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P. GUSMAN. La décoration murale à Pompéi. Un vol. in-4°. Paris, Éditions Albert Morancé, 1924.

« Si l'ouvrage que nous présentons, écrit M. Gusman au début de sa préface, touche à la fois à l'archéologie et à l'architecture, il se rapporte davantage à la polychromie des murs et entend rester dans ce domaine. >> C'est donc au point de vue de l'art tout spécialement que l'auteur s'est placé et dans le choix et dans la reproduction en couleur des peintures pompéiennes décoratives. Son dessein a été de mettre à la disposition des artistes qui s'occupent de décoration polychrome, non point tant des modèles à copier qu'une série d'exemples instructifs, capables d'ouvrir un nouveau champ à leurs recherches et à leur inspiration; son souci, d'indiquer les effets que les gens de Pompéi savaient tirer de la juxtaposition des couleurs, en tenant compte de l'ambiance, des divisions architectoniques des murailles, de la nature et de l'éclairage des pièces qu'il s'agissait de décorer. Un tel ouvrage ne s'analyse pas; rien ne servirait d'énumérer les sujets représentés sur les trente-deux planches de la publication. Il suffira de dire que celui qui les feuillettera y trouvera les motifs les plus divers, présentés avec un soin extrême. Un simple détail le prouvera. Pour éviter la lourdeur et l'empàtement des tons, inévitables si l'on use de l'impression en couleur, et par suite leur inexactitude, M. Gusman a tenu à ce que les planches fussent coloriées à la main; les teintes sont ainsi, plus fraîches, plus transparentes et plus voisines des charmants modèles qu'elles reproduisent.

R. CAGNAT.

Memoirs of the American Academy in Rome, volume IV.

Ce quatrième volume contient au début un très important article de Mlle Emily L. Wadsworth sur les reliefs en stuc du premier et du second siècle existants à Rome. Il est accompagné de 49 planches excellentes en simili. L'auteur y passe en revue, en entrant dans les détails, les fragments de décoration en stuc de la Farnésine, de la Maison d'Or de Néron, du Colisée, du Palatin, de la Villa de Domitien à Castel Gandolfo, de la Villa d'Hadrien à Tivoli, de différents tombeaux, celui de L. Arruntius sur la voie Prénestine, celui des Valerii et celui des Pancratii sur la voie Latine, les stucs de la fameuse basilique souterraine de la Porte Majeure, etc. Le travail est surtout descriptif; on y trouvera pourtant des réflexions sur l'histoire de ce genre de décoration, la technique et aussi les motifs que les artistes affectionnaient. Deux autres articles du volume sont des études d'architecture et des essais de reconstitution, un travail de M. James K. Smith sur le temple de Zeus à Olympie, et un autre de M. James H. Chillman sur un édifice de la villa d'Hadrien, situé au sud du Pécile; on ne sait pas bien quel nom lui donner; l'auteur de l'article l'appelle le casino des colonnades demi-circulaires, ce qui n'est pas compromettant. Un autre architecte a étudié avec multiples croquis, figures géométriques, tableaux, le renflement (entasis) des colonnes romaines, en s'attachant à un certain nombre de monuments de Rome le temple de Mars, la colonne Trajane, la basilique Ulpienne, le Panthéon, etc. Enfin Mlle Alice Walton a écrit une dissertation sur la date de l'arc de Cons

tantin. Elle s'est appliquée à y rechercher si la théorie de Frothingham, qui en attribue la construction première à Domitien, est conforme à la réalité. Sa conclusion n'est pas favorable à cette thèse.

R C.

G. HINNISDAELs. L'Octavius de Minucius Felix et l'Apologétique de Tertullien. Un vol. in-8° de 139 p. Bruxelles, Lamertin, 1924 (Mémoires de l'Académie royale de Belgique, Classe des Lettres, t. XIX, 2).

