Images de page
PDF
ePub

La mort d'un vertueux prêtre, d'un excellent homme, afflige en ce moment ses coopérateurs, ses élèves et ses amis. M. JacquesMagdeleine Bertout, supérieur du séminaire du St-Esprit, est mort dans sa maison, rue des Postes, la nuit du 9 au 10 décembre. Il étoit né le 3 mai 1753 à Halenghem, diocèse de Boulogne. Soixante ans de travaux et de vertus, son zèle pour ressusciter son œuvre après la révolution, sa prudence et son activité dans la direction de sa maison, tels sont les titres de M. Bertout à l'estime et à la vénération publique. Dieu a voulu l'éprouver encore par dangers d'une longue maladie que le pieux vieillard a supportée avec une admirable patience.

les

Nous rendimes compte cet été de la visite domiciliaire faite chez les dames de la Visitation, à Nantes, et des désordres de tout genre qu'on s'y permit. Depuis on a voulu atténuer ces excès. Des lettres de M. de Saint-Aignan, alors préfet à Nantes, ont été lues à la chambre par M. d'Argout, dans la séance du 29 novembre. Le préfet prétendoit qu'on avoit eu beaucoup d'égards pour les jeunes personnes élevées à la Visitation, qu'on les avoit fait conduire à l'évêché pour les mettre à l'abri de toute insulte. Madame de La Ferronays, supérieure de la Visitation de Nantes, déclare, dans une lettre adressée aux journaux, que cette allégation de M. de Saint-Aignan est entièrement fausse. Les jeunes personnes n'ont point été envoyées à l'évêché, elles n'ont pas pu l'être, car qui les y auroit conduites? Elles ont été exposées pendant trois heures à entendre les paroles les plus dégoûtantes. Le préfet ajoutoit qu'on avoit trouvé trois Trapistes cachés dans les combles de la Visitation. Madame de La Ferronays déclare qu'ils n'ont point été trouvés dans les combles de la Visitation, ni arrêtés. Enfin le préfet se vantoit que rien qui pût blesser les convenances ne pouvoit être reproché dans ces diverses visites, à l'exception du bris de deux portes que l'on avoit refusé d'ouvrir; et madame de La Ferronays affirme que les propos les plus licencieux et les injures les plus grossières n'ont cessé de retentir à ses oreilles pendant la visite; que les soldats ont pu s'enivrer impunément, et qu'une foule d'objets ont disparu. Elle déclare d'ailleurs qu'il n'a été fait ni avertissement, ni sommation préalables, et qu'on n'a appris la visite qu'en entendant les portes voler en éclats.

Un article inséré dans un journal de province et répété deux jours après par le Constitutionnel, jetoit du blâme et du ridicule sur les prisonniers politiques qui attendent leur jugement dans les pri sons d'Orléans. Respecter le malheur n'est pas, à ce qu'il paroit, la devise de ces feuilles. Elles ont cherche entr'autres à donner une très-fausse idée de M. Pineau, curé de Boissay. Si on en croit l'accusation, dit le Journal du Loiret, le curé de Boissay seroit un de ces hommes qui ne préchent que la guerre, il auroit appelé aux

