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louanges banales. Si c'était banal, ce serait maladroit parce que ce se serait outré. C'était si bien écrit pour saint Julien, cela exprime si spécialement le sentiment de l'église du Mans que les Tourangeaux n'ont osé se l'approprier pour l'office de saint Gatien. A Tours, en entendant Sacerdotum diadema, tout le monde eût pensé à saint Martin. Saint Gatien disparaît d'abord, non seulement devant son grand successeur du IV siècle, mais encore devant saint Lidoire (Litorius), comme le montre le calendrier de Perpetuus; dans la suite, on revient à lui; ce fut probablement vers le temps de Charlemagne, ou même plus tard, alors qu'on ne savait plus que certains répons de l'office de saint Julien étaient des vers. Les Tourangeaux chantèrent bravement: Urbs beata Turonis, ne s'imaginant point qu'en cet endroit, Turonis ne pût être l'équivalent de Cenomani (1). Cette méprise est très heureuse pour les Manceaux, qui sans cela eussent été assurément les pillards. Pourquoi s'avisent-ils d'avoir des prétentions? Les Tourangeaux n'ont pas eu peur seulement de Sacerdotum diadema ; ils n'ont pas cru pouvoir chanter en l'honneur de S. Gatien:

Tanti patris nunc præclara suscipe solemnia.

A Tours, le souvenir de saint Martin domine; au Mans, c'est celui de saint Julien. Dans l'Église occidentale, saint Julien ne devint célèbre qu'au moyen âge. S. Martin le fut immédiatement dans l'Église universelle. Il n'y a peut-être aucun saint qui soit le patron d'un aussi grand nombre d'églises, et il n'est nullement étonnant qu'en cela, même dans le Maine, il surpasse saint Julien. Il est l'apôtre des campagnes, et les églises rurales se forment en grand nombre de son temps, et immédiatement après. Les saints les plus anciens ne sont pas

(1) Ils ont pourtant cherché la rime:

Urbs beata Turonis ex Gatiani merito
Cujus vera te perduxit ad fidem assertio,
Ejus ope sempiterno perfruaris praemio.

toujours les plus célèbres; leur mémoire souffre de la pénurie des documents.

Néanmoins l'âge apostolique garde son prestige. Au Mans ce n'était pas seulement l'évêque fondateur ou le thaumaturge, c'était aussi le disciple de saint Pierre, l'envoyé de saint Clément que l'on célébrait. Il ne manquait à saint Martin que ce dernier titre. Il faut voir comment on fait disparaître cette infériorité : «< Qui licet apostolorum tempore non fuerit, tamen apostolorum gratiam non effugit; nam quod defuit in ordine suppletum est in mercede, quoniam sequens gradus illi nihil subtrahit, qui meritis antecellit » (1). Comme les ouvriers de la onzième heure, saint Martin reçoit la paie entière; son mérite le place avant ceux qu'il suit dans le temps. Ainsi parlent sept évêques membres d'un concile tenu à Tours en 567, dans une lettre à sainte Radegonde. C'est un texte célèbre, dont j'ai parlé jadis et dont il faut parler encore aujourd'hui.

(A suivre).

(1) Historia Francorum, IX, 40.

G. BUSSON.

UN COIN DE L'ÉPERON DU MANS

(Suite).

1775.

DOSSIER LEMAITRE, pièce n° 38, sur papier.

Le 1er juin 1775, est rédigé un « arrangement ultérieur au marché et devis pour la maison de l'Eperon: ..... 7° L'arrangement total du pavillon du billard comme il est expliqué par le devis, et en outre........... refaire le comble avec l'escallier en bois..... croisées et contrevents sur la ruë........... » (Signé): Le comte de Valentinois et Chaplain.

J'ignore où se trouvait ce « pavillon du billard », car les plans joints aux devis ne sont plus dans le dossier, et pourtant la pièce no 18, s. d., mais écrite par le marquis de Montesson, indique que « Chez M. Lambert, notaire (1), on trouvera 1o expédition d'un acte et délibération des 10 novembre 1771 et 22 février 1772; 2o les pièces concernant les eaux pluviales....; 30 l'alignement du terrein concédé le 22 février 1772; 4° enfin les allignements donnés par les officiers au Bureau des Finances de Tours, et de la police du Mans, lors de la construction de la maison. >>

Il y eut aussi un devis spécial pour la sortie de la Barillerie :

DOSSIER LEMAITRE, pièce n° 22, s. d., sur papier.

