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loient pas faire gras le vendredi. Imaginez- vous rien de plus effroyable? L'aînée de ces filles étant devenue majeure quitta ses père et mère. La cadette, qui a dix-huit ans, a aussi disparu depuis. On a dénoncé M. l'abbé Heuqueville, curé des Batignoles, comme ayant exalté le fanatisme de cette fille, et lui ayant procuré les moyens de trouver un asile. Le seul fondement de cette imputation, c'est que cette cadette étoit allée à confesse au caré quelque temps auparavant. Depuis on a appris qu'elle étoit passée en Angleterre. Néanmoins l'occasion a paru bonne pour tourmenter le curé. On lui a écrit une lettre comminatoire et insultante qu'il a déposée au parquet du procureur du Roi. Depuis, cet ecclésiastique a adressé au même magistrat une lettre où il nie les faits contenus dans la plainte des époux Ernest, et provoque une enquête sur ce qui lui est imputé. Assurément ces démarches ne sont pas d'un homme qui redoute l'oeil de la justice. De leur côté, les époux Ernest ont adressé le 18 janvier une lettre au procureur du Roi pour se plaindre de l'inutilité de leurs poursuites. Ils savent où est leur fille aînée, qui refuse, dit-on, de les voir; mais ils veulent que l'on leur rende la cadette, La mère a adressé ses réclamations au juge de paix, au maire, au président du tribunal, à la police. Elle s'étonne qu'on n'ait pu retrouver sa fille, elle se plaint que le cœur de cet enfant soit égaré et endurci par une cruelle et opiniatre superstition. Nous compatíssons à la douleur d'une mère bonne, tendre et sensible, et nous souhaitons que la dame Ernest n'ait aucun reproche à se faire, qu'elle n'ait pas provoqué elle-même le départ de ses filles en les contrariant dans leurs pratiques les plus simples de religion. Seroit-il vrai que, piquée de voir ses filles conserver des principes de religion que leur avoit inculqués une tante respectable, elle ait fait tous ses efforts pour les en détacher, et qu'elle voulût les réduire à la simple religion naturelle, dont les devoirs et les pratiques sont d'ailleurs si commodes? Au moins il auroit fallu leur faire aimer cette religion, en les traitant avec douceur. Elle ne cite d'elles d'autre tort que de n'avoir pas voulu faire gras le vendredi, et là-dessus, elle les accuse d'avoir le cœur corrompu, elle les flétrit publiquement comme telles. Cela n'est pas d'un cœur bien maternel. Quoi qu'il en soit, la justice éveillée par les plaintes de la dame Ernest, à fait le 23 une perquisition chez les Carmélites de la rue d'Enfer, où l'on soupçonnoit apparemment qu'étoit la fille cadette. M. d'Herbelot, juge d'instruction, est arrivé, accompagné des sieurs Ernest et Franque, et de la dame Ernest, qui est entrée seule avec le magistrat, les deux autres sont restés en dehors de la clôture. La supérieure a représenté qu'il étoit contre la règle des Carmélites de se découvrir le visage devant des hommes, et, comme en effet, il n'étoit nécessaire pour vérifier les soupçons que d'autres que la mère vissent les figures des religieuses, le magistrat a déféré à l'observa