combats toute la population de la contrée qu'il habite. Le journaliste devroit avoir de vifs regrets; il n'atténue pas l'accusation, il l'aggrave. Le défenseur de M. le curé de Boissay a fait insérer dans l'Orléanais une réponse au Journal du Loiret. « Non, dit-il, l'accusation elle-même n'a pas tenu ce langage, elle ue reproche pas au curé de Boissay d'avoir prêché la guerre; et toute cette population qu'il auroit appelée aux combats se réduit à un seul homme, dont la déclaration isolée et environnée des circonstances les plus suspectes, a pourtant uniquement motivé l'arrestation et le renvoi aux assises de M. Pineau. C'est ce qu'apprend la simple lecture de l'acte d'accusation. » Et c'est pourtant sur ce seul fondement que M. Pineau est retenu en prison depuis six mois! Le Journal du Loiret ajoute: Arrivé à Orléans, M. Pineau a prétendu, qu'en sa qualité d'aumónier des chouans, il devoit chaque jour dire la messe aux prisonniers, comme si ses prières seules pouvoient attirer sur eux le pardon du ciel. C'est encore là une fausseté; M. Pineau n'a point réclamé le titre d'aumônier des chouans, il n'a point prétendu empiéter sur les attributions de l'aumônier des prisons d'Orléans; mais prêtre, il a demandé la chose la plus naturelle, savoir : de pouvoir s'acquitter de la fonction la plus consolante et la plus auguste de son ministère. Il n'y a rien là que de légitime et d'honorable pour lui. Sa demande ne préjudicioit rien aux droits de l'aumônier des prisons qui, assurément, auroit trouvé très-bon qu'un autre ecclésiastique eût dit aussi la messe dans la prison. Au surplus, nous remarquons que le Journal du Loiret fait ici l'éloge du vénérable abbé Fausset, aumônier des prisons. Nous souscrivons de grand coeur à cet éloge d'un si digne et si excellent prêtre; seulement il eût été bon de n'y pas joindre des remarques malveillantes sur un autre prêtre dont la culpabilité est bien loin d'être prouvée, et dont la position d'ailleurs commandoit des égards à bien des

titres.

On a bien cru dernièrement être sur la trace de cette grande conspiration qui embrasse toute la France comme un réseau, ainsi que cela se dit, que l'on cherche partout, que l'on croit saisir et qui échappe toujours aux recherches les plus habiles et les plus rigoureuses. Les prêtres et les Jésuites alloient être enfin démasqués, on les tenoit; voici l'histoire de cette grande découverte : Le 25 octobre dernier, un négociant français établi à Lausanne, remit à l'entreprise des postes et messageries du canton de Vaud un paquet de papiers qu'il affranchit jusqu'à Pontarlier. Ce paquet portoit l'adresse du révérend M. de Progins, curé de Sales, à Besan çon, poste restante, et fut remis au conducteur Werly. Mais au bureau des douanes de Jougne, les douaniers, en inspectant ce paquet, furent frappés de cette épithète de révérend, et ne douterent pas qu'il y eût là-dessous quelque mystère. Ils se permirent donc d'ouvrir le paquet et y trouvèrent, dit-on, 58 lettres adressées

[ocr errors]

à des évêques, à des ecclésiastiques, à des supérieurs de communautés de religieuses, et enfin au père provincial des Jésuites à Madrid. Oh! pour le coup, c'étoit assez clair; on tenoit tous les fils du complot. La police fut avertie et arriva, un procès-verbal fut dressé. Que cela est heureux, disoit-on, pour le gouvernement et pour le repos de l'Etat! Le conducteur fut traduit devant le tribunal correctionnel de Pontarlier. L'affaire a été appelée à l'audience du 24 novembre, mais là, elle a un peu changé de nature et ce grand complot s'est expliqué. Les lettres renfermées dans le paquet n'étoient même pas cachetées, elles étoient imprimées; tant les coupables avoient pris de précautions pour s'envelopper dans un profond secret. Toutes ces lettres ne contenoient qu'une demande de secours pour bâtir une église à Lausanne; elles étoient naturellement adressées aux personnes qu'on avoit cru disposées à favoriser cette bonne œuvre, soit par elles-mêmes, soit par leurs connoissances. On peut juger quel a été le désappointement des douaniers, des curieux et de ceux qui s'étoient promis peut-être de réjouissantes révélations. Ils en ont été pour leurs conjectures, et un journal avoue qu'ils ont été passablement mystifiés. Le pauvre conducteur a été renvoyé des fins de la plainte, mais non probablement sans bénir cette terre de liberté où on est traduit en justice pour avoir été trouvé porteur de billets qui réclamoient des secours pour une œuvre de charité.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Il est toujours fort difficile d'avoir des nouvelles positives de Madame la duchesse de Berri. Il paroît cependant que la princesse est dans un état de santé aussi satisfaisant que possible, et qu'elle supporte sa position avec ce courage dont elle a déjà donné tant de preuves. Mais une triste circonstance va aggraver sa position. On a retiré d'auprès de la princesse sa compagne de captivité, Mademoiselle Stylite de Kersabiec, pour la transférer dans la prison de Nantes. Cette dame est arrivée le 7 à Nantes sous l'escorte d'un officier de gendarmerie. Il paroît que M. de Ménars va être aussi conduit à une autre destination. L'une et l'autre doivent être mis en jugement. La princesse est d'ailleurs tenue dans le secret le plus rigoureux. Elle ne peut se promener dans le jardin qu'accompagnée du colonel Chausserie. Les mesures de précaution pour le service de la citadelle de Blois sont incroyables; on a même placé des canons sur les remparts, et des bâti

