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erreur. Haut, comme la plupart des mots qui précèdent ou qui suivent se trouve dans la liste de Palsgrave. On peut donc conclure de cette liste, et des nombreux exemples d'autres mots ou l'h, même chez les écrivains, ne conservait pas son aspiration, que la double prononciation de haut, qu'on aspirât ou non l'h, régnait à la cour.

O admirable hautesse,
Grâce nous te rendons.

(La reine de Navarre.)

Encore Génin ne cite-t-il que des exemples du mot hautesse pour prouver que haut n'était pas aspiré au XVIe siècle. Cette preuve par analogie ne saurait être d'une rigueur absolue. Un philologue du XXIe siècle serait-il bien venu à ne citer que des exemples d'héroïsme pour prouver l'absence en 1868 d'aspiration dans héros? Cette manière de raisonner est d'ailleurs combattue par les faits eux-mêmes; on ne trouve pas dans les psaumes de Marot un seul exemple de haut et de hautesse ou l'h ne soit aspiré. (1)

Néanmoins, il est certain que très souvent au moyen âge et jusque dans le XVIe siècle l'h n'était pas aspiré dans haut, et que même on se dispensait de l'écrire, conformément à l'étymologie altus, comme le prouvent ces vers tirés du roman de la Destruction de Troie :

Moult si furent hault li portail
Sus chacune et d'or principal,

(1) Je trouve hautesse sans aspiration dans J. de Montlyard:
La terre me doit, vueille ou non,

Fournir de pasture à foison,
Pour mes ouailles que j'engraisse,
Non pour quelque divin'hautesse.
(Myth. p. 974.)

Cf. Mist. du S. d'Orl. vs. 17760.

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« L'haubois a commencé à oser faire entendre sa voix et son

son. (Amyot, Plutarque, du mot EI, p. 755.)

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« De peur d'heurter à quelque pierre. » (St. Franç. de Sales, Introd. à

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la vie dévote.)

HIDEUX.

Pour celui-là j'ai un nombre très considérable de citations dans mon escarcelle; je n'en prendrai que quelques-unes au choix :

Adonc les tourbillons et les souspirs du Nort
Acoisent leur courroux, et l'hideuse menace
De Neptun boursouflé contreschange sa face.
(J. de Montl. p. 852.)

C'est l'horrible Charon, d'hideuse crasse affreux

(Id. p. 184. Cf. 107, 146, 628.)

Nous envoirons au sabbat

L'ideuse et vieille sorcière.

(Ch. hist. II. 399.) (2)

(1) On peut affirmer, d'après la citation qui suit, qu'au XVIIe siècle St-Mars n'aspirait pas l'h de haut.

< Un petit sacchet qu'il avoit couseu au fond de son au de chose. (Extr. du Corresp du 25 janv. 1870.)

(2) Cf. Figaro du lundi 31 juill. 1863, p. 3, col. 1 et 2.

Quand on brulait chez nous la guillotine,
Gendarmes hideur, vous lanciez de vos forts

La bombe en feu dévorant la chaumine, etc.
(Ch. par le citen Sénéchal.)

HOBEREAU.

« Voyant un jeune obereau.» (Cont. de Gaul. p. 209.)

HONTE, HONTEUX.

Pour pleurer en lieu secret
Son mary, Jeanne se cache.
Est-elle honteuse qu'on sache
Qu'elle a de luy du regret?
(Tabourot, p. 89.)
Celuy qui est bon françois
Maintenant se réjouisse,
Car il fault qu'à ceste fois

Le Lorrain d'honte rougisse.

(Ch. hist. II, 486-1590.)

« Sa jeunesse fut deshonorée de beaucoup d'honteuses reproches. » (Cocffeteau, cité par Patru, p. 388.)

Cet exemple est remarquable en ce sens qu'il est tiré d'un écrivain estimable du XVIIe siècle; et notez bien que la critique de Patru à propos de cette phrase porte non sur ce que l'auteur a écrit honteuses sans aspiration, mais sur ce qu'il a fait reproches du genre féminin. (')

HUGUENOT.

<< Les armées mal logées, sans vivres, l'huguenote se recule de cinq lieues.» (Tavannes, pag. 340.)

« L'huguenotte arrogance... » (La Morl. pag. 447.)

HUCHER.

Et quoiqu'avec airins et cymbales on l'huche
Jamais de ses chevaux la lune on ne déjuche.
(Jeh. de Montl. p. 564.)

(1) Cf. Cl. Marot, ps. XLIIII, B.