pas

tion de la supérieure et la dame Ernest a vu seule le visage des religieuses, qui ont passé devant elle en relevant leurs voiles. Elle n'a pas retrouvé sa fille, et, une perquisition. faite dans toute la maison, a été également sans résultat. Des journaux pour lesquels les convenances ne sont rien, s'étonnent, s'indignent presque qu'un magistrat ait respecté les scrupules de pieuses filles. Mais pourquoi auroit-il déployé une rigueur inutile, puisque la mère seule pouvoit reconnoître sa fille? N'étoit-ce pas assez pour des religieuses vouées à une retraite profonde, de se voir l'objet d'une visite domiciliaire? N'est-il pas pénible pour elles d'être réduites, sur de faux soupçons, à défiler devant une étrangère et à lui montrer toute la maison? Faudra-t-il ainsi qu'à la première dénonciation de quelques ennemis de la superstition, on vienne troubler la paix de ces pieux asiles? Au surplus, on voudroit, à ce qu'il paroît, exciter un long scandale avec toute cette affaire. Les journaux ont donné tout au long les lettres des époux Ernest; leur conseil, M. Franque, avocat, a publié aussi une lettre où il dit fièrement: Que l'on sache bien que je ne suis pas homme à me laisser intimider par quelques marguilliers de paroisse. Qu'il faut de courage en effet pour ne pas avoir peur de quelques marguilliers! M. Franque parle d'intrigues et de manœuvres qui se croisent en tous sens; il est sûr qu'il y en a eu beaucoup pour essayer de remuer l'opinion et d'échauffer les esprits contre un prêtre estimable. Les démarches de M. l'abbé Heuqueville sont toutes naturelles. On. l'accuse, il est tout simple apparemment qu'il se défende. Fera-t-on par hazard un crime au conseil de fabrique de sa paroisse de se déclarer pour lui? Ce conseil a, dit-on, le projet de faire insérer dans les journaux une note pour répondre aux attaques contre M. le curé. Quoi de plus légitimé qu'une telle démarche !

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Le Nouvelliste ayant dit que la mission des docteurs Orfila et Auvity, à Blaye, se rattachoit à une question importante de médecine légale, ces singulières expressions avoient donné lieu à une foule de conjectures et de commentaires que cette feuille ministérielle a dû faire cesser, en expliquant qu'il ne s'agissoit que de fournir à la princesse, depuis quelque temps sujette à des indispositions, des moyens de consultation, et que l'on avoit cru pouvoir accorder toute confiance à deux hommes expérimentés, et qui ont été médecins de S. A. R. Quoi qu'il en soit, il paroît que l'état de santé de MADAME n'est point alarmant. Le Nouvelliste a publié le 27 une dépêche de Blaye, portant qu'une consultation 'venoit d'avoir lieu entre les docteurs Orfila, Auvity, Gintrac et Barthez, et que l'on n'a trouvé rien d'inquiétant dans la position de la duchesse. La Gazette de Guyenne, qui se procure des nouvelles de la citadelle, annonce, sous la date du 22, que S. A. R. étoit un peu souffrante d'une affection chronique nerveuse, à laquelle elle étoit sujette avant sa captivité; que des bains lui avoient été ordon

nés, et qu'elle s'en trouvoit bien. Elle s'est promenée le dimanche 20 sur la terrasse qui borde la rivière; beaucoup de personnes ont eu le bonheur de la voir et de la reconnoître. Le 21, elle a entendu une messe de Requiem dans sa chapelle. Ce jour-là, par un sentiment de convenance qui se conçoit, le colonel Chousserie n'a point laissé travailler les ouvriers à la citadelle. Nous faisons des vœux pour que le gouvernement sente la nécessité de retirer MADAME de la citadelle de Blaye. M. Aloysius de Mey, médecin à Paris, déclare, dans une lettre qui nous est adressée, qu'il adhère entièrement à l'opinion du docteur Guilbert, sur le danger qu'uue plus longue détention feroit courir à la santé de madame la duchesse de Berry. Il fonde son sentiment sur des motifs très-graves, et cite les maladies et indispositions auxquelles l'état de captivité peut donner lieu, ou qu'il agraveroit d'une manière funeste.

