cour de cassation, la première de nos cours dans l'ordre hié rarchique des tribunaux, où elle est spécialement chargée de maintenir l'observation rigoureuse des lois et des formes tutélaires de la vie, de l'honneur et des propriétés de tous nos sujets. Cette cour, qui a déjà rendu de grands services, les continuera avec un nouveau zèle quand nous aurons définitivement réglé sa composition, quand chacun de ses membres tiendra de nous des pouvoirs dont notre institution aura assuré l'irrévocabilité, et qu'aucun d'eux ne sera plus distrait de ses importans travaux par des inquiétudes sur son avenir. La même sécurité passera de la cour de cassation aux autres cours et tribunaux de notre royaume, parce que le très-petit nombre de changemens que nous aurons faits dans les personnes rassurera tous ceux qui pouvoient en craindre, et devenant comme le type des changemens qui nous resteront à faire, suffira presque pour les produire. A ces causes, sur le rapport de notre amé et féal chevalier, chancelier de France, le sieur Dambray, commandeur ́de nos ordres, Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit: Art. 1. La cour de cassation restera telle qu'elle est ré- ✨ duite, au nombre de quarante-neuf membres, y compris un premier président et trois présidens. Le parquet restera composé d'un procureur-général et de six avocals-généraux. Elle continuera d'avoir un greffier en chef nommé par nous, et quatre commis-greffiers nommés par le greffier en chef. 2. Nous avons nommé et nommons, institué et instituons membres de la cour de cassation, savoir: Premier président, le sieur de Sèze. Présidens, les sieurs Barris, président actuel; Henrion de Pensey, idem; Brisson, président à la cour royale de Paris.. Conseillers, les sieurs Bailly, Cochard, Coffinhal-Dunoyer, Schwendt de Saint-Etienne, Lasaudade, Audier-Massillon, Aumont, Babille, Basire, Borel de Bretizel, Boyer, Brillat de Savarin, Busschop, Cassaigne, Chasle, Gandon, Liger de Verdigny, Minier, Pajon, Poriquet, Rataud, Rousseau, Ru perou, Sieyes, Vallée, Vasse de Saint-Ouen, Vergès, Zangiacomi, Carnot, Botton Castellamonte, Lefessier de Grandprey, Chabot, Favart de Langlade, Lassagny, conseillers actuels; Pinson de Menerville, ex-président à la cour des aides; Clausel de Coussergues, conseiller à la cour de Montpellier; Olivier, avocat-général à la cour royale de Grenoble; Blondel d'Aubers, conseiller à la cour royale de Paris; Pajot de Marcheval, maître des requêtes, honoraire; Jaubert, conseiller d'Etat, honoraire; Legonidec, ex-procureur-général à la cour de Rome; Robert de Saint-Vincent, conseiller à la cour royale de Paris. 3. Nous nommons pour remplir les fonctions de notre procureur-général le sieur Mourre, président actuel de la cour Et pour remplir les fonctions d'avocats-généraux, les sieurs Jourde, Le Coutour, Giraud-Duplessis, Joubert, avocats-généraux actuels; Le Beau, conseiller à la cour royale de Paris; Freteau de Peny, avocat-général en la même cour. Signé, LOUIS. -Les nouvelles officielles de Vienne nous apprennent enfin l'heureuse issue des discussions relatives à la Saxe. Le légitime souverain de ce pays conserve sa couronne, Il devra seulement faire quelques cessions au roi de Prusse. Ainsi il ne sera point porté atteinte au principe de la légitimité des souverains, qui, ainsi que le prince de Talleyrand le fait observer dans sa note du 19 décembre, est le premier et le plus important des principes de politique, puisque c'est de Jui que dépendent et l'existence des Etats, et le salut des peuples. Le royaume de Saxe contenoit deux millions d'habitans; il en conservera environ tréize cent mille. Les possessions des maisons ducales de Saxe et des princes de Scharwzburg et de Reuss, qui se trouvent enfermées dans la circonscription du royaume de Saxe, en formeront, en quelque sorte, des dépendances. La population réunie de ces Etats et du royaume de Saxe forme encore une masse de plus de deux millions d'individus, qui, interposée entre les possessions de la Prusse et celles de l'Autriche et de la Bavière, préviendra les froissemens qu'auroient inévitablement amenés leur contact immédiat. La ville de Leipsick ne changera point de maître. Centre d'un commerce très-étendu, il importoit beaucoup à l'Europe, sous le rapport de ses intérêts commerciaux, que ce point restât sous la domination d'un prince toujours intéressé à se maintenir en paix ave les grandes puissances. Ainsi, sous le rapport des intérêts comme sous celui des principes, cette importante affaire a été terminée conformément aux voeux de la France et de l'Europe. Ce triomphe pacifique de la nouvelle politique françoise fait présager qué l'issue générale du congrès nous sera également honorable. Une ordonnance de S. M., du 28 janvier, nomme M. Quatremère de Quincy, intendant-général des arts et des monumens publics, et règle ses attributions. Les amis des arts verront dans le choix d'un amateur si distingué, nne preuve éclatante de la protection que S. M. leur accorde. On croit que le Roi a voulu récompenser à la fois, et les ta lens de M. de Quincy, et son dévouement à une cause honorable. M. de Quincy s'étoit soustrait par la retraite aux persécutions et à la faveur d'un gouvernement