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chini, chez le banquier Valentini et chez le prince Torlonia, pour leur demander la charité, pistolet au poing. En même temps, on répandait les bruits les plus absurdes contre le crédit de la banque romaine; la panique même prit de telles proportions que, pour éviter de fatales conséquences, le gouvernement se crut obligé de protéger la banque en décrétant le cours forcé des billets.

La position du souverain Pontife devenait chaque jour de plus en plus difficile, chaque heure amenait une difficulté nouvelle. Méconnu dans son autorité, trompé dans ses intentions, le pape voyait avec douleur son nom servir de mot d'ordre aux factieux et de ralliement à la révolution engagée contre l'Autriche sur les champs de bataille de l'Italie. Les publicistes dans leurs journaux, les conspirateurs dans leurs clubs, les émeutiers dans la rue, ne cessaient de proclamer que Pie IX était le principal moteur de la guerre; un jour même, le 27 avril, une députation composée des principaux membres du cercle romain, se présenta au Quirinal pour imposer au souverain le rappel officiel de son nonce à Vienne. Pie IX refusa, disant qu'il ne ferait jamais cette déclaration de guerre.

D'un autre côté, les ennemis de la religion catholique profitaient de cet état de choses pour miner sourdement l'influence de la papauté en

Allemagne : déjà même ils se réjouissaient en pensant à la possibilité d'un schisme. Un plus long silence de la part du pape eût été en quelque sorte la justification, sinon la consécration des bruits absurdes qui faisaient de son autorité souveraine une machine de guerre d'autant plus puissante qu'il représentait sur la terre le Dieu des armées; il le rompit d'une manière éclatante par une encyclique tellement importante que nous devons la reproduire ici telle qu'elle fut prononcée dans le consistoire secret du 29 avril :

<< Plus d'une fois, vénérables frères, nous nous sommes élevé au milieu de vous contre l'audace de quelques hommes qui n'ont pas eu honte de faire à nous et au Saint-Siége apostolique, l'injure de dire que nous nous sommes écarté non-seulement des très-saintes institutions de nos prédécesseurs mais encore (blasphème horrible!) de plus d'un point capital de l'Église. Aujourd'hui encore, il se trouve des gens qui parlent de nous, comme si nous étions le principal auteur des commotions publiques qui, dans ces derniers temps, ont troublé plusieurs pays de l'Europe, et particulièrement l'Italie. Nous apprenons en particulier des contrées allemandes de l'Europe, que l'on y répand le bruit, parmi le peuple, que le Pontife romain, soit par des émissaires, soit par d'autres machinations, a excité les nations italiennes à provoquer

de nouvelles révolutions politiques. Nous avons appris aussi que quelques ennemis de la religion catholique en ont pris occasion de soulever des sentiments de vengeance dans les populations allemandes pour les détacher de l'unité de ce siége apostolique.

« Certes, nous n'avons aucun doute que les peuples de l'Allemagne catholique et les vénérables pasteurs qui les conduisent, repousseront bien loin avec horreur ces cruelles excitations. Toutefois, nous croyons qu'il est de notre devoir de prévenir le scandale que des hommes inconsidérés et trop simples pourraient en recevoir, et de repousser la calomnie qui n'atteint pas seulement notre humble personne, mais dont l'outrage remonte jusqu'au suprême apostolat dont nous sommes investi, et retombe sur ce siége apostolique. Nos détracteurs, ne pouvant produire aucune preuve des machinations qu'ils nous imputent, s'efforcent de répandre des soupçons sur les actes de l'administration temporelle de nos États. C'est pour leur enlever jusqu'à ce prétexte de calomnie contre nous que nous voulons aujourd'hui exposer, clairement et hautement devant vous, l'origine et l'ensemble de tous ces faits.

<< Vous n'ignorez pas, vénérables frères, que déjà, vers la fin du règne de Pie VII, notre prédécesseur, les principaux souverains de l'Europe insi

nuèrent au siége apostolique le conseil d'adopter, pour le gouvernement des affaires civiles, un mode d'administration plus facile et conforme aux désirs des laïques. Plus tard, en 1831, les conseils et les vœux de ces souverains furent plus solennellement exprimés dans le célèbre memorandum que les empereurs d'Autriche et de Russie, le roi des Français, la reine de la Grande-Bretagne et le roi de Prusse crurent devoir envoyer à Rome par leurs ambassadeurs. Dans cet écrit il fut question, entre autre choses, de la convocation, à Rome, d'une consulte d'État formée par le concours de l'État pontifical tout entier, d'une nouvelle et large organisation des municipalités, de l'établissement des conseils provinciaux, d'autres institutions également favorables à la prospérité commune; de l'admission des laïques à toutes les fonctions de l'administration publique et de l'ordre judiciaire. Ces deux derniers points étaient présentés comme des principes vitaux de gouvernement. D'autres notes des mêmes ambassadeurs faisaient mention d'un plus ample pardon à accorder à tous ou à presque tous les sujets pontificaux qui avaient trahi la foi due à leur souverain.

<< Personne n'ignore que quelques-unes de ces réformes furent accomplies par le pape Grégoire XVI, notre prédécesseur, et que quelques autres furent promises dans des édits rendus cette

même année 1831, par son ordre. Cependant ces bienfaits de notre prédécesseur ne semblèrent pas satisfaire pleinement aux voeux des souverains ni suffire à l'affermissement du bien-être et de la tranquillité dans toute l'étendue des États temporels du Saint-Siége.

« C'est pourquoi dès le premier jour où, par un jugement impénétrable de Dieu, nous fûmes élevé à sa place, sans y être excité ni par les exhortations ni par les conseils de personne, mais pressé par notre ardent amour du peuple soumis à la domination temporelle de l'Église, nous accordâmes un plus large pardon à ceux qui s'étaient écartés de la fidélité due au souverain, au gouvernement pontifical, et nous nous hâtâmes de donner quelques institutions qui nous avaient paru devoir être favorables à la prospérité de ce même peuple. Tous ces actes, qui ont marqué les premiers jours de notre pontificat, sont pleinement conformes à ceux que les souverains de l'Europe avaient surtout désirés.

« Lorsque, avec l'aide de Dieu, nos pensées eurent reçu leur exécution, nos sujets et les peuples voisins ont paru si remplis de joie et nous ont entouré de tant de témoignages de reconnaissance et de respect, que nous avons dû nous efforcer de contenir dans de justes bornes les acclamations populaires dans cette ville sainte, les applaudisse

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