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siège; et le blocus de 1814; toutes circonstances où l'administration se trouvait en contact avec les intérêts de familles, de l'état et des hommes de guerre peu traitables de l'Empire.

Avec douceur et patience et une certaine bonhomie, aidée d'une grande connaissance des affaires administratives, M. Benoist en sortit à son honneur; aussi fut-il conservé dans ses fonctions lorsque vint la restauration, et lors du passage du duc de Berry en cette ville, on le nomma chevalier de la Légion-d'Honneur. Pendant les cent jours, il fut remplacé par M. le baron de Maingoval dans ses fonctions de maire, qu'on lui rendit en même temps que les alliés remettaient à Louis XVIII sa couronne.

Les élections du Nord, présidées par le duc de Berry, eurent lieu; on sait qu'elle influence eut le prince dans ces élections où n'assistèrent pas les électeurs constitutionnels; M. Benoist, regardé comme une victime des cent jours, fut élu député, et chacun se rappellera facilement avec quel éclat, avec quelle pompe, il fut reçu dans sa ville natale, en revenant de Lille après sa nomination. Des honneurs presque triomphaux lui furent rendus à la porte de Lille, et M. Momal, peintre, consigna sur la toile cette réception civique.

Ainsi donc, M. Benoist, qui n'était point homme de parti, se trouva membre de la fameuse chambre introuvable: il en fnt bientôt étonné lui-même; mais alors, une fièvre de royalisme s'était emparé de tout le département du Nord, et le nouveau député en fut atteint quelques jours. En récompense de ses services, le Roi lui accorda vers cette époque des lettres de noblesse; ce fut alors que M. Benoist, encore sous l'influence de la reconnaissance, prit pour armes une branche de lys, au pied de laquelle un chien, emblême de la fidélité, se tenait couché.

La chambre introuvable, plus royaliste que le roi, fut dissoute par l'ordonnance du 5 septembre 1815, et M. Benoist revint prendre ses fonctions de maire, fort importantes alors, par le passage des alliés qui sortaient de France, et depuis, par l'occupation de Valenciennes par les anglais.

Depuis long-temps on demandait que Valenciennes devint le siège d'une sous-préfecture; M. Benoist joignit ses efforts à ceux de quelques bons esprits qui poussaient à la conclusion de cette affaire; dès lors, M. Duplaquet, sous-préfet de Douai, homme personnel et passionné, voua à toute l'administration municipale de Valenciennes une haine implacable. Il abreuva M. Benoist de dégoûts; sa correspondance d'alors est un modèle de rudesse et d'incivilité: on conçoit que le fonctionnaire non rétribué ne put tenir contre ces attaques réitérées du fonctionnaire payé; M. Benoist offrit sa démission, elle fut acceptée, et le 15 mai 1822, M. Desfontaines de Preux fut nommé pour le remplacer.

M. Benoist rentra alors dans la vie civile après avoir rempli 22 ans les fonctions de maire; le 19 août 1822, jour de l'installation de son successeur, toute l'administration municipale et le conseil se portèrent en masse au domicile du démissionnaire pour lui rendre hommage et lui exprimer les regrets que causaient sa retraite. On ne remarqua dans cette visite que l'absence de M. le sous-préfet, qui était venu installer le nouveau maire, et était reparti subitement pour Douai.

M. Benoist est mort après une longue maladie de langueur; nous pouvons affirmer sans crainte qu'il ne laissa pas d'ennemis. C'était un homme conciliant, doux, affable, peu énergique peutêtre, mais sans amour-propre, sachant apprécier un bon conseil, et s'en servant au besoin. Il fut surtout regretté de la classe ouvrière qui trouva toujours près de lui un accès facile et de tous les instans. Quand il n'aurait eu que cette qualité, elle mérite que la terre lui soit légère.

DOM DRUON.

Druon, né à Busigny (arrondissement de Cambrai) en 1744, fit d'excellentes études et entra de bonne heure dans l'ordre célèbre et savant des Bénédictins de la congrégation de Saint-Maur. II' devint prieur de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, à Paris, et coopéra, avec Dom Brial et Dom Clément, au fameux Recueil des Historiens des Gaules et de la France, dont le 19. volume in-folio a déjà paru. C'est surtout au 14.e volume que Dom Druon prit une part très-active.

