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levez-vous donc, et à sa demande, répondez aux

armes! >>

En même temps, la commission exécutive enlevant les troupes de ligne à la juridiction des préfets de province, les plaçait sous les ordres uniques du ministre de la guerre et ordonnait un triduo solennel pour inaugurer par les bénédictions du ciel la guerre de l'indépendance.

Dans leur présomption, les républicains de Rome n'implorent pas le ciel, mais assurés de ses bénédictions, ils entonnent par anticipation le Te Deum de la victoire.

Au milieu de ce grand nombre de décrets rendus par l'Assemblée constituante, il s'en trouve quelques-uns dont le ridicule l'emporte encore sur l'inopportunité. C'est ainsi que le 25 elle décide par ordonnance la reprise des fouilles au Forum, et accorde à cet effet un crédit de 16,800 écus.

le

pouvoir sans que

Le lendemain 26, elle prohibe la chasse aux cailles sur le littoral de la Méditerranée, de Civita-Vecchia, à Prastra, etc. Puis, considérant que dans la gravité des circonstances, il était nécessaire de concentrer l'Assemblée elle-même suspendit l'exécution de son mandat, elle décrète la dissolution du comité exécutif et institue un triumvirat auquel elle confie le gouvernement de la république et des pouvoirs illimités pour la

guerre

pendance et pour le salut de la patrie.

de l'indé

Ce triumvirat, composé de Joseph Mazzini, Aurelio-Saffi et Charles Armellini, s'empressa

d'adresser

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au peuple une proclamation contenant, comme d'habitude, de sonores, et de vaines paroles au lieu de faits; mais leurs discours se perdirent dans l'indifférence du peuple romain comme le vent dans le désert dont parlent les saintes Écritures.

Les révolutionnaires de Rome et de Florence, qui avaient profité de l'attitude pacifique et conciliante de Pie IX pour le renverser, n'envoyèrent pas un seul homme au secours de l'armée piémontaise qu'ils poussaient à sa perte en haine des monarchies. Ce que désiraient avant l'expulsion des Autrichiens, les nouveaux maîtres de Rome, c'était la chute des trônes et des princes italiens. Ils n'avaient pu détruire par la révolte celui de Ferdinand II, ils jetaient sur les baïonnettes de l'Autriche celui de Charles-Albert.

Sur ces entrefaites, le roi de Sardaigne, prince malheureux, mais vaillant soldat, entrait en campagne à la tête de cent trente mille hommes. Il allait jouer contre l'Autriche sa couronne et le sort de l'Italie.

Un Polonais, nommé Chrzanowsky, ayant sous ses ordres les ducs de Savoie et de Gênes, le général Perron, Durando, la Marmora et Ramorino (ce dernier imposé par les clubs révolutionnaires), commandait en chef l'armée piémontaise. Le maréchal Radetzki commandait les vieilles bandes de l'Autriche formant un effectif de quatre-vingt- trois mille hommes. Après quelques succès insignifiants remportés d'abord par les troupes royales, Radetzki tra

versa le Tessin, et les deux armées ennemies se rencontrèrent dans les plaines de Novarre.

La première division de l'armée piémontaise, composée des brigades d'Aoste et de Régina formait l'aile droite; elle se déployait derrière Corto-Nuova à la gauche de la route de Verceil, sous les ordres du général Giacomo Durando. La deuxième division, composée des brigades de Casale, d'Acqui et de Parme, s'étendait devant la laiterie dite la Citadella. La troisième division, formée des brigades de Savone et de Savoie, s'appuyait sur quelques maisons et l'église de la Bicocca : le général Perron la commandait. La réserve, composée des brigades de Pigne. roles et Piémont, occupait, sous les ordres du duc de Gênes, les environs du cimetière de Saint-Nazaire. Les bataillons, composés de volontaires appartenant aux diverses contrées de l'Italie, étaient à la droite de Crécate. Enfin, le duc de Savoie, à la tête des gardes de la brigade de Cunéo, appuyant l'aile droite, occupait les bas-fonds qui s'étendent sous les murs de la ville.

Cette disposition de bataille, éparpillant sur une immense étendue de terrain les forces piémontaises devant les Autrichiens qui concentraient les leurs, fut une première faute dont sut profiter le maréchal Radetzky.

A onze heures du matin, cet habile guerrier commença le feu en dirigeant son mouvement d'attaque contre la Bicocca, sur la gauche de l'armée piémontaise. Après une mousqueterie fort vive des deux

côtés, l'action s'engagea sur toute la ligne de bataille. La brigade de Savone, qui occupait les premières positions, plia d'abord; mais, renforcée par la brigade de Savoie, elle reprit immédiatement le terrain perdu, et s'avança même jusqu'à la laiterie Lavinchi, située à la gauche de la citadelle. Alors le feu des Autrichiens se ralentit sur la gauche, et leurs efforts semblèrent se concentrer sur le centre, à la citadelle, qui fut prise et reprise plusieurs fois par les brigades Casale, Acqui et de Parme. L'attaque était redevenue plus vive sur la gauche, lorsque les brigades de Savone et de Savoie, décimées par la mitraille, commencèrent à se replier du côté de la Bicocca. Cette position devait décider du sort de la journée. La réserve, aux ordres du duc de Gênes, accourut pour la soutenir. Le jeune prince, donnant l'exemple du courage, y fit des prodiges de valeur, et après avoir eu plusieurs chevaux tués ou blessés sous lui, combattit bravement à pied. Vains ef- forts! la Bicocca fut enlevée. Alors les bataillons piémontais se replièrent les uns sur les autres; la nuit survint, et le champ de bataille resta au pouvoir des troupes de Radetzky vainqueur.

Le roi Charles-Albert, constamment exposé au feu, cherchant de préférence les positions qui présentaient le plus de dangers, fut superbe de courage pendant toute l'action; mais lorsqu'il vit que la bataille était perdue, il fut sublime... « Puisque je n'ai pu, en ce jour, s'écria-t-il, ni mourir de la mort du soldat, ni sauver l'Italie, ma tâche est

désormais accomplie. Je ne puis plus rendre des services à la patrie, au bonheur de laquelle, depuis dixhuit ans, je consacre ma vie ; je renonce volontairement à la couronne pour la déposer sur le front de mon fils. >>

Ce moment était solennel! Haut et debout devant la majesté du malheur, Charles-Albert, entouré de ses deux fils et de ses principaux officiers, cherchant tous à le faire revenir de sa décision, resta inébranlable dans sa volonté. « Je vous remercie, messieurs, leur dit-il, en les embrassant, je vous remercie tous des services que vous avez rendus à l'État, ainsi qu'à ma personne; mais je ne suis plus roi mon fils Victor est le roi. Io non sono più il re, il re è Vittorio mio figlio.

Une heure après, le glorieux vaincu de Novarre, accompagné d'un seul serviteur, partit pour aller mourir sur la terre étrangère.

L'histoire dira peut-être un jour que le roi CharlesAlbert est mort victime de son ambition; ce grief ne ternirait point sa gloire, car l'ambition, quand elle émane d'un sentiment généreux, devient la vertu des grandes âmes. Le roi Charles-Albert a dû sa perte moins à son ambition personnelle qu'à la fatalité des circonstances dans lesquelles il s'est trouvé. Placé entre deux écueils inévitables, la perte de sa couronne par la révolution, ou la chute de son tròne par la guerre étrangère, il a choisi celui qui pouvait lui faire perdre couronne et sceptre, mais lui conserver l'honneur. A toute révolution il faut un noble

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