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Au moment où de graves événements politiques mettent en question les bases de la Constitution de l'Europe, il est important d'avoir sous les yeux les Actes du Congrès de Vienne, qui servent de point de départ à la diplomatie de notre époque.

L'insuffisance, la confusion des publications spéciales qui existent déjà sur ce célèbre Congrès, rendaient indispensable un Recueil classé dans un ordre régulier et méthodique qui permît de marcher sûrement dans le dédale de ces Actes multiples et de suivre, pour ainsi dire pas à pas, les nombreuses Conférences des plénipotentiaires européens assemblés à Vienne.

C'est ce Recueil que nous livrons aujourd'hui au public, avec la confiance d'avoir accompli une œuvre utile qui s'adresse à tous.

Notre règle immuable a été, comme dans nos précédentes publications diplomatiques, la plus complète et la plus scrupuleuse impartialité. Les documents qui se rattachent à cette époque sont aujourd'hui du domaine de l'histoire; nous les donnons tous sans distinction d'opinion et de parti.

Pour remplir cette tâche difficile, nous avons dû faire appel à la bienveillance des Chancelleries, qui nous ont libéralement ouvert leurs archives. De tous côtés, les documents du plus précieux intérêt historique nous ont été communiqués avec un empressement qui témoigne de la considération flatteuse que nous ont valu nos précédents Recueils sur la Pologne et sur l'Italie.

Notre pensée première n'avait été que de rassembler les actes mêmes du Congrès de Vienne, mais nous avons bientôt compris que ce Recueil serait incomplet, si les actes ne venaient pas s'encadrer dans les phases diplomatiques diverses qui ont précédé et suivi le Congrès, et nous y avons joint les Conférences de Dresde, les Congrès de Prague et de Châtillon, ceux d'Aix-la-Chapelle, de Troppau, de Laybach, de Vérone, véritables annexes du Congrès de Vienne lui-même.

Pendant que la diplomatie délibérait sur la reconstitution nouvelle de l'Europe, surgissaient des événements politiques et militaires qui exerçaient le plus souvent une grande influence sur les négociations, soit qu'ils apportassent la nouvelle d'une victoire ou d'un revers aux parties en présence. Nous avons indiqué ces événements sous forme d'éphémé

II

rides, reliant ainsi dans un même ordre d'idées le côté diplomatique. à la phase politique et militaire.

Comme complément enfin, l'ouvrage est précédé d'une introduction. historique due à M. Capefigue, l'historien bien connu, qui a eu la rare bonne fortune d'avoir entre les mains les documents les plus intimes. et les plus secrets sur l'époque de la Restauration.

Cette introduction passe en revue les faits qui ont amené la dernière coalition contre la France; elle élucide les négociations qui ont précédé la réunion des plénipotentiaires de l'Europe à Vienne, explique les nombreuses et difficiles questions qui ont été débattues dans le Congrès, et, dans un résumé rapide, montre les résultats produits par ces actes qui ont exercé une si grande influence sur les cinquante dernières années.

Le Recueil se trouve divisé ainsi :

Introduction historique.

Première partie : Négociations de 1813.

Deuxième partie: Négociations de 1814, jusqu'à l'ouverture du Congrès de Vienne.

Troisième partie : le Congrès de Vienne, jusqu'aux Cent jours. Quatrième partie : le Congrès de Vienne jusqu'à l'acte final du 9 juin 1815.

Cinquième partie : Négociations de 1815, jusqu'à la seconde
paix de Paris du 20 novembre 1815.

Sixième partie: Traités, Conventions, etc., faisant suite aux
Actes du Congrès de Vienne et aux Traités de 1815.

Septième et dernière partie : Changements survenus aux Actes
du Congrès de Vienne et aux Traités de 1815.

L'ouvrage se termine par deux tables :

L'une chronologique indique par ordre de date tous les documents renfermés dans le recueil avec un court sommaire de leur contenu.

L'autre alphabétique, est disposée par ordre de Puissances. Dans l'Appendice, nous donnons les Pièces qui nous sont parvenues dans le cours de l'impression de l'ouvrage; nous les avons indiquées à leur ordre dans les deux tables.

