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LISTES D'AUTEURS. RENSEIGNEMENTS DIVERS.

SITIONS.

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PARIS

SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'IMPRIMERIE ET DE LIBRAIRIE

ANCIENNE LIBRAIRIE LECÈNE, OUDIN ET Cle

15, RUE DE CLUNY, 15

1901

Tout droit de reproduction réservé

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Desportes fut aussi un poète satirique. Certes sa satire n'est jamais bien véhémente ni bien âpre comme celle de d'Aubigné. Mais elle a une certaine malice fine, pénétrante, spirituelle, qui est tout à fait agréable parce qu'elle nous repose des fadeurs, des longueurs et de la monotonie habituelles à ce poète. On vantait beaucoup en son temps sa diatribe contre le mariage. Je n'en citerai rien: elle est plutôt vulgaire et plate, et c'est surtout par une âpreté un peu grossière qu'elle a séduit des contemporains trop peu délicats. Mais la réplique à cette pièce, intitulée Chanson, est au contraire fort agréable et assez piquante. C'est une série d'épigrammes des femmes contre les hommes.

Las que nous sommes misérables
D'être serves dessous les lois
Des hommes légers et muables
Plus que le feuillage des bois !

Les pensers des hommes ressemblent
A l'air, aux vents et aux saisons,
Et aux girouettes qui tremblent
Inconstamment sur les maisons.

Leur amour est ferme et constante Comme la mer grosse de flots,

Qui bruit, qui court, qui se tourmente,
Et jamais n'arrête en repos.

Ce n'est que vent que de leur tête,
De vent est leur entendement,
Les vents encore et la tempête
Ne vont point si légèrement;

Ces soupirs, qui sortent sans peine
De leur estomac si souvent,
N'est-ce une preuve assez certaine
Qu'au dedans ils n'ont que du vent?

Qui se fie en chose si vaine,
Il sème sans espoir de fruit,
II veut bâtir dessus l'arène,
Ou sur la glace d'une nuit.

Ils font des dieux en leur pensée,
Qui comme eux ont l'esprit léger,
Se riant de la foi faussée

Et de voir bien souvent changer.

Ceux qui peuvent mieux faire accroire
Et sont menteurs plus assurés,
Entre eux sont élevés en gloire,
Et sont comme dieux adorés.

Car ils prennent pour grand'louange
Quand on les estime inconstants;
Et disent que le temps se change,
Et que le sage suit le temps.

Mais, las qui ne serait éprise,
Quand on ne sait leurs fictions,
Lorsqu'avec si grand'feintise
Ils soupirent leurs passions?

De leur cœur sort une fournaise,
Leurs yeux sont deux ruisseaux coulants,
Ce n'est que feu, ce n'est que braise,
Même leurs propos sont brûlants.

Mais cet ardent feu qui les tue Et rend leur esprit consommé, C'est un feu de paille menue, Aussitôt éteint qu'allumé.

Et les torrents qu'on voit descendre

Pour notre douceur émouvoir,

Ce sont des appas à surprendre

Celles qu'ils veulent décevoir.

Ainsi l'oiseleur au bocage

Prend les oiseaux par ses chansons,

Et le pêcheur sur le rivage

Tend ses filets pour les poissons.

Sommes-nous donc pas misérables
D'être serves dessous les lois
Des hommes légers et muables

Plus que le feuillage des bois ?

Voilà qui est distingué. Le tour est joli, et surtout la mesure est juste; rien d'étrange, ni rien de lourd ou de désobligeant, comme dans tant de pièces satiriques de ce temps-là. C'est à cette même veine de satire piquante et modérée que se rapporte le chef-d'œuvre de Desportes, le poème auquel son nom reste attaché dans toutes les mémoires. Il en est ainsi de beaucoup de poètes, dont le nom évoque aussitôt une seule poésie, comme s'ils n'en avaient pas fait d'autres. Cette chanson qui a eu une réputation immense au XVIIe siècle et qui est encore bien connue, est intitulée Villanelle, bien que ce n'en soit pas une à proprement parler. Je ne saurais parler de Desportes sans la citer:

Rozette, pour un peu d'absence,
Votre cœur vous avez changé,
Et moi, sachant votre inconstance,
Le mien autre part j'ai rangé;
Jamais plus beauté si légère,
Sur moi tant de pouvoir n'aura :
Nous verrons, volage bergère,
Qui premier s'en repentira.

Tandis qu'en pleurs je me consume,

Maudissant cet éloignement,

Vous, qui n'aimez que par coutume,
Caressiez un nouvel amant.

Jamais légère girouette

Au vent si tôt ne se vira;

Nous verrons, bergère Rozette,
Qui premier s'en repentira.

Où sont lant de promesses saintes,
Tant de pleurs versés en partant?
Est-il vrai que ces tristes plaintes
Sortissent d'un cœur inconstant ?
Dieux, que vous êtes mensongère !
Maudit soit qui plus vous croira !
Nous verrons, volage bergère,
Qui premier s'en repentira.

Celui qui a gagné ma place,
Ne vous peut aimer tant que moi :
Et celle que j'aime vous passe
De beauté, d'amour et de foi.
Gardez bien votre amitié neuve,
La mienne plus ne variera,
Et puis nous verrons à l'épreuve
Qui premier s'en repentira.

Voilà le vrai Desportes: de la grâce, de l'amabilité, de la finesse satirique, et puis un léger grain de sensibilité discrète, le tout fait un mé

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