HUMER.

Garde bien d'approcher, quand ell'hume, à ses bords.

(Id. p. 866.)

Il est question de Scylla.

HANGAR.

J'ai gardé pour la fin, (') parce qu'il est du XVIII siècle, l'exemple suivant, tiré des œuvres du marquis de Villette, moins connu par ses poésies que par ses relations avec Voltaire :

Voilà les tableaux entassés

Sous l'hangar de la renommée.

(Cité par le Moniteur de l'armée du 1er mai 1868.)

Ce n'est que dans son édition de 1835, que l'Académie a signalé l'aspiration de l'h dans hautbois et dans hautesse. Elle l'avait dès longtemps signalée dans hangar, au grand étonnement des auteurs du dictionnaire de Trévoux et plus tard de Domergue, indignés que l'Académie écrivit par un h un mot dérivé du latin angarium. Je me demande pourquoi ils n'ont pas ressenti la même indignation au sujet de l'aspiration de haut, qui dérive du latin altus. HONGRIE, HOLLANDE. Ces noms propres offraient jusqu'aux premières années de ce siècle une particularité curieuse. L'aspiration y disparaissait, toutes les fois qu'ils ne servaient qu'à indiquer la provenance commerciale d'un objet. Ainsi on disait le stathouder de Hollande, le roi de Hongrie (2), mais de la toile d'Hollande, de l'eau de la reine d'Hongrie. C'était la règle; elle subissoit souvent des infractions : « Les Ollandois... etc. » (Tavannes, 3o advis au roy, pag. 21.)

M. Helvétius est fils d'un médecin d'Hollande. (Vigneul-Marv., Mélang. I. p. 42.)

(1) Je puis ajouter pour être complet un exemple du XIXe siècle. J'ai trouvé en mai 1873 Paris envahi par des placards ainsi conçus: A l'Hérissé, 28, boul. de Sébastopol. (2) Ce mot n'était pas aspiré au moyen âge : « Si estoit madame Ysabeau avec la roine, celle qui fu d'Ongrie. » (Liv. de la Conq. dans Buch. Hist. des Conq. p. 421.)

Ce n'est guère qu'à partir des dernières années du XVI siècle que la règle de l'h asp., à part quelques rares exceptions, dont j'ai signalé quelques-unes, est fidèlement observée par les écrivains, dans les mêmes mots où nous aspirons encore l'h aujourd'hui. Néanmoins il ne faudrait pas croire qu'il en fut toujours de même dans la conversation, et Vaugelas nous atteste que dans la plus grande partie de la France cette règle, de son temps, était fort peu pratiquée. Du reste, encore de nos jours, le peuple, même de Paris est loin de reconnaître et de suivre en cette matière les préceptes de l'Académie, et je me souviens d'avoir entendu crier dans les rues de la capitale par ces gamins qui s'improvisent au printemps marchands de hannetons : « A un liard les z'hannetons! »

REMARQUE. Il y a quelques mots dont la lettre initiale, non aspirée en français, est aspirée dans le dialecte blaisois: ce sont huit et ses composés, huiler (non pas huile), onze et ses composés, ouéte, oui et ourse. L'aspiration qui se fait sentir dans ces mots, à l'exception de onze et de ourse, reproduit un son très voisin du v, une sorte de digamma, lettre qui remplaçait aussi l'esprit rude dans le dialecte éolien; Ex.: grec, écπéça; éolien, Fecépa; latin, Γεσπέρα

vesper. Ainsi beaucoup de naturels du pays blaisois ne se contenteront pas de dire le huitième, iz on huilé, de la ouete, i m'a di oui, mais prononceront vuitiéme, ou même veutiéeme et vitiéeme; vuiler et vueuler; d'la vouete; voui ou même vi.

1° Huit et ses composés ont eu l'h tantôt muet, tantôt aspiré au moyen-âge ('); mais j'ai cru découvrir une trace de la prononciation par v dans une lettre d'Edouard Ier, roi d'Angleterre :

Doné a Dovre, le vytime jur de fevryer. (Lettr. de Rois, I. p. 190.) Qu'on remarque bien que dans cette phrase le v comme dans Dovre et février, et l'u comme dans jur sont bien distincts.

(1) Cf. Cur. inouies, p. 293: L'huictiesme cicl. Au huictiesme p. 68. La huictiesme; et Bibliot. des Enf. p. 135: « D'autres d'un plus haut rang disent: voui vou non; vou autrement; vuit heures. »

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