'appui des Vier»ges, le port des veuves, la guide des époux, » le lien des amis, la confolation, la joie, &

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(7) L. 15. Tr. 1. p. 115. Vid. | bus à Sacerdotibus Dei quiefcen Annot, 18. ibid. & S. Ambrof. tes commendari confueverunt, L. de Elia & jejunio, c. 17. n. 62. | profanis aliquoties ululatibus (8) Ep. 22. 29. & Confef. l. 6. rumpit. S. Zen. 1. 1. Tr. 16. P. 126. (f) Solemnia ipfa divina qui

C. 2.

» fouvent la liberté des efclaves. C'eft par vous » que les pauvres trouvent le vrai bonheur dans AVRIL 12. » leur état; c'eft par vous que les Prophetes fe » font perfectionnés dans la vertu, & que les » Apôtres ont été unis à Jesus-Chrift. Vous êtes » la couronne & la mere des Martyrs, le bou»levard de la foi, le fruit de l'efpérance, l'amie » de la charité...... Heureux, mille fois heu»reux, celui qui vous poffede toujours dans fon » ame (9) » ! Il parle ainfi de la charité dans fon Sermon fur cette divine vertu: «O charité! » que vous êtes tendre, que vous êtes riche, que » vous êtes puiffante! On n'a rien quand on ne » vous poffede pas. Vous avez pu changer Dieu » en Homme. Vous avez vaincu la mort, en » apprenant à Dieu à mourir, &c. (10).

Saint Zénon mourut en 380, le 12 Avril, jour auquel il eft nommé dans le Martyrologe Romain. On célebre à Vérone deux autres fêtes en fon honneur, l'une le 21 Mai, & l'autre le 6 Décembre. La premiere a pour objet la tranflation de fes Reliques, & la feconde fon ordination, ainfi que la Dédicace de fa nouvelle Eglife, qui fe fit fous Pepin, Roi d'Italie. La premiere Eglife qui porta le nom du Saint, fut bâtie fur fon tombeau, & fur les bords de l'Agide, hors les murs de Vérone. Il s'y opéra en 589, un miracle éclatant que faint Grégoire rapporte de la maniere fuivante (11); il l'avoit appris du Patrice Jean, qui en avoit été témoin oculaire avec le Roi Autharis & le Comte Pronulphe.

Dans le temps que le Tibre débordé couvroit de fes eaux un quartier confidérable de Rome

(9) L. 1. Tr. 6. de patientia, (10) L. 1. Tr. de charitate. p. 63.

(11) Dial. l. 3. e. 19.

* une grande partie de la ville de Vérone fut fub AVRIL 12. mergée par une inondation de l'Adige, qui fe précipite du haut des montagnes. Le peuple courut en foule à l'Eglife de faint Zénon les eaux parurent en respecter les portes; elles s'éleverent à la hauteur des fenêtres fans entrer dans l'Eglife; elles refterent fufpendues comme celles du Jour. dain lors du paffage des Ifraélites. Le peuple refta vingt-quatre heures en prieres; après quoi le Fleuve rentra dans fon lit. Ce miracle, dont tous les habitants de Vérone furent témoins oculaires, joint à plufieurs autres qui s'opérerent dans la fuite, augmenta de beaucoup la dévotion qu'on avoit déja pour le Saint. Rotalde, un de fes fucceffeurs, transporta fes Reliques en 865, dans la nouvelle Eglife bâtie fous fon invocation. On les y garde encore avec une finguliere vénération dans une Chapelle fouterraine (g),

(g) On imprima à Venife, en 1508, 127 Sermons fous le nom de faint Zénon. Ils ont été réimprimés à Vérone en 1586, & dans la Bibliotheque des Peres. Il n'y a que la premiere partie qui porte le nom de faint Zé non, dans les Mff. comme dans celui qui fut donné par Hincmar au Monaftere de Saint Remi de Reims; la feconde contient des pieces de différents Auteurs dont les noms font inconnus. Ceci a fait tomber dans plufieurs fautes Tillemont, Dupin, Ceillier, &c. fautes qui ont été très-' bien relevées par MM. Ballerini, dans l'excellente édition qu'ils ont donnée des Œuvres de faint Zénon, à Vérone en 1739. in-fol. & qu'ils ont dédiée au Cardinal Paffionei. Ces deux Sayants

ont jetté auffi le plus grand jour fur les difficultés qu'on pourroit former touchant les Ecrits du Saint. Ils ont appellé fes Sermons Tractatus, d'après les anciens Míï. C'étoit le nom qu'on donnoit autrefois aux inftructions courtes & familieres qui fe faifoient au peuple.

Les Traités ou Sermons de faint Zénon font divifés en deux livres, dont l'un en contient seize, & l'autre foixante-dixfept. Ceux du deuxieme livre font beaucoup plus courts que ceux du premier. On trouve dans tous des chofés fort importantes fur le dogme, la morale & la difcipline Il paroît par le trentecinquieme, L. 2 p. 23. que dù temps de faint Zénon c'étoit la coutume de plonger dans l'eau

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