Images de page
PDF
ePub

la conduite du ministère. M. Duvergier de Hauranne est arrivé heureusement pour faire une longue et pompeuse apologie de celui-ci. M. de Corcelles s'est fort étonné de ce que l'on veut consacrer un paragraphe de l'adresse à l'évènement du PontRoyal, qui n'est pas encore éclairci.

M. Salverte a justifié les signataires du compte-rendu des graves imputations dont il est l'objet. Il a interpellé ensuite le ministère sur le retard apporté dans l'arrestation de madame la duchesse de Berri, qu'il étoit sans doute facile de trouver, puisqu'un député l'étoit allé voir si aisément.

M. Gaillard-Kerbertin a cherché à expliquer la conduite du procureur du Roi Demangeat. M. Berryer a rappelé aussitôt l'historique de l'affaire. M. le garde-dessceaux est convenu hautement que cet agent avoit eu tort d'envoyer au ministère, comme le tenant de M. Berryer, des détails qu'il n'avoit eus que par M. de Granville. Il a expliqué ensuite comment on avoit été induit en erreur sur les autres faits relevés par M. Berryer, lors de son procès.

Le 29, M. le ministre du commerce, comme membre de l'ancien cabinet, croit devoir répondre au reproche de M. Salverte sur le peu d'activité avec lequel on auroit poursuivi madame la duchesse de Eerri et les insurgés de l'Ouest. M. d'Argout lit principalement les lettres écrites dans le Midi, par M. de Montalivet, en avril deruier, pour prévenir les tentatives de débarquement ou d'entrée par les Pyrénées; une circulaire adressée, le 10 mai, aux préfets de l'Ouest, etc. Il avoue que l'on a accepté l'offre faite au ministère de livrer la princesse.

M. Thiers s'occupe de montrer par des faits que ce n'est point, comme le prétend l'opposition, le gouvernement qui organise les complots. Il rappelle pour cela différens procès relatifs aux évènemens de juin. Le ministre juge convenable de ne pas s'expliqner, quant à présent, sur les circonstances de l'arrestation de madame la duchesse de Berri. Il s'attache ensuite à défendre le système du 13 mars et la conduite du ministère actuel, et soutient que l'on ne se rapproche en rien des doctrines de la restauration. M. Thiers plaisante successivement toutes les plaintes de l'opposition.

[ocr errors]

M. Salverte réplique au ministre de l'intérieur, et demande de nouvelles ex-* plications, particulièrement sur des enrôlemens d'ouvriers et la scène du Pont-d'Arcole. M. le garde-des-sceaux dit en peu de mots que ces faits ont été exagérés.

M. Odilon Barrot ne pense pas que protester contre les actes du gouvernement soit fomenter des émeutes. Puisque le gouvernement admet une opposition, il doit lui reconnoître des devoirs à remplir. L'orateur soutient que l'opposition ne fait que défendre les principes de la révolution de juillet; il censure la conduite que le gouvernement a tenue à la suite des évènemens de Lyon et de ceux du 5 juin. L'état de siége n'étoit plus nécessaire le 7, et violoit la loi; il fait voir tout ce qu'il y a d'odieux dans une ordonnance de police, approuvée par un ministre, qui enjoignoit aux médecins, et autres, de dénoncer les blessés auxquels ils donnoient des soins. On a encore méconnu la loi, en ne laissant pas traduire madame

la duchesse de Berri devant les tribunaux. Du reste, l'orateur désire voir cesser l'irritation qui existe entre la majorité et le minorité de la chambre.

M. Garnier - Pagès prétend que les révoltés de Paris et de Lyon sont dus au mécontentement de la classe ouvrière. M. Fulchiron, comme député du Rhône, affirme que les autorités de Lyon ont pris tous les moyens pour soulager les ouvriers. Il rétracte le mot traitreusement, dont il s'étoit servi dans un premier mouvement d'indignation pour désigner les attaques de l'opposition.

[ocr errors][merged small]

Le 30, M. le ministre des finances présente le budget de 1833; les recettes y sont évaluées à 1,133,620,347 fr., et les dépenses à 1,132,626,618. fr.

Les premiers paragraphes de l'adresse sont adoptés.

Des amendemens ont été proposés sur le dixième, relatif à l'état de siége, par MM. Teste, Legrand et Mérilhou : ce dernier, qui voudroit un blâme sur cette mesure, reproduit, au milieu des murmurės, les argumens de ses amis contre la conduite du ministère.

