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DE L'ÉTRANGER ET DES COLONIES

ET

EXPLORATION

GAZETTE GÉOGRAPHIQUE

(Fondée en 1875.- Vingt et unième année.)
Sous la direction de MM. GEORGES DEMANCHE et ÉDOUARD MARBEAU

MÉDAILLE DE BRONZE A L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE BARCELONE DE 1888

MENTION HONORABLE A L'EXPOSITION UNIVERSELLE DE PARIS DE 1889

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Geog 192. 3

HANTARD COLLEGE LIBRARY
GIVEN IN MEMORY OF
ARCHIBALD CARY COOLIDGE

OCT 21 1930

DE L'ÉTRANGER ET DES COLONIES

ET

EXPLORATION

GAZETTE GÉOGRAPHIQUE

LES SCIENCES GÉOGRAPHIQUES EN 1895

EXPLORATIONS FRANÇAISES EN AFRIQUE

La Société de Géographie de Paris, dans sa séance du 20 décembre 1895, a entendu la lecture du rapport annuel dû à la plume si autorisée de son secrétaire général, M. Maunoir. Voici ce qui est relatif aux explorations françaises d'Afrique.

Depuis quelques années, une demi-douzaine d'États ont travaillé à se partager d'office l'immense continent africain : le partage est presque terminé, et actuellement, peu de la terre africaine reste aux Africains qui n'ont pas tous accepté avec philosophie la mainmise de notre civilisation sur leurs destinées. Si la politique n'était interdite dans cette étude, on pourrait faire remarquer que les opérations du partage ont fourni à l'équilibre européen, réputé fort instable, l'occasion de faire preuve d'une certaine élasticité et d'une solidité de tenue à laquelle on était en droit de ne pas s'attendre.

L'Afrique, semble-t-il, conserve comme une dernière lueur de prestige du mystère qui l'a voilée pendant un si long passé. Elle pose, en même temps, devant l'avenir de redoutables problèmes dont la solution coûtera plus cher encore que la découverte des sources du Nil, du Niger ou du Congo. Elle est désormais une dépendance de l'Europe; elle y est comme incorporée, et si la prise de possession n'a pas amené de chocs trop rudes, l'œuvre de l'assimilation entraînera peut-être des troubles profonds. Elle comporte, en effet, une lutte de races, dont

les tendances humanitaires professées par la race blanche ne suffiront pas à atténuer les sévérités. Les sentiments l'emportent rarement sur les intérêts.

Qnoi qu'il en doive être, l'attention des esprits au moins en Europe est tendue sur le spectacle du tassement qui s'opère dans ce nouveau monde. La géographie, pour sa part, s'intéresse spécialement aux transformations presque quotidiennes de ses notions sur l'Afrique, à la continuelle variation des traits qui viennent occuper les immensités blanches de la carte telle que l'ont connue les moins jeunes parmi

nous.

Notre Société de géographie, désireuse de vulgariser les notions relatives à l'Afrique, a dressé une carte sur laquelle sont indiqués, autant que le comporte son échelle, les données actuelles de la géographie, et le tracé des frontières telles que les veulent nos intérêts nationaux. C'est un document d'ordre général sur lequel la Société, par les soins de son habile cartographe, M. J. Hansen, reportera les changements que produiront les explorations futures.

Il faut maintenant aborder l'exposé très sommaire de la part pour laquelle les voyageurs français ont contribué aux progrès de la géographie africaine. Notre rapporteur a trouvé en M. Froidevaux un précieux et savant collaborateur dans la tâche de coordonner tous les éléments du sujet, et il vous demande de vous associer aux remerciements qu'il lui exprime. Comme dans le rapport précédent, le Soudan et la Guinée occuperont, dans le rapport pour 1895, une place importante; mais le puissant intérêt des voyages aux rives du Niger et à l'intérieur du Dahomey ne doit pas nous faire oublier les hommes méritants qui ont contribué au progrès de nos connaissances pour d'autres parties de l'Afrique.

C'est le cas pour le Maroc, terre de défiance, dont le gouvernement suspecte les puissances européennes; elles le lui rendent bien, tout en se surveillant d'ailleurs les unes les autres avec un soin jaloux. Une carte, une étude sur le domaine chérifien ne saurait paraître avec une attache plus ou moins officielle sans provoquer, dans les chancelleries, des soupçons toujours en éveil.

Un membre de notre Société, M. René de Flotte de Roquevaire qui, n'étant pas des grands de ce monde, n'a aucun souci des susceptibilités diplomatiques a exécuté pour son instruction personnelle et pour l'amour

de la science une carte du Maroc digne d'être signalée comme un travail de critique attentive, comme le type actuel de la représentation de ce vaste pays par ses traits généraux. Les sources originales ont seules été utilisées par M. de Flotte pour l'établissement de son œuvre à laquelle nous devons souhaiter un éditeur; il n'aurait pas à redouter l'afflux des éléments nouveaux qui modifient chaque jour les cartes des autres parties de l'Afrique. Rien, en effet, n'annonce une prochaine rénovation de la géographie du Maroc; l'accès de l'empire reste interdit aux explorateurs. Ils visitent aujourd'hui Tombouctou, mais ils ne pénètrent ni dans le Rif, ni au Tafilett, et il en sera ainsi longtemps encore.

Jusqu'à un nouvel ordre de choses, il faut se contenter des perfectionnements de détails apportés aux itinéraires antérieurs. Voici, par exemple, que M. Henri de la Martinière, qui est bien connu par d'importantes explorations dans l'ouest marocain et par des études serrées sur le Maroc, a récemment publié dans le Bulletin de Géographie historique et descriptive, la relation d'un voyage exécuté en 1891, de Fez à la frontière algérienne, par Oudjda. Grâce à la toute-puissante protection du chérif d'Ouezzan, il a pu suivre cette route, aujourd'hui fermée, pour ainsi dire, jadis l'une des plus fréquentées de la Berbérie, et en lever l'itinéraire. Plein de précieux renseignements historiques et géographiques, le travail de M. de la Martinière marque un progrès notable dans le figuré de la contrée esquissée naguère par le capitaine anglais Colville (1877-78) et par le vicomte de Chavagnac ((1881). M. de la Martinière révèle un trait de géographie physique qui mérite d'être noté : il fait finir le Tell marocain à quelque distance dans l'est de Taza, et commencer aussitôt après les hauts plateaux algériens, au col dit Bab-Tamalou, par une altitude de 1.000 mètres.

A l'autre extrémité du Magreb, dans la régence de Tunis, pays de protectorat français, voici longtemps que nos compatriotes sont à l'œuvre. Bien antérieurement à l'année 1884, ils avaient commencé l'exploration géographique, scientifique et archéologique de la contrée; mais l'institution, par le ministère de l'instruction publique, après la conquête, d'une double mission scientifique et archéologique de Tunisie, ainsi que la confection de la carte du pays par le Service géographique de l'armée, n'ont pas peu contribué au progrès rapide de nos connaissances. Que de précieux renseignements sur la géologie, la flore, la

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