Depuis plus d'un demi-siècle, la curiosité des philologues ou des historiens de la littérature chrétienne s'acharne à pénétrer l'énigme de l'Octavius. Il y a là-dessus toute une bibliothèque polyglotte, qui grossit d'année en année. On sait d'où vient la difficulté. Bien des pages de l'Octavius se retrouvent presque textuellement dans l'Apologétique ou le Ad nationes de Tertullien. Il s'agit d'expliquer d'où viennent ces concordances inattendues et si fréquentes entre des ouvrages également authentiques. L'hypothèse d'une source commune étant aujourd'hui presque écartée d'un commun accord, on se demande qui des deux auteurs a pillé l'autre; et la question des emprunts se complique d'une question de chronologie. D'un camp à l'autre s'affrontent des champions également chevronnés, tous armés d'arguments qui paraissent solides. Si la thèse de l'antériorité de Minucius semblait au début l'emporter, c'est le contraire aujourd'hui. Mais la plupart des adversaires restent sur leurs positions; et le mystère subsiste.

A son tour, M. Hinnisdaels s'est attaqué à ce mystérieux problème.

Son enquête est assurément l'une des plus complètes et des plus précises qu'on ait faites jusqu'ici. Comme beaucoup de ses prédécesseurs, il croit avoir tranché la question: il se rallie résolument au parti de Minucius.

Dans une Introduction, il expose les thèses en présence, résume les théories soutenues, pèse les arguments produits de part ou d'autre. Puis il reprend toute la question pour son compte, en mêlant à sa démonstration une réfutation en règle de R. Heinze. Celui-ci en 1910, dans un mémoire académique de Leipzig, avait cru établir définitivement la priorité de Tertullien ་་ par une analyse méthodique de l'Apologétique, confrontée avec une étude analytique de l'Octavius ». M. Hinnisdaels a employé la méthode inverse, qui l'a conduit naturellement au résultat contraire. « L'objet du présent travail, dit-il, est de montrer qu'en partant du texte de l'Octavius, et en instituant une comparaison nouvelle avec l'Apologétique, on peut aboutir à des conclusions opposées. » C'est ce qui devait

arriver.

Ce qui reste acquis sans contestation possible, c'est une étude très complète et pénétrante de l'Octavius, qui est disséqué ici de main de maître, et qui ne perd pas à être regardé de si près. Quant à la valeur des conclusions, je suis moins sûr que « la vérité soit en marche », comme on l'affirme. M. Hinnisdaels dit de Heinze « A plusieurs reprises, les arguments développés risquent de se retourner contre leur auteur, et l'ensemble de la thèse qu'il défend ne peut rencontrer une adhésion unanime. » Dans l'alternance séculaire des deux thèses, qui sait ce que l'avenir réserve à ses propres arguments?

On ne peut songer ici à discuter. Je rappellerai seulement un fait que dans ce débat tout le monde oublie : c'est l'Église de Rome, comme les auque tres Eglises d'Occident, a été longtemps une Eglise purement grecque. La littérature, comme la liturgie, y a été exclusivement grecque jusqu'au milieu du 1° siècle. Quant à la littérature chrétienne de langue latine, elle apparaît à Carthage avec Tertullien, qui lui-même avait d'abord rédigé en grec ses premiers ouvrages. Voilà le fait tout le reste n'est qu'hypothèses. Si donc Minucius Felix était antérieur à Tertullien, s'il avait vécu au 11° siècle, tout porte à croire qu'il aurait écrit son Apologie en grec, comme saint Justin. Or personne ne niera que l'Octavius soit en latin.

P. MONCEAUX.

Union académique internationale. Catalogue des manuscrits alchimiques grecs, publié sous la direction de J. Bidez, F. Cumont, J. L. Heiberg et O. Lagercrantz. I. Les Parisini décrits par Henri Lebègue; en appendice les manuscrits des Coeranides et tables générales par Marie Delcourt. III. Les manuscrits des Iles Britanniques décrits par Dorothea WaleySinger avec la collaboration de Annie Anderson et William J. Anderson; en appendice les recettes alchimiques du Codex Holkhamianus éditées par Otto Lagercrantz. Deux vol. in-8°. Bruxelles, Maurice Lamertin, 1924.