M. le président du conseil donne quelques explications sur l'état général des affaires. A l'extérieur, dit-il, la bonne harmonie continue d'exister. A l'intérieur, on a cherché constamment à pacifier l'Ouest et a comprimer le désordre; le gouvernement a dû recourir à l'état de siége, que la législation sembloit autoriser. M. Soult s'attache à justifier la nécessité de cette mesure, et même sa légalité. Il ne veut pas que l'on compare les évènemens de juin avec ceux de Lyon, et il déclare au surplus qu'il ne repousse point la responsabilité de ses actes.

M. de Tracy appuie l'amendement de M. Mérilhou, en critiquant de nouveau l'état de siége. M. Madier de Montjau croit que cette mesure a sauvé la France; il regarde les troubles de juin comme une révolte organisée qui demaudoit une une répression forte.

M. Odilon Barrot discute encore l'opportunité et la légalité de l'état de siége. M. le garde-des-sceaux, après avoir rappelé que l'opposition réclamoit des moyens plus actifs en Vendée, s'attache à réfuter toutes les imputatious dout le ministère n'a cessé d'être l'objet. M. Odilon Barrot, qui demande à répliquer, fait cette fois l'apologie du compte rendu. L'amendement est rejeté.

COURS DES EFfets publics.

Gérant, Adrien Le Clerc.

· Bourse du 30 novembre 1832.

Trois pour 100, jouissance du 22 juin, ouvert à 67 ir.

75c., et fermé à 67 fr. 40 c.

Cinq pour 100, jouissance du 22 sept., ouvert à 96 fr. 25 c., et fermé à 96 fr. 15c.

Actions de la Banque,

1665 fr, 00 c.

IMPRIMERIE D'AD. LE CLERE ET COMP®.

[graphic]

MARDI 4 DÉCEMBRE 1832.

Etudes élémentaires de philosophie, par M. de Cardaac; 2 vol. in-8°.

(Suite et fin du n° 2006.)

Cet ouvrage a pour objet, comme nous l'avons dit, de faire connoitre l'esprit humain, ses facultés et les actes divers qui appartiennent à chacune d'elles. Il est divisé en cinq sections, qui traitent successivement de la sensibilité, de l'intelligence, de l'activité, de la spiritualité de l'ame, et enfin des facultés intellectuelles. A ces divisions principales viennent se rattacher les questions de la matière et de l'origine des idées, des rapports entre les idées et le jugement, des motifs de certitude, de l'influence du langage sur les idées, de la liaison des idées, de l'attention, de la mémoire, des habitudes, de l'instinct, de la liberté, de l'union de l'ame avec le corps, en un mot, l'examen de tout ce qui a rapport à la nature et aux différentes fonctiens de l'intelligence.

[ocr errors]

En traitant de la sensibilité, M. de Cardaillac adopte la doctrine de M. Laromiguière, qui, sous le nom de sentiment, reconnoît et distingue quatre phénomènes ou quatre espèces absolument différentes: la sensation, qui nous met en rapport avec les corps étrangers; le sens intime ou la conscience, qui nous avertit de ce qui se passe en nous; le sentiment moral qui nous met en rapport avec nos semblables et nous fait apprécier leurs actions et les nôtres comme bonnes ou mauvaises enfin le sentiment par lequel nous saisissons les rapports qui existent entre les différens objets de nos connoissances. Examinant ensuite chacun de ces sentimens à part, il en recherche la nature et l'origine, détermine la part qui leur appartient dans le développement de l'intelligence, et finit par indiquer les causes principales des modifications différentes qu'ils peuvent éprouver chez divers individus. Cette partie de l'ouvrage, où l'on remarque, comme dans toutes les autres, une grande clarté d'exposition, ne peut manquer d'être également utile et intéressante, précisément parce qu'elle n'apprend rien, selon l'expression de M. de Cardaillac lui-même, c'est-à-dire parce qu'elle se borne à rappeler des phénomènes et des circonstances que

Tome LXXIV. L'Ami de la Religion.

P

tout le monde sent également, mais qui, par cela même, sont trop répétées pour que les hommes y fassent attention, et surtout trop communes pour que les philosophes daignent s'y

arrêter.