Nous avons l'espoir que tel qu'il est, ce Recueil sera utile aux hommes d'État, aux historiens et aux publicistes. Si nous atteignons ce but, ce sera la seule récompense que nous ambitionnons pour l'immense tâche à laquelle nous avons consacré tant d'années.

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Le Congrès de Vienne est le grand acte diplomatique du dix-neuvième siècle, il a refait la carte de l'Europe. Après la chute de l'Empire français, trente-trois millions d'âmes, vaste épave du genre humain, restaient à répartir entre les puissances victorieuses; le Congrès accomplit cet œuvre; il le fit quelquefois avec passion, avec égoïsme peut-être, mais il vint à bout d'un œuvre remarquable, l'acte définitif du 9 juin 1815.

Un chercheratt en vain dans les fastes les plus gigantesques de l'histoire, une situation semblable à celle de l'Europe en 1815. Quand l'Empire romain fut dépecé, les peuples du Nord s'en partagèrent les dépouilles, et de là naquirent les grandes monarchies modernes; l'Empire de Charlemagne tomba sous ses faibles successeurs, et de cette décadence sortit la fière et sauvage féodalité.

Mais à Vienne, en pleine civilisation, la statistique en main (cet fement tout nouveau), le Congrès procéda à une répartition de peuples comptés par tête dans le troupeau un peu confus des nationalités perdues ou dédaignées. Le hut, le mérite du présent Recueil est de nous faire assister par des documents jusqu'ici pour

la plupart inconnus, à la reconstruction pénible de la carte de l'Europe échancrée, déchiquetée par les prétentions les plus mobiles, les plus diverses.

Il serait impossible d'écrire les annales du Congrès de Vienne si l'on ne retraçait rapidement quelques pages des derniers jours de l'histoire diplomatique de l'Europe sous Napoléon. Tout se lie dans la marche des événements; on n'expliquerait jamais les actes du Congrès si l'on ne jetait un regard rétrospectif sur les événements terribles de 1812 et de 1813. Les Congrès de Prague et de Châtillon préparèrent le Congrès de Vienne, comme les fatalités de Waterloo furent la cause des Traités de 1815. Il faut donc donner place à cette triste histoire du passé.

Au commencement de l'année 1812, l'empereur Napoléon fermement décidé à la guerre contre la Russie, voulut s'assurer l'alliance de la Prusse, soumise alors à sa prépondérance souveraine; il signa le 24 fevrier 1812 un Traité particulier par lequel le roi FrédéricGuillaume s'obligeait à fournir trente mille hommes, comme corps auxiliaire; l'article VIII portait : « Dans le cas d'une heureuse issue de la guerre contre la Russie, si malgré les vœux et les espérances des Hautes Parties contractantes, elle venait à avoir lieu, S. M. Impériale s'engage à procurer à S. M. le roi de Prusse une indemnité en territoire pour compenser les sacrifices et charges que Sa Majesté aura supportés pendant la guerre1. »

Le Traité avec l'Autriche, signé le 14 mars 1812 était plus intime encore, et pour ainsi dire l'expression d'une alliance de famille; l'Autriche s'obligeait également à fournir un contingent de trente mille hommes, et il était dit dans l'article V : « Que si par suite de la guerre le royaume de Pologne venait à être rétabli2, l'empereur Napoléon garantirait à l'Autriche la possession de la Galicie, à moins qu'il fût dans sa convenance de l'échanger contre les provinces illyriennes; et, dans le cas d'une heureuse issue de la guerre, l'empereur Napoléon s'engageait à donner à l'Autriche un agrandissement de territoire qui non-seulement compenserait les sacrifices faits pour la guerre, mais qui constaterait l'union intime existant entre les deux Puissances3 ».

Le désastre de Moscou ayant amené les Russes sur les frontières de la vieille Prusse, une sourde agitation se fit sentir en Allemagne; les sociétés secrètes organisées par Schill et Arndt en 1808 (le Tugendbund), indépendantes des volontés du roi, agirent en dehors du ca

1. Ce Traité fut signé par M. Frédéric-Guillaume, baron de Krusemarck et M. Hugues-Bernard Maret, duc de Bassano.

2. Il n'existait alors que le grand-duché de Varsovie aux mains du roi de Saxe. 3. Le Traité fut signé par le général comte de Bubna au nom de l'Autriche.

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