<«< Devis de l'ouvrage que monseigneur le comte de Valentinois désire faire faire dans le bâtiment qui servoit ancienne

(1) Ou plutôt avocat, car je n'ai pas trouvé de notaire de ce nom au Mans à l'époque de 1815-1817. V. plus loin.

ment d'écurie donnant sur la rue de La Barillerie en sa maison. du Mans..... Cette ancienne écurie avoit un mur mutuel avec M. Charpentier (1); du côté de M. de L'Etang (2) un mur supportoit la charpente de l'écurie. »

Voilà donc Valentinois tiré des premières hésitations, et nous avons vu que son entrepreneur y mettait toute l'activité possible pour rendre l'hôtel entièrement habitable à Pâques 1774. Il y avait déjà longtemps qu'il avait pris pied dans la société mancelle, puisque « le mardi 6 décembre 1768, il avait donné une très belle fête à toutes les dames de la ville,.... à l'hôtel de Tessé ». Le 31 mai 1774, il prend part à un dîner de prêtres chez le chanoine Nepveu (3), et il est le commensal habituel de son parent, l'évêque de Grimaldi; il dine encore chez le même chanoine, à la Manouillère, le 30 mai 1775. <«< C'est un aimable seigneur », mais il est aussi charitable, car, le 7 avril 1776, il donne le pain bénit à la Couture avec <«< beaucoup de pièces de vingt-quatre sols ». Mais si Valentinois occupait sa maison toute neuve, lorsqu'il venait au Mans, le départ de M. de Grimaldi de l'évêché allait bientôt lui faire oublier l'Éperon. Il reçut chez lui l'évêque qui y fit ses adieux à son clergé, et quitta Le Mans le 23 janvier 1778, après dix années d'administration médiocre (4). J'aurais aimé à décrire les fêtes qui furent données en l'hôtel de l'Eperon, qui portait le n° de ville 2.144, et je regrette que le chanoine de la Manouillère n'ait pas laissé des Mémoires plus étendus (5).

((

Je ne sais pas à quelle époque Valentinois partit du Mans, et j'ignore si l'hôtel fut longtemps vacant. J'arrive à sa

vente:

(1) Nepveu de LA MANOUILLÈRE, t. II, p. 96, et ESNAULT et CHAMBOIS, Inventaire des minutes des notaires.

(2) Idem., t. I, p. 102, et t. II, p. 412. Mariage Létang-Ponthosme. (3) Nepveu de la MANOUILLÈRE, t. I, pp. 80, 191, 201, 219, 244.

(4) NepVEU DE LA MANOUILLÈRE, t. I, p. 298, 300, 302, 303; t. II, p. 424. (5) ESPAULART, Buste de Mme de Fondville, pp. 7-12.

1780.

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Dossier LemaitRE, pièce no 32 sur papier, et no 33, expédition sur parchemin.

Très haut et très puissant seigneur monseigneur Charles-Maurice Grimaldy de Monaco, comte de Valentinois, grand d'Espagne de la 1r classe, lieutenant-général pour le roy de la Basse-Normandie, gouverneur des ville et château de Grandville, Cherbourg, Saint-Lô, et de Chausey, brigadier des armées du roy et chevalier de l'O. r. et m. de Saint-Louis, demeurant à Paris en son hôtel rue et barrière Saint-Dominique, paroisse Saint-Sulpice,.... a, par ces présentes, ceddé, transporté et abandonné à messire Louis Fontaine, écuier, capitaine d'infanterie, demeurant ordinairement en la ville du Mans, et à la dame son épouse (1), tous ses droits sur une maison et jardin située place de l'Éperon, paroisse de la Couture, donnant d'un costé sur la rue de La Barillerie, et le jardin y joignant donnant sur la place de l'Éperon, le tout acquis par mondit seigneur comte de Valentinois, par bail à rente passé à son profit par MarieRenée de Sallayne (2), demoiselle, aujourd'huy épouse de messire de Sallayne de Marcé, le dix novembre 1771 devant Me Guy Martigné (3), notaire royal au Mans, et le restant desdits terreins par délibérations du Bureau de l'Hôtel de ville du Mans des 10 novembre 1771 et 22 février 1772,.... à la charge par l'acquéreur de payer auxdits sieur et dame de Sallayne de Marcé la rente de 800# au principal de 18.000# à eux dües,.... et enfin moyennant la somme de 12.000# payées présentement..... dont quittance. Passé à Paris le 9 may 1780 devant Lambot (et Feminiard) notaires à Paris. »

(A suivre).

Vte DE MONTESSON.

(1) Abbés ESNAULT et CHAMBOIs, Minutes anciennes des notaires du Mans, t. III, p. 169. NEPVEU DE LA MANOUILLÈRE, t. I, p. 371; t. II,

p. 240, 391, 416.

(2) Abbés ESNAULT et CHAMBOIS, Minutes anciennes des notaires du Mans, t. VI, pp. 70, 71.

(3) Etude Bachelier.

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