Images de page
PDF
ePub

un confolateur qui lui adouciffoit le sentiment de fes peines. Quelle ne dut pas être la pureté & la MARS 19. fainteté de celui que le Ciel avoit choifi pour être

le gardien de la plus pure & de la plus fainte des Vierges !

Il paroît que faint Jofeph. ignora affez longtemps le prodige que le Saint Efprit avoit opéré dans Marie. Il s'apperçut pourtant à la fin de sa groffeffe. La conduite qu'il avoit tenue, jointe à l'éminente fainteté de Marie, fit naître en lui des réflexions qui le jetterent dans la plus grande perplexité. Comme il étoit jufte & rempli de charité pour le prochain, il résolut de la quitter fecrétement, fans la condamner, ni même l'accuser. De pareilles difpofitions ne refterent pas fans récompenfe. Lorsqu'il fe préparoit à exécuter fon deffein, un Ange lui apparut en fonge. Il venoit, non pour lui faire des reproches, mais pour dif fiper fes doutes & fes craintes, en lui révélant la groffeffe de Marie étoit miraculeuse, & que la vertu du Très-Haut avoit formé dans fon chafte fein le corps adorable du Sauveur du monde. La conduite de faint Joseph est bien propre à confondre tous ces Chrétiens, qui, fur de fimples conjectures, ou fur le témoignage trompeur des fens, fe livrent aux foupçons les plus injurieux, & déchirent enfuite impitoyablement la réputation de leurs freres.

que

Enfin arriva le temps où Marie mit au monde le Rédempteur du genre humain, le Défiré des nations. Jofeph fut le premier de tous les hommes qui eut le bonheur de l'adorer. Il faudroit avoir fon cœur pour comprendre ce qu'il dut alors éprouver, & pour fe former une jufte idée de la dévotion, du refpect & de l'amour avec lefquels il adora le Sauveur qui vouloit bien être réputé

[ocr errors]

fon fils. Quelle fidélité à correfpondre aux def MARS 19. feins du Pere éternel qui l'avoit chargé tout à la fois de nourrir le Verbe fait chair, & de garder fa bienheureuse Mere! C'est-là, dit faint Bernard en parlant de faint Jofeph (2), « c'eft-là ce fer» viteur fidele & prudent que notre Seigneur a » établi fur fa famille, pour être le foutien & la » confolation de fa Mere, fon pere nourricier & »fon digne coopérateur dans l'exécution de fes » deffeins miféricordieux fur la terre. . . . . . Quel bonheur pour lui de voir non-feulement Jefus-Chrift, mais encore de l'entendre, de le » tenir dans fes bras, de le porter d'un lieu à » un autre, de le careffer, de l'embraffer, de le » nourrir, d'être admis dans la participation de »ces ineffables fecrets qui ont été cachés aux yeux » du monde ! O prodige d'élévation! O dignité » incomparable, s'écrie le pieux Gerfon, en s'a» dreffant à faint Jofeph (3)! La Mere de Dieu, » la Reine du ciel vous appelle fon Seigneur, le » Verbe fait chair vous appelle fon Pere & vous » obéit. O Jefus, ô Marie, ô Jofeph, qui formez »fur la terre une glorieufe Trinité, en qui l'augufte » Trinité du ciel met toutes fes complaifances! » Que peut-on imaginer ici-bas d'auffi grand » d'auffi bon, d'auffi excellent » ?

[ocr errors]

Mais ce qu'il y a de plus admirable dans faint Jofeph, c'eft qu'au milieu des graces extraordinaires dont il eft favorifé, il conferve l'humilité la plus profonde: il vit dans l'obfcurité comme le dernier des hommes; il cache les privileges ineffables dont il eft honoré; il ne publie rien des myfteres incompréhensibles qui viennent de

(2) Serm. 2. fuper Miffus eft,: (3) Serm. de Nativ.

n. 16, p. 742.

s'accomplir; il ne cherche point à les pénétrer,

& laiffe à Dieu le foin de les manifefter dans le MARS rg. temps fixé par fes décrets; il ne pense qu'à cor refpondre aux vues de la providence fur lui, & fe borne uniquement à ce qui le regarde. Quoiqu'iffu du fang des anciens Rois de Juda, il fe plaît dans une condition vile aux yeux du monde, & n'a d'autre ambition que de fournir par le travail de fes mains aux befoins communs de la Sainte Famille (a).