mens armés croisent devant le port. On assure que Madame la comtesse de Cartėja est parvenue à obtenir la permission d'être admise auprès de la princesse. Elle a été avertie officiellement le 5, qu'au premier moment elle seroit introduite dans la forteresse. On dit aussi qu'un des hommes les plus dévoués à la duchesse a obtenu de partager sa captivité.

Nous continuons d'enregistrer les démarches, les offres et les réclamations auxquelles donnent lieu l'arrestation de madame la duchesse de Berri. M. l'archevêque de Bordeaux a sollicité du président du conseil l'autorisation d'être admis

auprès de la princesse, pour lui offrir les secours et les consolations de son ministère, et pour régler le service intérieur de la chapelle. Cette demande a été repoussée par le gouvernement, comme tant d'autres. Nous apprenons qu'une adresse à S. A. R., par les dames de Paris, se couvre de signatures. Beaucoup de dames de la capitale ont signé aussi une protestation, déposée au bureau de la Quotidienne. Une protestation fort énergique a été rédigée par les habitans de BourgArgental (Loire). De nouvelles adresses ont été signées par les habitans de Vitré, de Riom, de Mende, de Maillanne (arrondissement d'Arles), par ceux de l'Arriége et par les dames du Bourbonnais. Les habitans de Pont-Saint-Esprit ont adhéré à l'adresse de Nîmes. Une foule de personnes notables envoient chaque jour de semblables adhésions. Les étudians en droit d'Aix avoient préparé une adresse, mais on les en a détournés par des menaces de peines disciplinaires. M. le comte de Vaucelles, maréchal-de-camp, s'est offert en otage pour la princesse. M. le comte de Lynch, madame la comtesse Arthur de Bouillé, et madame de Bruc, ont encore tenté de demander la permission d'être admis auprès d'elle. La souscription ouverte à Marseille au bureau de la Gazette du Midi, s'élevoit le 1er décembre à 14,325 fr. 90 cent., dont 1,000 fr., en dernier lieu, par madame Sheppard. ▲ Aix, une autre souscription ouverte en même temps, montoit déjà à près de 27,000 fr. Sur cela, M. le marquis et madame la marquise de Valery ont donné 5,000 fr.; M. le marquis de Galiffet 3,000 fr.; madame de Che neri et un marchand, père de neuf enfans, chacun 2,000 fr.; M. de Lavison, M. Alfr. d'Albertas, cinq anonymes, et une dame, chacun 1,000 fr. M. Berryer a déposé sur le bureau de la chambre des députés, 1° une pétition des habitans de Bennos, dans l'intérêt de MADAME, et qui est revêtue de plus de huit cents signatures; 2° une pétition des habitans de Florensac (Hérault), qui en contient trois cents, quoique la population ne soit que de trois mille ames; 3° et une semblable pétition d'un grand nombre d'habitans du Mans.

Ce n'est pas une des choses les moins remarquables de notre époque que de voir les adresses et les témoignages de dévoûment se croiser à la fois de tous côtés, en faveur du roi Louis-Philippe et de Madame la duchesse de Berri. A notre avis, personne n'a le droit de donter que ces protestations de zèle et de fidélité ne soient aussi sincères à l'égard de l'oncle qu'à l'égard de la nièce. Mais si la chose étoit possible, la présomption naturelle de sincérité seroit en faveur des hommages qui s'adressent à l'auguste prisonnière. Au moins est-on sûr que ceux-là sont désintéressés, purs d'ambition et de cupidité. Madame la duchesse de Berri n'a point de budget à distribuer, point de places, point d'avancemens, point de richesses, point de fêtes à donner. Ses mains sont vides, et ne peuvent offrir que le poids de leurs chaînes à partager. Ceux qui vont à elle y vont pour rien, et peut-être même au risque de compromettre leur repos. On ne sauroit donc attribuer à de vils motifs leurs démonstrations d'affection et de dévoûment; c'est le culte du malheur dans toute sa pureté.