Ces deux volumes sont consacrés aux manuscrits de Paris, soigneusement décrits par M. Henri Lebègue, et aux manuscrits des Iles Britan

niques, décrits par Mme Dorothea Singer avec la collaboration de Mme Annie et M. William Anderson. Un appendice important, dû à M. La

gererantz, contient le texte et le commentaire de curieuses recettes contenues dans un manuscrit de Holkham.

M. Joseph Bidez qui a été le promoteur de cette œuvre scientifique et en garde la direction effective, expose dans une courte mais substantielle préface les motifs qui ont fait entreprendre ce catalogue et les résultats qu'on en peut attendre. Ce n'est point dans le dessein de pouvoir réaliser le grand Euvre que nous dépouillons les manuscrits alchimiques et si la transmutation des métaux doit un jour être réalisée, les moyens en seront découverts dans les laboratoires et non dans les bibliothèques. Mais, tout d'abord, les recueils alchimiques renferment des recettes de tout genre, précieuses pour l'étude de la technique et des procédés industriels chez les anciens; ils permettent de suivre la transmission de ces procédés de l'Orient à l'Occident et de l'antiquité au moyen âge. De plus, l'esprit mystique dont sont animés certains adeptes de l'art sacré, le secret dont ils entourent une science ésotérique dont la thaumaturgie tirait de merveilleux effets, les rapprochent des théurges platoniciens et donnent à leurs écrits une véritable importance pour la connaissance de la religion ou du moins de la religiosité du monde antique. Enfin les philologues trouveront dans ces textes l'explication d'une foule de termes peu usités. On connaît l'intérêt que Berthelot a porté à ces premières manifestations de la science qu'il a illustrée et l'ouvrage fondamental où il a commenté les écrits alchimiques avec toute sa compétence de spécialiste. Malheureusement les textes dont il disposait avaient été fort imparfaitement édités par son collaborateur et les manuscrits, comme l'a prouvé le nouvel inven

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La question que M. Andrieu a traitée. dans ce mémoire est une question que Mabillon, dans son Museum italicum, et Martène, dans son De antiquis Ecclesiae ritibus, avaient abordée déjà, mais qui depuis deux siècles était en sommeil. Cette question, qui intéresse l'histoire théologique, aussi bien de l'Orient que de l'Occident, porte sur le point de savoir si, à la messe dite des présanctifiés, dans la liturgie byzantine c'est la messe normale des jours de semaine de carême à l'exception du samedi, et dans la liturgie romaine c'est la messe du seul vendredi saint, le calice est consacré du fait que le célébrant y plonge (immixtio) une parcelle d'hostie, consacrée dans la liturgie byzantine le dimanche, et dans la liturgie romaine le jeudi saint. La croyance à la consécration par immixtio est la croyance ancienne, aussi bien en Orient qu'en Occident, et elle a été comme classique dans la chrétienté carolingienne en vertu de l'autorité du grand liturgiste Ama

SAVANTS.

laire qui l'avait prise aux liturgistes de Rome. Au XIe siècle, préoccupés de préciser les conditions de la transsubstantiation, les scolastiques, comme l'auteur de la Summa sententiarum et aussitôt ensuite Pierre Lombard, rejetèrent l'hypothèse d'une consécration par immixtio, et toute l'École suivit. Rien n'est plus instructif que de rechercher, après le xir siècle, dans les livres liturgiques, les traces de la survivance de la doctrine amalarienne, jusqu'au jour où elles disparaissent définitivement, dans la seconde moitié du xvIe siècle. M. Andrieu a conduit cette recherche dans la littérature inexplorée des manuscrits liturgiques, dont il a une exceptionnelle connaissance. Il expose les résultats de son enquête avec une méthode impeccable. Son mémoire est un heureux indice que la tradition de Mgr Duchesne ne se perdra pas de sitôt en France.

