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cun desquels il mit douze Religieux avec un Su. périeur. Parmi ces Religieux, il s'en trouva un MARS 21, qui, par défaut de ferveur , contracta l'habitude de sortir de l'Eglise immédiatement après la psalmodie, au lieu de rester à la méditation avec les Freres. Pompeien, fon Supérieur , l'ayant averti charitablement de la faute , il se corrigea ; mais il retomba trois jours après. Benoît , qui en fut informé, promit d'aller remédier au désordre. Il s'agissoit effe&ivement d'une de ces fautes qu'il est important de ne pas laisser invétérer , puisque le dégoût de la priere & de la méditation est toujours suivi des plus grands maux. Le Saint , convaincu de la vérité de ce principe , se rendit promptement au Monaftere où étoit le Religieux contre lequel on lui avoit porté des plaintes. Mais il voulut avant de prendre un parti, examiner les

par

lui-même. Il apperçut, après la psalmodie, un enfant noir qui tiroit le Moine par le bord de la robe, & l'entraînoit hors de l'Eglise. Saint Maur eut aussi cette vision. Il fut aisé d'y découvrir les pieges du Démon , qui, pour réussir à.perdre les hommes, s'attache principalement à

choses par

appellé Roca de Bore. Tous ces on n'y voit plus que des ruines Monafteres ont été réunis à & quelques cellules. Outre les celui de sainte Scolastique, qui cent quarante - quatre Religieux eft aujourd'hui très-célebré, & que saint Benoit avoit distribués étoit regardé comme le chef- dans ses douze Monasteres, il' lieu de la Congrégation de sainte en avoit encore quelques - uns Juftine, avant sa réunion à celle avec lui, comme nous l'appre. du mont Caslin. On donne or- | nons de saint Grégoire. Ceci dinairement l'Abbaye en Com- donne lieu de croire qu'il vimende : mais cela n'empêche voit dans une maison séparée , point que , par un privilege bâtie, selon toute les apparenspécial, le Monaftere ne soit ces, aux environs de sa grotte. gouverné par un abbé Régulier, Il avoit une inspection générale choisi dans le Chapitre général. sur les douze Monasteres dont Quant aux autres Monasteres , l il étoit le Fondateur,

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les détourner de la priere. Cependant le Moine MARS 21. continuoit toujours de s'absenter de la méditation.

Benoît crut qu'il seroit dangereux d'attendre plus long-temps , & qu'il falloit user de rigueur. Il prit donc une baguette , & en frappa le coupable. Ce châtiment eut fon effet, & le Moine fut délivré pour toujours de fa tentation. Saint Grégoire , de qui nous apprenons ce fait, rapporte plusieurs miracles opérés par faint Benoît vers le même temps.

On venoit de tous côtés vifiter le serviteur de Dieu, dont la réputation s'étendoit de plus en plus. Des personnes de la premiere qualité , tant de Rome que des autres pays , accouroient à son Monastere. Elles oublioient, en le voyant, l'éclat extérieur qui les environnoit, & se prosternoient humblement à ses pieds pour recevoir fa bénédi&tion , & implorer le secours de ses prieres. Quelques-uns même lui offrirent leurs enfants , afin qu'il les instruisît & les formât à la pratique de la vertu. On comptoit parmi ces enfants Maur & Placide, qui étoient fils, l'un du Sénateur Equice, & l'autre du Sénateur Tertulle.

Mais le Démon , jaloux de voir Benoît étendre de jour en jour l'empire de Jesus-Christ, lui fuscita de nouvelles épreuves. L'instrument dont il fe servit , fut un mauvais Prêtre du voisinage, nommé Florent. Ce malheureux , ennemi de tout bien, publia d'horribles calomnies contre la réputation du Saint. Benoît , en vrai disciple du Sauveur, n'oppofa que la douceur & le silence. Il fit plus : dans la crainte d’aigrir davantage l'efprit d'un homme acharné à le perdre , il quitta Sublac

, pour se retirer au mont Cassin. Mais il apprit peu de temps après son départ, que Florent avoit été écrasé sous les ruines d'une galerie.

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pas fâché

Il fut sensiblement touché d'une fin aussi tragique ; & il impofa une pénitence à Maur , pour avoir MARS 21. donné à entendre qu'il n'étoit

que

fon maître fût délivré de son persécuteur.

Il y avoit sur le sommet du mont Caffin (s) un ancien temple & un bois consacrés à Apollon, qui comptoit encore des adorateurs en cet endroit. Ces restes d'Idolâtrie enflammerent le zele de Benoît. Il prêcha l'Evangile ; & par la force réunie de ses discours & de ses miracles, il fit un grand nombre de conversions. Il brisa l'idole & coupa le bois. Ayant ensuite démoli le temple, il éleva sur ses ruines deux Oratoires ou Chapelles, sous l'invocation de saint Jean-Baptiste & de faint Martin. Voilà l'origine du célebre Monastere du mont Callin, dont notre Saint jetta les premiers fondements en 529,

à la quarantehuitieme année de son âge, la troisieme de l'em-, pire de Justinien , sous le Pontificat de Félix IV, Athalaric étant Roi des Goths en Italie. Ce fut vers ce temps-là que le Sénateur Tertulle rendit une visite à saint Benoît. Il venoit encore, dans le dessein de voir son fils Placide. Il donna au nouveau Monastere des biens qu'il avoit dans le voisinage , & une Terre considérable fituée en Sicile.