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Lorsque la première révolution supprima les ordres monastiques, le studieux bénédictin chercha dans l'étude et la lecture des consolations sur la dispersion de ses amis; mais il ne resta pas long-temps dans l'obscurité : sa grande réputation de savoir s'était étendue au loin, et en 1798, on jeta les yeux sur lui quand il s'agit de nommer un bibliothécaire du corps législatif. Il a rempli ces fonctions jusqu'au dernier moment de sa vie, avec ce zèle scrupuleux et cette exquise urbanité qu'avaient su apprécier les diverses législatures, aussi M. Druon avait-il eu pour amis tous les hommes les plus remarquables qui se sont succédés dans les divers renouvellemens des chambres.

L'empereur Napoléon, qui savait distinguer le mérite dans tous les rangs et toutes les positions, décora Dom Druon de l'étoile de

l'honneur.

Cet ecclésiastique tolérant et éclairé, ce savant aimable et conciencieux, a terminé le 4 octobre dernier, après une courte maadie, sa longue et honorable carrière; il était agé de 89 ans.

DUPIRE.

M. Dupire, ancien membre du corps législatif, successivement administrateur du département du Nord, agent national près le district de Valenciennes, puis procureur syndic et adjoint au maire de Valenciennes, ancien avocat et ayant long-temps exercé les fonctions de notaire, dans cette dernière ville, y est décédé le 11 août 1833, à l'âge de 70 ans.

Né à Emerchicourt, près Bouchain, fils d'un cultivateur, M. Dupire, après avoir fait ses études à Douai, y fut reçu avocat. Nommé agent national au district de Valenciennes, il en remplit les fonctions pendant le fameux bombardement de cette ville; il suivit, après sa reddition, l'administration à Douai, puis à Bouchain, et rentra avec elle lorsque nos troupes eurent chassé les Autrichiens de la ville.

Il reprit la profession d'avocat, à laquelle il joignit celle de notaire, et fut bientôt vengé de l'injustice dont il avait été la victime, par sa nomination au corps législatif, où il siégea 3 ans.

A peine de retour dans ses foyers, il fut nommé commissaire du gouvernement, près l'administration départementale, et exerça en cette qualité jusqu'à la révolution du 18 brumaire.

Rentré dans la vie privée, M. Dupire redevint notaire et n'occupa de fonction publique que celle d'adjoint au maire de Valenciennes pendant les cent jours. Depuis il est resté simple citoyen.

M. Dupire, pendant les temps de troubles de notre première révolution, dans la position critique et rigoureuse d'agent national et de commissaire du gouvernement, position qu'on ne peut juger qu'en se reportant à l'époque pénible pendant laquelle il exerçait ces fonctions, fit tout le bien qu'on pouvait attendre d'un homme probe et courageux.

Député, il rendit de nombreux services, tout en refusant les cadeaux qu'on ne craignait pas de lui offrir en reconnaissance de ses services; électeur, il fut toujours fidèle aux opinions constitutionnelles, inébranlable dans sa conviction; faisant abstraction des hommes, son vote fut toujours donné pour la même cause; ni les promesses, ni les menaces du pouvoir, ne le firent dévier de la route qu'il s'était tracée, qu'il suivit obstinément avec quelques amis, et où la majorité vint enfin se joindre.

Sa veuve, son fils, ses parens, ses amis, tous ceux enfin qui le connurent, ne peuvent trouver trop de larmes et de regrets pour une telle perte, ni trop de voix pour dire ce qu'il fut et ce qu'il fit.

PLOUVAIN.

Pierre-Antoine-Samuel Plouvain naquit à Douai, d'une famille de bourgeoisie, le 7 septembre 1754. Après avoir fait ses études au collège d'Anchin, à Douai, il fut reçu avocat par l'académie de Douai. En 1777, M. Plouvain fut nommé conseiller à la gouvernance du souverain bailliage de Douai et Orchies. A la suppression de cette compagnie, en 1792, M. Plouvain devint receveur-économe de l'administration des hospices. Lors de la réorganisation des tribunaux, en 1800, il fut nommé juge au tribunal criminel du département du Nord. En 1811, au moment de la création des cours impériales, M. Plouvain entra dans celle de Douai en qualilé de conseiller, et il a fait partie de cette compagnie, devenue cour royale, jusqu'au moment de sa mort, arrivée le 1er décembre 1832.

