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pour les marquer. Notre langue l'imite encore en ce point.

3o Les articles dans l'hébreu ne sont pas toujours une marque sûre des cas. Le même en désigne souvent deux. Le français suit encore ici cette langue: notre article le dénote le nominatif et l'accusatif, notre article du le génitif et l'ablatif.

4° Souvent les Hébreux omettent ces articles, et laissent le nom seul. Notre langue avoit encore autrefois cette ressemblance avec la leur, comme on le voit dans les

verbes anciens.

pro

Pauvreté n'est pas vice contentement passe richesse.

5° De l'aveu de tous les grammairiens, le plus sûr moyen pour connoître le cas de l'hébreu, est le tissu du discours : nous avons encore cela de commun avec eux.

Donnons à présent la traduction que nous avons annoncée.

Et le Seigneur frappa parmi les hommes de Béthsémès, parce qu'ils avoient regardé dans l'arche du Seigneur, et il frappa parmi le peuple soixante-dix hommes de cinquante mille hommes.

Ces cinquante mille hommes n'étoient sûrement pas tous de Bethsémès, qui n'étant qu'une petite bourgade, selon Josèphe, ne pouvoit avoir un si grand nombre d'habitants;

mais pour la très-grande partie, il étoient accourus des environs pour être témoins de l'heureux retour de l'arche.

Voici les preuves de notre traduction.

1° Eleph, mille, se joint avec des nombres pluriels, voyez Nomb., c. 1, v. 16; Juges, c. 5, v. 8, c. 20, v. 21. 1 des Paralip. c. 21, v. 5; lorsqu'il est ainsi joint avec un nombre pluriel, il devient pluriel lui-même ; c'est pourquoi Pagnin, si savant dans la langue sainte, l'a traduit ici par millia.

le

2o Eleph n'ayant point d'article qui en désigne le cas, doit être mis à celui que tissu du discours exige, selon la cinquième

remarque.

3° Les Hébreux placent quelquefois les plus petits nombres avant les plus considérables; d'autres fois ils suivent un ordre tout contraire. Ainsi on lit dans l'original de la Genèse, ch. 5, v. 7, sept ans et huit cents ans; et au ch. 23 du même livre, v. I cent ans et vingt ans et sept ans. Mais quelqu'arrangement qu'ils donnent à leurs nombres, ils ne manquent point de les unir par la conjonction et, quand ils font partie du même total, comme on peut le voir dans les passages que nous venons de citer, et comme on le remarqueroit dans une infinité d'autres qu'il seroit superflu de rapporter.

De cet usage des Hébreux, il est naturel

de conclure que lorsqu'on lit plusieurs nombres de suite, mais sans cette conjonction, ils doivent être pris séparément; et alors le petit nombre séparé et extrait du plus grand, exige que celui-ci soit placé au génitif. C'est ainsi que nous disons cinq de cent, quarante de mille. On trouve des exemples de cette façon de parler dans l'hébreu, Genèse, ch. 26, v. 10, et premier des Rois, c. 26, v. 15. On lit un peuple pour un du peuple.

Voilà précisément le cas dont il est ici question: les soixante et dix personnes étant sans conjonction avec les cinquante mille, ne font point une partie d'un total de cinquante mille soixante-dix personnes mises à mort, mais de cinquante mille personnes qui étoient présentes, ces soixaante-dix sont toutes celles qui périrent. Il ne faut donc pas traduire en latin quinquaginta millia, mais quinquaginta millium; et il ne faut pas traduire en français cinquante mille, mais de cinquante mille; -ajoutons que le mot homme étant placé après chacun des nombres indique bien clairement qu'ils doivent être séparés.

L'historien Josèphe n'a lu dans son exemplaire que soixante-dix personnes mises à mort pour avoir regardé l'arche d'alliance; ce qui donne un nouveau poids à la traduction que nous venons de proposer. Non-seulement les règles de la grammaire hébraïque

et un exemplaire de dix-sept cents ans d'antiquité, autorisent notre version, elle est encore fondée sur le sentiment qu'ont tous les hommes de la bonté de Dieu. Comment, se dit-on à soi-même, le Seigneur a-t-il pu faire périr tant de monde pour une faute qui ne paroît pas mériter un si terrible châtiment? Pour lever cette difficulté, quelques interprètes recourent à la sévérité des jugements de Dieu ; mais cette réponse loin de nous calmer nous atterre; ne vaut-il pas mieux, puisqu'on y est fondé, donner à ce passage un sens qui mette quelque proportion entre la faute et la peine, ainsi que nous l'avons fait dans notre traduction?

Mais, dira-t-on, si le nombre de ceux qui périrent a été si petit, le peuple d'Israël a-til pu regarder ce châtiment comme une grande plaie? Il en a cependant jugé ainsi. Je réponds qu'il en a bien jugé. Est-ce donc une plaie bien légère que la mort inopinée de soixante-dix personnes ?

Que l'on voie quelle fut la consternation des Hébreux lorsque les habitants de la ville de Haï leur eurent tué trente-six hommes !

-Demande d'un roi par les Israélites.

Moyse parle ainsi aux Israélites de la part de Dieu :

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Quand vous serez entrés dans la terre que >> le Seigneur votre Dieu' doit vous donner, » que vous la posséderez et que vous y serez >> établis ; si vous venez à dire, je choisirai un >> roi pour me commander comme en ont >> toutes les nations qui nous environnent >> vous établirez celui que le Seigneur aura >> choisi d'entre vos frères ; vous ne pourrez » prendre pour roi un homme d'un autre pays >> qui ne soit point votre frère. »

Dieu en cet endroit accorde à son peuple la permission d'avoir un roi, et lorsqu'il en demande un il le trouve mauvais. Que penser d'une conduite si peu soutenue?

Réponse. Dieu, maitre absolu de toutes les nations, étoit spécialement le roi d'Israël. Il lui donna les lois par le ministère de Moyse; il en régloit les marches et les campements dans le désert; il se faisoit payer par les Hébreux le tribut que les sujets doivent à leur souverain. Il décidoit de la punition des criminels qui se trouvoient parmi eux. Josué, successeur de Moyse, dans l'illustre emploi de conducteur des Israélites, ne se conduisit dans toutes ses guerres que par les commandements du Seigneur. Après la mort de ce grand capitaine, la nation, bien instruite que Dieu seul étoit son roi, ne songea point à en demander un. Elle continua à se diriger 'Deuteronome, ch. 14, v. 14, 15.

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