Parmi ceux qui prirent l'habit au mont Cassin, étoit un vénérable Hermite , nommé Martin. Il tavoit tant d'amour pour la solitude , qu’afin de n'être pas seulement tenté de fortir de la cellule, il y avoit attaché son corps avec une grosse chaîne

y de fer. Benoît , qui craignoit qu'une telle singularité ne vînt du désir de se faire remarquer, lui

(f) Dans le pays des Samnites, qui fait aujourd'hui partie du Royaume de Naples,

dit : « Si vous êtes véritablement serviteur de JeMARS 21. sus-Christ, vous n'avez pas besoin de chaîne

» de fer ; celle de son amour suffira pour vous
>> rendre inébranlable dans votre réfolution ».
Martin donna une preuve de fon humilité en
obéissant sans replique , & en reprenant la vie
commune. Benoît, au rapport de faint Grégoire,
gouvernoit encore un Monastere de Religieuses
peu éloigné de celui du mont Cassin. En même
temps qu'il en fondoit un d'hommes à Terracine
il envoya faint Placide en Sicile pour y en fonder
un autre.

Nous conviendrons volontiers que faint Benoît n'étoit point versé dans la littérature profane. Mais, ce qui eft infiniment plus précieux, il étoit animé de l'esprit de Dieu , & possédoit la plus belle des .fciences, celle des choses fpirituelles. Aufli faint Grégoire le représente-t-il comme un homme, dont l'ignorance étoit accompagnée d'une vraie lumiere & d'une vraie sagesse (g). Et, pour lui appliquer ce que faint Arsene disoit de faint Antoine, son alphabet valoit beaucoup mieux que toutes les vaines sciences du monde. On ne peut gueres douter qu'il ne fût dans les Ordres facrés, & même Diacre (h). Il alloit , au rapport de faint Grégoire , prêcher quelquefois dans les lieux voisins ; &, par l'effet d'une charité fans bornes, il distribuoit aux pauvres tout ce qu'il poffédoit fur la terre , afin d'amasser dans le ciel des trésors qui ne périssent point.

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(8) Soienter nefciens & fa- & d'anciennes inscriptions. Plus, pienter indoctus.

fieurs Modernes entr'autres (h) C'est ce que le P. Mabil. Muratori , Script. Ital. T. 4. Ion a prouvé, Annal. Ben. T. s.jp. 217. ont avancé, mais sans p. 122. ad an. 543. d'après d'an- fondement, que saint Benois ciens tableaux de saint Benoit étoit Prêtre,

, PATRIARCHE. 93 Ce fut au mont Cassin que saint Benoît écrivit fa Regle. On y remarque un homme consommé MARS 21, dans la science du salut , & suscité dans les defseins de Dieu , pour conduire les ames à la plus sublime perfection. Il y regne un esprit de sagesse & de discernement qui touchoit saint Grégoire à un tel point , qu'il ne balançoit pas de la préférer à toutes les autres Regles. Elle fut depuis adoptée par tous les Moines d'Occident , qui la suivirent pendant quelque temps. Elle est principalement fondée sur le filence, la solitude , la priere , l'humilité & l'obéissance (i).

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(i) La Regle de S. Benoît saint Benoît avoit en vue l'Hécharge l'Abbé de tout le gou- mine Romaine , ou le demivernement du Monastere ; elle Sextier , qui contenoit dix onces. prescrit sept heures de travail ( Voyez Montfaucon , Antig. manuel par jour , & deux heures expl. T. 3. l. 4. C. 7. p.149. & de le&ure spirituelle, outre la Mabillon , Præf. in Sec. 4). méditation qui doit se faire de D. Ménard pense que l'Hémine puis la fin de Matines , jusqu'au de faint Benoît ne contenoit que point du jour. En quelques en- rept onces & demie. Il s'agit, droits on a substitué au travail suivant Mabillon , loc. cit. & des mains l'étude & d'autres Martene, in cap. 40 Reg. de occupations qui ont la gloire l'Hémine des Grecs, qui contea de Dieu pour objet. La même noit une livre & demie ou dix. Regle interdit l'usage de la huit onces. L'opinion de Lanviande. (Voyez les Peres Mar- celot a paru avec raison la plus tene & Calmet). Cette loi de probable à D. Calmet. Ce derl'abstinence a été rétablie dans nier, in cap. 40. Reg. T. 2. plusieurs maisons, entr'autres, p. 62. prouve par la tradition dans celles qui suivent la ré- des Écrivains de son Ordre, & forme de la Congrégation de pat divers monuments, que l'Hé. saint Maur.

mine en question contenoit trois Saint Benoit, vivant dans un coups. Saint Benoît accordoit pays où il étoit d'usage de boire par jour à chaque Religieux une du vin & de l'eau , accorde par livre & demie ou dix-huit onces jour à ses Religieux une cer- de pain, comme il fut décidé taine mesure de vin, appellée dans le célebre Concile d'AixHémine. On a beaucoup écrit la-Chapelle , tenu sous Charle. sur cette Hémine, qui a varié magne. selon les temps & les lieux. Le célebre Côme de Média Lancelot a tâché de prouver que cis , sans parler de plusieurs

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