Jofeph fut l'inftrument dont Dieu fe fervit pour fauver l'Enfant Jefus de la fureur d'Hérode. Ce Prince cruel & jaloux ayant résolu le massacre des Innocents, un Ange apparut à Jofeph, & lui ordonna de fe lever, de prendre Jefus, de. fuir en Égypte & d'y refter jufqu'à ce qu'il fût averti d'en fortir. Une fuite auffi foudaine ne déconcerta point le Saint. Il obéit fur le champ, fans même s'informer du temps marqué pour le retour. Il est aifé de juger de ce qu'il eut à fouffrir en traversant de vaftes déferts & des pays inconnus, avec un enfant & une tendre vierge. Saint Chryfoftome remarque (4) à cette occafion, que Dieu traita faint Jofeph, comme il a coutume de traiter fes ferviteurs. Il leur envoie des épreuves pour purifier leurs cœurs des fouillures de l'amour propre, de maniere toutefois qu'il mêle

(4) Saint Joseph étoit artifan, qu'il travailloit à des ouvrages ce que faint Matthieu, XIII. 55. de fer, comme font lés ferruexprime par le mot Faber. Ilriers. Il est affez probable qu'il travailloit à des ouvrages de travailloit en fer & en bois. Le bois, comme font les charpen-texte de faint Juftin favorife tiers, felon faint Juftin, Dial. cette opinion. « Jofeph & Jefus, n. 9. edit. Ben. Saint Ambroife, in Luc. p. 3. Théodoret, Hift.

dit ce Pere, faifoient des char-
rues & des jougs pour les
bœufs "..

3. c. 18. Saint Hilaire, in» Matt. c. 14. p. 17. & faint Pierre (14) Hom. 8. in Matt. T. 7. Chryfologue, Serm. 48. difent p. 123. edit. Ben.

à leur amertume la douceur des confolations.

MARS 19. » Joseph, dit ce Pere, eft inquiet en voyant la

[ocr errors]

» groffeffe de Marie, mais un Ange vient le tirer » de fes perplexités. Il fe réjouit à la Naiffance » de Jefus, mais cette joie eft fuivie d'une grande crainte. Hérode, & toute la ville de Jérufalem » confpirent contre les jours de l'Enfant. La joie » renaît à l'adoration des Mages; mais elle eft » troublée par une nouvelle crainte : il faut fuir » dans une terre inconnue ».

. Nous lifons dans les Peres, qu'à l'entrée de Jefus en Egypte, les Oracles devinrent muets & que les Statues des faux Dieux \tremblerent, furent même renverfées en plufieurs endroits conformément à ce paffage du dix-neuvieme chapitre d'Ifaie Les Idoles d'Egypte feront ébranlées devant fa face (b). Les Peres attribuent encore au féjour que le Sauveur fit en Egypte, cette merveilleufe fécondité qui y produifit durant plufieurs fiecles une multitude innombrable de Saints (c).

Après la mort d'Hérode, Dieu avertit Joseph par une vision, de retourner en Judée, avec I'Enfant & fa Mere. Il obéit avec fa promptitude ordinaire. Mais ayant appris à fon arrivée, qu'Archélaüs avoit fuccédé à Hérode, il eut peur que le fils n'eût hérité de tous les vices du pere. Il ne voulut donc point s'établir dans fon royaume, malgré toutes les facilités qu'il y eût trouvées pour l'éducation du Saint Enfant. Ainfi, conformément à l'ordre que Dieu lui donna en fonge, il se re

fe

(b) Voyez faint Athanase, | 1s. 19. faint Chryfoftome, faint L. de Incarn. Eusebe, Demonft. Cyrille d'Alexandrie, in If. Soev. l. 6. c. 20. faint Cyrille, zomene, Hift. l. 5. c. 20, &c. Cat. 10. faint Ambroife, in PS. (c) Voyez les Vies des Peres 118. Ofton. 5. faint Jérôme, in du Défert,

[ocr errors]

tira dans la Galilée, qui étoit de la domination d'Hérode Antipas, frere d'Archélais. Il choifit MARS 19. pour fa demeure la ville de Nazareth, où la naiffance de Jefus avoit fait moins de bruit. En fidele difciple de Moïfe, il alloit tous les ans célébrer la Pâque à Jérufalem. Il n'avoit plus rien à craindre d'Archélaüs, exilé par Augufte qui avoit fait de la Judée une province de l'Empire Romain.

Jefus ayant atteint fa douzième année, alla célébrer la Pâque à Jérufalem avec fes parents. Après la fête, Marie & Jofeph reprirent la route de Nazareth, ne doutant point que Jefus ne fût avec les perfonnes de leur connoiffance & de leur compagnie. Ils ne s'apperçurent de fon abfence qu'au bout d'un jour. Pénétrés de la plus vive douleur, ils retournerent à Jérufalem. Ils le chercherent trois jours confécutifs, & le trouverent enfin dans le Temple, affis au milieu des Docteurs de la Loi, les écoutant & leur faifant des queftions, dont la fageffe raviffoit d'admiration tous ceux qui étoient préfents. Jofeph & Marié furent eux-mêmes faifis d'étonnement. Mon Fils, lui dit fa Mere encore toute accablée de la douleur que lui avoit causée la privation de fa divine préfence, << Mon Fils, pourquoi en avez-vous agi de la » forte avec nous ? Voilà que votre pere & moi » nous vous cherchions, fort affligés ».

Jéfus leur répondit que fa qualité de Meffie l'obligeoit à s'employer aux chofes qui regardoient le fervice de fon Pere; & que par conféquent le Temple étoit le lieu où l'on devoit le trouver. Il donnoit à entendre par ces paroles qu'il n'avoit paru en public que pour procurer la gloire de fon Pere & pour préparer les Princes de la Synagogue à le recevoir, en leur faifant comme

« PrécédentContinuer »