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Pendant la période pliocène la Durance, se frayant passage à travers les Alpines, a étalé un talus de débris, dont les formes auraient été sans doute profondément remaniées si, dans la suite, la rivière n'avait pris un autre cours. Le talus subsiste donc presque intact, se déroulant par un plan fortement incliné, que montre la carte. C'est du sommet de ce Icône que divergent les canaux d'irrigation, condition essentielle de fertilité dans cette partie de la Provence. C'est là aussi que se groupent de petites villes, où se conservent plus purement les types et les costumes de la population dite Arlésienne.

VIE PROVENÇALE.

On suit ainsi pas à pas la conquête de la vie, et l'on remonte du présent au passé. Sous ce climat sec le sel, aux efflorescences toujours prêtes à remonter à la surface, est l'ennemi; mais les réserves d'eau douce sont en abondance. Ainsi ont été colmatés les étangs et les marais qui au XIIIe siècle entouraient Arles,

ove 'l Rodano stagna'

Les palus, les graves, les ségonnaux ont été changés en prairies et en plantations. Partout, dans ces parties vivifiées, se répand et se multiplie le mas, exigu souvent, mal bâti en général, mais riant sous les platanes qui l'ombragent, entre des fossés d'eau vive, derrière les palissades de cyprès et de roseaux qui l'abritent. Les villes se cantonnent, avec leurs vieilles tours carrées, au pied des montagnes, ou sur les anciennes terrasses, ou sur les rocs isolés que les crues n'atteignent pas; plus brave, le mas se hasarde et commence à pulluler dans la plaine. Il est la forme envahissante de vie rurale de ces régions.

Ainsi une vie originale, très étroitement et très anciennement adaptée au sol, participant de la montagne, de la mer, de la steppe, de la plaine irriguée, se combine en Provence. En tout elle est étroitement liée à la nature des lieux. La roche calcaire imprime au pays l'aspect monumental si frappant surtout entre Avignon et Arles. Les tours carillonnantes d'Avignon se pressent autour du rocher où naquit la ville. Tout un peuple d'édifices ruinés ou debout est sorti des carrières des Alpines ou des chaînons voisins: amphithéâtres, arcs de triomphe, aqueducs. Pas de rocher, au bord du Rhône, qui n'ait sa tour massive et rectangulaire, jaunie par le soleil. Les grandes traditions romaines de l'art de bâtir, si visibles à Saint-Trophime d'Arles ou sur la façade de Saint-Gilles, se sont naturellement entretenues dans cette contrée. La nudité de la roche s'harmonise à merveille avec l'architecture. Au théâtre d'Orange, la roche et l'édifice ne font qu'un; à Roquefavour, comme au Pont du Gard, les arches des aqueducs semblent faire partie des escarpements qui les encadrent; on dirait que la roche elle-même, à peine tachetée de quelques pins, a été ciselée en arcades, taillée en piliers.

Il est difficile d'apprécier ce que la clarté du ciel, la sécheresse de l'air ont pu mettre dans le tempérament et l'âme des habitants; la science de ces relations n'est point faite. Mais on peut noter un mode particulier de groupement et de vie en rapport avec le climat et le

1. Dante (Enfer, chant IX, v. 112).

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Ch.Bonnesseur

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CARTE 57. LA PLAINE PROVENÇALE (CRAU ET CAMARGUE).

Le talus de cailloux pliocènes a rencontré sa limite à la digue d'alluvions récentes que le Rhône a édifiée latéralement à ses rives; des marais, qui ne sont pas tous desséchés, suivent cette ligne de contact. Arles a trouvé moyen de s'établir sur la berge entre les marais et le fleuve; en général, ce sont les pointements de rocs calcaires qui ont donné asile aux villes, châteaux ou abbayes, où s'est concentrée la vie historique. Les mas disséminés dans la Crau et la Camargue indiquent un peuplement encore à ses débuts, mais en voie de conquête.

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sol des lisières de population très dense bordent des plateaux arides, de grandes villes sont serrées de près par des régions presque désertes. Peu de cohésion entre ces parties disparates, mais une variété d'occupations qui répond à celle de la contrée pâtres, pêcheurs, vanniers, marins, agriculteurs de plaines irriguées, sont à titres divers les personnages du sol provençal; personnages que rapproche la facilité des habitudes sous un ciel qui permet la vie au dehors. On chercherait vainement dans la maison rurale ce mobilier et ces traces d'opulence ménagère que l'habitude de travailler le bois, de cultiver et de tisser le lin, ont introduites dans la plupart des campagnes de France. Mais le roseau, les cornes d'animaux font les frais de beaucoup d'instruments usuels. L'attraction des villes est d'autant plus sensible qu'est rudimentaire l'installation rurale. La vie urbaine est profondément ancrée dans les traditions de ce pays; elle continue, comme jadis, à régner par l'attrait des divertissements, des jeux, souvent dans le cadre des édifices antiques; et l'on est tenté de croire que l'esprit des foules a moins varié encore que le cadre. Les superstitions n'ont fait que changer de nom, et les passions d'étiquettes. On se sent en face d'un type de civilisation fixé de trop ancienne date, et d'ailleurs trop cimenté par sa conformité avec le milieu, pour être susceptible de changement. La répugnance du Provençal à s'adapter à d'autres genres de vie, la difficulté pour le Français d'une autre contrée à s'acclimater en Provence, montrent tout ce qu'il y a encore de réel dans cette autonomie régionale. Il est vrai qu'aujourd'hui l'attraction des grandes cités, l'industrie, le dépeuplement des parties montagneuses, conspirent pour modifier ces caractères séculaires; mais ils ne s'effaceront pourtant pas de sitôt, car c'est d'éléments voisins, tirés aussi des bords de la Méditerranée ou des montagnes, que se recrutent les contingents nouveaux.

CHAPITRE II

LA PLAINE ET LES PASSAGES

DU LANGUEDOC

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voir le golfe du Lion dessiner à partir du Rhône une courbe si régulière, on serait tenté de croire que les accidents si nombreux, dont nous avons déroulé la série entre les Alpes et le Massif central, s'éteignent, et que l'action paresseuse des alluvions et des flèches de sable, se substituant aux forces de plissement, a seule présidé à la formation de la plaine languedocienne. Il n'en est rien cependant; et il suffit de jeter les yeux sur les reliefs courts et heurtées qui çà et là font saillie pour être ramené à la perception réelle des faits. La pyramide hardie de Saint-Loup se dresse au nord de Montpellier Cette a sa montagne isolée, qui s'étale, comme une baleine échouée, sur le rivage. Les pointements de calcaire jurassique amorcés par le roc de Notre-Dame de la Garde au littoral marseillais reparaissent ici sur la côte languedocienne. Plus loin, un pilier de basalte, jalon extrême d'une série de pointements volcaniques, forme le cap d'Agde. Entre Narbonne et la mer s'interposent les roches grises de la Clape, petit massif isolé dont l'altitude n'atteint pas 200 mètres, mais qui par sa structure s'accuse comme un fragment détaché d'une des zones pyrénéennes. Vers les confins du Languedoc et du Roussillon, le noyau primaire des Corbières a joué le rôle de massif résistant devant lequel ont dévié les plissements tertiaires. Et les accidents qui ont été la conséquence de ce conflit trouvent l'expression la plus frappante dans la silhouette du Pic de Bugarach, qui scande étrangement les chaînons rectilignes du bord méridional des Corbières. Les couches y sont renversées en sens contraire de l'ordre normal de superposition; et ce phénomène, dont les exemples sont nombreux en Provence, s'exprime ici topographiquement par

ÉVOLUTION

DU SOL.

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