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personnalité triompha.

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Mais le projet renfermait d'autres dispositions qui entraînèrent son rejet. La question de savoir si, en principe, les lois pénales sont des lois personnelles, n'est pas cependant sans importance, notamment pour l'interprétation de l'art. 7 du Code d'instruction criminelle: si, en effet, cet art. 7 n'est pas une exception exorbitante; s'il n'est qu'une restriction du Droit commun, une limitation de la vérité juridique, il doit être interprété largement; que si, au contraire, il n'est qu'une sorte de violence faite aux principes généraux, il faut s'attacher strictement à ses termes et se garder d'en élargir la portée. Ainsi, s'agit-il de savoir si le désistement du Français qui a porté plainte contre le Français de retour, paralyse l'action du ministère public et fait obstacle à la poursuite? il faut, avec M. Mangin (1), adopter l'affirmative, si la criminalité de l'infraction commise à l'étranger est subordonnée à la réclamation de la partie lésée; il ne faut pas, au contraire, hésiter à proclamer, avec M. FaustinHélie (2), l'indépendance de l'action publique, quand elle a été provoquée, si la criminalité n'est pas une criminalité conditionnelle et si la plainte n'a été exigée que comme une mise en demeure, suppléant celle qui résulterait du flagrant-délit, de la clameur publique et de toutes les preuves que laisserait après elle l'infraction commise sur le territoire français.

(1) De l'Action publique, no 70, p. 13.

(2) Inst. crim. II, p. 623.

S'agit-il de savoir si le crime du Français à l'étranger, au préjudice d'un Français, doit être nécessairement un crime contre la personne ou s'il suffit que ce crime atteigne les biens du Français, on ne pourra hésiter à adopter la dernière interprétation, du moment où l'on admettra le principe de la personnalité de la loi pénale française.

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Le principe que la loi pénale française ne saurait atteindre les faits de l'étranger à l'étranger, qu'ils aient ou non été commis au préjudice d'un Français, ne prévalait pas, au moins sans contestation et sans distinction, sous l'empire de notre ancien Droit.-On allait jusqu'à controverser le point de savoir si le fait de l'étranger, commis à l'étranger contre un étranger, pouvait être poursuivi en France, quand l'auteur de la lésion et la partie lésée s'y rencontraient. Rousseau de la Combe cite sur ce point deux arrêts, l'un du Parlement de Paris, l'autre du Parlement d'Aix, en sens contraire, et il essaie de les concilier (1), L'arrêt du Parlement de Paris, du 14 août 1632 se prononce dans le sens de l'application de la loi pénale française (2); mais la poursuite ne devait pas avoir lieu d'office. Jousse approuve l'arrêt du Parlement de Paris (3). Le nouveau Dénizart défend la thèse contraire. Il n'admet l'application de la loi pénale fran

(1) Mat. crim. II p., ch. 1er, no 34, p. 122.

(2) Voir cet arrêt dans les arrêts de BARDEL, tome 2, p.74, avec les Conclusions très remarquables de l'avocat-général Talon. (3) Part. II, tit. II, no 39, 40 et 41, p. 425 et suiv.

çaise, qu'autant que le crime commis à l'étranger par un étranger, au préjudice d'un étranger, a eu des suites en France (1).

Lorsque le fait de l'étranger avait été commis à l'étranger au préjudice d'un Français, le droit de poursuite contre l'étranger saisi en France, était-il reconnu d'une manière absolue? Jousse faisait des distinctions: si l'étranger était venu depuis fixer son domicile en France, il décidait, sans hésitation, que la loi française était applicable; il adoptait la même solution quand l'étranger était fugitif, n'avait aucun domicile. C'était, disait-il, un vagabond qui pouvait être poursuivi dans le lieu où il était trouvé. Mais lorsque l'étranger était en France pour ses affaires, qu'il ne s'était pas dérobé à la répression de sa souveraineté, il déclarait la question pleine de difficultés, et sa conclusion n'était pas très nette. Il cite Ayrault pour la négative, les conclusions de l'avocat-général Talon, lors de l'arrêt de 1632, pour l'affirmative, et c'est vers cette dernière opinion qu'il semble incliner (2); c'est aussi celle de Rousseau de la Combe (3); le nouveau Dénisart, rejette cette opinion (4).

34.

J'insiste sur les solutions de l'ancien Droit, parce

(1) Vo Délit, § 4, no 6.

(2) Justice crim., part. II, tit. II, sect. 4, no 31, 32, 33,

(3) Loco citato.

(4) Vo Délit, § 4, n° 7.

qu'elles sont de nature à vous faire comprendre toute l'importance qu'il faut attacher aux bases sur lesquelles on asseoit le Droit de punir.-Expression de la vengeance publique et divine, expression même du Droit de défense, la pénalité française ne devaitelle pas frapper l'étranger saisi en France qui avait attenté aux Droits du Français à l'étranger? Avec l'idée de justice morale, limitée par l'utilité sociale, on pourrait arriver au même résultat. « Le <«< roi, disait l'avocat-général Talon, a intérêt à ce « que la justice soit rendue à son sujet contre l'étran«<ger », et la morale ne pourrait qu'y gagner. -Oui; mais si la pénalité n'était que la sanction du commandement, et si le commandement ne s'adressait pas aux étrangers en dehors du territoire français, comment les punir pour avoir violé une loi qui n'était pas leur loi? Comment les punir, par exemple, lorsqu'ils venaient, ex post facto, fixer leur domicile en France? Du jour de leur résidence, ils étaient soumis à la souveraineté française; mais, pour les actes antérieurs qui s'étaient produits sur le sol étranger, comment leur appliquer la loi française sans une véritable rétroactivité ?

L'ancien Droit français admettait unanimement que les attentats directs commis à l'étranger contre l'État français tombaient sous la prise de la pénalité française.

Les Codes pénal et d'instruction de 1791 furent muets sur la question; mais un décret du 3-7 septembre 1792 mit en lumière les vrais principes. Ce

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décret proclame que les « étrangers prévenus de dé« lits commis dans leur patrie n'ont pu être légale«ment jugés que selon les lois de leur pays et par «<leurs magistrats; que les peines ne doivent avoir a lieu que là où les crines ont été commis, et que ce a serait tolérer une atteinte à la souveraineté des peuples pour laquelle la France donnera toujours l'exemple du respect, que de retenir sur ses ga«<lères des étrangers qui n'ont pas blessé ses lois. >> L'art. 12 du Code du 3 brumaire an IV réservait au pouvoir judiciaire la faculté de punir les étrangers qui auraient altéré ou falsifié, hors du territoire, soit la monnaie nationale, soit les papiers nationaux ayant cours de monnaie, ou qui auraient exposé sciemment, hors du territoire, soit des monnaies nationales contrefaites ou altérées, soit des papiers nationaux ayant cours de monnaie contrefaits ou falsifiés.

Si le Droit de punir est une émanation de la souveraineté, comme le disait le décret du 3 septembre 1792, la souveraineté française ne pouvant adresser ses commandements aux étrangers hors de France, était impuissante à faire infliger, en son nom, des pénalités contre des actes d'agression. C'était un Droit de défense qu'elle avait à exercer; ce n'était pas un Droit de justice.

L'art. 13 du Code du 3 brumaire an IV déclarait qu'à l'égard des délits de toute autre nature, les étrangers prévenus de les avoir commis hors du territoire ne pourraient être ni punis ni jugés en France, c'est-à-dire que, comme Droit commun, il

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