1

On ne peut s'empêcher d'être surpris des paroles de triomphe employées par un journal révolutionnaire, pour féliciter son parti de ce que les royalistes

sont battus partout dans les élections. Il seroit bien plus singulier, assurément, qu'ils n'y fussent pas battus, et que des candidats tels que M. le duc de Fitz James (car c'est de lui qu'il est question) fussent préférés par les patriotes à leurs compagnons de gloire et de travaux. La révolution de juillet serait bien sotte si, maitresse de faire des lois à son usage et à sa guise, elle s'amusoit à les faire à la guise et à l'usage des autres, Comme de raison, elle a choisi tout son monde à sa convenance: Roi, ministres, magistrats, électeurs. Comment donc être étonné de ce que tout son monde s'accorde à repousser ce qui n'est pas lui? Le journal dont il s'agit a fait uue remarque juste en disant que les royalistes sont repoussés de partout. Seulement il a oublié d'expliquer pourquoi ; et d'ajouter que, si le royalisme, qui est en minorité dans les colléges électoraux, est en majorité autour de la prison de Madame la duchesse de Berri, c'est qu'on ne lui impose pas l'obli gation de payer deux cents franes de contributions foncières pour avoir le droit d'aimer qui bon lui semble,

!

La Belgique offre dans ce moment une singularité qui, probablement, ne se verra jamais en France: le roi Léopold ne peut trouver personne qui veuille être ministre. Manquer de ministres! Que ne s'adresse-t-il à nous ? Dieu sait combien son beau-père est en état de lui en fournir; car ce n'est pas lui, assurément, qui éprouvera jamais des embarras de cette espèce. La matière ministérielle ne lui manque point, et même on l'obligeroit fort en lui ouvrant quelques débouchés pour s'en débarrasser. Quoi qu'il en soit, les dificultés que le roi des Belges rencontre aujourd'hui pour recomposer son ministère proviennent, selon toute apparence, d'un sentiment de délicatesse qui ne peut que faire honneur aux hommes politiques du pays. Il leur répugne probablement d'accepter un pouvoir dont ils ne seroient chargés que pour la forme, tandis qu'un gouvernement voisin le feroit exercer chez eux pour le fond; et il paroît assez naturel qu'ils cherchent à laisser passer cette espèce d'interrègne sans s'en mêler. Si telle est leur raison, il n'y a rien à dire, sinon qu'en France les amateurs ont bien de la peine à concevoir les mœurs politiques d'un pays où l'on ne succombe pas plus facilement à la ten

tation d'être ministre.

[ocr errors]

Les ambitions littéraires se réveillent à l'occasion de la nouvelle classe des sciences morales créée à l'Institut. Les candidats se mettent sur les rangs; il y en a un dont on ne se doutoit pas, et qui se fait recommander par ses amis, Le Constitutionnel joint à la liste des prétendans M. Sénancourt, « auteur, dit-il, de plusieurs ouvrages de philosophie et de morale, et qui, dans tous ses écrits et notamment dans les Méditations d'un solitaire inconnu, s'est proposé prin cipalement de réconcilier avec les idées religieuses pures les esprits désabusés des superstitions, mais jetés par cela même dans une sorte d'incrédulité à la fois aveugle et stérile. Les travaux, les malheurs et le caractère de ce savant écrivain, le recommandent particulièrement à l'attention des membres de l'Académie. « Or, ce philosophe moral si recommandable est auteur d'an livre : De l'Amour, publié en 1806, et qui est, dit-on, principalement dirigé contre l'institution du mariage. Quoi de plus philosophique et de plus moral? En 1826,

« PrécédentContinuer »