M. Plouvain a été membre de l'administration des hospices et du conseil municipal pendant long-temps, et n'a quitté ces dernières fonctions qu'au moment de la révolution de juillet.

Annaliste et chronologiste exact et laborieux, M. Plouvain a laissé une grande quantité de matériaux précieux sur l'histoire du pays, et en particulier sur celle de la ville de Douai.

Il a publié à diverses époques :

Arrêts du parlement de Flandre, 12 vol. in-4.0

Souvenirs à l'usage des habitans de Douai, 1 vol. in-12.
Notice sur les offices du parlement de Flandre, 1 vol. in-4.0
Notice sur le conseil provincial d'Artois, 1 vol. in-4.°

SCALFORT.

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Nicolas-Joseph Schelfondt, baron Scalfort, maréchal-de-camp de cavalerie en retraite, commandant de la Légion-d'Honneur, chevalier de Saint-Louis, naquit à Douai, le 16 février 1752. Entré au service le 1er avril 1768, dans le régiment de Lanau nommé ensuite de Durfort, puis 4. chasseurs à cheval, il devint colonel de ce régiment après avoir passé par tous les grades et sans l'avoir quitté. Il était lieutenant lorsque, le 3 août 1792, il fut créé chevalier de Saint Louis.

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Scalfort a fait successivement toutes les campagnes des années 1792 et 1793, des six premiers ans de la république, aux armées du Rhin, de Rhin-et-Moselle, de Hollande et de l'Ouest Il fut blessé dans la Vendée d'un coup de feu à la cuisse, à la suite duquel il avait gardé une forte claudication. Il fit comme colonel

les campagnes des ans 8 et g à l'armée d'Italie. Il força les passages de la Piave et du Tagliamento, à la tête de son régiment, et décida en partie le résultat de ces journées.

Promu au grade de général de brigade, ce fut à regret qu'il quitta le régiment auquel il appartenait depuis quarante ans. Les campagnes de la grande armée s'ouvraient alors. A la mémorable bataille d'Austerlitz il commandait une division de dragons; il y exécuta plusieurs charges brillantes qui contribuèrent au gain de la bataille. Quoique grièvement blessé d'un coup de feu au visage dès la première charge, il ne voulut point quitter sa division de toute la journée et il eut un cheval tué sous lui. Déjà il avait éprouvé cet accident à deux reprises dans la retraite de Moreau et à l'armée de l'Ouest.

L'empereur le nomma alors baron de l'empire et lui assura une riche dotation en Westphalie. Il était commandant de la Légiond'Honneur dès la création de l'ordre, et il avait reçu en Italie un sabre d'honneur, étant déjà colonel.

Plus tard le général Scalfort retourna en Italie pourly prendre, sous les ordres du prince vice-roi, le commandement de la réserve générale de cavalerie. Ses blessures et ses longs services l'obligèrent de demander sa retraite en 1809. Cependant, ses connaissances comme officier général de cavalerie engagèrent l'empereur à le rappeler encore en 1812 à l'activité. Il alla prendre à Tours le commandement général du grand dépôt de Turnout.

En 1815, le général Scalfort était retiré à Douai; il y commandait la garde nationale. La garnison de cette place, après la désastreuse journée de Waterloo, refusait de se soumettre au pouvoir des Bourbons, que les alliés traînaient à la suite de leurs équipages; elle ne voulait point ouvrir les portes de la ville à un ramas de paysans qui vociféraient au pied des murailles et insultaient aux braves qui les gardaient. Le peuple, qui souffrait de l'état de siège et que d'ailleurs quelques meneurs avaient insidieusement excité, s'agitait dans la ville et se répandait en invectives contre la garnison. Des pièces de canon furent braquées de la place vers la rue de la Mairie, l'artillerie et les autres troupes s'y formèrent en bataille; alors la populace, toujours lâchement poussée, ne se contenta plus de crier, elle lança des pierres aux artilleurs. Ces braves, que depuis trois jours on abreuvait d'outrages, que l'on contenait avec peine, se portèrent avec impétuosité à leurs pièces, et, les dirigeant vers les groupes de citoyens, s'apprêtaient à tirer vengeance de ces malheureux.... Déjà la mêche s'approchait de la lumière, lorsque le général Scalfort, malgré son infirmité, s'élance à la bouche du canon. «< Amis, dit» il aux canonniers, si vous faites feu, c'est moi que vous attein

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