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M. Andrieu, qui nous promet un Mémoire de beaucoup plus étendu sur les Ordines romani, nous laisse entrevoir quelques-unes des découvertes qu'il a déjà faites. On ne manquera pas de remarquer ce qu'il dit de cet Ordo romanus antiquus, publié en 1568 par Hittorp, que Tommasi traitait de « farrago diversorum rituum », et Bishop de « piège pour les imprudents », et dans lequel M. Andrieu n'hésite pas à voir un document de première importance pour l'évolution de la liturgie latine aux premiers siècles du moyen âge compilation du x siècle, dont les manuscrits mettent en évidence l'origine germanique, et qui fait la transition entre la liturgie du temps d'Amalaire et celle de l'Ordo ecclesiae lateranensis dans la première moitié du XIIe siècle. Le vieil Ordo germanique était dès lors une des autorités reçues au Latran, il avait

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droit de cité à Rome où l'on ne se doutait pas de son origine étrangère.

Non moins importante est la notice que consacre M. Andrieu à l'aîné du Pontificale Romanum de Durand de Mende. Cette compilation anonyme n'avait pas jusqu'ici attiré l'attention des liturgistes, et c'est néanmoins

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une des pièces maîtresses de la liturgie romaine au moyen âge ». Elle fut très répandue dans la chrétienté, avant d'être supplantée par l'œuvre plus complète et plus systématique de Durand, et il en reste de nombreux manuscrits du XIVe siècle qui doivent dériver d'un prototype fixé à Rome même, dans les premières années du XII. Ce pourrait être un des témoins de la réforme liturgique, si mal connue encore, d'Innocent III.

Pour le texte difficile de saint Ambroise (cité p. 10), je signalerai à M. Andrieu un rapprochement à faire avec les Quaestiones V. et N. Testamenti, CI, 7. De iactantia romanorum levitarum, éd. Souter, p. 197 « Diaconii enim ordo est accipere a sacerdote et sic dare plebi.

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Pierre BATIffol.

Byzantion. Revue internationale des Etudes byzantines, publiée par Paul Graindor et Henri Grégoire. Tome I, 1924. In-8, Paris, Édouard Champion, Liége, Vaillant-Carmanne, 1924.

Au printemps dernier, à Bucarest, le congrès des études byzantines avait décidé la publication d'un périodique nouveau, déjà souhaitée à Bruxelles en 1923 par le Congrès des sciences historiques. Un comité directeur fut nommé, comprenant, avec moi, sir William Ramsay, MM. Jorga et Millet. La direction effective de la Revue fut confiée à MM. Grégoire et Graindor, qui

se sont acquittés de leur tâche avec un dévouement et un zèle auxquels on ne saurait trop rendre hommage.

Dans le premier volume de Byzantion, qui n'a pas moins de 55 pages, on a réuni en un seul tome les deux fascicules de 1924, de manière à en faire une sorte de recueil de « mélanges en l'honneur du grand savant russe Kondakof, qui fêtait en 1924 son So* anniversaire. Le volume a paru au moment même où la mort enlevait aux études byzantines celui en l'honneur de qui la revue était composée. Mais Kondakofest représenté dans Byzantion par un bel article, un des plus originaux qu'ait écrits l'illustre byzantinologue.

La nouvelle revue byzantine, qui paraîtra désormais en deux fascicules par an, a un caractère international. Les articles en français, en anglais, en italien, en allemand y seront également admis; ceux écrits en d'autres langues seront traduits en français, Aussi, dans l'ensemble, le premier volume est-il surtout de langue française. A côté des articles de fond, il comprend des comptes rendus et de précieuses chroniques qui nous font connaître le mouvement des études byzantines en Bulgarie, en Grèce, en Roumanie, en Yougoslavie, etc., qui nous renseignent aussi et ceci est d'un intérêt particulier sur les travaux que poursuivent, malgré les difficultés de l'heure, les byzantinologues russes.

Je ne saurais énumérer les 28 articles de fond qui forment l'essentiel du volume, mais on est heureux d'y constater la collaboration des savants les plus connus en matière d'études byzantines, d'y constater aussi la variété des sujets traités et la haute qualité des recherches. Ce premier volume de Byzantion fait grand honneur aux deux savants belges qui en ont assuré

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