usurpateur, et il a recueilli d'une bouche auguste les témoignages les plus flatteurs de satisfaction pour son courage et sa fidélité. II publie en ce moment un ouvrage du plus grand intérêt pour les arts, l'Histoire de l'Art antique, et a obtenu de le dédier au Roi. L'épître dédicatoire, que nous avons vue, est, dans sa briéveté, un modèle de délicatesse, de mesure et de goût, -M. de Sèze, premier président de la cour de cassation, et M. Mourre, procureur-général, ont prêté serment, le 16 fevrier, entre les mains du Roi. Au moment où M. de Sèze, à genoux, prêtoit le serment, S. M. lui a dit : M. de Sèze, c'est pour la cour de cassation que je vous ai nommé son chef. Je veux maintenant faire quelque chose pour moi, et pour la famille royale; je vous nomme trésorier de l'ordre du Saint-Esprit. M. le chancelier vous recevra. S. M. a alors donné elle-même le cordon bleu au défenseur de Louis XVI. -M. le duc d'Angoulême et MADAME partiront pour Bordeaux, le lundi 27. LL. AA. RR. coucheront successivement à Orléans, à Bourges, à Châteauroux, à Limoges et à Périgueux. Elles passeront dix jours à Bordeaux, après quoi, M. le duc d'Angoulême ira visiter les côtes de la Méditerranée, et MADAME reviendra par Poitiers, Tours et Chartres. Sur l'enterrement des comédiens. Un chevalier romain, Labienus, forcé par César de monter sur le théâtre, exhaloit sa douleur avec amertume: Ainsi done, disoit-il, après une vie sans reproche, sorti chevalier de ma maison, j'y rentrerai mime. Il sentait quelle tache une telle action imprimoit à son nom. Les chevaliers romains pensoient comme lui. Car on rapporte que jugeant qu'il s'étoit rendu indigne de siéger parmi eux, ils refusèrent de lui faire place lorsqu'il vint pour prendre son rang dans son ordre. Il ne paroît pas que l'on ait crié alors au fanatisme et à la superstition. Les amis de Labienus n'étoient pas aussi éclairés qu'on l'est de nos jours. Ce n'est pas que les mœurs des Romains fussent alors très-sévères; mais, quoique déjà corrompus, ils regardoient comme vil un état où l'on se consacroit a amuser les autres, où l'on pouvoit être sifflé impunément, où l'on étoit exposé aux caprices et aux outrages de la multitude sans avoir le droit de les repousser. On dit qu'aujour d'hui, que nous avons secoué beaucoup de préjugés, on s'est aussi défait de celui-là, et qu'on voit les comédiens d'un autre œil. Il me semble cependant qu'il reste encore parmi nous quelques traces d'une prévention qui est d'ailleurs de tous les Ages et de toutes les nations. J'entends dire qu'en plusieurs circonstances le public fait assez sentir aux comédiens l'opinion qu'il a d'eux. Pour un acteur dont le talent lui plaît, que, pour cela, il traite avec indulgence, combien d'autres qu'il accable de déboires, de marques de mépris! Quelle idée a t-on généralement des comédiennes ? Quel père, même avec les idées les plus libérales, ne regarderoit comme un mal heur et une tache pour sa famille que son fils se consacrât ǎ cette profession? quelle mère bien née ne se croiroit condamnée à la honte et aux larmes si elle ne pouvoit détourner une fille chérie de suivre la même carrière ? Quel est donc cet état et 1 où l'on rougiroit de voir entrer un des siens, où l'on n'oseroit même chercher sa société? que Si telle est l'opinion qui domine dans le monde, peut-on trouver étonnant qu'elle règne dans l'Eglise, qui a toujours pris autant de soin de conserver le dépot de la morale celui de la foi? L'Eglise, en attachant une note peu honorable à une condition décriée pour ses mœurs, a fait un acte de sagesse. Par-là elle prémunit ses enfans contre la contagion du mauvais exemple; et sa sévérité, si c'en étoit une mériteroit l'approbation du philosophe ami des mœurs et zélé pour leur pureté. Une actrice meurt. Qu'elle ait été fameuse ou obscure, c'est ce qui importe peu. Qu'elle ait fait du bruit pendant sa vie, ce n'est pas une raison pour en faire tant pour elle après sa mort. Ses amis vouloient honorer sa mémoire; ils avoient un moyen bien simple. Un corbillard bien décoré, un nombreux cortége, tous les signes du deuil, une longue file de voitures, toute cette pompe profane qui auroit traversé les rues, auroient convenu à leur héroïne. Sont-ils bien sûrs qu'elle eût trouvé bon qu'on la traînât à l'église? Elle qui n'y paroissoit pas de son vivant, eût-elle souhaité y aller après sa mort? Elle n'avoit peut-être pas entendu de messe en sa vie; pourquoi lui donner le chagrin d'en célébrer une devant son corps? Elle regardoit en pitié les prières de l'Eglise; ne l'affligez pas en en récitant pour elle. Si elle avoit encore un souffle de vie, combien elle seroit honteuse et indignée du spectacle que vous lui mettez sous les yeux! Oubliez-vous ce qu'elle a dít` cent fois : Nos prêtres ne sont pas ce qu'un vain peuple pense; Ces vers, dont elle a fait retentir les voûtes des théâtres, qu'elle répétoit, dit-on, avec un accent si expressif, et que yous applaudissiez avec tant de complaisance, vous avertissent de son chagrin de vous voir recourir, en son nom, au ministère des prêtres. Elle ne les a point appelés sur son lit de mort. Suivez les intentions de cette femme forte; ne les appelez pas non plus pour prier sur son cercueil. |