Comme l'intelligence s'exerce par des jugemens et des idées, M. de Cardaillac, en étudiant cette seconde propriété de l'esprit humain, commence par exposer nettement la nature de l'idée et celle du jugement, afin de déterminer exactement les rapports de l'une à l'autre, et d'éviter ainsi la confusion et l'obscurité dont la cause est presque toujours le défaut de précision dans les termes. Il fait voir que si le jugement s'exerce toujours sur des idées, celles-ci renferment souvent aussi des jugemens, comme le jugement à son tour sert à former les idées memes qui en sont l'objet. D'où il arrive que la plupart des questions que l'on forme sur l'une et sur l'autre de ces deux choses sont résolues différemment, parce qu'on les confond l'une avec l'autre, ou paroissent insolubles, parce qu'on n'a pas défini le sens des mots qu'on emploie. Viennent ensuite des observations sur les différentes espèces d'idées, sur la manière dont se forment les idées générales et les idées abstraites, ainsi que sur d'autres questions relatives au même objet, mais dont on conçoit bien que nous ne pouvons pas donner une analyse complète. Nous remarquerons seulement, et pour n'y plus revenir, que si les théories qu'il développe sur cette matière comme sur quelques autres, ne nous paroissent pas toujours complètement justes, parce que la diversité des opinions est ce qu'il y a de plus commun en philosophie, elles contribuent du moins à répandre du jour sur la question, parce qu'elle y est toujours exposée sous son véritable point de vue.

En examinant la question si obscure et si célèbre de l'origine des idées, M. de Cardaillac reproduit, avec quelques légères modifications, la solution également facile et simple donnée par M. Laromiguière. Selon lui, c'est dans le sentiment que se trouve l'origine de toutes les idées considérées indépendamment de l'affirmation dont elles sont l'objet, et c'est la raison qui les met en œuvre par l'affirmation pour en faire les élémens de nos croyances et de nos jugemens. Ainsi les idées de l'ordre physique ont leur origine dans la sensation et dans le sentiment des rapports que fait naître la sensation, et les idées morales dans le sentiment de nos facultés et des rapports moraux qui en résultent. Peut-être cette solution ne paroit-elle si simple

que parce qu'elle est incomplète et qu'elle n'atteint pas le fond de la difficulté; mais ce seroit l'objet d'une discussion qui ne peut entrer ni dans les bornes de cet article, ni dans le plan de ce journal.

Cette manière d'envisager la question amenoit naturellement M. de Cardaillac à rechercher quels sont les motifs de nos croyances et le fondement de la certitude. Après avoir établi d'une manière générale que le principe des vérités rationnelles est dans la raison de chacun, et le principe des vérités de foi dans l'autorité; après avoir défini le caractère de la certitude et déterminé les causes ou les motifs qui la produisent; après avoir montré que les difficultés qu'on peut faire contre la certitude fondée sur la raison particulière se présentent avec la même force contre l'autorité générale, et qu'elles peuvent recevoir dans l'un et l'autre cas la même solution, il donne un exposé succinct, mais complet, de la doctrine de M. de La Mennais par des citations textuellement extraites de ses ouvrages; puis il s'attache à en faire voir le vice et la fausseté. Quoique la philosophie de M. de La Mennais soit jugée depuis long-temps, cette réfutation n'en est pas moins propre à intéresser la plupart des lecteurs; elle est si claire, et en même temps si complète, qu'elle ne peut laisser le moindre doute dans les esprits les plus prévenus.

Les deux points vraiment importans dans l'étude de l'esprit humain sont l'activité et la spiritualité de l'ame. Quoique M. de Cardaillac n'ait rien omis de ce qui a rapport à ces deux points principaux, et qu'il ait présenté toutes les preuves qui servent à les établir, nous voudrions peut-être qu'il leur eût donné plus de développemens. Nous devons dire toutefois que ces preuves sont exposées avec tant d'ordre et de clarté, que la réflexion peut suppléer sans peine aux développemens omis. Cette critique, du reste, en ce qui concerne l'activité, porte uniquement sur les preuves de son existence, et non sur l'exposition des phénomènes qui lui appartiennent; car il offre d'ailleurs sur la nature de l'instinct et des habitudes, sur les rapports de l'un et des autres avec la volonté, des considérations étendues et pleines de sagacité, qu'on ne trouve guère dans les ouvrages élémentaires de philosophie. Le chapitre sur la liberté nous paroit aussi suffisamment développé, quoiqu'il ne soit pas fort long, parce que la manière dont la question s'y trouve exposée fait disparoître la plupart des difficultés qu'elle

« PrécédentContinuer »