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- Une adhésion à la protestation de M. Hennequin se couvre depuis quelques jours de signatures à Paris. En tête des nombreux royalistes qui y figurent, et qui déclarent accepter toutes les conséquences et la responsabilité de cet acte, se trouve M. le lieutenant-général marquis de la Tour-Maubourg, ancien ministre de la guerre. Beaucoup de jeunes gens des écoles se sont aussi identifiés aux sentimens exprimés par M. Hennequin. M. Battur, avocat à la cour royale, M. Vautenet, et d'autres personnes, y ont donné des adhésions particulières. La démarche de M. Hennequin a donné lieu à une déclaration non moins remarquable des magistrats qui, lors de la révolution de juillet, ont abandonné les siéges qu'ils occupoient à la cour de cassation, à la cour royale de Paris, et au tribunał de première instance. Cet acte est signé de MM. Clausel de Coussergues, de Sèze, J. Gossin, Charlet, de Vaufreland, Bérard des Glajeux, Regnier, Lambert, Al. Javon, Menjot de Dammartin, Edm. Levavasseur, Coudrin, Soufflot de Magny, A. de PontonDamécourt, Gruel, de Fremeur, de Cazales, Aniéré. MM. Pardessus et Meslin, alors absens, ont autorisé à y joindre leurs noms. On lit dans la Quotidienne du 27 janvier des réflexions de M. le comte Ferdinand de Bertier, ancien ministre d'Etat, sur la conduite que l'on tient à l'égard de madame la duchesse de Berry, sur le bien qu'elle a fait et qu'elle comptoit faire. M. de Bertier se plaint de ce qu'une protestation de dévoúment, qu'il avoit adressée ouverte au colonel Chousserie, et qui étoit fort inoffensive pour le pouvoir, n'ait point été remise à la princesse, M. le comte Adolphe de Villemur, ancien garde-du-corps, a proposé au gouvernement une caution de 150,000 fr. pour que S. A. R., à qui le séjour de Blaye est nuisible, fût transférée à Bordeaux dans un local plus sain. M. Anatole Dujay, demeurant dans l'arrondissement de Soissons, est un de ceux qui ont offert leur fortune, leur liberté et leur vie pour obtenir que l'on mette un terme à cette détention illégale. M. Rostan, médecin et ancien maire de Mamers, demande depuis long-temps à partager sa captivité. De nouvelles adresses à la princesse out été signées par les habitans de Béziers et de Villeneuve-lès-Béziers, de Perpignan, de Laigle, de Rugles (Eure), de Sablé (Sarthe), par ceux de beaucoup de communes du Midi et de l'Ouest, et par les dames d'Aubusson, du Mans, de Brives et de Lizieux.

On ne discontinue point d'adresser aux chambres des pétitions relativement à la détention arbitraire de madame la duchesse de Berry. M. de Dreux-Brézé en a remis la semaine dernière un assez grand nombre sur le bureau de la chambre des pairs, déjà saisie de semblables réclamations sur lesquelles elle n'a point encore statué. A la chambre des députés, M. Berryer en a déposé seize depuis quelques jours. Elles sont adressées par des habitans de Rouen et des environs (seconde pétition de 1,500 signatures); de Moulins, autant de signatures; de Caen (2,000 signatures); de Flers et Tinchebray (1,100), d'Alençon (5 à 600), de Falaise (4 à 500), de Coutances, de Bergerac, de Limoux, de Neufchâtel, d'Auch, de Troyes, de Dax, de Pont-St-Esprit, et par MM. Rivet à Paris et Zozime - Bergé à Mézières. Il va encore arriver aux chambres des pétitions souscrites par les habitans d'Arboras et Montpeyroux (Hérault), et par M. de Beuville, ancien mousquetaire, demeurant à Caen.

M. le comte Duchâtel, membre et doyen d'âge de la chambre des députés, et M. le lieutenant - général St – Cyr Nugues, sont élevés à la dignité de pair de France.

M. l'abbé Delannois, curé-doyen de Gamaches, qui a montré beaucoup de zèle pendant le choléra, vient de recevoir la décoration de la Légion-d'Honneur. M. le vicomte de Rohan-Chabot, aide-de-camp du roi Louis-Philippe, est nommé membre du conseil-général du département de Seine-et-Oise.

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M. Feuillade-Chauvin, procureur-général à Bordeaux, a été mandé à Paris, et a eu une longue entrevue avec Louis-Philippe. On croit qu'il s'agit de madame la duchesse de Berry.

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Le collége électoral de Figeac (Lot), est convoqué pour le 26 février, à l'effet d'élire un député en remplacement de M. Delpon, démissionnaire.

Le ministre des finances vient de rendre un arrêté qui réduit le taux de l'intérêt des bons royaux, savoir, à 4 pour 100 pour ceux pris à un an d'échéance, à 3 pour 100 pour ceux pris à six mois, et à 2 pour 100 pour ceux à trois mois.

