contient ont été assignés à des personnages mythiques ou fictifs. Le nom de Haïg paraît être une appellation ethnique par laquelle la nation arménienne a été transfigurée à son origine sous les traits du héros qui est représenté comme son père. C'est ainsi que la Genèse, dans le chapitre X, personnifie les grandes divisions ethnographiques de la terre sous la dénomination des descendants de Noé. Au lieu de croire, avec Moïse de Khoren, que le nom national des Arméniens, Hai et Haïasdan au pluriel Haïk, dérive de Haïg, je pense au contraire, suivant toutes les lois de l'étymologie, que c'est ce dernier nom qui est dérivé du premier. J'en dirai autant de celui du sixième successeur de Haïg, Aram, qui semble être la dénomination géographique ou plutôt ethnique qu'avaient donnée les peuples sémitiques aux pays compris entre l'Euphrate et le Tigre, et dont la partie nord formait la Mésopotamie arménienne. Cette opinion est justifiée par les faits et gestes attribués à Aram; il porta en effet ses armes dans les contrées du sud, jusque dans l'Assyrie, et les soumit à ses lois. De là vient sans doute que son nom fut attribué à l'Arménie par les nations étrangères, comme nous l'apprend Moïse de Khoren : « D'Aram, dit-il, les Grecs ont fait le mot Armén, les Syriens et les Perses Armenik. Pareille observation peut être faite au sujet du nom d'Arménag, Araménag ou Aramaniag, fils de Haïg, qui n'est autre que le mot Armên, accru de la syllabe indiquant les diminutifs, et qui signifie le petit ou le jeune Arménien. La même liste pourrait nous fournir des remarques philologiques analogues qui ne feraient que confirmer ces assertions. Les trois sortes de documents employés par Moïse de Khoren pour composer l'histoire des premiers temps de sa nation, le livre de Mar Abas Katina, la tradition orale et les poésies populaires, ont été coordonnés par lui suivant ses vues particulières, et les additions ou les remaniements qu'il y a introduits, sont parfaitement reconnais sables. L'ordre chronologique d'après lequel il a classé ces documents, et les synchronismes par lesquels il essaye de fixer l'époque des rois haïciens, lui appartiennent en propre. Ces synchronismes reposent sur la chronologie du texte des Septante, et se rapprochent, à quelques légères différences près, du système de Jules l'Africain. Il est constant, en effet, par les propres paroles de Moïse de Khoren, qu'il s'est servi de l'ouvrage de ce chronographe, tandis que l'on peut douter qu'il ait eu recours à la chronique d'Eusèbe; il ne mentionne pas une seule fois ce dernier livre, tout en citant l'Histoire ecclésiastique du même auteur, qui avait été traduite par les soins de saint Mesrob. En mettant en rapport Moïse de Khoren et Jules l'Africain sur un point où nous pouvons comparer leur chronologie, nous trouvons un écart de moins d'un siècle. L'historien arménien termine la vie d'Abraham sous Ninyas; suivant Jules l'Africain, Ninyas monta sur le trône en 3365 de l'âge du monde 2136 av. J.-C., et mourut après 38 ans de règne, en 3403=2098 av. J.-C. Le même chronographe place la naissance d'Abraham en 3312 = 2489 av. J.-C., et sa mort en 3386 2015 av. J.-C., c'est-à-dire 83 ans après la mort de Ninyas. C'est à ce dernier chiffre que se réduirait la différence entre le chronographe grec et l'historien arménien, en admettant que ce dernier fait finir les jours d'Abraham la dernière année du règne de Ninyas. Dans sa nomenclature parallèle des rois d'Assyrie, des princes arméniens et des juges d'Israël, Moyse de Khoren ne fait que reproduire pour les premiers la liste d'Abydène. Il n'a marqué nulle part les dates des souverains haïciens ; et nous ne pouvons induire ces dates que par les synchronismes qu'il a donnés, et qui sont simplement approximatifs. Cependant le P. Tchamitch, dans son Histoire d'Arménie, inscrit pour l'avénement de chacun de ces souverains un chiffre déterminé. Aussi saint Martin (Mém. sur l'Arm., t. I, p. 405) a raison de dire qu'il ignore sur quelle autorité le savant Mekhitariste s'est fondé, et d'ajouter que ses calculs ne reposent que sur des données arbitraires. Un autre écrivain arménien, qui est du 1x siècle, et qui a consulté plusieurs auteurs de sa nation qui ne nous sont pas parvenus, Jean Catholicos, affirme que tous étaient d'accord pour placer entre Haïg et Valarsace, le premier des Arsacides d'Arménie, un intervalle de 2295 ans. Si Valarsace monta sur le trône en 150 ou 149 av. J.-C., date adoptée par Tchamitch et saint Martin, nous aurons 2445 av. J.-C. pour l'époque de Haïg. Depuis Haïg jusqu'à Barouïr, les princes qui régnèrent sur l'Arménie furent les vassaux de Ninive. Le premier qui prit le titre de roi, Barouïr, le reçut d'Arbace, reconnaissant du concours qu'il lui avait prêté pour renverser Sardanapale et détruire l'empire assyrien. On sait comment Arbace, d'abord gouverneur de la Médie, s'étant ligué avec les autres feudataires de la monarchie assyrienne, se révolta contre Sardanapale, mit fin à la monarchie des successeurs de Ninus, et se rendit indépendant. Jules l'Africain place la chute de Sardanapale en 4675 ou 826 av. J.-C., d'accord à peu près avec Eusèbe, qui la met en 820 av. J.-C. Dans l'hypothèse que l'écart que nous signalions tout à l'heure entre Jules l'Africain et Moïse de Khoren se prolonge jusqu'ici, il faudra reconnaître que ce dernier a entendu fixer la prise de Ninive par Arbace vers le commencement du xe siècle avant notre ère. Voici la liste des Haïciens, telle que nous la fournit Moïse de Khoren, avec la série des monarques assyriens et des patriarches, des juges et des rois d'Israël, qu'il met en regard comme contemporains. |