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O DE

SUR

L'INGRATITUDE.

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I.

Toi, mon fupport & ma gloire,

Que j'aime à nourrir ma mémoire
Des biens que ta vertu m'a faits!
Lorfqu'en tous lieux l'ingratitude
Se fait une pénible étude

De l'oubli honteux des bienfaits.

II.

Doux nœuds de la reconnaiffance,
C'est par vous que dès mon enfance
Mon cœur à jamais fut lié;

La voix du fang, de la nature,
N'eft rien qu'un languiffant murmure,

Près de la voix de l'amitié.

III.

Eh quel eft en effet mon père?
Celui qui m'inftruit, qui m'éclaire,

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Dont le fecours m'eft affuré;
Et celui, dont le cœur oublie
Les biens répandus fur fa vie,
C'est-là le fils dénaturé.

IV.

Ingrats, monftres

que la nature

A paîtris d'une fange impure
Qu'elle dédaigna d'animer
Il manque à votre ame fauvage,
Des humains le plus beau partage,
Vous n'avez pas le don d'aimer.

V.

Nous admirons ce fier courage
Du lion fumant de carnage,
Symbole du DIEU des combats.
D'où vient que l'univers détefte
La couleuvre bien moins funefte?
Elle est l'image des ingrats.

VI.

Quel monftre plus hideux s'avance?

La

† Gacon était un mifé- univerfellement méprifé. rable écrivain fatyrique Chauffon fut brûlé publi

que

La nature fuit & s'offenfe

A l'afpect de ce. vieux Giton;
Il a la rage de Zoile,

De Gacon † l'efprit & le ftile,

Et l'ame impure de Chauffon.

VII.

C'eft Desfontaines; c'eft ce Prêtre,

Venu de Sodome à Biffètre,
De Biffètre au facré vallon;
A-t-il l'efpérance bizarre,
Que le bucher qu'on lui prépare
Soit fait des lauriers d'Apollon?

VIII.

Il m'a dû l'honneur & la vie,

Et dans fon ingrate furie,

De Rufus lâche imitateur,

Avec moins d'art & plus d'audace,
De la fange où fa voix croaffe,
Il outrage fon bienfaiteur.

IX

quement pour le même des Fontaines fut mis à crime pour lequel l'abbé Biffêtre,

IX.

Qu'un Hibernois, * loin de la France,

Aille enfevelir dans Bizance

Sa honte à l'abri du Croiffant;

D'un œil tranquille & fans colère,

Je vois fon crime & fa mifère,

Il n'emporte que mon argent.

X.

Mais l'ingrat dévoré d'envie,
Trompte de la calomnie,

Qui cherche à flétrir mon honneur,

Voilà le raviffeur coupable,

Voilà le larcin déteftable,

Dont je dois punir la noirceur.

XI.

Pardon, fi ma main vengereffe

* Un abbé Irlandais, fils d'un chirurgien de Nantes, qui fe difait de l'ancienne maifon de M**, ayant fubfifté longtems des bienfaits de Mr. de Voltaire, & lui ayant en dernier lieu emprunté deux mille livres, s'affocia en

Sur

1732. avec un Ecoffais, nommé Ramfai, qui fe difait auffi des bons Ramfai, & avec un officier Français, nommé Mornay; ils paffèrent tous trois à Conftantinople, & fe firent circoncire chez le comte de Bon neval,

Sur ce monftre un moment s'abaiffe
A lancer ces utiles traits,

Et fi de la douce peinture,
De ta vertu brillante & pure,
Je paffe à ces fombres portraits.
XII.

Mais lorfque Virgile, & le Taffe,
Ont chanté dans leur noble audace
Les dieux de la terre & des mers,
Leur mufe, que le ciel inspire,
Ouvre le ténébreux empire,
Et peint les monftres des enfers.

STAN

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