Le conseil-général du département de la Seine, en ouvrant sa session extraordinaire le 25 janvier, a réélu MM. Besson président et Cochin secrétaire. M. Ch. Dupin est chargé du rapport sur le budget de la marine.

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Les journaux ministériels démentent le bruit qui s'étoit répandu du refus qu'auroit fait l'empereur de Russie d'agréer, pour ambassadeur de France, M. le maréchal Maison. On croit qu'il est également inexact que Nicolas s'oppose à l'arrivée de sir Strattford-Canning, nouvel ambassadeur d'Angleterre.

La chambre d'accusation et la chambre des appels correctionnels de la cour royale réunies ont rendu définitivement le 25, sous la présidence de M. Séguier, leur arrêt de prévention dans l'affaire du coup de pistolet. Les sieurs Bergeron et Benoist sont renvoyés devant la cour d'assises, sous l'accusation d'attentat envers la personne de Louis-Philippe. Les sieurs Giroux (de Saint-Geniez) et Planel ont été mis en liberté. S'il n'y a pas de pourvoi en cassation, l'affaire sera jugée les 11 et 12 février.

· Le Constitutionnel assure que la déposition de la demoiselle Boury n'a eu aucune influence sur l'arrêt de la cour royale, qui traduit devant la cour d'assises les sieurs Bergeron et Benoist, pour le coup de pistolet du 19 novembre. La demoiselle Boury, dit cette feuille, est tombée dans de flagrantes contradictions, et son récit n'a fait naître que des méfiances.

La cour d'assises a jugé le 26 le nommé Regez, ancien sergent de ville, assassin du garçon de caisse Ramus, dont il a ensuite coupé le corps par morceaux. Il a avoué son crime, et a déclaré que son fils n'y avoit aucunement participé. Sur la déclaration du jury, il a été condamné à la peine de mort.

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La réintégration à Ste-Pélagie de MM. Philippon, éditeur de la Caricature, et Mie, imprimeur, porte le nombre des détenus politiques à 110.

M. le docteur Perdreau, directeur d'une maison de santé à Chaillot, éloit poursuivi pour avoir laissé évader, le 27 novembre dernier, M. Bérard, éditeur des Cancans, transféré dans sa maison. M. Perdreau a déclaré à l'audience que le préfet de police lui avoit permis de laisser sortir le prisonnier, et qu'il avoit eu confiance dans la parole de ce dernier. Les juges ne l'ont condamné qu'à 25 fr. d'amende. M. Bérard est, dit-on, passé en Espagne.

On se rappelle que la Quotidienne, la Gazette de France, le Revenant, la Mode et l'Echo français ont été saisis, pour avoir publié les discours prononcés lorsque des jeunes gens allèrent témoigner leurs félicitations à M. de de Châteaubriand, à l'occasion de sa dernière brochure. La chambre d'accusation de la cour royale, à laquelle l'affaire a été déférée, vient de décider, qu'avant de faire droit à la réquisition du ministère public, M. de Châteaubriand seroit poursuivi, tant pour la réunion qui a eu lieu à son domicile que pour les paroles qu'il a prononcées.

Le journal royaliste le Revenant a été saisi le 25 à la poste et dans ses bureaux.

- Un certain nombre de jeunes gens se proposoient d'aller féliciter M. Hennequin sur sa courageuse protestation. L'honorable avocat a manifesté dans les journaux le désir que l'on ne donnât pas de suite à ce projet. Une députation des étudians qui adhèrent à sa protestation se rendra cependant chez lui jeudi prochain.

On lit depuis peu, aux angles des rues royales et des Champs-Elysées, celle inscription: Place Louis XV1. Cette place avoit repris, après les évènemens de juillet 1830, le nom de place de la Révolution ou de la Concorde.

Le caissier de M. Alcobert, banquier espagnol, a disparu, emportant 685,000 fr., et ne laissant que 40 fr. dans la caisse. M. Alcobert, qui est absent de Paris, ignore ce malheur qui met sa maison dans l'embarras. On n'a pu encore retrouver le caissier, nommé Priou, qui s'étoit muni à l'avance d'un passeport pour la Suisse.

— L'autorité a fait fermer, le 23, plusieurs maisons de jeux non autorisées, qui ont été découvertes.

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